Pour bien finir (mais avec modération)

Avec sa victoire face aux Iles Féroé, la Suisse a bouclé son année comme on l’attendait, avec une victoire qui la place en tête de son groupe. Avec un peu de quoi sauter au plafond, mais pas trop haut quand même. Parce que, des défauts, il y en a encore.

L’année 2016

La Nati conclut par cette victoire quand même attendue sur une équipe constituée pour moitié d’éleveurs de moutons et de pêcheurs. Elle finit première du groupe devant le Portugal Champion d’Europe, avec 12 points ce qui est inédit, dans la sérénité etc… etc… Oui tout ça est très positif. Cela tranche avec un début d’année qui ne présageait rien de bon. Mais cela montre aussi l’importance de participer à une phase finale. Au delà du pognon engrangé pour la fédération et de la visibilité qu’un Euro ou une Coupe du Monde offre à des joueurs pour jouer dans des supers clubs (comme Stocke City ou Hoffenheim), la participation offre la seule opportunité de réunir enfin tout le monde pendant plus d’un mois et créer une équipe. Pour le coup Petkovic a fait son boulot et a réellement su profiter de monter un groupe. Il y a clairement une autre gueule entre cette équipe et la simple réunion de joueurs pour le week-end que l’on a pu avoir lors des deux premières années de Vladimir. Lui, il en a pris plein la tronche parce qu’il était moins sexy que Favre (on parle de rayonnement footballistique pas de calendrier de pompier) et parce qu’il n’était pas assez Suisse allemand (il paraît que c’est un défaut, alors qu’il suffirait qu’il se laisse pousser la moustache) mais il a fait son boulot avec humilité et conviction. Petko a réussi à gérer des égos qui, sans doute, peuvent commencer à prendre une dimension exagérée et imposer son système de jeu. On lui dit merci et on ne se réjouit pas du tout du moment où on retournera notre veste parce que les choses iront un peu moins bien. Par contre, on se placera en porte-à-faux par rapport à l’idée que l’Euro 2016 était « un franche réussite pour la Nati » dans la mesure où sortir bêtement en huitième après une seule (toute petite) victoire contre l’Albanie n’est pas vraiment ce qu’on appelle du caviar. Mais on mise sur le fait qu’il s’agissait d’un démarrage.

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La Nati a été une vraie marée rouge pour les Féringiens… ah attendez… ah non c’était pas ça…

Le jeu

Passées les vingt premières minutes lors desquelles les joueurs suisses semblaient n’en avoir rien à foutre de venir jouer à Lucerne, sous la pluie, un dimanche, contre des mecs dont le sport national est de tuer des dauphins à la machette, le jeu a commencé à être plus clair. L’utilisation des couloirs a été presque parfaite. Oui, même Lichtsteiner a servi à quelque chose. Les rumeurs l’envoyant à Barcelone nous font, bien sûr, toujours nous poser des questions sur la clairvoyance de certains décideurs mais vous me direz, à une époque, on engageait Philipp Degen à Liverpool et on votait pour Trump aux Etats-Unis (ah non ça c’était aussi cette semaine). La construction portée vers l’offensive contre une de ces équipes qui joue à onze dans sa moitié de terrain et de façon très physique a été quasi sans couac. Et les occasions ont été nombreuses.

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Lichtsteiner a marqué. Du coup, on est bien déçu de ne pas pouvoir le tailler.

Mais quand même…

Le « mais quand même » est le principal problème du bilan annuel. Comment peut-on avoir autant d’occasions et n’en coller que deux ? A un moment il va falloir soigner l’efficacité. Toute l’année et particulièrement durant l’Euro, la Suisse a élevé en art l’application à vendanger un nombre d’occasions ahurissant. Bien sûr, Seferovic en est le Leonard de Vinci, mais on ne peut pas accuser que lui. Il y a un truc à changer parce que, à nouveau, si l’adversaire avait été d’un autre calibre, il y aurait eu des regrets. Comment ne pas finir ce dernier geste dans des actions bien construites ? C’est rageant et angoissant. On tricote devant le but, on fait comme la Poste qui ne livre pas les paquets à tous les domiciles et il faut trop souvent attendre les dernières minutes pour voir la libération. Tout en angoissant du jour où celle-ci ne viendra pas. Par exemple, un jour en huitième contre la Pologne tiens… Alors certes Shaqiri et Embolo n’étaient pas là et cela a porté à préjudice. Non, pardon, je reformule la phrase: alors certes le gnome qui se blesse tout le temps et n’arrive pas à faire une saison correcte depuis quatre ans et le post-ado à qui on met beaucoup trop de pression et qui n’a pas encore eu le temps de prouver quoi que ce soit n’étaient pas là et cela a porté à préjudice. Mais à la lumière de l’avenir qui semble tendre les bras à Seferovic et Tarashaj, un peu le même avenir que des bébés baleines aux Féroés qui se dirigent vers une plage en se disant « oh regarde tous ces gentils humains, ils veulent jouer avec nous », l’espoir immédiat de l’attaque ne peut passer que par un mec… celui du titre qui vient ci-dessous.

Derdiyok

Je serai bien sûr beaucoup trop complaisant sur Eren tant cela fait des années que j’apprécie ce joueur. Si les blessures débiles et Stefan Kiessling n’avaient pas existé, il aurait fait une totalement autre carrière. Malheureusement, son CV n’est pas aussi brillant que mérité. Mais là, à nouveau, on louera le nez de Petkovic de l’avoir titularisé plutôt que Haris Seferovic et sa façon de confondre une cage de but avec un gradin. Combatif et impliqué, cela faisait plaisir de voir un attaquant de la Nati qui a enfin l’air dangereux. On espère qu’il finira une bonne saison à Galatasaray et on n’est même pas convaincus d’espérer qu’il quittera la Turquie pour aller dans un club de ventre mou de Bundesliga finalement.

Swiss forward Eren Derdiyok, celebrates after scoring a goal, during the 2018 World Cup group B qualification soccer match between Switzerland and Faroe Islands at the Swissporarena in Lucerne, Switzerland, Sunday, Nov. 13, 2016. (Anthony Anex/Keystone via AP)
Derdiyok fait l’avion pendant que Seferovic fait le camion-benne.

La suite

La suite ce sera continuer sur ce parcours et s’offrir une première place dans le groupe pour aller en Russie. Mais au fond de nous, on craint quand même le vieux faux pas. Si la Suisse ne parvient pas à se montrer plus réaliste, on imagine mal qu’un vilain résultat contre une équipe a priori plus faible ne pointe le bout de son nez. L’autre problématique va consister à trouver du temps de jeu en club à des joueurs indispensables comme Schär et… (j’hésite entre Lichtsteiner, Seferovic, Drmic et Tarashaj). Alors oui on se réjouit de 2017, on se réjouit du changement, du renouveau, de l’espoir, tous ces trucs quoi. Et pour l’instant, on se contentera d’être satisfait. Ce qui est un luxe quand on suit l’équipe de Suisse.

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