TSR : les autres guignols de l’info

Il est certain que tu connais les célèbres marionnettes délirantes de Canal+. Elles te font vivre l’actualité mondiale avec un humour tranché et certain. En Suisse, ils sont souvent moins drôles, mal fagotés et peu inspirés. Ils disputent à leur incompétence le mauvais goût et la nullité. Ils, nous voulons bien entendu parler des «journalistes» sportifs de la TSR.

Certains reprocheront peut-être à Thierry Gilardi d’être pompeux au possible, franchouillard à souhait, mais personne ne remettra en cause ses connaissances footballistiques. On peut se demander aussi si l’équipe de Canal+ ne nous prend pas pour des cons en vendant tant bien que mal le produit «Ligue 1». Mais la qualité de leurs commentaires, reportages et analyses sont un véritable régal pour l’amateur de football, du néophyte au plus éclairé. Le docteur Jean-Luc Arribart est autant sûr de sa personne que peut l’être Alexander Frei (c’est tout dire), ses remarques précises sonnent souvent justes. Les moyens sont bien entendu incomparables. Mais il suffit d’une plume ou d’un stylo pour écrire les Misérables, pour dessiner la plus belle des cathédrales. La différence tient donc en quelques mots : compétence, talent ou passion. Au-delà du style, au-delà des moyens, c’est ici que tout se joue. Et justement, Yannick Paratte (au hasard…) et sa bande, c’est l’antithèse de la compétence, un talent à la mesure de leur passion, c’est le degré zéro de la performance. La moindre heure d’émission dominicale est autant un calvaire pour l’amateur de sports vautré dans son sofa que pour le malheureux «invité» qui se rend sur le plateau. Il fut une époque où déjà désabusés, l’on riait de la «Carte Blanche» d’Audrey Sommer ou des performances d’Olivier Cochet qui sortait sa tête d’un container pour lancer un reportage sur le hockey sur glace. L’absurde était atteint.

Mais là où l’énervement fait place au désespoir, c’est qu’il faut constater aujourd’hui que les choses n’ont pas changé d’un iota et que, dix ans après, se posent encore et toujours les mêmes questions ! Pourquoi diable Pierre-Alain Dupuis prend encore ses lunettes sur le plateau si c’est pour les tenir dans la main et les agiter devant la caméra ? Pourquoi personne ne lui a encore expliqué que quand il tape du poing sur le pupitre ça résonne dans son micro ? Pourquoi personne n’a pris le soin de lui couper l’étiquette de son pull qui semble tant le démanger derrière son micro ? Pourquoi ne voit-on pas tous les buts du championnat de Suisse ? Pourquoi un reportage ne commence qu’une fois sur deux au bon moment, avec le son et l’image ? Comment un journaliste peut-il se spécialiser dans deux sports en même temps (Dupuis et Droz pour le foot et le tennis par exemple) ?
Il n’y a donc qu’un moyen pour éviter de s’énerver : zapper au risque de ne rien comprendre des actualités sportives sur la chaîne suisse allemande !
Au milieu de ce cirque, on regrette bien entendu le départ de Philippe Duccaroz. Sa passion du hockey sur glace transpirait à l’écran, sur le plateau comme au commentaire. Nous étions bien loin d’Eric Willemin qui, entre deux concerts de cithare et deux commentaires de Schlagenparade, vient à nouveau nous rappeler, dix ans après, que «tout est possible en hockey sur glace». Eric Willemin a traumatisé notre jeunesse. Il nous a pourri les plus beaux derbies de l’histoire du hockey suisse : de Berne – Lugano à Fribourg – Berne en finale du championnat. Bref, Eric Willemin cristallise à lui seul la frustration d’une génération de passionnés et ne voilà-t-il pas qu’on s’autorise à nous imposer à nouveau la tristesse de ses commentaires. Sa passion pour la musique lui permet au moins de se «distinguer» par la richesse de son vocabulaire : doté de 70 mots, il en a toujours dix d’avance sur ses collègues qui alignent péniblement 60 mots différents en une soirée.

Bien entendu, Bertrand Duboux nous a fait vibrer lorsque le cyclisme était encore un sport. Oui, Fabrice Jaton est à son aise pour commenter le ski alpin. Bien sûr Jean-Jacques Tillmann, même bourré, savait nous arroser d’anecdotes passionnantes. Mais il suffit qu’un reporter de qualité et passionné comme Bernard Jonzier lance une vanne appuyée sur la police vaudoise pour qu’il soit suspendu par la chaîne l’espace d’un grand prix. Le service des sports est un tourbillon, une puissance cynique qui, quoiqu’il advienne, tire au fond de son océan de médiocrité, même les plus méritants. 
Nous voulons bien admettre qu’il n’est pas aisé de se passioner pour un St-Gall – Schaffhouse de fin d’après-midi du mois de novembre. Mais même de l’or en bar dans les mains, l’imcompétence triomphe toujours, comme une fatalité. Que penser en effet des soirées de Ligue des Champions du mardi et du mercredi soir ? Respect tout de même à Messieurs les dirigeants de la TSR pour la couverture de cette compétition (peu de chaînes le proposent). Mais pourquoi laisser les clés de la soirée à Pascal Droz ? Dites-lui que ses gags foireux et que ses jeux de mots à deux francs six sous ne font rire personne. Expliquez-lui par exemple que Didier Drogba n’est pas français ou que Patrice Evra n’a jamais joué à l’OM… Dites lui que ce n’est ni dans la Tribune de Genève, ni dans le Journal de Mickey qu’il trouvera ses références. Bref, qu’il élargisse ses lectures à l’Equipe, France Football ou la Gazzetta dello Sport et nous lui pardonnerons de donner rendez-vous au lendemain sans se souvenir de l’affiche du match de la soirée.
En direct, Philippe von Burg ne fait rêver personne, mais on peut difficilement lui reprocher de tenter tant bien que mal de sauver la baraque. Il est vrai que ses concurrents n’ont jamais fait vibrer le moindre pékin devant sa TV. Yannick Paratte est complètement dépassé, il ne reconnaît plus les joueurs et reste capable de nous soutenir, même après plusieurs ralentis, que c’est Robben qui a marqué un but et non Lampard, et ce même après l’incrustation officielle de l’UEFA. Jean-François Develey, donneur de leçons devant l’éternel, voit le football comme peu de monde. A se demander s’il n’aurait pas volé le prisme de Jean-Claude Van Damme. A se demander aussi s’il nous parle bien de ce qui est en train de se passer sur le terrain. Il a le mérite d’avoir ses idées, mais si seulement il pouvait les débiter avec moins d’arrogance.

Après le match, c’est le défilé de clowns qui débarquent sur le plateau pour nous raconter ce qu’il s’est passé dans les autres stades. C’est à ce moment là qu’on atteint souvent le sommet du désespoir. Michel Di Tria et Alberto Montessissa s’unissent dans la médiocrité pour lire les notes qu’ils ont tentés de prendre devant leur écran de contrôle. Il n’est par rare de ne pas avoir compris le score du match à la fin de leurs discours. Plus fort encore, Nicolas Burgy, au demeurant bien sympathique quand il reste dans les domaines qui l’ont fait connaître, nous résume à son tour les faits et gestes de la plus grande compétition de clubs du monde. SVP (encore), Messieurs les dirigeants de la TSR, restons sérieux.
Mais c’est vrai, il ne faut pas se plaindre. Un consultant comme Pierre-Albert Chapuisat rend toute sa crédibilité à la place du sport sur les chaînes helvétiques… Au fond de la Pinte Besson, dans l’arrière cave de la buvette d’Eclepens, nous voulons bien passer une nuit entière à parler de football avec Gabet. Mais le plateau un soir de match de l’équipe suisse n’est ni le café du commerce, ni le cabaret de Sion ou le kiosque à musique. Ce n’est sans doute pas non plus le meilleur moment pour entendre les onomatopées d’un fan de football, si Gabet soit-il.
Le service des sports de la TSR est une incitation à ne plus payer la redevance, à huer la présence de ses journalistes aux alentours de tous les terrains de sport. Après que Boris Aquadro se soit presque fossilisé sur le plateau de «Fans de sport», après que Deschenaux ait enfin jeté l’éponge, nous avions à chaque fois l’occasion d’espérer. Mais force est de constater que même ces changements n’ont rien amené. Par ces temps d’élections, nous ne pouvons faire appel qu’à la force citoyenne : boycottons ce cirque et peut-être qu’un jour sera opéré le grand nettoyage. D’ici le grand soir, il ne nous reste qu’un plaisir : il arrive des fois en effet où bourrés au festival de la Cité comme au Mad, il nous vient le courage d’insulter et d’allumer ces guignols… C’est triste et affligeant, mais ô combien plaisant.

Écrit par David Despont et Vince McStein (texte), Robert Johanson (dessin)

Commentaires Facebook

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.