Mal Polli le HCV Martigny ? Je ne pense pas…(1)

C’est sous les hourras des supporters des bords de la Navizence et l’indifférence totale de ceux des dédales de la Lonza Arena que le président-mécène Patrick Polli (une sorte de CC martignerain, mais en moins riche) et Victor Liebenguth, le « CEO » du club (Chief Erreur Officer), ont annoncé le traditionnel harakiri du HCV Martigny, le 8 mars dernier. Une année après l’épique promotion acquise à Thoune, le Lion r(o)ugissant sous des pertes abyssales quitte déjà l’eldorado qu’est la Swiss League de hockey pour rejoindre lamentablement mais également injustement la troisième division helvétique.

Riez donc supporters sierrois et autres grands professeurs du business model idéal à adopter par un club de hockey en Valais, mais n’oubliez surtout pas que l’auto-recalage du club octodurien vous impactera tôt ou tard. Car la volonté à peine dissimulée de la National League de se fermer et la paralysie de la Fédé suisse de hockey d’adresser le désastre économique qu’est devenue la Swiss League éteindront à tout jamais les rêves de grandeurs de certains avec leur patinoire à CHF 320 millions! Mais qu’à cela ne tienne, une petite dissection en deux épisodes de la saison 2023-24 de ce HC Martigny s’impose afin de tenter d’identifier les responsables de cette débâcle… et si vous pensiez qu’on n’oserait pas toucher à la fille de Couchepin, vous êtes autant perspicaces qu’Hakan Yakin au moment de sélectionner Renato Steffen.

Bienvenue au grand Cirque qu’est devenu Martigny, patrie de Jules César, Léonard Gianadda et …René Grand bien sûr !

Le HCV fait Fuhrer 

Partie comme des Rockets (on y reviendra), l’équipe entraînée par le néo-Thurgovien Anders Olsson n’a mis que trois matches pour s’adapter à sa nouvelle ligue. En prime pour le maigre public, le jeu fut au rendez-vous. Certes à la suédoise, avec une approche défensive et opportuniste qui nous a fait penser à Viola Amherd en train de justifier l’achat des F-35 devant les Chambres fédérales. En fait, le style de jeu des Red Lions n’avait de valaisan que l’empreinte appliquée par les quelques joueurs rescapés de la promotion mais qui se propulsèrent prestement au niveau de la Swiss League: un Sami El Assaoui assagi (dommage !), un Melvin Merola sur courant alternatif, un Romain Seydoux malmené dans des alignements parfois chaotiques et un statuesque Arnaud Currit, solide comme le Catogne. Au fil de la saison, les résultats furent probants pour le néo-promu car à l’exception de quelques fessées contre les satanés Bâlois et les Crésus d’Olten, les Martignerains survolèrent la plupart des débats face aux oppositions directes (Winti, Bellinzone) et face aux Viégeois d’Ehlers qui furent tellement à la rue durant le Championnat que les suiveurs avertis les surnommaient « les clochards » de Swiss League.

Deux fines pioches expliquaient principalement les succès à répétition du HCV Martigny. De un, le génial David Lindquist (38 assists) dont le talent dans l’exécution de passes millimétriques pour conquérir les zones défensives adverses n’aurait pas déplu à un petit moustachu en 1939. Et de deux, l’opportuniste Léonardo Fuhrer (33 buts) qui avait été jugé insuffisant la saison précédente à la Chaux-de-Fonds par le coach Louis Matte (en échec sur ce coup). Le seul hic dans cette première ligne fut la redistribution trop fréquente des cartes au poste d’ailier à cause du LHC qui n’envoyait que des flemmards du côté de Martigny. Ce partenariat valesco-lausannois fut une véritable bérézina (hormis super Pasche qui décolla essentiellement grâce à son passage au HCV) qui restera symbolisée par l’apport négatif de Pedretti et Kenins qui furent aussi utiles au team d’Olsson que des ratracks pour grimper la face nord du Cervin. Décidément, au pays du Fendant, le Dézaley n’a pas sa place.

Lindquist… la bonne trouvaille de la saison. Hein Visp ?

Une saison qui finit en Kourou

Qu’on se le dise, les talents dans les académies de hockey « romandes », c’est bien du côté de Bienne qu’il faut aller les puiser. Citons en tête de gondole Mattheo Reinhard et ses faux airs de Kelly Glowa et Jérémie Bärtschi dont la rapidité et le patinage donnèrent le tournis à nombre de défenseurs de la Ligue (hein Casserini et Montandon !). Le partenariat avec les Seelandais fut donc une réussite et se renforça durant la saison grâce à l’apport qualitatif de l’habile Elvis Schläpfer. Malgré ces apports prolifiques, les Rouge et Blanc calèrent sérieusement au retour des frimas de l’hiver, ce qui coïncida, comme par hasard, avec le moment où le LHC décida de tourner la Pasche du partenariat en rappelant au bercail le talentueux portier de 21 ans.

Dès ce moment, on assista à un véritable défilé de gardiens dans la cage du HCV avec un Shiyanov amateur de montagnes russes (what else ?), un Patenaude en mode asynchrone et un Punnenovs excellent sur un match (le seul joué au Forum !). La fin de saison de la troupe à Polli allait tourner au cauchemar. Victime collatérale des GCK Lions et de l’EHC Basel qui choisirent honteusement les matches où ils voulaient bien mouiller le maillot, le HCV Martigny se retrouva au pied de la Bâtiaz pour la dernière ronde du championnat, menacé par « l’ogre viégeois » et les valeureux Winter Touristes. Et patatras, victimes du syndrome caca-culotte face à Bellinzone, les hommes d’Olsson volèrent étonnamment en éclats alors que 3 points leur tendaient les cannes face à ces Rockets… l’effet Challenger sans doute.

J’ai glissé, Chef ! 

Club historique du hockey suisse (born in 1939 and reborn in 2018), le HC Martigny énigmatiquement rebaptisé HC Valais-Chablais-Martigny-Sion (… qui dit mieux ?) a donc décidé d’abandonner ses petits camarades de jeu après une année seulement passée dans cette ingérable Swiss League. Après cette 4ème relégation en 25 ans et la calamiteuse faillite de 2017, autant cela me fait mal de l’écrire et encore plus de le lire, ce camouflet représente la fin du hockey professionnel à Martigny, et ce, pour des décennies. Alors vous nous connaissez, avec notre retenue admirée par nos pairs, nous ne pouvons pas nous empêcher de partir à la chasse du Pithivier qui pourrait expliquer le désastre octodurien. En ordre croissant d’importance, voici une belle brochette de coupables en puissance que nous allons disséquer dans les chapitres à venir :

# 5. Le public

# 4. Les sponsors

# 3. Les dirigeants

# 2. La Ligue suisse de hockey

# 1. Anne-Laure

Le Kop valaisan en vadrouille à Bellinzone. 

Quo vadis Octodurium populus ?

Le HCV Martigny n’a pas de public. Oui, mais non. Disons plutôt qu’il l’a perdu en route. En effet, ce public a progressivement fondu depuis le nouveau millénaire et des 4’000 pelés qui sautillaient dans les quatre coins du Forum scandant des « Rosol-Fedulov » à vives voix alcoolisées, il ne reste actuellement plus qu’un noyau de passionnés d’à tout casser un millier de personnes. Le renouvellement du public ne s’est tout simplement pas fait auprès de la jeune génération de la ville et des districts environnants. Pour être cohérent, le même phénomène est visible à Sierre et Viège où les tempes grisonnantes prennent largement le dessus sur les jeunes frimousses. A Martigny, certains fans ont certainement perdu le feu sacré avec des relégations à répétition, un management scandaleux (Echenard), des entraîneurs contestés (Perroton, Ryan), des rebrandings incompréhensibles (HC Red Ice, HCV Martigny-Chablais-Sion), un ancrage un peu moins marqué de joueurs pure souche (les Moret & Co, Baumann, Ancay…) et pour couronner le tout, avec une exclusion du Forum plus ou moins justifiée de membres de la Brigata.

Certain ex-visiteurs du Forum mentionnent le manque d’attractivité de la Ligue B en raison de trop nombreux clubs bourbines pour expliquer leur désengagement. Oui, mais ce sont les mêmes qui boudent la venue d’un excellent la Chaux-de-Fonds un mardi soir de novembre ! L’excuse la plus souvent invoquée par les paresseux pour éviter d’assister à un match, c’est l’état douteux de la patinoire du Forum qui date il est vrai d’un autre siècle. Alors certes, on s’y est gelé quelques phalanges de pieds au fil du temps. Mais perdre la fibre de supporters uniquement en raison de ce hangar d’acier inhospitalier, c’est un peu l’excuse du pauvre car comparé à Tourbillon et ses 7’000 courageux qui sont congelés sur des gradins à mi-novembre, le Forum de Martigny, c’est le Ritz. D’ailleurs comme disait un habitué du frigo octodurien: « Quand on va dans une patinoire, on s’habille en fonction et ceux qui veulent y aller en tongs et t-shirt, ils peuvent toujours se passionner pour le HC Male qui domine largement le championnat de hockey des Maldives. »

Pour un club scotché au milieu des Alpes, seuls 0.7% des gens issus d’un bassin de population d’environ 140’000 habitants daignent se déplacer pour suivre un match du « sport national » suisse. Cela fait sérieusement désordre alors qu’un club lacustre tel que Thurgovie arrive à bien remplir ses gradins. Alors oui, on peut objecter un sérieux manque de professionnalisme dans le marketing des matches par la direction du club octodurien (on y reviendra) mais cela n’explique pas tout. Et si les gens de Martigny et de ses alentours étaient non seulement devenus paresseux mais aussi proches de leurs sous car rongés par l’inflation ? Je ferai ma petite enquête début octobre à la Foire du Valais où, selon mes sources, les gens de tout âge (notamment les jeunes) affluent en masse et savent boire et dépenser plus que de raison.

Un numéro 23 que vous ne reverrez plus au Forum, par contre à Biou, probablement… 

« J’ai plus de sous, je vends tout! »

Tel fut le slogan de la pub lancée début des années 90 par Jean-Daniel Descartes, grand supporter du sport valaisan et précurseur du sponsoring sportif en Valais. Bien lui en avait pris car son commerce de meubles réussit à fleurir grâce aux liens créés dans moult clubs qu’il aidait à coup de pulls offerts et autres billets de mille lâchés çà et là. Cependant, force est de constater qu’il n’a pas créé de vocation durable du côté des entrepreneurs de la région martigneraine. Déjà en déficit de spectateurs, le HCV Martigny n’est pas parvenu à motiver les locomotives de l’économie locale à participer à l’aventure en Swiss League.

Il est vrai que les entreprises bas-valaisannes étaient en droit de se demander pourquoi lâcher des kilos francs au HCV Martigny pour en contrepartie offrir une expérience frigorifique à leurs clients dans les cabanons VIP du Forum. Il suffit de regarder l’approche de la Banque Cantonale Valaisanne qui se paya une double loge qui en jetait à la Lonza Arena alors que du côté du Forum, en tant que partenaire d’argent, elle ne vint lâcher qu’un budget modeste pour coller son logo sur un panneau bien pourri. Parmi les partenaires de taille à Martigny, on n’entrevit pas de banques privées comme à Bâle (Baumann & Cie), ni d’assurances comme aux GCK (Swiss Life) ou à Olten (la Bâloise) et encore moins de montres de luxe (Tissot) comme à la Tchaux. Tout juste vit-on pointer la boîte du président sur le maillot des joueurs (le Groupe Polli) et quelques courageux sponsors (Alpatec, Besson SA, VfP Immobilier) qui tentèrent de montrer le chemin à ceux qui n’avaient pas osé se lancer (ils se reconnaîtront). Et dire que pendant ces temps de vaches maigres au niveau des sponsors de la région du coude du Rhône, la destination Verbier 4Vallées et les vins Rouvinez s’affichaient comme partenaires d’argent à Gottéron ! Polli et Liebenguth auraient été bien inspirés d’aller chercher des sous auprès de Télé-Charmey et des laits Cremo pour rendre la pareille aux Dzodzets!

La saga du HCV Martigny se poursuivra courant du mois de mai où nous finirons plein d’allant le dépeçage de l’ex-club de Swiss League en analysant les rôles que la Ligue Suisse de Hockey, les dirigeants du club et la Présidente de la ville ont, qu’ils le veuillent ou non, tous joué dans la relégation administrative du club octodurien.

A propos Paul Carruzzo 207 Articles
Elle est pas un peu belle notre Nati et tout le bonheur qu’elle nous amène ? Alors, Rickli et compagnie, si vous ne vibrez pas devant cette équipe, vous n’êtes pas non plus monstrement obligés de regarder. Profitez d’un bon match de hornus et foutez la paix à nos joueurs, qui comme vous, ont un joli passeport rouge à croix blanche.

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1 Commentaire

  1. Bonjour,
    On se moque… mais on n’est pas très fort en géographie! Pour qualifier les supporters sierrois vous aurez pu parler des bords de la Raspille, de la Mondereche, de la Sinièse… Mais pas de la Navizence, elle ne coule pas à Sierre.
    Et c’est un Sierrois qui vous le dit!

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