Le bâton de Nasazzi

En manque de réelles compétitions sportives, il est temps de s’intéresser aux trophées annexes. Ainsi, je vous propose de découvrir le bâton de Nasazzi, une récompense trop peu médiatisée.

Le mois de juin 2020 était normalement réservé à l’Euro, un mois à parler de foot, partout, tout le temps. Un mois où même ceux qui détestent ça sont obligés de participer, pour faire partie du groupe, et sortent des « Je n’aime pas le foot mais j’aime bien l’Euro », phrase qui a autant de sens que « Je déteste les légumes, mais j’adore la ratatouille » (formule entièrement reprise à Yann Marguet mais qui mérite d’être connue). Un mois où l’on croit que la Suisse va enfin aller loin et finit par se faire éliminer par la Suède, en huitièmes, comme toujours. Un mois où notre cher rédac’ chef adoré nous harcèle et rentre dans une transe digne d’une méditation du Dalaï Lama sous LSD. Malheureusement, un satané virus (créé en laboratoire par Minus et Cortex et diffusé via les antennes 5G pour assouvir le pouvoir des 13 familles illuminati et des reptiliens à travers des puces contenues dans le futur vaccin) est venu gâcher la fête. On devra malheureusement attendre 2021. D’ici là, on a le temps de s’enflammer pour d’autres matches cruciaux, comme par exemple ceux qui remettent en jeu le bâton de Nasazzi.

Le bâton de Nasazzi, quésaco ?

Le bâton de Nasazzi est un trophée non officiel et virtuel pour les sélections nationales masculines inventé à la fin de la Coupe du Monde 1930 qui a vu l’Uruguay devenir les premiers champions du monde de football de l’histoire sous la houlette de son capitaine José… Nasazzi. L’Uruguay devenait donc la première détentrice du bâton de Nasazzi. A l’instar des ceintures de boxe, le trophée est remis en jeu à chaque fois que son détenteur joue un match officiel (amical ou non). Le bâton revient à l’équipe victorieuse dans le temps réglementaire du match (une victoire en prolongations ne permet donc pas de récupérer le bâton). C’est ainsi que le bâton se passe d’équipe en équipe depuis presque 100 ans et a déjà changé de mains 202 fois ! (si je sais compter des lignes sur Wikipedia).

Lui, c’est José Nasazzi

L’aspect magique du bâton se révèle dans le fait qu’il a parcouru tous les continents avec les 58 équipes qui l’ont eu en leur possession. Il est évident qu’il est passé dans les mains des grandes nations du football mais malgré le fait que je ne sois pas sûr que ça soit une bonne ou une mauvaise situation de le posséder, il est assez curieux de se dire que par le hasard des rencontres, il s’est retrouvé dans des « petites équipes » du monde du ballon rond. Et qu’il leur a peut-être permis de forger leur destinée (Édouard « Otis » Baer ne dira pas le contraire). En effet, des pays comme les Antilles Néerlandaises, Trinité et Tobago ou encore le Zimbabwe qui l’aura gardé 195 jours ont eu la chance de détenir un trophée du football mondial. De plus, cela ajoute un bel enjeu lorsqu’il peut changer de propriétaire, même si c’est un vieux match amical Andorre-Liechtenstein.

C’est actuellement l’Espagne qui a l’honneur d’être en possession du bâton de Nasazzi et cela depuis le 10 juin 2019. Comptez sur la rédaction de Carton-Rouge pour crier à la terre entière qu’il ne faut pas louper le prochain match de l’Espagne qui remettra donc en jeu son précieux bâton.

Et la Suisse dans tout ça ?

C’est là que ça devient intéressant. Le bâton de Nasazzi est sans aucun doute le trophée international avec lequel la Suisse a eu le plus de réussite puisque qu’elle a détenu 6 fois le bâton pour un cumul de 853 jours. Elle se place au 15ème rang mondial. Certes la Suisse a su profiter de la 2ème guerre mondiale pour faire son trou (encore un truc dans lequel la Suisse a su profiter de la guerre). Elle obtient le bâton pour la première fois le 12 novembre 1939 lors d’un amical (3-1) contre l’Italie à Zürich avant de le perdre 140 jours plus tard face à la Hongrie. Pour information, l’équipe nationale joue 16 matches pendant la guerre, dont 11 contre les forces de l’Axe et leurs alliés. Les matches sont des événements d’ampleur nationale et le football a apparemment joué un rôle dans l’image de la neutralité helvétique durant le conflit. Bref, ce n’est pas un cours d’histoire et je ne veux pas d’un article à bâtons rompus.

Le 20 avril 1941, la Suisse récupère le bâton à l’Allemagne nazie, à Berne, le jour de l’anniversaire d’Adolf Hitler. Ce n’est pas le tout de mener une politique du bâton mon petit moustachu, il faut être capable de le garder, surtout qu’à une syllabe près, il était prédestiné à te revenir. La Suisse détiendra le trophée 210 jours avant de le céder à nouveau à la Hongrie.

Lui, c’est pas José Nasazzi

Pour les 3ème et 4ème récupérations du bâton, la victime de la Suisse sera la Suède avec des victoires 3-1 (15 novembre 1942 à Zürich) et 3-0 (25 novembre 1945 à Genève). Ah, c’était le bon temps où les Suédois ne nous mettaient pas de bâtons dans les roues. Sa 4ème possession du bâton sera du reste la plus longue (224 jours) avant que la Suède ne récupère son dû en étrillant la Suisse 7-2 à Stockholm.

Ensuite, la Suisse ne voit plus la couleur du bâton pendant presque 50 ans ! Entre 1945 et 1994, elle s’assoit dessus (ndlr : ceci n’est pas une provocation envers la population LGBTIQ+ venant d’un homme blanc cisgenre hétérosexuel issu d’un milieu favorisé). Mais lors de la Coupe du Monde 1994 aux Etats-Unis, c’est le retour de bâton en mains suisses. Grâce à des buts de Sutter, Chapuisat et à un doublé de Knup la Suisse ravit le bâton aux Roumains. Elle le perdra malheureusement 4 jours plus tard face à la Colombie.

Pour sa dernière possession du bâton, la Suisse s’est offert une victoire de prestige. C’était le 14 août 2013, à Bâle, face au Brésil. Un succès acquis grâce à un magnifique autogoal de Dani Alves qui depuis lors mène apparemment une vie de bâton de chaise.

Stats et matches importants

Lors de la finale de l’Euro 2012, l’Espagne a humilié 4-0 l’Italie. C’est sans aucun doute la possibilité de récupérer le bâton de Nasazzi aux Italiens qui a boosté leur motivation. La Roja l’a gardé pendant presque une année avant de le céder aux Brésiliens lors d’une autre finale, celle de la Coupe des confédérations.

On peut aussi noter qu’hormis l’Uruguay en 1930, trois coupes du monde de football ont vu triompher le détenteur du Bâton de Nasazzi. L’Italie en 1934, le Brésil en 1958 et l’Allemagne de l’Ouest en 1974 qui l’avait récupéré en cours de tournoi face à la Pologne. Le vainqueur de la fameuse finale de cette Coupe du Monde 1974 opposant les Allemands aux Hollandais emmenés par un certain Johan Cruijff allait repartir avec la Coupe Jules Rimet et le bâton de Nasazzi.

Pour plus de statistiques, je vous laisse aller vous perdre dans la page Wikipedia. Sachez qu’il existe plusieurs autres bâtons de ce genre, le bâton de Bourbotte pour la Ligue 1 française ou encore Bâton de Netto qui démarre à la finale du Championnat d’Europe 1960 par exemple.

A propos Valentin Henin 67 Articles
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