Je connaissais le dopage pharmacologique, le dopage mécanique, le dopage sanguin, le dopage génétique, le dopage nutritionnel et même le dopage psychologique. Voilà que, de Genève, où Cupidon s’est mué, sa petite flèche fièrement brandie, en dealer, l’espace d’une dizaine de minutes (prétendre plus serait vraiment prétentieux), le dopage « échange de fluide » m’a giclé au visage.
Le sport de haut niveau, on le sait, est un terrain occupé, miné, envahi par moultes tentatives désespérées d’amélioration des performances. Mais ce que personne n’avait vu venir, c’est l’entrée fracassante d’un nouveau suspect dans le peloton : l’alcôve king-size. Oui, mesdames et messieurs, oubliez les seringues, les poudres mystérieuses et les cocktails maison, le danger se cache désormais aussi dans les quickies au naturel.
La triathlète genevoise Imogen Simmonds, championne d’Europe d’Ironman 2019, est tombée de son 7ème ciel lorsqu’un contrôle a révélé dans son organisme la présence de ligandrol à des niveaux picogrammesques (une quantité équivalente à une pincée de sel dans une piscine olympique et qui n’aurait jamais pu apporter le moindre avantage en termes de performance). Quoi qu’il en soit, le ligandrol est une substance qui ferait gonfler les muscles plus vite qu’un ballon de baudruche et donc INTERDIT, punkt schluss, dit la patrouille. Sa défense ? C’est son cher et tendre qui lui aurait intimement inoculé la substance, la veille et le jour même (quel appétit!) de son contrôle inopiné. Pour mémoire, c’était le doigt du masseur de Sinner qui l’avait poussé hors des courts pour 3 mois. Tu es visuel ? C’est ton problème.
Autrement dit, l’amour rend aveugle et positif.
Un cas isolé ? Pas du tout !
On pourrait croire à une excuse bidonnée dans la (pa)nique du moment, mais cette justification a déjà fait florès. L’escrimeuse Ysaora Thibus aurait attrapé son ostarine à force de baisers contaminés consentis (où l’on découvre donc que le french kiss est plus dangereux que le fleuret). Blanchie elle fut. Laurence Vincent-Lapointe, championne de canoë, a elle aussi invoqué l’Amour, celui qui fait dormir après (ou fumer) comme vecteur de dopage. Tout comme Madilyn «Bubba» Nickles et Virginia Fuchs. Après analyses approfondies, aucune suspension pour elles, leur virginité leur ayant été rendue par la même occasion, au joli quatuor. Au diable la responsabilité objective!
Moins de chance pour la cavalière Sibylle Vogt qui s’enfonce dans l’embrouille juste quand les autorités sportives décident qu’elles aussi peuvent durcir… le ton. Contrôlée positive à la cocaïne, elle a juré ses grands dieux, Eros en tête, que c’était uniquement à cause d’une cavalcade XXL avec son étalon favori. Les juges, n’ayant pas trouvé le propos suffisamment romantique, lui ont offert six mois de vacances forcées. L’histoire ne dit pas si elles étaient all-inclusive.
En attendant que ça se TAS
La règle en vigueur de la clownesque AMA (agence mondiale antidopage) reste la responsabilité objective (voir ci-dessus) qui signifie notamment que chaque athlète est seul(e) responsable des substances présentes dans ses échantillons. Imogen Simmonds est donc mal barrée, elle qui a toujours eu la hantise d’un contrôle positif, allant jusqu’à systématiquement vérifier si les bouteilles PET étaient déjà ouvertes avant d’en consommer leur contenu. Manque de bol, la pharmacie privée de son compagnon de longue date avait échappé à son attention. La voilà qui, maintenant, risque jusqu’à 4 ans de suspension (ça fait cher la passe, même s’il y en a eu deux). Quoi qu’il en soit, le TAS sait se montrer moins borné que nos amis de l’AMA, le cas de Ysaora Thibus le montrant (4 ans demandé par l’AMA, innocentée par le TAS). Gageons qu’avec une bonne défense, une analyse de cheveux des deux personnes, un selfie de couple et une facture d’hôtel, elle évitera le carton rouge. Et le pigeon d’or.
C’est ce que qu’on lui souhaite.
Les articles à Bender, toujours une régalade!