FC Sion : comme un épisode de Derrick

Sentez-vous poindre le doux vent monotone de l’automne ? Ce souffle soporifique qui s’abat dans la cheminée où crépitent déjà quelques bûches, qui caresse l’écran cathodique sur lequel se joue le drame d’un commissaire de Munich ou qui chatouille encore les enceintes d’où s’échappent les indolentes notes d’une sonate de Richard Claydermann. Ah ! Onirique paysage d’une tranquille soirée perdue dans un automne naissant. Ah ! Horizon autrement plus intéressant que ce 1-1 arraché par Sion face à Aarau sur la pelouse de Tourbillon.

Il y a certes eu ces deux buts pour colorer un peu cette rencontre de la 10e journée de Super League : le coup franc stupidement concédé par Arnaud Bühler et transformé d’un magistral coup de patte signé Bastida à la 40e ; puis, l’égalisation de Dominguez grâce à somptueuse reprise acrobatique dans les arrêts de jeu. Mais ces éclairs de beauté ne sauvent pas un match d’une pauvreté affligeante.

Les Sédunois, qui avaient rapidement pris le match à leur compte, se montraient incapables d’amener un réel danger dans la surface adverse. L’immobilisme coupable de certains couplé à l’impuissance flagrante des autres freinait une équipe valaisanne sans doute capable d’emballer la rencontre. Le seul éclair offensif du onze de Stielike durant la première mi-temps fut à ce titre révélateur. Les reprises de M’Futi, puis de Monterrubio dans la foulée, ne pouvaient faire trembler les filets et permettre au match de se débrider.

Le déchet technique affiché avait lui aussi un rôle prépondérant dans la médiocrité ambiante, sans compter la maladresse et le manque de réussite, qui manquèrent par exemple à Adeshina (47e) et à Monterrubio (61e) dans leur duel avec le solide Benito. Et même les idéalistes durent déchanter après les entrées en jeu de Reset, puis de Saborio qui n’eurent – comme trop souvent – qu’une influence moindre sur le rythme et la physionomie de la partie.

Bühler : une faute lourde de conséquence

En face, les Argoviens, inexistants durant 40 minutes, puis suffisants après leur ouverture du score, ne semblèrent jamais en mesure d’offrir une réplique spectaculaire au FC Sion. Et ce, malgré une ou deux actions de rupture où El Hadary devait sortir le grand jeu.

La rencontre aurait pu s’enflammer à l’image de cet épisode 3 de la saison 9 «Nachts in einem fremden Haus» où le commissaire Stefan Derrick, incarné par l’impérial Horst Tappert, tire son premier coup de feu augurant par la même d’une suite haletante. Mais le goût d’inachevé au coup de sifflet final fut similaire à celui du générique de fin, ce fameux goût qui donne envie de se passionner mélancoliquement pour la Ligue 2 française ou simplement d’attendre «Des chiffres et des lettres» après une sieste cathartique.

Ce point arraché par Dominguez ne change rien à la donne. Sion n’avance pas – il a pris trois points en quatre matches -, ne convainc pas sur la pelouse, ne parvient pas à prendre feu. C’est un peu comme si son âme se consumait petit à petit, voire comme si elle n’existait tout simplement plus. Les places européennes s’éloignent, la zone dangereuse se rapproche. Autant dire que les Sédunois feraient bien de retrouver ce feu sacré avant que l’hiver ne vienne définitivement l’endormir.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Sion -Aarau 1-1 (0-1)

Tourbillon, 8500 spectateurs.

Arbitre : M. Busacca.

Buts : 41e Bastida 0-1. 91e Dominguez 1-1.

Sion : El Hadary; Nwaneri, Kali (68e Saborio), Vanczak; Geiger (76e Alioui), Dominguez, Obradovic, Bühler; M’Futi, Monterrubio; Adeshina (56e Reset). Entraîneur: Stielike.

Aarau : Benito; Menezes, Rapisarda, Page, Marazzi; Lang (68e Guerrero), Burki, Bastida, Nushi; Rogerio (72e Bengondo), Ianu (76e Tarone). Entraîneur: Komornicki.

Notes : Sion sans Paito, Sarni, Beto, Brellier (blessés), Serey Die (suspendu). Aarau sans Mutsch, Elmer, Schaub (blessés). 90e: tête de Bühler sur la latte.

Cartons jaunes : Rapisarda (7e, faute sur Dominguez), Dominguez (57e, faute sur Ianu), Marazzi (65e, faute sur Reset), Page (68e, faute sur Reset).

Corners : 8-3 (4-0).

Écrit par Jean-Christophe Hardy