«Ma qué bonheuuur !»

CartonRouge.ch, toujours prêt à tout pour contenter ses fidèles lecteurs, a réussi une première mondiale : lors de la finale de Gstaad entre Thomaz Bellucci et Andreas Beck – qui a battu le record négatif d’audimat de la TSR avec 342 téléspectateurs (dont 256 dans un sommeil profond) –, nous sommes parvenus à implanter une puce recueillant les impressions du Brésilien pendant la rencontre. Nous vous proposons donc de revivre quelques moments clés de ce match de rêve…

«Bon, on y est ! Cette fois-ci, c’est pas Tommy Robredo en face, vas-y Tom, t’es capable d’y arriver ! Ouh là y’a pas foule dans ce central, j’imagine qu’ils sont encore tous déçus de la pâtée que j’ai mise à leur Wawri machin ! En même temps, j’y peux pas grand chose, y’avait vraiment personne en face !Yes ! Il craque d’entrée, et ça fait plaisir parce que je pense pas que je vais réussir à prendre souvent son service, il faut lui laisser ça. C’est pas un truc qui serait arrivé si mon pote Marcos avait battu Beck, il m’avait foutu une bonne caisse la dernière fois. J’ai quand même eu pas mal de chance cette semaine : entre un mec qui arrive pas à conclure, un fantôme et un boiteux, je m’en sors plutôt pas mal ! Quand je pense à tous ces mecs qui sont mieux classés que moi et qui sont dehors, cette fois-ci j’ai ma chance, il faut pas que je la laisse passer.
Le premier set est à moi ! Putain, je me rapproche de plus en plus du Graal, je vais même succéder à Federer et Edberg au palmarès si je continue comme ça ! Mais attention, il faut que je reste dans le match et pas que je pense trop aux plages de Rio, quoi qu’une caïpirinha je serais pas contre, enfin bref… Ouh là, Andreas commence à jurer en allemand, ça râpe en bouche ce dialecte, il va craquer, je le sens !
Bon allez c’est parti pour le deuxième set, surtout tu restes dans ce que tu sais faire, tu joues long, tu le fais bouger, et tu verras la choucroute va lui peser ! De toute façon tu es plus régulier… Aïe, il se remet à arroser au service ! Heureusement il refait plus les bâches qu’autre chose mais quand ça passe je suis vraiment aux fraises. Allez on laisse passer l’orage…
Ouf, j’ai retrouvé une belle qualité de service ! Faut continuer de lifter autant ma deuxième, il a vraiment du mal à les remettre. J’arrive pas à croire que je suis au début du second
set avec une manche d’avance en finale d’un tournoi 250 ! Quand je pense que j’ai enchaîné 15 tournois sans passer le premier tour. Allez t’enflammes pas, reste concentré…
Oh nan c’est pas vrai il se met à pleuvoir maintenant ! J’aime bien ce pays mais c’est pas les Maldives. Déjà que ça caille en été par ici, j’ose pas imaginer l’hiver… Ils vont pas nous sortir leurs bâches pour trois gouttes quand même, je suis trop bien parti ! Chez nous on continue à jouer même sous les pluies tropicales… Quoi que là ça s’accélère un peu… Bon va pas falloir sortir du match jusqu’au retour sur le terrain.
Bon allez on se remet dedans ! Et merde je lui donne une balle de break ! Putain mais
rentre dans ta balle et va finir à la volée ! Tu vas pas faire comme Federer et paniquer à l’idée de monter au filet. C’est tout le temps pareil ! Vamos, t’as assuré ! Maintenant c’est à toi d’aller le breaker !
Mais c’est pas possible ! T’avais deux balles de break abruti ! Pourquoi t’as peur d’un coup ? C’est pas marqué Lammer sur ton front ? Et du coup tu perds le jeu… Si on part au tie-break je la sens mal, il a plus d’expérience que moi et les Schleu ne lâchent jamais rien, c’est connu. Quoi qu’il n’a jamais rien gagné non plus… On est vraiment des touristes en fait. Et qu’est-ce qu’il a ce gros dans les tribunes ? Il voit pas que je vais servir, il peut pas arrêter de gueuler et s’asseoir ! Il y a quand même un paquet de beaufs dans ce central… On se demande ce qu’ils fichent là. D’un autre côté, ils devaient sûrement s’attendre à une autre finale. Ma foi, c’est pas de ma faute si ce tournoi est aussi relevé qu’un challenger de seconde zone…
Allez t’as quatre balles de match ! T’as pas sauvé ces deux balles de match au premier tour pour rien… Surtout panique pas, reste calme, t’as super bien géré ton tie-break jusque-là, ce serait rien que le premier titre de ta carrière… Oh mon dieu mais c’est vrai, je peux rentrer dans l’histoire ! Pourvu qu’il fasse une double faute, pitié la double… Bon tant pis maintenant à toi de prendre ta chance… C’est gagné !!! Tu l’as fais Toto, t’es une star ! Ma qué bonheur ! Tu viens de remporter une sacrée somme d’argent ! Enfin je lance ma carrière, enfin je pourrai me la péter au Brésil, enfin je vais pouvoir choper en boîte !
Bon maintenant faut se mettre en condition pour le speech… Qu’est-ce que je vais pouvoir dire, je suis une vraie bille en anglais… On parle déjà quelle langue à Gstaad ? Je leur fais un «Hello Sweden» et je pense que ça devrait aller… Quoi qu’un simple thank you devrait le faire… Ouais allez je vais balancer une bonne dizaine de merci et je devrais m’en sortir. Vaut mieux pas se lancer dans les complications… Attends c’est à moi là ou je passe après le perdant ? Comment ça marche ? Je comprends rien à ce qu’ils disent ! Nan c’est bon Andreas se lève, j’attends mon tour…
Oh mon dieu, non seulement il est immonde ce trophée, mais en plus il est très lourd, ils pouvaient pas prendre un truc en verre ou en plastique plus léger… Et dire que j’ai une plombe de photos à faire… Il est bien mieux celui de Beck, au moins il peut cuisiner dedans… Tu veux faire quoi avec un bloc de granite ? Et puis il y a vraiment personne en tribune, j’ai vraiment joué dans un cimetière…
Ça y est ma première conférence de presse en tant que vainqueur… Quatre journalistes c’est tout… Ah ces Suédois, ils sont vraiment vexés depuis que j’ai éliminé leurs deux compatriotes… Attends qu’est-ce qu’il me dit lui ? Je comprends vraiment rien, il peut pas articuler ? Si c’est pareil quand il parle sa langue, il y en a qui doivent bien s’amuser. En tout cas faudra que je bosse mon anglais parce que j’ai du mal là. Enfin en même temps briller à l’US Open ça va pas être simple, je pense pas avoir à pratiquer la langue devant les medias pendant un bon moment. Quoi que si je tombe contre Wawrin truc….»

Écrit par Nicolas Jayet et Julien Billarant