Ils nous Andorre

C’est amusant à quel point on ne retient pas les leçons, même quand on les a vécues des dizaines de fois. Quand on voit la Suisse se faire attribuer Andorre au tirage au sort, on ne pense jamais au fait qu’il va falloir se le farcir ce match. Et quand on doit supporter cette purge de football, on ne pense même pas au fait que, la prochaine fois que la Suisse tirera Malte ou le Luxembourg, on se dira que c’est super.

Il y a déjà l’impression visuelle. Devant cet écran aux teintes pâles et aux couleurs surannées, ce milieu de terrain surexposé en lumière et ces bordures sombres, on a le sentiment d’être en en 1998, en train de regarder un match au Hardturm sur sa télé à tube cathodique. Pour être clair dès le début : l’équipe de Suisse n’est aucunement à blâmer pour ce résultat plat. Il fallait choper les trois points, ils sont là.

 Les enseignements à tirer d’une plaie pareille ?

 Pas grand chose. Sur un terrain synthétique dégueulasse, même pas au niveau de celui de Lutry mais plutôt digne des rouleaux qu’on achète à Hornbach pour mettre sur le balcon de son HLM pour faire croire à notre subconscient qu’on a un jardin (et accessoirement sur lequel on se demande si les trous sont là pour simuler un vrai terrain pourri), la Suisse était venue gagner sans se blesser après avoir relâché la pression de Budapest. C’est moche, c’est avec un penalty, c’est sans manière ni plaisir mais c’est là. Le reste on devrait s’en foutre.

Gagner contre une équipe d’amateur n’est pas réellement le test gratifiant par excellence. C’est comme parquer votre Twingo dans une place pour camping car. Vous ne retirerez aucune fierté d’y être parvenu mais votre femme vous traitera de grosse fiente si, dans un tout petit moment d’inattention, trop sûr de vous, il vous arrivait d’érafler la carrosserie contre la borne à électricité. Et en plus, dans ce genre de match, il faut être humble dans la victoire. Parce que, clairement, on ne trouve jamais très classe les mecs qui, lors d’un match de basket contre des enfants de 9 ans myopathes, viennent leur faire des doigts à cinq centimètre de leur visage à chaque fois qu’ils marquent un panier.

Andorre

On a toujours bien conscience que les petites équipes de tout petits pays sont un peu dans le même panier des « nuls » en ne faisant pas de différence réelle entre le Liechtenstein, les Féroés ou les Iles Cook. Alors mettons les choses au clair en ce qui concerne Andorre. Pour info, cette équipe est la plus faible d’Europe (considérant que Gibraltar qui se résume à une piste d’atterrissage, trois pubs anglais et une plage ne peut être réellement considérée comme une nation de foot). Andorre c’est 100 places en dessous du Canada au classement FIFA, 30 places plus bas que Malte et même quelques unes en dessous de St-Marin. Andorre c’est une victoire dans toute son histoire (contre la Macédoine). Et d’ailleurs, ce soir-là, les mecs ne devaient tellement pas en revenir qu’ils ont dû prendre une cuite monumentale, mettre des déguisements d’animaux en peluche et finir avec des filles aux toilettes. La Suisse devrait avoir davantage de peine contre le FC Yvorne en théorie. Sauf qu’en plus, les joueurs de la Principauté se sont payé le luxe d’avoir une attitude insupportable tout au long du match. On imagine le calvaire des joueurs de Petkovic pendant une heure et demie, forcés de faire le boulot face à des bourrins dont la tactique tient en « Je vois un truc rond devant moi, je shoote dedans » (incluant ballon, rotule, bébé St-Bernard).

and-sui

On fait tourner

Petko s’était dit qu’il fallait faire jouer les mal-aimés. D’abord ce pauvre Burki. Lui, il a dû vendre du charbon aux allemands pendant la guerre pour ne jamais être aligné sauf contre Andorre. Le mec joue au Borussia Dortmund, fait une bien meilleure saison que Sommer (et même depuis plus d’un an) mais il n’a pas le droit à une seconde de jeu sauf quand c’est sur un synthétique en aluminium contre une équipe de vendeurs de glace. Lichtsteiner, par contre, on ne le sort que dans ce genre de match alors qu’on aimerait tellement ne plus le voir servir quand c’est important. Vladimir a aussi voulu mettre Gelson, le fidèle, afin qu’il coure partout et soit d’accord de faire encore douze campagnes sur le banc. Et puis Klose, pour voir si c’est acceptable de le mettre sur un terrain. L’info rassurante est que Seferovic n’a pas été trop perturbé par son but face à la Hongrie et est redevenu le joueur qu’il a été pendant un an, le Luke Skywalker du foot qui vise les étoiles. Quand on doit compter sur Fabian Schaer, défenseur central, un des meilleurs buteurs de l’équipe, ainsi que sur l’éternel Mehmedi, absent à chaque match pendant la majeure partie du temps jusqu’à son petit geste qui sauve systématiquement tout, on se dit qu’il va quand même falloir faire gaffe prévoir des plans de secours.

Ils sont venus acheter des cartouches de clopes moins chères

Stocker, lui, on ne lui laisse même pas une chance d’être titularisé face à la plus faible nation d’Europe même s’il a sauvé tout le monde trois jours avant. Tarashaj qui doit se dire à chaque fois qu’avec Haris comme seul concurrent, il va bien rentrer trente secondes mais qui finalement se rend compte que non et va anéantir sa confiance. Steffen… mais alors ça ce n’est pas du tout grave.

La suite c’est…

…les Iles Féroés, en Suisse. AAAAAh les Iles Féroés… affronter une équipe composée pour moitié d’éleveurs de moutons dont le principal hobby est de tuer des dauphins avec des machettes ça donne toujours un petit côté Walking Dead au football. Mine de rien ce sera un dernier bon test pour la Suisse qui devra à nouveau se sortir les pouces du short afin d’asseoir sa dominance sur le groupe. Parce que c’est cela l’information la plus importante ce soir : les neufs points en trois matchs, et se retrouver devant le Champion d’Europe. Le vomitif match de ce soir, les maladresses défensives, les imprécisions offensives, on s’en balance un peu. On n’avait quasiment jamais vécu une position si avantageuse en qualification et ce qu’on aimerait c’est que ça reste ainsi. Même si en octobre, Mehmedi venait à marquer le seul but du match de l’arrière de la cuisse en tombant contre Seferovic.

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8 Commentaires

    • Non… zéro… mais c’est le but le moins grave possible à prendre: un geste incroyable complètement hasardeux et inarrêtable. Le mec n’en revenait tellement pas qu’on peut le soupçonner de n’avoir jamais voulu faire ça. Ca aurait été bien plus grave un cafouillage de défense sous l’oppression adverse (cf Luxembourg 2009)

  1. Magnifique article qui m’a bien fait marrer. Et malgré le fait que je me suis infligé la purge d’Andorre sur place en live, ma conclusion est la même: 3 matchs, 9 points, le reste n’est que littérature !

    Et croyez-moi, la ville d’Andorre est pire au niveau sortie que leur « pelouse », ville morte ! Je préférerais les 3 pubs de Gibraltar, même s’ils jouent au Portugal !

  2. Vraiment excellent, cet article! Pardon, excellentissime même !

    Et je n’arrivais pas à définir l’impression visuelle bizarre que me faisait ce match devant mon poste, et voilà que Robin trouve la comparaison parfaite : « on a le sentiment d’être en en 1998, en train de regarder un match au Hardturm sur sa télé à tube cathodique… » Great !

    Sinon, je suis toujours amusé de voir comme les médias traditionnels portent aux nues notre équipe nationale après certes deux jolies victoires consécutives, puis lui crachent dessus après une victoire poussive contre le FC Andorre (3ème ligue). Lisez le « 24 heures » de samedi, puis d’aujourd’hui, c’est édifiant ! Heureusement pour nous, CR est là !

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