Kelly-fication !

Des collègues de travail italiens qui vivaient le deuxième match féminin de leur vie commençaient déjà à la ramener avec le 11 juillet 2021 deux jours avant ce duel a priori bien plus déséquilibré qu’en foot masculin. Il était temps que ça commence et que les Lionesses renvoient la Nazionale à ses chères études. Et au pire, si la Squadra créait la surprise, on pouvait toujours changer de métier d’ici la rentrée d’août ou se terrer dans une salle de classe toutes lumières éteintes jusqu’à Noël. Spoiler: c’est pas passé loin.

Le match en trois mots

Cette sortie de Dragoslav Stepanović en 1992 après une défaite de l’Eintracht Francfort masculin face au Hansa Rostock lui faisant perdre le titre lors de la dernière journée du championnat devrait être floquée sur plus de maillots à ce stade de la compétition.

Cela dit, on avoue être décédé plusieurs fois au cours de ce duel complètement dingo. 

La joueuse qui a touché au mythique St-Gall

Chloe « Super Sub » Kelly. Après son but décisif et sa célébration iconique en finale de l’Euro 2022 à Wembley et ses deux centres salvateurs contre la Suède en quart (entre autres), CK a rejoint sa fameuse cabine téléphonique (77e minute), enlevé ses lunettes et son costard, revêtu ses collants et sa cape et crucifié une Laura Giuliani admirable qui ne méritait pas ça pour inscrire le but le plus tardif de l’histoire de l’Euro (119e) sur un penalty provoqué par l’héroïne malheureuse de cette demi-finale, Emma Severini (on en reparle bientôt). Et si cette nouvelle célébration n’est pas quasiment aussi iconique que celle d’il y a trois ans, on ne sait pas ce qu’il vous faut (prenez notre argent, on précommande le t-shirt dès que possible). Bref, on ne dérange Super(wo)man que si c’est crucial et malgré sa couleur, le maillot italien n’a pas eu l’effet kryptonite escompté.

Au fait, on ne nous y reprendra pas à penser que cette foutue règle de la reprise autorisée sur un penalty repoussé est complètement nulle. C’est bien sûr dès ce mardi soir la meilleure et la plus pure des lois du jeu sans aucune équivoque.

On n’a pas de bonne photo de Kelly, alors on vous met Lauren Hemp, dont le boulot abattu pendant 120 minutes sur son côté gauche méritait bien une mention.

La buse alpine du match

Sarina Wiegman.

Mais non. Evidemment que non.

On attribuera donc ce titre au soussigné, qui s’est encore permis de douter de la tactique infaillible de la sélectionneuse néerlandaise des Lionesses, impératrice du chaos et en complet contrôle de la partie dès les premiers changements décisifs des alentours de la 70e minute. Oui, on paniquait déjà depuis des lustres à ce stade, comme à chaque fois. À la cinquième finale majeure (Euro 2017, Coupe du monde 2019, Euro 2022, Coupe du monde 2023 et Euro 2025) atteinte avec deux nations différentes, il serait temps qu’on arrête de jouer les Saint Thomas et qu’on commence à y croire un poil, non ?

Pour nous punir, notre karma nous a réservé un siège dans un rang de… UN. On pue peut-être.

Le tournant Tourbillon du match

Ou plutôt le Jet d’eau du match dans ce cas précis. Voire même la Genève de toute cette histoire (si vous voulez vous arrêter là, on ne vous en voudra pas, on a rarement abusé de la sorte en termes de calembours de caniveau).

Bref, on se reconcentre. La rubrique. Il s’agit de l’entrée de Michelle « Super Sub Bis » Agyemang (84e, franchement on ne l’attendait plus). Douze minutes plus tard, à moins de 120 secondes de la fin des arrêts de jeu, la numéro 17 anglaise, 19 ans, 4 sélections et 3 buts (!), conclut avec un sang froid pas loin du zéro absolu et c’est l’explosion. Un bruit comme on n’en avait pas entendu depuis l’égalisation helvétique face à la Finlande dans le même stade, et comme on ne risque plus trop d’en entendre puisqu’on rappelle que le locataire habituel des lieux est le Servette FC masculin. Si des abonnés étaient présents hier soir, ça doit quand même leur faire tout bizarre. Et imaginez si l’espoir d’Arsenal avait en plus placé son délicieux lob de la 117e minute ailleurs que sur la barre transversale…

C’est joli cet espèce de halo involontaire sur les photos de nuit, non ?

On notera encore que, fort étrangement, le nombre d’Italiennes étendues sur la pelouse et appelant les secours d’urgence a diminué d’environ 5000% (à vue de nez) depuis l’égalisation adverse. La force de gravité a le chic de diminuer drastiquement en fin de soirée dans la région genevoise.

Les crampes, les crises d’épilepsie soudaines, la combustion spontanée, tout y est passé du côté transalpin.

L’action qui a Berné toute une défense 

L’ouverture du score de Barbara Bonansea sur le seul tir cadré italien de la première mi-temps (33e) après un centre que Lucy Bronze aurait pu et dû dégager. On ne coulera toutefois pas Bronze puisque son équipe jouera l’argent au minimum dimanche*.

(Vous allez voir, les initiales des buteuses en gras ont un sens, contrairement à pas mal d’autres trucs dans cet article. Patience.)

On ajoutera que ce seul tir cadré tient également lieu d’unique occasion à taxer de très dangereuse pour les Azzurre sur le match entier, si on excepte l’incroyable maladresse de Severini (encore elle !) à bout touchant (86e). On conseille d’ailleurs à la malheureuse de lire cette atroce bafouille pour tenter malgré tout de trouver le sommeil. 

Du côté anglais, Alessia Russo aurait marqué si son tir n’était pas passé à un souffle des buts défendus par Giuliani (19e) et une frappe bien trop molle de Lauren James, seule aux 6 mètres, aurait pu mériter meilleur sort dans un autre univers (38e), mais c’était un peu tout en ce qui concerne les avant-dernier et dernier gestes plus ou moins aboutis avant la fatidique 96e minute susmentionnée.

Le tir le plus dangereux essuyé par la portière de l’AC Milan en première période (oui, notre téléphone est bien plus performant de jour).

*Avec nos excuses. L’apparition de cette tournure de phrase est une obligation contractuelle à chaque match des Lionesses narré sur un site satirique.

L’aVARie qui aurait pu nous faire toucher le fond (du lac)

Jess Carter ne fait pas un bon Euro, mais alors pas du tout. Prise de vitesse par la moindre brise lacustre, la latérale anglaise n’est pas dans son assiette de Full English depuis le 5 juillet et l’entrée en lice de son équipe contre la France.

Deux problèmes s’ajoutent à ce constat:

1) Quand Sarina Wiegman convaincue, elle toujours faire ainsi: en des termes moins tintinesques, la sélectionneuse anglaise a probablement quelques soucis de TOC à régler puisque ses XI titulaires en dehors des grandes compétitions portent toujours les numéros de maillots 1 à 11 et que son équipe type à l’Euro ou en Coupe du monde ne varie pour ainsi dire pas du match d’ouverture à la finale, quelles que soient les performances des unes et des autres (jusqu’ici avec suffisamment de succès pour nous faire fermer notre grande bouche à chaque fois, on vous l’a dit). Quitte à compter sur l’entrée de super subs au moment fatidique, comme pendant tout l’Euro 2022 ou encore vendredi dernier contre la Suède et donc ce soir. Bref, on résume: quand tu passes un sale Euro et qu’en plus tu commences tous les matches contre vents et marées, tu es un poil exposée à la critique.

Jennifer et ses coéquipières après avoir assemblé pièce par pièce le scénario ubuesque de leur quart: « What the Falk ? »

2) En football, quand un joueur ou une joueuse est noir(e) dans un pays aux supporters (voire aux parieurs…) majoritairement blancs, comme c’est le cas de Jess Carter, la « critique » (sic) passe malheureusement souvent du terrain technico-tactique à celui, inacceptable, de la couleur de peau. Quand ladite joueuse possède en plus un compte sur les réseaux sociaux, bonjour l’angoisse dans sa boîte à messages privés. Pas de genou à terre, geste désormais jugé dépourvu de sens, pour les Lionesses avant le coup d’envoi et probablement une vieille migraine au terme d’une préparation pas idéale, surtout si on y ajoute les petits bobos du quart de finale (Lauren James, Leah Williamson).

(Source: compte Instagram de Jess Carter)

Sur CR on est quand même souvent de bonne foi (par exemple la semaine des quatre jeudis ou le 30 février) et on déteste trouver des excuses à nos équipes préférées quand elles perdent (ce qui n’arrive jamais d’ailleurs), mais là on s’est quand même dit qu’il fallait être prêt au cas où.

Pardon ? Ah Jess Carter n’a pas commencé le match et en plus sa sélectionneuse l’a lancée à la 120e minute, dans l’enchaînement du but vainqueur, histoire de décupler l’ovation qui lui était réservée ? Chapeau bas, Sarina. On la boucle devant tant de génie, une fois de plus.

Avec un tour d’honneur en prime.

Le moment qui valait son pesant de Thun

Les vacances d’été commençaient ce mardi après-midi en Angleterre (oui, dans les pays froids l’été est décalé d’un mois). Les petit(e)s  Anglais(e)s allaient donc pouvoir se coucher tard et regarder tout le match, ce qui n’avait absolument rien à voir avec un film de Michel Lang mais risquait de confirmer le chiffre d’audience attendu par ITV: 8 millions de téléspectateurs après les 7,4 millions sur la BBC pour Suède-Angleterre.

Il risque d’y avoir quelques maux de tête du côté de Fulham, surtout pour ceux qui ne sont pas rentrés chez eux avant les arrêts de jeu.

Quand on sait que le Home Office avait autorisé l’ouverture des pubs jusqu’à 1 heure du matin pour cause d’événement « d’importance nationale exceptionnelle », la Thun risquait de quitter les cartes de crédit aussi rapidement qu’elle allait intégrer les poches des annonceurs TV et des gérants de lieux de perdition.

Pendant ce temps, le Stade de Genève, accusé de tous les maux en début de tournoi, affichait guichets fermés pour la troisième fois consécutive, excusez du peu. Le Guardian, non content d’avoir titré « England arrive in the beating heart of Euro 2025 with Italian job still to do« , ajoutait que « there has been no louder noise this summer than when Switzerland dramatically equalised here against Finland. While Stade de Genève is not routinely favoured by the local football association, partly due to a perceived lack of hospitality provision, it has arguably been the beating heart of the tournament« . On ne vous traduira pas cette envolée lyrique de peur que les rares Genevois qui ne sont pas des expats la lisent et prennent la grosse tête.

À part ça, c’est quand même une sacrée coïncidence que tout ça arrive pendant une non-manifestation pseudo-sportive qui n’intéresse personne, hein Jean-Michel ?

Le chiffre un peu dé-Biel (ou à deux Bâle)

1 million. En livres sterling, le montant du transfert de la Canadienne Olivia Smith (21 ans le mois prochain) de Liverpool à Arsenal cet été, le plus élevé de l’histoire devant ceux de Naomi Girma (USA, San Diego Wave -> Chelsea) et Tarciane (Brésil, Houston Dash -> OL Lyonnes) en janvier dernier et ceux de Racheal Kundananji (Zambie, Madrid CFF -> Bay FC) et Barbra Banda (Zambie, Shanghaï Shengli -> Orlando Pride) en 2024.

On vous raconte ça parce qu’on a fait un peu de lecture pendant nos voyages en train d’une ville hôte à l’autre (oui, la villégiature à Olten ça va un moment), et notamment les autobiographies d’Alex Scott (How (Not) To Be Strong, 2022) et Steph Houghton (Leading From The Back, 2024). L’occasion de mesurer l’évolution exponentielle de la valeur économique du foot féminin en général et de celui pratiqué outre-Manche en particulier.

En effet, l’ex-capitaine d’Arsenal (jusqu’en 2018) et actuelle consultante pour la BBC raconte avoir dû travailler à la buanderie du club alors champion d’Europe et y ajouter un job de nuit à la poste pour boucler ses fins de mois. Quand à l’ancienne porteuse du brassard de l’équipe nationale et fan de Sunderland devant l’Eternel, elle avoue avoir quitté son nord-est natal et cédé aux sirènes londoniennes en 2010, attirée par un pactole de… 125 £ par match. Comme les 16’000 £ annuelles que rapportaient ses sélections avec les Lionesses ne suffisaient pas à payer les factures, il lui fallait encore coacher les juniors et enseigner le sport à l’école primaire à côté. Bon, ça c’était jusqu’à ce qu’elle se trouve un a(r)gent, l’extraordinairement bien nommé Matthew Buck.

Non, on ne parle pas du Auckland City FC masculin, mais bien de l’élite du foot féminin il y a moins de deux décennies. Mais bon, comme tous les stades de cet Euro sont vides et qu’aucun média ne s’y intéresse de près ou de loin, on ne voit pas par quel tour de passe-passe les revenus de ce sport pourraient soudain exploser hein.

Vides, on vous dit !

L’anecdote qu’on aurait pu entendre sur la Bahnhofstrasse…

… si on avait été un peu plus (Zu)riche.

Figurez-vous que les initiales des buteuses du quart de finale Suède-Angleterre forment les lettres A-B-B-A, voilà qui ne s’invente pas.

Autant dire qu’il allait falloir un festival offensif pour parvenir à épeler A-N-D-R-E-A  B-O-C-E-L-L-I cette fois…

B-A-K, c’est un nom de groupe ? Du rap peut-être ?

Si le match avait été un fromage

50% de Gruyère et 50% de Vacherin fribourgeois.

À en croire le podcast du Guardian Women’s Football Weekly, le rêve de tout Britannique qui se respecte est de se faire une bonne fondue par 35 degrés à l’ombre le pied à peine posé sur sol suisse cet été. Ce même Britannique lambda s’est même laissé dire au soir d’Angleterre-Pays de Galles que la flammekueche était une spécialité… saint-galloise, tout en se disant que la chose n’était finalement qu’une “pizza glorifiée”. On en connaît qui sont devenus apoplectiques pour moins que ça, et ce des deux côtés des Alpes.

La minute Sandy Maendly 

Comme on est au stade tous les jours depuis le 2 juillet et qu’on n’écoute absolument jamais la RTS, cette rubrique commence à devenir aussi pertinente que “et sinon dans les tribunes ?” pendant la période huis clos du covid (ou à la Pontaise lors d’un match couperet du SLO).

On attribuera du coup cette minute à notre nouvel ami Scott, venu tout droit de Newcastle et fan des Magpies de Fabian Schär, rencontré à Bâle lors de France-Allemagne. Le bougre avait tout prévu puisqu’il avait pris un billet pour le 1/4 du premier du groupe D et la 1/2 du deuxième de ce même groupe, histoire de ne pas complètement rater les Lionesses. On lui laisse la parole au douzième décès français à même la pelouse du Parc Saint-Jacques, le tout suivi d’une roulade en position fœtale, samedi dernier: “It’s like watching men, isn’t it ?” Difficile de lui donner tort sur ce coup.

La rétrospective du prochain match se jouant à Lausanne (mais non, on déconne)  

Le mental en papyrus carbonisé par l’éruption du Vésuve en 79 après J.C. des Bleues s’étant une nouvelle fois effrité entre les mains d’un sélectionneur, c’est donc l’Allemagne qui défiera l’invincible Espagne à Zurich ce soir dans l’autre demi-finale. Vu l’imminence du début de cette rencontre, on va éviter tout pronostic qui risque d’aussi bien vieillir que du lait oublié sur le balcon donnant plein sud en pleine canicule.

On se risquera par contre à dire que Williamson & Cie préféreraient sûrement affronter l’Allemagne, ce qui au vu de l’historique entre les deux équipes tous genres et siècles confondus (sauf à l’Euro 2022) paraît complètement fou. Même Gary Lineker doit être d’accord, c’est vous dire la frousse que suscite l’Espagne en ce moment.

Le pronostic d’avant-match selon l’indice ALISHA (A-Level Inclusive Soccer and Holistic Approach)

Un slam dunk, comme d’habitude. On n’a jamais douté. Pas une seconde.

A propos Raphaël Iberg 231 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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