Bundesliga 2009-2010 : bilan, partie I

Entre la fin des championnats indigènes et le début des présentations de la Coupe du Monde, on a juste le temps de glisser quelques bilans sur une saison de Bundesliga qui s’est une nouvelle fois affirmée comme le championnat le plus passionnant et le plus populaire d’Europe. On commence par les cancres.

Hertha BSC Berlin (18e, 24 points, relégué)

Quatrième après avoir lutté pour le titre et la Ligue des Champions jusqu’à l’ultime journée l’an dernier, lanterne route et relégué douze mois plus tard, le Hertha Berlin constitue bien évidemment le gros flop de cette saison. Les explications à cette descente aux enfers sont multiples : premièrement, la Bundesliga est sans doute le championnat le plus dense d’Europe avec une hiérarchie extrêmement mouvante d’une saison à l’autre ; deuxièmement, l’été dernier, l’Alte Dame a laissé filer trois joueurs clés (Pantelic, Voronin et Simunic) sans les remplacer ; troisièmement, la dynamique positive de 2008-2009 a été remplacée par une spirale négative : la réussite insolente de la saison dernière a cédé la place à une noire malchance (erreurs d’arbitrages, tirs sur les montants, buts encaissés dans les dernières minutes, défaites par un but d’écart…) ; quatrièmement, le remplacement du manager Dieter Hoeness par Michael Preetz.
Reste ensuite la grande question dont on ne connaîtra jamais la réponse : que serait-il advenu du Hertha s’il n’avait pas limogé prématurément Lucien Favre au soir de la 7e journée ? Pour avoir assisté au dernier match de l’ère Lulu au Hertha, une défaite 5-1 à Hoffenheim, le mal semblait profond et le ressort cassé. D’un autre côté, son successeur Friedhelm Funkel s’est montré incapable de redresser la barre avant la fin du 1er tour, conclu sur un total record (négatif) de six points. La deuxième moitié de saison a été meilleure, il y a eu quelques belles victoires à l’extérieur mais l’incapacité des Berlinois à remporter la moindre victoire à domicile (en dehors d’un succès contre Hanovre lors de la 1ère journée) a ruiné leurs derniers espoirs de maintien.
Top-Spieler : Jaroslav Drobny
Lucien Favre était très sceptique lorsqu’il avait débarqué de Bochum à l’été 2008 mais Jaroslav Drobny s’est affirmé comme l’un des tous bons gardiens de Bundesliga. C’est l’un des rares Berlinois à avoir tenu son rang cette saison, le seul qui a échappé au courroux des supporters après la relégation. Sa blessure en début de saison et les facéties de ses remplaçants ont d’ailleurs précipité le début de la descente aux enfers de l’Alte Dame qu’il ne suivra pas en Zweite Liga.
Flop-Manager : Michael Preetz
On aurait pu mettre presque toute l’équipe berlinoise dans les flops, alors sélectionnons celui qui a mis en place cette équipe. Après avoir intrigué au printemps dernier pour prendre la place du manager Dieter Hoeness, Michael Preetz a livré une campagne de transfert calamiteuse. Comment peut-on sérieusement espérer remplacer Pantelic et Voronin par Wichniarek et Ramos ? En outre, sa volonté d’assister aux matchs depuis le banc et de brailler des consignes a dû prodigieusement agacer Lucien Favre et déstabiliser l’équipe. A Noël, Michael Preetz s’est montré incapable de donner le signal fort qui aurait pu permettre à l’Alte Dame de redresser une situation compromise, se contentant d’aller chercher quelques has been comme Gekas ou Kobiashvili, remplaçants dans leur club. Le pire, c’est que le principal responsable de ce fiasco va survivre à la chute, c’est dire si le Wiederaufstieg n’est pas encore gagné.


 

La révélation : Fabian Lustenberger

C’était pas évident de trouver une révélation dans ce Hertha 09-10, alors on va la jouer un peu chauvin : trop souvent blessé, Fabian Lustenberger n’avait  que peu joué lors de la formidable épopée berlinois en 2008-2009. Cette saison, il s’est imposé comme un titulaire indiscutable à mi-terrain. Impeccable sur le plan défensif, on a l’impression qu’il a le potentiel pour apporter davantage offensivement dans un contexte plus serein que ce Hertha déliquescent. En tous les cas, il mériterait de retrouver de l’embauche en première division.

VfL Bochum (17e, 28 points, relégué)

C’était décidemment une saison noire pour les Unabsteigbaren : à l’instar d’Aarau en Suisse, les irrelégables du VfL Bochum sont tombés ! Là, je suis plus catégorique qu’avec Lucien Favre : le club de la Ruhr a fait une erreur monumentale en limogeant son entraîneur Marcel Koller après seulement six journées. La situation était loin d’être désespérée et le Suisse avait prouvé lors des saisons précédentes qu’il pouvait réussir des miracles avec des moyens modestes. Ses successeurs Heinemann, Herrlich puis Wosz ne feront pas mieux que lui. Habituellement, Bochum flirtait avec la relégation durant toute la saison mais se montrait irrésistible dans les dernières journées pour assurer son maintien. Là c’est tout le contraire qui s’est produit, le légendaire instinct de survie des Bochumer avait disparu puisque le club, qui avait pris ses distances avec la barre en début de 2e tour, s’est montré incapable de remporter la moindre victoire lors des 12 dernières journées, notamment trahi par la saison décevante des leaders supposés de l’équipe (Sestak, Epallé, Hashemian, Klimowicz, Freier…). Le VfL aurait pu se sauver sur l’ultime journée avec un duel à la vie à la mort contre Hanovre mais il s’est décomposé après avoir encaissé le premier but (au final 0-3). Ce Bochum 2009-2010 n’était définitivement pas unabsteigbar !
Top-Spieler : Christian Fuchs
Si tous les Bochumer avaient fait preuve de la même volonté et la même rage de vaincre que Christian Fuchs, le VfL n’en serait pas là. Ce n’est peut-être pas le joueur le plus élégant de la ligue mais son activité inlassable dans son couloir et la remarquable qualité de son pied gauche sur balles arrêtées en ont fait un des leaders de cette équipe de Bochum. L’international autrichien devrait pouvoir rebondir ailleurs après la chute.

Flop-Spieler : Joël Epallé
Joël Epallé devait être l’animateur du milieu de terrain bochumois mais, comme tant d’autres leaders supposés de l’équipe, il a livré une saison complètement transparente. Le Camerounais n’aura jamais confirmé les espoirs qu’avaient suscités ses débuts tonitruants en Bundesliga en 2007. A 32 ans, il paraît proche de la sortie.
La révélation : Philipp Heerwagen
Depuis le départ de Jaroslav Drobny à Berlin, Bochum a pas mal tâtonné pour retrouver un gardien titulaire. C’est finalement dans ses propres rangs qu’il l’a trouvé : ancien troisième portier du club, Philipp Heerwagen s’est affirmé, à 27 ans, comme un titulaire relativement fiable. Ce n’est peut-être pas le futur gardien de l’équipe d’Allemagne mais il a réussi une saison tout à fait honorable et ne peut être tenu pour responsable des déboires du VfL.

1. FC Nürnberg (16e, 31 points, sauvé en barrage)

Comme l’an dernier, c’est en barrage que Nuremberg a gagné sa place en Bundesliga : promu l’an passé au détriment de Cottbus, der Club a cette fois sauvé sa place contre le prétendant de 2. Liga, Augsburg (1-0 à l’aller à Nuremberg, 2-0 au retour à Augsburg). Une issue heureuse pour une saison bien compliquée. On savait l’effectif franconien limité mais pas plus que celui d’autres clubs. Mais le jeune entraîneur Michael Oenning n’est jamais parvenu à donner à son équipe une solide assise défensive, ce qui lui coûtera sa place à Noël. On n’est pas persuadé que son successeur Dieter Hecking, viré peu auparavant à Hanovre, était vraiment le meilleur choix possible, il est toutefois parvenu à obtenir le maintien. Mais que ce fut laborieux : il semblait pourtant en début de 2e tour que, renforcé par le prêt des Munichois Ottl et Breno, Nuremberg avait les moyens de se sortir de la gonfle. Mais la blessure de Breno a tout remis en cause et der Club a tremblé jusqu’au bout. La grande chance des Bavarois, c’est d’être tombé sur un Cologne démobilisé lors de la dernière journée, ce qui leur a permis d’arracher leur place en barrage, avec l’issue que l’on sait.
Top-Spieler : Raphael Schäfer
Héros et capitaine lors de la victoire de Nuremberg en Coupe d’Allemagne 2007, le gardien Raphael Schäfer avait ensuite tenté une expérience malheureuse à Stuttgart. Il est revenu à Nuremberg pour fêter la promotion l’an dernier et a enchaîné avec une grosse saison pour le retour du Club dans l’élite. Après quelques hésitations en début de saison, il s’est affirmé comme le leader de son équipe qu’il a sauvée à de nombreuses reprises, notamment lors d’un 1-1 homérique contre le Bayern où il avait dégouté les stars bavaroises. Il terminera sa saison en beauté avec un double blanchissage lors du barrage décisif contre Augsburg.
Flop-Spieler : Daniel Gygax
L’an dernier, après une saison compliquée, Daniel Gygax s’était révélé comme l’un des héros de la promotion. Il connaîtra un destin inverse en 2009-2010 : blessé en début de championnat, il a marqué pour son premier match de la saison, contre le Hertha. Mais ce n’était qu’un feu de paille, DJ Dani Gygax sera rapidement relégué sur le banc, puis dans les tribunes, avec seulement trois apparitions au 2e tour. C’est donc par la petite porte qu’il quitte l’Allemagne pour Lucerne. Ce sera plus pratique pour aller mixer à Zurich.
La révélation : Albert Bunjaku
Albert Bunjaku n’avait joué qu’un rôle de joker au printemps dernier lors de la promotion de Nuremberg. En revanche, en Bundesliga, les performances décevantes des Mintal, Eigler et autres Boakye lui permettront d’avoir une chance qu’il saura parfaitement saisir : un premier but pour son premier match de Bundesliga à Francfort, un doublé contre Berlin pour sa troisième titularisation et au final douze buts marqués, dont un triplé retentissant contre Hanovre, c’est pas mal pour un joueur qui évoluait encore en Dritte Liga il y a 18 mois. Sa fin de saison sera plus délicate (avec notamment un penalty raté en barrage contre Augsburg qui aurait pu avoir des conséquences dramatiques), ce qui le privera d’Afrique du Sud avec la Nati.

Hannover 96 (15e, 33 points)

Hannover a vécu une saison cauchemardesque. C’était déjà mal parti après un championnat 2008-2009 raté  et un entraîneur contesté, Dieter Hecking, qui ne tiendra pas longtemps. Au moment où son successeur Andreas Bergmann semblait redresser la situation, il y a eu le tragique suicide du capitaine et gardien Robert Enke, plongeant le club dans une profonde dépression. Les défaites s’enchaînent, l’entraîneur Bergmann est viré mais son successeur Mirko Slomka débute son mandat avec six défaites sur un goal average de 4-16, ça c’est du choc psychologique ! Et pourtant, 96 s’était justement adjoint les services d’un psychologue pour faire la théorie… Dès lors, malgré un effectif qui aurait dû lui permettre de jouer le milieu de tableau, Hanovre semblait s’enfoncer inexorablement vers la chute. Toutefois, Slomka trouvera les moyens d’enfin stabiliser sa défense, il y aura quelques rechutes (une défaite 7-0 à Munich) mais un succès 4-2 contre son ancien club de Schalke lors de la 31e  journée permettra à l’entraîneur d’Hanovre de redonner confiance à son équipe. Deux victoires 6-1 contre Gladbach et 3-0 à Bochum lors des deux dernières journées permettront aux Bas-Saxons d’éviter la relégation et le barrage, un happy end presque inespéré au vu des difficultés rencontrées pendant la quasi-totalité du championnat.
Top-Spieler : Dider Ya Konan
Didier Ya Konan ne partait pas franchement titulaire dans le riche contingent offensif d’Hanovre. Mais, malgré une certaine propension à vendanger les occasions, l’Ivoirien s’est affirmé comme le leader de l’attaque de 96 et le seul attaquant à pouvoir régulièrement scorer. Sa non-sélection pour la Coupe du Monde avec la Côte d’Ivoire constitue une relative surprise.

Flop-Spieler : Jan Schlaudraff
Décidemment, Jan Schlaudraff ne parvient pas à rebondir après son échec au Bayern en 2007-2008. Considéré comme l’un des plus grands talents du foot allemand, l’attaquant d’Hanovre a traversé une nouvelle saison entre vagues à l’âme, blessures et séjours sur le banc. C’est sûr que le contexte dépressif entourant le club et la pression de la lutte contre la relégation ne sont guère favorables à l’épanouissement d’un joueur réputé instable. Ses rares apparitions n’ont en tous les cas pas incité les divers entraîneurs qui sont succédés sur le banc de 96 à lui donner plus de temps de jeu.
La révélation : Manuel Schmiedebach
Longtemps cantonné sur le banc, le jeune Manuel Schmiedebach (21 ans) a eu sa chance avec l’arrivée de Mirko Slomka, qui a un peu fait tourner tout son contingent pour trouver des solutions. Manuel Schmiedebach a su saisir sa chance, malgré un contexte pas franchement évident pour débuter dans l’élite. Avec deux assists lors de la victoire capitale contre Schalke et un autre lors du succès final à Bochum, il restera même comme l’un des héros du maintien. De quoi entrevoir une place de titulaire pour la saison prochaine.

SC Freiburg (14e, 35 points)

Le maintien de SC Freiburg tient du miracle, tant l’effectif était celui d’une bonne équipe de deuxième division, sans plus. Après avoir surfé sur l’euphorie de la promotion en début de saison, les Breisgauer semblaient rattrapés par les limites criardes du contingent et glisser irrémédiablement vers un retour immédiat en Zweita Liga avec une série de douze matchs sans victoire, dont des défaites à domicile consternantes contre Berlin (0-3) ou Hanovre (1-2). Les dirigeants fribourgeois ont toutefois eu l’intelligence de toujours maintenir la confiance dans leur entraîneur (non, on ne parle pas de Gottéron, le SC Freiburg lui n’avait pas annoncé qu’il allait devenir champion d’Allemagne), conscients du fait que Robin Dutt faisait le maximum avec le contingent à disposition. Et effectivement, Robin Dutt a confirmé sa réputation de faiseur de miracles en parvenant à redresser la barre et à remporter les matchs clés qu’il fallait pour, luxe inouï, assurer le maintien lors de l’avant-dernière journée déjà. Il y aura donc encore de la Bundesliga aux portes de la Suisse la saison prochaine, franchement en mars je n’aurai pas parié un Deutsche Mark, fût-il périmé (quoique…), là-dessus.

Top-Spieler : Simon Pouplin
C’est un peu comme Martin Gerber lorsqu’il jouait à Langnau : jouer derrière une défense passoire peut permettre à un gardien de se révéler. Si Freiburg n’a pas complètement sombré, il le doit en partie à Simon Pouplin. Evidemment, sur le nombre astronomique de tirs adressés en sa direction, le gardien français en a laissé passer quelques uns qui n’étaient pas imparables mais il en a sauvé tellement d’autres qu’on lui pardonnera bien volontiers. Si la Bundesliga n’était pas largement sous-évaluée en France, il aurait sa place dans le cadre tricolore pour l’Afrique du Sud. A la limite, tant mieux, ça nous donnera quelques moments de franche rigolade si Steve Mandanda doit jouer.
Flop-Spieler : Cha Du-Ri
Cha-Du Ri ne laissera pas la même empreinte en Allemagne que son père Cha Bum-Kun, cinquième buteur étranger de l’histoire de la Bundesliga derrière Pizarro, Elber, Ailton et Chapuisat. Arrivé de Koblenz en début de saison, Cha-Du Ri, ancien attaquant reconverti en latéral, n’a guère brillé par sa rigueur, inscrivant même l’un des autogoals gags de la saison contre le Bayern. Il finira par perdre sa place de titulaire et ne participera pas au sauvetage de fin de saison de ses coéquipiers.
La révélation : Felix Bastians
Après un passage très discret à Young Boys où il n’était jamais parvenu à glaner une place de titulaire, Felix Bastians va en revanche immédiatement s’imposer en Breisgau. D’abord comme défenseur central puis comme latéral. Il participera aux 34 matchs de la saison, dont 32 dans leur intégralité, c’est plutôt pas mal pour un gars qui ne jouait pas en Suisse. Et ça démontre également à quel point le maintien de Freiburg tient du miracle.

Écrit par Julien Mouquin

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