A l’assaut des gros poncifs

L’Euro étant encore proche et la Champions League battant son plein, bien des commentateurs sportifs ont récemment eu maintes occasions de nous abreuver, match après match, de la même soupe fadasse et indigeste.

C’est tellement plus simple quand le spectacle sportif peut être réduit à une suite de saynètes si prévisibles qu’un bout de papier suffit à contenir tout le champ des possibles. Dans ce petit microcosme, l’usage est de se contaminer mutuellement de ces formulations dont on oublie de vérifier l’exactitude et l’opportunité. L’Helvétie du ballon rond compte des footballeurs moyens et des arbitres qui ne percent plus au niveau international, alors si on pouvait au moins avoir des commentateurs qui donnent envie…

Pour  une petite piqûre de rappel de l’ensemble du répertoire, le scribouillard s’attardant sur la langue française pourrait par exemple se contenter d’une mi-temps commentée par une ancienne vedette des stéréotypes,  dont l’acronyme (la classe, les mecs qu’on reconnaît par leur simple acronyme!) est suffisamment utilisé sur ce site pour ne pas nécessiter une nouvelle mention. Le susnommé étant toutefois désormais relégué aux matches dont personne ne veut, le sacrifice de subir une affiche de troisième zone en plus des commentaires lénifiants paraît néanmoins quelque peu disproportionné. Nos souvenirs feront donc l’affaire…

 « A ce niveau, la moindre erreur se paye cash »

Heureusement pour bien des carrières, ce n’est pas le cas dans le journalisme sportif. Car si une imprécision au milieu du terrain peut faire concéder un but, au micro par contre, il semble qu’il faille un sacré enchaînement de foirages sur le long terme pour risquer une sanction.

« C’est un coaching gagnant ! »

C’est le duo de remplaçants qui te renverse un match cinq minutes après être rentré. Mais pourquoi ressert-on bêtement ce constat sans évoquer que ces jokers auraient pu être plus utiles dès le coup d’envoi ? A moins qu’ils soient hors de forme et incapables de tenir 90 minutes, on pourrait au moins oser l’hypothèse. Mais évidemment, c’est toujours plus délicat de remettre en question un coach qui a gagné…

thumbnail_pyrrhus« Une victoire à la Pyrrhus »

Un autre classique, c’est le cas de le dire… On ferait volontiers un petit sondage dans les tribunes de presse pour voir qui connaît l’origine de l’expression. Mais allons-y progressivement et contentons-nous déjà d’en faire la dictée…

« C’est simple le football »

C’est la formule qui permet aussi de simplifier les commentaires. Sa concision évite de devoir chercher des explications tactiques quant à la facilité affichée par une équipe. Peut être parfois remplacé par: « c’est beau le football quand c’est joué comme ça ». Ces expressions sont toutefois peu utilisées pour les matches de Super League.

« Chaque match va être une finale de Coupe »

Offre l’avantage d’éviter trop de calculs sur le long terme, les multiples hypothèses mathématiques défiant rapidement la capacité de calcul du commentateur moyen. La variante « On va prendre match après match et on fera les comptes à la fin » est d’ailleurs encore plus favorable, car elle sous-entend que ce ne sera pas au commentateur de faire les comptes, limitant ainsi ses risques d’erreurs…

« Il y a 0-0 pour les deux équipes au début du match »

En gros, « même pas peur ! »  Certes, mais ce sont souvent les mêmes qui diront après le match: « Bon, avec un budget douze fois inférieur, c’est normal de prendre 3-0. » Et c’est ainsi que Bâle poursuit sa chevauchée sans discontinuer au firmament du foot helvétique. Et c’est également ainsi que Bâle cale toujours à un stade honorable des compétitions européennes…

« Ils ont aussi deux bras et deux jambes »

Variante de la précédente. En l’occurrence, en regardant certaines légendes vieillissantes de la tour des bords de l’Arve, on pourrait aussi rappeler que d’autres commentateurs sportifs ont eux aussi « une bouche et un micro », sans que le résultat ne soit pourtant aucunement comparable… Il est tout de même à noter que la nouvelle génération de la RTS a bien redressé la barre et qu’elle remplace avantageusement ce qu’il reste de l’ancienne.

« L’ace est le coup imparable »

Ça, c’est la brève incursion tennistique dont le seul et unique but est l’évocation de cet immonde pléonasme. Contrairement aux expressions ci-dessus, celle-ci semble avoir été enfantée dans la tour de la RTS; le copyright étant détenu par le mec à l’acronyme ci-dessus. Personne, visiblement, n’a jamais osé le corriger. Pourtant, qui oserait dire « qu’un but, en foot, c’est l’arme fatale » ou « qu’une fois que le ballon a franchi la ligne, on ne peut plus rien faire » ? C’est effectivement alors trop tard, comme quand on a dit une connerie en direct au micro…

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