Juan Antonio Samaranch avait l’habitude de clôturer ses Jeux Olympiques en lançant des fleurs à l’organisateur, les qualifiant systématiquement de « meilleurs Jeux de l’Histoire », déclenchant dans la foule en délire une acclamation générale. L’Arabie saoudite n’a même pas eu à attendre la fin de son tournoi pour obtenir son ovation puisqu’elle a été désignée par acclamation pour l’organisation de la Coupe du Monde 2034, présentant un dossier de candidature avec une note moyenne de 4,2 sur 5, soit la plus élevée jamais obtenue par un candidat, bien que précédée dans le temps par les vertueux États-Unis, la besogneuse Allemagne, l’irréprochable France, l’intègre Italie, ou encore, plus avant, la pudique Suisse, pour n’en citer qu’une poignée.
« Extraordinaire », selon la Fédération saoudienne de football. Sa candidature propose quinze stades (dont trois en cours de construction et huit dont les travaux n’ont pas encore commencé), répartis dans cinq villes hôtes, dont une (le développement futuriste de Neom) qui n’a pas encore été construite. Le rapport d’évaluation de la FIFA salue « une série de stades impressionnants qui, une fois construits ou rénovés, pourraient offrir des infrastructures de pointe ». Rien de moins.
Exit les organisateurs sans tradition footballistique importante, la FIFA a retenu la leçon du Qatar de Blatter. Pour l’Arabie saoudite d’Infantino (six participations à des phases finales de Coupe du Monde avec, à la clé, un huitième en 1994), ce n’est pas uniquement historique, c’est simplement normal.
Cette notation élevée met en lumière le meilleur choix possible pour les délégués de la FIFA. Cette attribution est une excellente chose pour le football, pour le sport en général tout comme pour le peuple saoudien et le développement de la civilisation sinon, évidemment, les délégués présents à la visio-conférence d’attribution par acclamation – la Suisse en tête – n’auraient jamais validé ce choix hautement éclairé. D’ailleurs, pour tordre le cou à des idées reçues d’une société encore rétrograde là-bas, les hommes qui se rendent au stade peuvent librement y emmener en toute sécurité – comme ici, en Suisse – leurs femmes et leurs filles et celles-ci peuvent même jouer au football (70 000 licenciées dans le pays, à divers niveaux) tout comme être actives dans la toute nouvelle ligue pro féminine, « richement » dotée elle aussi. La large autoroute multipiste du progrès.
Et puis, l’expertise de l’Arabie saoudite dans l’organisation de grands événements sportifs n’est plus à prouver. Le royaume a accueilli la Formule 1, les finales des supercoupes d’Espagne et d’Italie de football, la Coupe du monde des clubs, ainsi que des compétitions de haut niveau de boxe, de golf, de courses hippiques et de tennis. Tout le monde se presse désormais au portillon de l’Arabie saoudite. Tout le monde veut y et en être.
Honnêtement, suite au retrait de l’Australie, qui n’a finalement pas rendu de dossier pour 2034, le choix ne pouvait être autre : le toit du monde pour la plus belle des compétitions mondiales. Le choix de la raison. Je tire mon chapeau aux délégués de la FIFA qui savent – contre vents et marées – être aussi clairvoyants, quand les circonstances l’exigent, que ceux du CIO !
J’émettrais quand même un petit bémol, si rien ne change dans leurs lois et leur application stricte dans le pays. Les personnes qui prévoient de se rendre en Arabie saoudite en 2034 doivent savoir qu’il s’agit d’un pays où l’exercice des libertés que nous considérons comme acquises dans les sociétés démocratiques peut entraîner la mort. Par pendaison, la plupart du temps, mais la mort quand même.
Bon, vis-à-vis de la grande nouvelle de la tenue de la future meilleure Coupe du Monde de tous les temps, ce n’est qu’un détail et vous ne pourrez pas dire que nous ne vous avions pas avertis.
Soyez le premier à commenter