Une sensation nommée Cesena

«Le Milan n’a pas mal joué hier soir et j’ai vu trois goals qui n’étaient pas hors-jeu. Il faut donc dire que très souvent le Milan butte contre des arbitres de gauche». Telle est l’analyse ironique du match faite par Silvio Berlusconi (de très mauvais goût vu le contexte politique en Italie, me souffle-t-on).

Certes qu’après 734 ralentis – intercalés de gros plans sur les jambes et les décolletés des plantureuses présentatrices de Sky et MediasetPremium – ces deux buts annulés (le 3ème étant une pure invention de campagne pré-électorale) ont fait discuter certains du côté de la Piazza del Duomo, ou hurler d’autres comme Adriano «Oncle Fester» Galliani (administrateur délégué des Rossoneri) losqu’il s’adresse «poliment» au désignateur arbitral assis à 5 mètres dans la tribune d’honneur. Mais après une double promotion de la Serie C à la Serie A en deux ans et après sa performance de la première journée (0-0 à l’extérieur contre la Roma), ce nouvel exploit du petit poucet Cesena est à saluer au même titre que la qualification lausannoise en Europa League. Un chiffre, un seul qui symbolise cet exploit : 9. En millions d’euros, c’est le salaire annuel d’Ibrahimovic, plus que le salaire total de tout l’effectif des bianconeri de Cesena (8,3 millions). Cesena c’est non seulement le nouveau club de notre Steve Von Bergen national, mais c’est aussi le joli – et c’est trop rare en Italie – Stade Dino Manuzzi qui retrouve la Serie A 19 ans après l’avoir quittée, ses 23’860 places, ses tifosi et leurs chants durant toute la rencontre.

Coup d’envoi. D’un côté le trio des merveilles, Ibra-Dinho-Pato. De l’autre ? Euh… on vous laisse vous renseigner sur Wikipedia à vos heures perdues. Une première demi-heure de jeu presque toute à l’avantage des Milanais : une frappe de Ronaldinho d’abord (7e), une tête de Thiago Silva ensuite (11e), une main involontaire (et non sifflée) du défenseur japonais Nagatomo dans les 16 mètres sur un centre d’Ibracadabra (17ème), un goal de Pato annulé pour un hors-jeu millimétrique, un tir mal-cadré toujours de Pato et un centre mal repris par «Taekwondo» Zlatan. Et le Cesena dans tout ça ? Une tête de Bogdani à la 12ème sur corner. Soudain, à la 31ème minute de jeu, LE schéma : Giaccherini légèrement sur la gauche se joue du dinosaure Gattuso et passe sur la droite pour Ceccarelli qui, tout seul, contrôle et remise au centre pour la tête d’Erjon Bogdani et c’est 1-0!
Puis le match ralentit quelque peu, mais à la 44ème, action de rupture rondement menée par Ceccarelli dans son couloir droit, qui remet dans l’axe à 35 mètres pour Giaccherini en pleine course qui pousse son ballon une fois, arrive à l’orée de la surface de réparation, décoche un tir croisé ras-terre du pied gauche, le ballon ricoche sur le poteau et termine sa course dans les filets rossoneri : goal goal goal ! Et c’est 2-0 pour le Cesena dans un Stadio Manuzzi proche de l’explosion (sauf – et c’est dommage pour les héros du jour – la curva derrière la cage d’Abbiati occupée par les tifosi du Diavolo).
Après le thé, tout de suite un second goal annulé à Pato pour un contrôle de la main (52e). Alors Allegri, à la recherche d’un retournement de vapeur, fait rentrer Robinho pour Ronaldinho et Inzaghi pour Gattuso. Mais à part un tir à distance d’Ibrahimovic et une jolie action de Pippo Inzaghi, c’est surtout le Cesena qui est proche d’aggraver le score par Parolo (66e), Colucci (82e), Giaccherini (83e) et encore Colucci (84e). A la 86ème minute, l’habituel pénalty généreusement offert aux rich… euh pardon, aux grandes équipes est conquis par ce renard de Inzaghi mais galvaudé par Ibra qui centre le poteau. Coup de sifflet final et, après 2 matches contre les ténors du Calcio, le Cesena se retrouve là où personne ne l’attendait !

Il est bien sûr trop tôt pour juger ce Milan à la sauce Ibrazilhovic car après les réglages d’usage ça devrait faire mal là-devant. Mais ni les arrivées cosmétiques du magicien Zlatan et de Robinho, ni les bonnes blagues de Silvio-le-Clown ne masqueront la dure réalité aux électeurs du Cavaliere : le nouvel entraîneur des rossoneri, Massimiliano Allegri, va avoir du pain sur la planche s’il entend trouver un peu de solidité au jeu de son équipe, avec l’amicale des pré-retraités au milieu du terrain et une défense aussi expérimentale qu’hétéroclite. Cependant, ce n’est pas le Milan qui a perdu mais bien les bianconeri de Cesena qui ont gagné. Gagné avec une défense encore inviolée, aux mains de l’expertissime Antonioli (41 ans aujourd’hui, 2ème saison au club). Gagné avec de nombreux éléments du groupe de la double promotion : Ceccarelli, Parolo, Giaccherini et Schelotto (très intéressant M21 italien), tous titulaires et tous novices en Serie A. Gagné avec notre Steve Von Bergen national qui s’est tout de suite imposé comme titulaire et ça c’est une bonne nouvelle pour Ottmar Hitzfeld. Évidemment la chaloupe du Cesena – qui a un hippocampe pour symbole et ça tombe bien – va devoir affronter plus d’une tempête pour gagner son maintien, mais lorsque l’on met en échec coup sur coup Oracle et Alinghi avec un pédalo loué devant le Château d’Ouchy, il y a de quoi avoir le moral au beau fixe avant d’affronter les quarantièmes rugissants et les cinquantièmes hurlants !
Photos copyright www.cesenacalcio.it

Écrit par Mirko Martino

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8 Commentaires

  1. vivement ton prochain article cher Mirko « Savini » Martino!!! (zut, je suis démasqué!!!). Je sens ton envie de faire le déplacement jusqu’à Cesena à la fin du mois pour le match contre Napoli

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