Une arnaque nigériane ? Mais Kelly-dée !

On a failli avoir les boules au Rectangular Stadium

Bon, franchement, à ce stade on était pour le Nigeria. A son septième match de Coupe du monde (dont quatre de l’Angleterre) couvert pour ce site ingrat et ses 4 lecteurs (dont 3 fois l’auteur de l’article), le soussigné commençait vaguement à être à court d’inspiration. On savait pourtant dès le départ que couvrir l’équipe nationale féminine du Vatican aurait été un choix plus reposant. On porte le cilice jour et nuit depuis le 20 juillet en guise de pénitence pour cette décision bien hasardeuse.

Le match en deux mots

Trois lattes.

Ashleigh Plumptre (16ème minute), Uchenna Kanu (47ème) et Asisat Oshoala (103ème) ont touché la transversale anglaise. Trois barres = un penalty ? Même pas. Un coup d’épaule de Lucy Bronze sur Michelle Alozie dans les 16 mètres (92ème) n’a même pas fait broncher la VAR (avec raison). Et pourtant on pensait qu’il ne fallait pas lui mettre la main au panier, Alozie.

Blague de bas étage à part, la numéro 22 de l’escouade vert fluo, née en Californie et évoluant actuellement au Houston Dash en National Women Soccer League (NWSL), est également titulaire d’un Bachelor en biologie moléculaire de l’Université de Yale et travaille comme technicienne dans l’unité de recherche sur le cancer du Texas Children’s Hospital de Houston. Elle s’est donc rendue en Australie par peur d’être inactive pendant plus d’un demi-battement de paupière cet été.

La femme du match

Zećira Mušović.

Elle ne jouait pas dans ce match ? On s’en fout. Celle qui a bouté les Etats-Unis hors de la compétition à elle toute seule sera dorénavant la femme de tous les matches en ce qui nous concerne. Juste pour fermer le caquet de tous ceux (et ils sont nombreux) qui suivent cette Coupe du monde uniquement à travers les buts gags et les boulettes de gardiennes (OK, elles étaient en général énormissimes, mais il y en a eu assez peu pour qui regarde 90 minutes par match et pas un highlight tous les 6 jours).

Tiens, d’ailleurs, en ce jour dont d’aucuns se souviendront comme de celui de la bourde monumentale de la portière sud-africaine Kaylin Swart (oui, c’est généralement ici qu’on place le fameux « même moi je l’aurais arrêté »), le reste du monde retiendra ça:

On rappelle encore à tout hasard qu’il est toujours impossible de se procurer le maillot officiel d’une gardienne évoluant actuellement en Australie et en Nouvelle-Zélande. Alors que même pour un club masculin de division inférieure aussi obscur que le FC Sion, il suffit d’à peine trois clics pour… ah non.

Voilà qui nous rappelle qu’en juin dernier on a commandé un maillot du SLO floqué du nom d’un joueur qui est depuis parti à Lucerne et qu’on est sans nouvelles dudit maillot…

Vous dites ? Mary « Wyatt » Earps a enduit toute l’offensive nigériane de goudron et de plumes et a été élue joueuse du match qui nous occupe ? Allons donc ! Trois gardiennes qui savent ce qu’elles font ? On va être à deux doigts du règlement de compte à OK Barrière de Corail en Australie… 

La méduse du match (y’a pas de buses en Océanie)

On était tenté de placer la remplaçante nigériane Gift Monday (qui est née un dimanche, on a vérifié) dans cette catégorie sans même attendre le coup d’envoi. Ou plutôt ses parents. Quand tu t’appelles Lundi et que tu veux que ta fille mette moins de 10 ans à nouer son premier lien d’amitié dans la cour d’école, tu fais profil bas avec le prénom, non ?

C’est vrai que ça aurait pu être pire.

Le tournant du match

Le carton rouge de Lauren James à la 85ème minute, expulsée pour avoir voulu copier la technique de Zizou jusqu’à l’essuyage de crampons sur une hanche adverse. A 10 contre 11, il n’y avait plus rien à tenter dans le jeu pour une Angleterre dominée physiquement par les athlètes nigérianes. Mais à voir le body language de Mary Earps, on n’avait pas peur des tirs au but du côté des Lionesses. Et qui d’autre que Chloe Kelly (entrée à la 88ème), autrice du but champion d’Europe l’été dernier et du penalty gagnant lors de la Finalissima face au Brésil ce printemps pour sceller la qualification ?

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Entre les Etats-Unis hier et l’Angleterre ce matin, on a peut-être eu droit à la différence entre une génération en fin de course et une vainqueur potentielle qui ne brille pas toujours mais s’en sort dans l’adversité. Etait-ce le France-Paraguay ’98 des Lionesses millésime 2023 ?

L’aVARie qui aurait pu couler le match

Un penalty initialement accordé sur une faute commise sur Rachel Daly dans la surface de réparation (31ème). Sauf que Daly s’est prise pour un footballeur et s’est laissée tomber après avoir été vaguement époussetée dans le dos. On ne le dira pas souvent, mais sur ce coup on était content que la VAR existe ! Même si la valse hésitation qui a conduit à sa consultation nous a coûté à elle seule 4 minutes d’arrêts de jeu juste au moment où notre café du matin commençait à faire son effet diurétique.

La Perth de balle catastrophique du match

Celle d’Ashleigh Plumptre. La perte de balle métaphorique de la native de Leicester date de 2021 quand, après avoir représenté l’Angleterre chez les M15, M17, M19 et M23 pour un total de 30 sélections et 10 goals, elle s’est soudain découvert un grand-père nigérian. Comme quoi il n’y a pas que les Américaines qui ont soudain trouvé un passeport philippin, irlandais ou… nigérian au fond d’un tiroir ces derniers temps.

Et pourtant la 16ème minute déjà mentionnée plus tôt a failli lui donner raison avec d’abord une formidable frappe du gauche qui s’est écrasée sur la latte, suivie d’un tir du droit repoussé par Earps. On avoue, l’histoire aurait été belle.

Le docte préposé au live du Guardian ne s’en remet pas.

Le chiffre Hamilton (parce que c’est quand même mieux qu’une stat’ à deux balles)

1. Comme le nombre de joueuse ayant déjà remporté une Coupe du monde encore présente dans la compétition après l’élimination des Etats-Unis hier. Elle s’appelle Saki Kumagai et porte le brassard de capitaine du Japon champion du monde à Francfort en 2011. C’est même elle qui avait marqué le tir au but vainqueur contre les Etats-Unis de Megan Rapinoe et Alex Morgan, déjà là elles aussi. En relisant le résumé du match, on tombe sur cette stat’: les Japonaises n’avaient jamais battu leurs adversaires étasuniennes en 25 confrontations avant cette finale. Tout ça pour dire que les surprises, bien que plus rares que cette année, ça ne date pas d’hier en foot féminin. Les Lionesses étaient prévenues.

L’anecdote qu’on aurait pu entendre à Bondi Beach…

… si seulement on y était.

Bondi Beach serait clairement hors de prix pour une joueuse nigériane lambda non qualifiée pour une Coupe du monde aux antipodes (le prix médian d’une maison dans cette banlieue riche de Sydney s’élève à environ 2 millions de francs suisses). On pourrait même dire que l’Angleterre faisait face à une équipe amateure ce matin. Figurez-vous que selon USA Today, certaines joueuses n’ont pas été payées par leur fédération depuis plus de deux ans. C’est leur coach texan, Randy Waldrum, faisant lui-même du bénévolat depuis sept mois selon ses dires, qui dénonce l’affaire. Il a d’ailleurs un deuxième job (coach principal de l’équipe féminine des Panthers de l’Université de Pittsburgh) pour arrondir les fins de mois, c’est dire.

La réponse de son employeur, la Nigerian Football Federation (NFF) ? Le sélectionneur n’est qu’une « grande gueule incompétente ». L’arnaque nigériane ne serait donc pas répandue que sur Internet ? Les Super Falcons seraient-elles dirigées par des vrais cons ? Que nenni: les résultats sont là. Le Nigeria a franchi une phase de groupe invaincu pour la première fois de son histoire. Qui a dit que le management brutal et l’esclavage moderne ne fonctionnaient pas ? Certainement pas nous à la rédac’ de Carton-Rouge.ch ! 

Si le match avait été une citation de Zlatan Ibrahimovic du rappeur nigérian Zlatan

Omoniyi Temidayo Raphael, connu professionnellement sous le nom de Zlatan Ibile, rappeur natif de Lagos, a un jour dit: « Je voulais être un footballeur comme Zlatan, pas un musicien. » C’est d’ailleurs sous le modeste sobriquet de World President qu’il apparaît sur les réseaux sociaux. Tout ça alors qu’il a deux fois moins de followers qu’Alisha Lehmann.

Si vous avez lu les chroniques de Benjamin Décosterd à Paléo et avez par la même occasion fait la connaissance de Rosalia (qui ?), le peu d’espace qui restait disponible dans votre cerveau est maintenant inutilement encombré par un deuxième artiste improbable.

Ce que vous allez regretter d’avoir manqué si vous dormiez encore (comme chacun sait, « qui dort Dunedin ») 

La vidéo que vos potes footix ne vous enverront jamais.

La minute Johan Djourou 

« Rasheedat Ajibade, l’attaquante de l’Atlético Madrid, diplômée en sciences politiques, ça doit être notre seul point commun. » C’est la 26ème minute et Jérémie Henriod est déjà en roue libre. On imagine qu’il parlait de ses années de formation au Wanda Metropolitano.

La rétrospective du prochain match se jouant dans le même fuseau horaire  

L’Angleterre affrontera le vainqueur d’un derby coke-weed Colombie-Jamaïque le 12 août à Sydney. Un duel d’ailleurs très attendu par Lauren Hemp qui fêtait son anniversaire aujourd’hui. Un peu plus et on développerait une addiction pour cette Coupe du monde.

Malgré les apparences, le propriétaire de cette voiture n’est probablement pas plus fan de foot féminin que nous de kabaddi.

A propos Raphaël Iberg 175 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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4 Commentaires

  1. Franchement, j’ai trouvé que l’expulsion était sévère, à mon avis un jaune aurait été suffisant. Le geste est moche, mais il n’y a aucune dangerosité (ni même aucun risque de faire mal en fait).

    • C’est clair que c’est beaucoup moins grave qu’un tacle à la carotide, mais le geste reste très violent dans la forme je trouve. Et j’ai l’impression que le foot féminin essaie de saisir l’opportunité de tuer dans l’oeuf des dérives qui sont solidement implantées dans le foot masculin (grande sévérité sur les simulations, tirages de maillot, etc.). Du coup suspension automatique pour le prochain match et liberté de décider d’en ajouter un de plus apparemment…

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