Honduras longtemps (ou pas)

La «Bicolor» se trouve une nouvelle fois sur le chemin de la Suisse. L’occasion de s’apercevoir que l’équipe nationale du Honduras a progressé en quatre ans et ne se contentera cette fois pas d’un vieux 0-0. Car les Honduriens sont persuadés qu’ils feront tomber la France et, avec, les coéquipiers de Steve Von Bergen.

1) Pourquoi ai-je choisi de présenter ce pays ? Je n’ai aucunement choisi de présenter le Honduras, celui-ci m’a été imposé par notre dictateur de red’ en chef après un complot planétaire (comme d’hab quoi).  De mon côté, je voulais présenter le Costa Rica depuis que je suis devenu un fan invétéré d’Alvaro Saborio lorsqu’il allumait autant de fois le gradin nord de Tourbillon que les petites Valaisannes à peine sorti de la puberté. Mais le patron m’a alors dit que ma vénération envers «El Queutard de oro» ne ferait pas de moi quelqu’un d’objectif. Et au bout de quelques shots, il m’a donc convaincu à l’usure de présenter le Honduras
2) A quoi sert ce pays ?
Il sert à faire le nombre en Amérique central. Apparemment, lorsque Christophe Colomb, Napoléon et Jules Vernes ont débarqué ensemble là-bas, ils ne savaient pas quoi en foutre. Ils ont réussi à le refourguer à l’Espagne qui s’est permis de piller ses réserves d’or et de cuivre.
Puis les Espagnols ont essayé de le refiler au Portugal, à la France, au Danemark et au Nicaragua aussi, mais personne n’en voulait. Du coup, les types restés sur place se sont dits «bon bah,  on en fait une dictature ou bien ?» La dictature a disparu depuis, mais la pauvreté est restée.
Actuellement, même s’il permet de produire du café, des bananes, de la canne à sucre, tout en ramassant quelques cyclones et tremblements de terre sur la gueule, le Honduras est le pays le plus pauvre et le plus touché par le Sida en Amérique centrale. Avec son taux de criminalité parmi les plus élevés au monde, le pays est gangréné par les narcotrafiquants. Et pas ceux de la place Saint-François…
Mais mon ami Jean-Michel Routard dit que c’est joli à visiter, et qu’il y a des coraux encore pas bousillés et des forêts encore pas décharnées. Et que même Maya y a laissé des traces. Mais évite de la toucher par contre avec ces histoires de HIV.
Sinon footballistiquement, il sert à se foutre sur la gueule dans des stades défouloirs, car c’est plus marrant que dans la rue, et déclarer la guerre au Salvador (voir point 10). Mais également à rappeler à la Suisse qu’elle n’est qu’un petit pays du ballon rond, et à Derdiyok qu’il ferait mieux de se mettre au Scrabble (je ne sais pas pourquoi, je l’ai encore de travers ce vieux 0-0 en Afrique du Sud).

3) Comment se sont-ils qualifiés et surtout pourquoi ?
La zone CONCACAF est drôlement sexy, puisque tu sais qu’il y aura au moins une équipe exotique qui se qualifiera pour le Mondial aux côtés des «grands» USA et Mexique. Comme ces derniers ont fait les clowns et sont passés par les barrages cette année, on a du coup droit au combo Costa Rica – Honduras. Evidemment tout le monde voulait revoir la Jamaïque. Oui mais bon, on parle quand même de football, pas de bobsleigh, ni d’un autre sport de types qui courent en shorts shootés aux anabolisants.
Du coup, au troisième tour des qualifications, «Los Catrachos» (les castrés en espagnol… ah bon c’est pas cela) terminent deuxièmes de leur groupe derrière le Panama, mais devant l’équipe féminine du Canada (oui, là-bas, les gars font du hockey) pour un point. Ce qui leur permet de prendre part au tour final durant lequel ils se qualifient au petit trot au troisième rang avec 4 points d’avance sur le Mexique.
4) Pourquoi vont-ils gagner la Coupe du Monde ?
Car c’est une équipe redoutable et redoutée (enfin surtout par la Suisse). Il faut dire que le palmarès de la «Bicolor» inspire le respect. Une Concacaf (1981) et trois UNCAF (1993, 1995 et 2011). Et ce sont des trophées que ni l’Allemagne, ni l’Espagne, ni le Brésil n’ont remporté.
Les types sont donc en confiance. Ils clament partout qu’ils n’ont peur de personne. D’ailleurs, je les vois débuter par une victoire (3-0) contre une France qui jouait son premier match à 8 après la suspension interne de 15 joueurs tricolores qui se sont fait choper au détour d’un bordel transsexuel. Une sortie, paraît-il, orchestrée par Ribéry, Benzema et Griezmann à peine arrivés sur sol brésilien. Puis, ils géreront leur acquis avec deux matches nuls insipides (0-0) contre l’Equateur et la Suisse. Suffisant pour se qualifier à la deuxième place du groupe derrière l’Equateur.
En 8es de finale, en quarts et en demi-finales, ils jouent comme ils savent le faire. En mode catenaccio pour se qualifier à chaque fois aux pénos après des rencontres sans relief (0-0 évidemment) contre l’Argentine, la Belgique et l’Italie. Enfin, en finale, ils profiteront de la crise d’épilepsie de tous les joueurs brésiliens quelques heures avant le coup d’envoi. La Seleçao, ne voulant pas prendre le risque de se faire humilier sur son terrain, préfère déclarer forfait. Une victoire historique qui permet au pays de récolter des millions, de quadrupler le PIB et de sortir de la pauvreté en rachetant le Guatemala, Belize et une partie du Mexique.

5) Pourquoi vont-ils se faire éliminer au premier tour ?
Parce que Derdiyok et Nasri n’ont pas été sélectionnés. Parce qu’ils n’ont jamais gagné plus d’un point en Coupe du Monde en deux participations. Parce que même les médias du pays se foutent de leur gueule en les traitant de «pauvre équipe». Parce qu’ils n’ont pas Saborio. Parce qu’ils vont se prendre une tornade sur la gueule avant de partir au Brésil. Parce que c’est Platini et Blatter qui décident en collaboration étroite avec des centres de paris illégaux taïwanais.
6) Qui sont les joueurs à surveiller ?
Hormis, la colonie britannique composée de Peralta (Rangers), Izaguirre (Celtic), Figueroa (Hull), Garcia (Wigan), Espinoza (Wigan) et Palacios (Stoke), «Los Catrachos» comptent dans leur rang une jeune pépite au parcours atypique: Andy Najar (Anderlecht).
A 21 ans seulement, le jeune ailier s’est imposé comme titulaire indiscutable en quelques mois chez le nouveau champion de Belgique. Un gamin plein de volonté, qui a traversé le désert à 13 ans pour rejoindre les Etats-Unis à pied. Rien qu’avec cela, il a plus marché que Derdyiok a couru sur un terrain de football dans sa carrière. Et le petit dribbleur se réjouit d’ores et déjà d’avoir Patrice Levrat au marquage.
7) Qui sont les joueurs à ne pas surveiller, mais dont on peut éventuellement se moquer ?
Du gardien Noel Valladares. Du haut de ses 37 ans, c’est une légende au pays. Mais comme c’est un gardien ultra-reconnu, il fait les beaux jours du Real Comayagua. Une sorte de Jörg Stiel du pauvre avec les dégagements de Vailati et les réflexes de Zubi. Et dire que l’on n’a pas été foutu de lui en foutre un il y a quatre ans.
8) Une bonne raison de les supporter ?
Dans la plupart des interviews, ils ne pensent qu’à battre la France après avoir été traités de «misérables» dans un documentaire de Canal+. S’ils pouvaient nous aider, nous ne serions pas contre…

9) Une bonne raison de ne pas les supporter ?
…quoique, ils aiment bien nous emmerder aussi. Y vont pas nous refaire le coup d’il y a quatre ans. Sinon, tu vas voir quand on leur enverra notre armée et nos avions de chasse suédois superpuissants que l’on aura acquis finalement au rabais. Ils ne feront pas tant plus les malins. Surtout avec Nkufo et Derdyiok aux commandes.
10) Bon d’accord, mais sinon ?
Saviez-vous qu’une guerre avait mis aux prises le Honduras et son voisin Salvador dont l’une des causes majeures du conflit fut la dégénérescence d’un triple affrontement entre les deux pays dans le cadre des qualifications de la Coupe du Monde 70 ? Un conflit qui s’appelait la «Guerre du football»
Les prémices sont causées par une migration en masse de Salvadoriens au Honduras dès le début des années 50. Notamment d’agriculteurs en quête de terres. La cohabitation est alors difficile dans tous les secteurs d’activité. Les Honduriens avaient le sentiment de se faire piller. Du coup, les mouvements xénophobes augmentent au fil des années. Et les expulsions salvadoriennes deviennent courantes à la fin des années 60.
Au mois de juin 69, les deux pays se rencontrent dans un climat tendu en éliminatoires de la Coupe du Monde à Tegucigalpa, capitale du Honduras. Parano, l’équipe de Salvador se sent personnellement visée par des grèves qui touchaient le quartier où elle résidait. Elle n’a pu dormir la nuit, veille de la rencontre qu’elle perdit 1-0. Dépitée, une supportrice salvadorienne se tire une balle dans le cœur. Ses obsèques seront nationales, et le Salvador souhaite alors se venger. Au match retour, l’hôtel de la sélection du Honduras fut incendié et les joueurs ne purent non plus dormir. Les échauffourées sont nombreuses et deux supporters honduriens furent tués. Pour l’histoire, la victoire est finalement revenue 3-0 au Salvador. Un troisième match devait alors les départager.
Mais entretemps, les Honduriens ont voulu se faire justice au pays. Ils tuèrent à leur tour de nombreux Salvadoriens sans que le gouvernement ne pipe mot. Le match de barrage disputé au Mexique (3-2 pour Salvador) s’est terminé en émeutes et bain de sang à la suite de propagandes nationalistes proférées par les deux pays.
Dans les jours qui suivirent la rencontre, un avion salvadorien lâche alors une bombe sur Tegucigalpa, déclenchant alors cette fameuse «Guerre du football» qui dura 100 heures. Après quatre jours, le Salvador décidait toutefois de retirer ses troupes du Honduras après des pressions de l’Occident. De nombreux Salvadoriens quittèrent le Honduras après cette éphémère guerre qui aura coûté la vie à 3000 personnes.
C’est beau le football.

Écrit par Johan Tachet

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3 Commentaires

  1. Le rédacteur en chef de CR est fort de persuasion… Et son porte-monnaie à tournée est bien rempli.

    Serait-il possible d’avoir une autre intro pour les prochains articles?

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