Clubbing : Brûleurs de Loups de Grenoble

Dernière étape de notre tour d’Europe de l’été et nous revoici en terrain presque connu, puisque nous allons rendre visite à notre voisin de gauche méprisant et généralement honni lors d’un déplacement à Grenoble qui a au moins le mérite de ne pas coûter la peau du c*l. Partons à la rencontre des Brûleurs de Loups de Grenoble, un club qui rivalise avec des équipes de NHL (surtout en termes d’ambiance dans le stade) et qui a au moins un point commun évident avec ton tonton valaisan (si tu le n’as pas, relis le nom du club une syllabe après l’autre).

L’histoire complètement bidon du club

Il paraîtrait qu’une quinzaine de milliers de Suissesses et de Suisses vivent toujours aujourd’hui en Argentine, l’une des terres promises des vagues d’émigration du XIXe siècle qui touchèrent notamment le Valais en raison de ses conditions de vie difficile. En même temps, c’était ça ou devoir supporter le FC Sion, alors on peut comprendre.

Toujours est-il que tous les Valaisans en exil n’atteignirent pas l’Amérique du Sud, et que certains, à en croire la légende, n’allèrent de fait pas si loin dans leur exode. Que voulez-vous ? L’heure de l’apéro, c’est sacré ! Une troupe de Valaisans s’étant perdus en Isère ne voulut pas y déroger, s’installa à Grenoble et… n’en repartit jamais.

Mais surtout, ils refusèrent fermement d’abandonner leurs plus anciennes traditions, constitutives de leur identité, et, ayant terminé l’apéro, ils se mirent à chasser le loup, ennemi juré depuis des générations, aux abords de leur nouvelle patrie. On dit que les habitants de Grenoble furent si impressionnés par l’assiduité mise par les Valaisans dans cette tâche qu’ils s’en inspirèrent pour fonder le club des Brûleurs de Loups de Grenoble.

Dire qu’on court après un HC Valais depuis des siècles alors qu’il a toujours été là, juste sous nos yeux ! Comme quoi, quand on parle du loup…

Couleurs, symboles et mascotte à la con

… on en sent le poil brûlé. Il faut dire que, même si cela ne semble étonner personne, le logo des Brûleurs de Loups de Grenoble n’est de fait pas un brûleur de loup, mais plutôt un loup (à moitié) brûlé. Si l’expression « you had one job » était un club, ce serait sans doute celui de Grenoble. Même si, soyons honnête, ce nouveau logo est plutôt classe est vaut en tout cas mieux que l’ancien loup vaguement looney-toonesque que le club arborait encore en 2004.

Fichier:BDL-premier.jpg

Je dis pas que c’est le Grand Méchant Loup de Disney, je dis juste que je les ai jamais vus dans la même pièce en même temps.

Bon, ceux qu’on appelle les « BDL » ou Boulets de Liège ont envoyé… bouler les couleurs de la ville, ça n’étonnera personne, pour jouer en rouge et bleu marine. Jusque-là, pas de problème. Mais pour me faire mentir, les Bouteilles de Lait ont décidé d’ajouter au loup (à moitié) brûlé un imprimé torche enflammée en arrière-plan dont le rendu est, disons, discutable.

 

Voir cette publication sur Instagram

 

Une publication partagée par Brûleurs de Loups (@bdl_officiel)

Et c’est sans parler de la mascotte, Jeff, qui, lui aussi, est un peu entre chien et loup. Comprenez : il ressemble à un étrange croisement entre un lion et une panthère, à la crinière en feu et qui plus est atteint d’un début de calvitie pas piqué des vers. Sacré animal, n’est-ce pas ?

Moi yé m’appelle Jeff ! Non, sans déconner, elle danse bien, mais il y a tout de même un loup, avec cette mascotte, non ?

Ville, stade et supporters

Pas grand-chose à dire de positif sur Grenoble, puisque le loisir le plus prisé à part le hockey est le même qu’à Belfast il y a trente ans, c’est-à-dire la guérilla. Eh oui ! Chez nous, les matchs à thème honorent le terroir local, on lance des peluches, on bouffe, on s’amuse, quoi. Là-bas, on a droit au match à thème spécial Forces de l’ordre. Sans déconner.

 

Voir cette publication sur Instagram

 

Une publication partagée par Brûleurs de Loups (@bdl_officiel)

Comme on dit : l’homme est un loup pour l’homme.

Tournons-nous donc vers le Polesud, l’aréna branchée forces de l’ordre de Grenoble dont le ratio places debout fait honneur à ce match à thème et n’est pas sans rappeler celui de la Swiss Life aréna de Zürich (712 pour 4200 places). Elle n’en reste pas moins la deuxième plus grande patinoire de France, et aujourd’hui, elle fait du « show » d’avant-match sa « signature », avec deux têtes de loup géantes crachant du feu qui renverraient le plus courageux des Valaisans dans les jupes de sa mémère.

Au-delà de ça, et à part si vous êtes fan de Candeloro (mais on doute que beaucoup de nos lecteurs, voire que beaucoup de gens soient fans de Candeloro), le Polesud accueille aussi des séances de kart sur glace. Si vous avez déjà rêvé de jouer à Mario Kart dans la vraie vie, c’est probablement l’activité humaine qui s’en éloigne le moins (on n’a jamais dit qu’elle en est très proche non plus).

Ben oui, faut dire ce qui est : avec 712 places debout, on peut difficilement parler d’ultras. Ingolstadt restera donc malheureusement une exception en la matière parmi les adversaires du LHC en CHL cette saison, et c’est peut-être ce qui manque pour faire de cette Champions Hockey League une compétition un tant soit peu intéressante. Mais bon, les mauvaises langues argueront qu’il y a déjà assez de criminalité à Grenoble, et qu’il n’est pas la peine d’en rajouter. On rappelle à ce sujet que dans certaines villes pas si lointaines, il n’y a pas besoin d’ultras adverses pour assister à de la violence dans les rues, les ultras locaux se suffisent à eux-mêmes. Et puis, bon, il y a bien un club appelé les « Irréductibles » (comme 347 autres clubs de supporters sportifs en France, on a fait le compte), mais celui-ci est à peu près aussi proche d’un groupe d’ultras que Toronto de gagner un acte VII d’une série de play-offs. D’ailleurs, leur plus beau tifo ressemble à ça.

 

Voir cette publication sur Instagram

 

Une publication partagée par Les Irréductibles (@irres1985)

Il fait un froid de loup au Polesud, et pas seulement sur la glace. Attendez, il vous rappelle pas quelque chose, ce tifo ? Mais oui ! Bien sûr ! Je me disais aussi.

Bon, et en ce qui concerne la prétendue section ultras des « cularos » (on vous le concède, ça doit donner des chants particulièrement juteux aux sections ultras adverses, si elles existent), elle est mentionnée une fois sur un forum en 2012, donc on va partir du principe qu’elle n’existe pas et passer à la suite.

Le joueur qui pourrait avoir sa statue à l’entrée du stade

Il a fallu se renseigner un tantinet sur les huit maillots retirés du club pour découvrir un personnage du hockey grenoblois : le Québecois Gaëtan dit « Pete » Laliberté, connu comme le loup blanc dans le microcosme du hockey français et qu’on ne cite pas seulement parce qu’il avait planté 54 buts en ayant joué 16 matchs en une saison, ni même parce que pour la première et la dernière fois de l’histoire de Clubbing, on a droit à une statue de Laliberté. Ce Grenoblois de cœur fut l’architecte du club qu’il a pratiquement construit à lui seul, de l’école de hockey à l’équipe première, en à peine trois ans. Grand artisan de l’organisation du tout premier match à domicile de Grenoble, il fut aussi celui du succès contre Bâle lors de ce match, dans lequel il a mené la danse avec 5 buts et 2 assists. Quelque chose à ajouter, Pete ? Et Pan !

Sur la glace ce jour-là se trouvait aussi un certain Alain Bozon, dont le fils Philippe, pas encore né, devait devenir le deuxième du classement des buts par saison du club de Grenoble (45 en 36 matchs, soit un ratio un peu moins flamboyant que celui de Pete, on vous le concède), et le père des mieux connus par chez nous Tim et Kevin Bozon. Comme quoi, il est vraiment tout petit, ce monde.

Sous l’impulsion de ce vieux loup de mer de Pete, les Grenoblois se sont sentis pousser des ailes ainsi qu’une faim de loup : ils ont successivement écrasé Lausanne (9-1) et Genève (10-2) pour les troisième et quatrième matchs de leur histoire, avant d’être stoppés dans leur nouvel élan par… Zürich (4-12), qui prouvent par là (si c’était encore à prouver) qu’ils étaient déjà rabat-joie dans les années 1960 et qu’à la fin, on se tue à vous le dire, ce sont les Suisses allemands qui gagnent ! En même temps, si ça, ce n’est pas faire entrer le loup dans la bergerie, je ne sais pas ce qui l’est.

Quant aux Lausannois, ils espéreront sans doute une autre issue pour cet automne, à moins qu’ils n’aient pas envie de louer un avion pour aller se les peler en novembre au fin fond de la Suède en espérant toucher une prime qui suffirait à peine à payer la nuit d’hôtel du masseur, hypothèse qui, somme toute, semble assez raisonnable, en fin de compte. Non ? De toutes façons, je suis sûr qu’en cas de défaite, tous les tabloïds romands sont déjà prêts à nous parler de gueule du loup.

Le joueur à placer sur une case mot compte triple

Laissez-moi vous présenter le boss final du scrabble toutes langues confondues, le Polonais que même les autres Polonais regardent d’en-bas, avec admiration et respect : Alan Lyszczarczyk. Voilà, ça c’est du lourd. C’est pour ça que cette rubrique a été créée ! Le mec n’a même pas besoin de mot de passe quand il commande en ligne : son nom est un mot de passe, et de sécurité maximale en plus, pas besoin d’ajouter une majuscule, un chiffre ou un point-virgule. Même le Fourchelang s’incline face à tant de consonnes à la suite dans un nom. Et merde, quoi, 2 voyelles sur les 3 lettres qui restent sont des « y » ! Ça, c’est du nom à placer sur une case mot compte triple, ça c’est du nom qui râpe la langue, ça c’est un nom qui était sûr de ne jamais être interrogé au tableau à l’école.

 

Voir cette publication sur Instagram

 

Une publication partagée par GKS Tychy (@gkstychy)

Oui, bon, le seul problème, c’est qu’Alan Lyszczarczyk ne joue pas à Grenoble, mais à Tychy, autre club engagé en Champions Hockey League 25-26 et que n’affrontera par le LHC en phase de ligue de cette compétition (et vraisemblablement pas en phase finale non plus). On aurait dû s’en douter.

Allez, ne prenons pas la Grossetete (5) et parlons un peu des joueurs de la Meute pour rester sur le Beauchemin (49). Parce que sinon, après, on dira que j’Englund (6) pas une, ou que je manque pas Dair (3). Mais c’est pas Treille (77) sympa, parce que les idées, Bachelet (26) ai. Alors Crinon (72) pas encore au scandale, parce que je sens que je vais Fertin (27) tabac et que les Loups pourraient bien sortir leurs Geurif (88) pendant qu’on est à Leclerc (22) avant le match. Et pour moins que ça, Barberio, lui, il a Prissaint (57) matchs de suspension, et moi, ce que j’en dis, c’est que Stepa(très)nek (30). Dommage que le match ne soit pas à Mallet (92), hein ? Bon, je vous laisse, je dois aller Binner (16) Deschamps (17).

Si le club était une bière

Il pourrait probablement être n’importe quelle bière de la brasserie locale La Furieuse, et doublement, en plus. Jugez plutôt : la Furtive et la Futée, comme le loup en chasse. La Fusée lorsqu’il bondit sur la biche qui devait lui servir de proie. la Furax lorsqu’il la manque et la Furie lorsqu’il aperçoit un troupeau de moutons non gardés au beau milieu d’un alpage valaisan. La Furax encore lorsque le berger se réveille au matin et constate qu’il lui manque une pauvre bête, la Furie lorsqu’il part en chasse à son tour contre le loup, la Fusée lorsqu’il s’agit de voter pour autoriser à tuer le loup, la Futée et la Furtive lorsque la votation n’a pas passé mais qu’il tue le loup quand même.

Ok, et actuellement ?

Comme en Valais, il n’y a plus beaucoup de loups en Isère. Ceux-ci ayant d’ailleurs été déclarés éradiqués sur le territoire français en 1937, on peut sereinement dire que le club des Brûleurs de Loups de Grenoble est probablement le seul club sportif au monde dont l’apogée de la gloire a précédé la fondation, ce qui n’est quand même pas rien.

Plus sérieusement (ou pas, on ne sait jamais, ici), les Banquiers du Léman sont à n’en pas douter plus à l’aise en Continental Cup qu’en Champions Hockey League ces dernières années. Comment ça, c’est quoi, la Continental Cup ? Osez-vous prétendre ne pas connaître l’équivalent de la Conference League de l’UEFA dans le monde du hockey européen ? La vraie question, c’est plutôt : ça existe toujours, la Continental Cup, depuis le triomphe d’Ambri en 1999 ? Figurez-vous que oui ! Et les Grenoblois y ont échoué en finale la saison passée contre les Cardiff Devils. Accueillant des équipes comme les Bulldogs de Liège, le Skautafelag Reykjavikur ou l’Étoile rouge de Belgrade (si, si, sérieusement), la Continental Cup, c’est aussi un incontournable en termes de divertissement sur glace européen avec une moyenne d’environ 8 buts par match et des 15-0, 19-2 et autres 11-1 assez fréquents.

Plus sérieusement (pour de vrai, cette fois, promis), on l’a un peu oublié, mais Grenoble fut un temps une place force du hockey qui, sous la houlette de Pete Laliberté, donnait des leçons à toute l’Europe. Une époque de classiques contre les Diavoli de Milan, une époque où les attaquants jouaient à mains nue et où les gardiens se faisaient recoudre le front en plein match, mais une époque tout de même, et une époque où le hockey grenoblois était loin de faire Pete-ié. Alors s’il y a au moins un maillot à photographier au plafond du Polesud cet automne, c’est bien celui de l’ancien numéro 9 Laliberté, qui, à notre connaissance et grand regret, n’a pas encore eu droit à sa statue.

Et puis, 10 trophées sur les 15 dernières années, ça suffit toujours pour se ranger dans la catégorie des clubs qui peuvent se vanter d’un meilleur ratio que le LHC, aux dernières nouvelles. Il faut dire pour conclure ce tour d’Europe qu’à part les Lausannois, il n’y a parmi les équipes de la CHL de cette saison que les Pingouins de Bremerhaven et le KalPa Kuopio qui n’ont jamais remporté leur championnat national. Alors, vous reprendrez bien un peu de cette légendaire humilité ? Parce qu’un derby de la lose pourrait bien attendre le LHC en huitièmes de finale.

Crédits photographiques :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:BDL-premier.jpg

Les bières

A propos Laurent Bouvier 12 Articles
...

Commentaires Facebook

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.