Un petit tour du côté de la Championship

La troisième journée de Championship voyait s’affronter deux néo-promus : Leeds United et Millwall FC. Avec une rivalité née ces dernières années dans le haut du classement de League One et des supporters chauds bouillants, c’était une excellente opportunité de se plonger dans la deuxième division anglaise qui remplit les stades chaque week-end.

Le match étant décrété «à risque» par la fédération, le coup d’envoi était programmé samedi à 12h30, soit une heure et demie seulement après l’ouverture de la plupart des pubs. Selon une rumeur persistante, Jean-François Develey aurait appelé deux jours auparavant pour déplacer le match à 14 heures afin qu’il puisse terminer sa sieste, mais apparemment sa requête a été refusée. C’est donc aux aurores que je me suis levé pour prendre le train en direction de Leeds, le burger et les pintes d’avant-match sont remplacés à la gare par un sandwich œufs-lard et un café. Un concept que n’auront pas compris et appliqué toutes les personnes croisées au stade.

Football Factory

La rivalité entre les deux clubs s’est accentuée la saison passée dans la bataille pour la promotion. Les forces de l’ordre ont déployé un dispositif en conséquence et les abords du stade ressemblent à  la rue du Rhône pendant le G8, les chevaux de la police montée en plus. Il faut dire que les supporters de Millwall n’ont pas la meilleure réputation qui existe. Le club de la banlieue sud de Londres, là où le métro et les touristes ne vont pas, est associé au hooliganisme des années huitante et nonante et les supporters seront même médiatisés dans le film Football Factory, qui les met aux prises des «fans» de Chelsea. Leur dernier fait d’arme remonte à l’été passé et aux affrontements avec les voisins de West Ham en Coupe, faisant quelques blessés. Les cars de supporters arrivent au stade sous escorte et c’est au travers d’un couloir formé par la police que les Londoniens rejoignent la tribune sous les chants et les huées d’une foule impressionnante. Finalement, tout se passe dans une ambiance bon enfant.

Un peu d’histoire

Sportivement, les deux équipes ont un passé différent. Du côté de Leeds, un habitué de la Premiership, le club a fêté trois titres de champion d’Angleterre, deux dans les années soixante et le troisième et dernier en 91-92. Je commençais à m’intéresser au foot hors de nos frontières et il y avait encore en première division des clubs historiques comme Sheffield Wednesday (troisième cette saison-là), Nottingham Forest, Crystal Palace, Wimbledon ou Notts County. Dans ses rangs lors du titre : Gary McAllister, Gordon Strachan et Eric Cantona pour les plus connus. Avec un mécène à sa tête, Leeds sera une des toutes bonnes équipes anglaises du début des années 2000 avec notamment une demi-finale de Ligue des Champions en 2001 perdue contre Valence. Le club avait acheté des stars comme Mark Viduka, Robbie Keane, Harry Kewell ou Rio Ferdinand. Une année plus tôt, ils s’étaient déjà inclinés en demi-finale de la Coupe UEFA cette fois, dans le match tristement célèbre contre Galatassaray qui avait vu deux supporters de Leeds poignardés à Istanbul. Vivant au-dessus de ses moyens, la descente aux enfers suivra peu de temps après ; Leeds United sera relégué en League One en 2007 ayant subi deux années de suite des retraits de points dus à la dette du club.

Le Millwall Football Club, un des plus vieux clubs d’Angleterre, n’a lui connu que deux saisons au plus haut niveau, mais le souvenir de la promotion en 1988 est encore dans toutes les mémoires des plus anciens fans. Le duo d’attaque composé de Teddy «but dans le temps additionnel» Sheringham et de Tony Cascarino avait fait les malheurs des défenses de Championship. Le dernier moment de gloire remonte à 2004 avec une finale de FA Cup perdue contre Manchester United et une élimination au deuxième tour de la Coupe UEFA contre les Hongrois de Ferencvaros l’année suivante. Millwall FC peut être facilement comparé à Yverdon ; il vit dans l’ombre de ses voisins plus prestigieux, son président est légèrement mégalomane et se promener dans les quartiers sud à une heure avancée de la nuit ressemble à squatter la place de la gare à 2h du matin. Cependant, une différence de taille : le club, issu de la classe ouvrière de Londres, a toujours été populaire et l’affluence en League One était incroyable, plusieurs matchs étant joués proches du guichets fermés dans un stade de vingt mille places. La promotion a été acquise à Wembley au mois de mai dernier devant 73’000 personnes. Un chiffre qui donne le vertige, quand on sait que pour la promotion en Challenge League, il y avait 2’960 personnes à la Blancherie lors de la finale contre YF Juventus.

Quand Elland Road s’enflamme

Malgré le fait que Millwall est premier après deux journées de championnat avec un goal-average impressionnant de sept buts marqués pour aucun encaissé, les fans de Leeds semblent confiants. Leeds n’a qu’un petit point, ramené de son déplacement à Nottingham Forest la semaine passée, mais la prestation de l’équipe a été excellente et elle aurait mérité mieux. Bien que la partie supérieure de la tribune principale soit fermée, le match se joue devant vingt-cinq mille personnes et je ne suis pas déçu par l’ambiance ; les chants partent des trois côtés du stade et sont repris à l’unisson. Les Whites prennent le jeu à leur compte en début de partie, mais leur capitaine Naylor refroidit tout le stade à la quinzième minute en propulsant un long centre en cloche dans sa propre lucarne. Kasper Schmeichel, fils de qui vous savez et nouvelle recrue du club, ne peut que regarder passer le ballon dans ses filets. Après ce coup du sort, Leeds se rue à l’attaque pour tenter de refaire son retard et assiège son adversaire pour le reste de la mi-temps. C’est Morgarten pour la défense londonienne, qui à l’instar des Habsbourgs, va craquer une première fois à la 32ème sur une énième action chaude, par le remuant Sam. Avant et après ce goal, je compte deux poteaux, deux sauvetages sur la ligne, un miracle du gardien et trois tentatives qui ont frôlé le but de Millwall. J’ai dû rester assis sur mon siège environ une dizaine de minutes en tout et pour tout durant cette mi-temps d’anthologie.
Curieusement, Leeds tempère ses ardeurs en début de deuxième et le match est plus équilibré. L’entraineur de Millwall a modifié et renforcé son milieu de terrain et Leeds mettra plus de temps pour déjouer leur tactique. Le meilleur buteur de la saison passée, Beckford, qui avait terrassé Manchester United en Coupe en marquant deux buts à Old Trafford, est parti à Everton et son absence se fait sentir à la pointe de l’attaque. C’est alors que Somma, buteur sud-africain, fait ses débuts pour United à la septante-cinquième minute et va faire exploser le stade quatre minutes plus tard sur un cafouillage. Il marque en fin de match et sur contre son deuxième but personnel, donnant au score une allure plus proche de la réalité du terrain.

Au vu de mon dernier pronostic, soit une victoire d’Aston Villa sur le terrain de Newcastle (résultat : victoire de Newcastle 6 à 0), je me garderais bien de prédire quoi que ce soit pour ces deux équipes dans un championnat toujours difficile à évaluer. Mais cette jeune équipe de Leeds a présenté un excellent football offensif et va clairement mériter un soutien en nombre à Elland Road cette saison.

Leeds United – Millwall FC 3-1 (1-1)

Elland Road, 25’067 spectateurs.
Arbitre : Colin Webster (qui prouve que le physique ne fait pas tout et que l’amour de la bière peut être amie avec un arbitrage professionnel compétent)
Buts : 15e Naylor, csc 0-1, 32e Sam 1-1, 79e Somma 2-1, 94e Somma 3-1.
Leeds United : Schmeichel; Connolly, Collins, Naylor, Bessone (Somma75e) ; Kilkenny, Sam (Hugues 91e), Howson, Johnson ; Becchio, Watt.
Millwall FC : Forde; Dunne, Robinson, Barron, Ward; Trotter, Schofield, Henry, Abdou, Morison; Lisbie (56e Carter).
Man of the match : Somma.

Écrit par Ludovic Schmutz

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10 Commentaires

  1. Très bien de nous parler de la Championship! Ce championnat mérite certainement le titre de 2e division la plus relevée du monde, et en plus on y croise des clubs mythiques comme Millwall, Leeds, Forest ou encore Sheffield. Niveau ambiance, ça a l’air bien plus tripant que la Premier League. A côté de ça, Bolton-Wigan, c’est la misère… C’est pour ça que des clubs de traditions comme le LUFC ou Forrest doivent à tout prix remonter en Premier League. Quoique bon, celle-ci et ses prix exorbitants a déjà tué les chants d’Old Trafford ou de bons nombres de stades (je ne parle pas de Stoke City hein…).
    Allez, parions sur un petit QPR, Leeds et Forrest comme podium final pis bon ben pour quoi pas Middlesborough en 4e place…

    PS: pas mal la vanne sur papy develet xP

  2. Merci !! J adore Leeds United, et ca fait plaisir d’en entendre parler sur un site comme cartonrouge!

    Je me réjouis de lire tes prochains articles sur le foot anglais, faut essayer de concurrencer Mouquin et sa Bundesliga!

  3. Merci pour ce brillant papier et un match que j’espère vire une fois mais plutôt au…Den.

    Par contre une petite erreur, Leeds a battu ManU 1-0 en FA Cup l’année passée donc Beckford n’a marqué « qu’un » seul but à OT.

  4. Merci de parler de ce championnat qui le mérite amplement! C’est dommage qu’il faille descendre les échelons pour pouvoir observer le VRAI foot anglais, celui du peuple. Tellement de gens ne connaissent du foot anglais que les très peu british Chelsea, Arsenal, ou Liverpool et ManUtd.

    Pour la montée je verrais Burnley, QPR (manque d’objectivité je l’avoue) et peut-être Ipswich Town ou Cardiff City.

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