Croche-Patte : le vilain petit panard

Encore plus nullissime qu’une production bollywoodienne, encore plus dérisoire que la mort de Marion Cotillard dans The Dark Knight Rises, les simulations des joueurs de football sont pourtant tacitement acceptées par tous les acteurs du ballon rond… qui reste bien le seul à ne pas tourner de travers d’ailleurs.

Le vulgus pecum ne vient voir un match de foot que dans l’optique de voir son équipe gagner. Notez que je pourrais écrire la même chose pour le hockey, le football américain, le catch ou tout autre débilité post-moderne à travers laquelle le cervelet du fan lui tient lieu de cortex pré-frontal ce qui laisse l’instinct grégaire s’exprimer dans toute sa splendeur. Aussi, entre deux saucisses et trois binches, lorsqu’il ne s’agite pas frénétiquement au même rythme que ses contemporains, tout en hurlant des slogans guerriers à la gloire d’autres primates sapés de telle sorte que le moins averti des stylistes n’oserait pas habiller son chien de la même manière, le vulgus pecum qui introduisait mon propos trouve toutes sortes d’excuses lorsque son équipe perd.
Je passerais comme chat sur braise sur l’inanité de certaines d’entre-elles, ne serait-ce que si par hasard l’hystérique me lit, la trop brusque mise en évidence de l’imbécillité de ses arguments pourrait le plonger dans un abîme de réflexions et serait susceptible de rétablir les quelques connections neuronales qui lui ont, momentanément, fait défaut. Lorsqu’on touche le fond en effet, il convient de respecter des paliers de décompression avant de revoir la lumière… C’est vital même !
Revenons à nos moutons. Heuuu à quelques-unes de ses excuses plutôt…
L’arbitre, le terrain trop grand, l’arbitre, les buts trop petits, la hauteur des brins d’herbe, l’arbitre, le froid ou le chaud, la pluie ou le soleil, la neige, l’arbitre, une erreur personnelle, le coaching, le goût de la bière, la taille de sa saucisse (celle sur le carton, à côté de la moutarde), l’arbitre, bref, s’il y a bien un domaine dans lequel l’imagination du fan de base ne fait pas défaut, c’est celui des explications à deux balles, des arguments à l’emporte-pièce et de la psychologie de comptoir.
A l’inverse, jamais je n’ai entendu mon ami le supporter râler la moindre lorsqu’il est témoin des crétineries de ses idoles. Et aujourd’hui, je ne parlerais que de celles commises dans les limites du terrain. Dans ce cadre, l’Europe unie n’est pas un vain mot : des plaines arides de Lusitanie à celles humides des Balkans, des steppes slaves à la pointe de la botte péninsulaire, du Bosphore aux Highlands, le joueur de football n’hésite pas une seconde lorsqu’il s’agit de montrer à la planète entière qu’entre deux gestes techniques d’un rare engouement, il est un comédien pathétique.

 

Ainsi, de Cesc Fàbregas à Emir Spahic, de Luis Suarez à Fabrizio Ravanelli, de Rivaldo à Alexis Sanchez, en passant par l’idole des adolescentes prépubères, le type qui n’a que l’émotion «faire la gueule» à son répertoire, Cristiano Ronaldo donc (CR7 jusqu’à samedi, Minipec depuis son exhibition en finale de la CL), on ne compte plus les auteurs de simulations grossières sur un terrain de foot (que les acteurs inconnus et néanmoins auteurs de très belles prestations veuillent bien excuser leur anonymat, mon ignorance des étoiles filantes de la chose footballistique et ma mémoire défaillante m’empêchent de les assurer du souvenir qu’ils ont laissé).
Au beau milieu de ce monticule malodorant, un accessit particulier au chilien Bryan Carrasco qui, au vu et au sus de tous, agrippe le bras de son adversaire pour se le balancer dans sa propre figure avant de se laisser tomber par terre, rouler sur lui-même et se relever aussi sec, tout en se tenant lamentablement le visage d’une main…
Ce type de comportement, que leurs auteurs savent pertinemment filmés et donc vus, reflète-t-il une incapacité congénitale à la réflexion ? Une absence de communications entre les hémisphères ? Ou un déficit synaptique peut-être, hormis les connexions relatives aux fonctions vitales (se branler, boire, chier) ? Que le fan éclairé, comme celui dont le filament donne des signes de fatigue, tolère ce genre de facéties sur un terrain n’est pas vraiment étonnant puisque comme je le disais en introduction, les deux viennent pour voir leur équipe gagner… alors si en plus «fo fer atension ala manière»…
Mais l’absence de réaction des entraîneurs et des dirigeants est un véritable laisser-passer distribué à tous les gosses de la planète : tricher bêtement pour gagner plus… Et ça me coûte de l’écrire, mais c’est des Etats-Unis que nous vient le vent de la révolte. Ce pays dont l’apport culturel sans commune mesure, du chewing-gum au Hamburger, de la guerre des étoiles à la bigoterie réinventée, de Bukowski à Truman Capote, de Louis Amstrong à Bruce Spingsteen, ce pays des extrêmes, dans lequel le basket fait rêver grands et petits du monde entier plus sûrement que les egos surdimensionnés qui gonflent leurs mini-pectos et foulent les terrains de foot de la vieille Europe, dans ce pays étoilé disais-je, les instances dirigeantes de la NBA ont amendé Lance Stephenson, joueur des Indiana Pacers parce qu’il a simulé pour obtenir une faute. Les images parlent d’elles-mêmes et sont plus qu’accablantes. Ce type s’est marqué au fer rouge plus sûrement que le premier esclave venu ! Soit, les 5’000 dollars qu’il devra payer sont aussi ridicules que les dénégations d’un Brady Dougan quelconque. Mais je rêve d’un monde où tous les charlots d’opérette se feront botter le cul à chacune de leur bouleversante comédie…

Écrit par Pascal Trépey

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3 Commentaires

  1. Tu as mis le doigt sur la plaie du foot mais pas sûr qu’elle cautérise un jour. J’adore ce sport et comme toi (et Martin) j’ai un rêve… qui risque pourtant de jouer longtemps au stade de l’Utopie, à guichets fermés.

  2. Excellent ! Punir sévèrement les tricheurs seraient une solution simple. Pas la seule, prévention devra être faite en parallèle (média, campagne).

  3. Bon début, dommage qu’on ne retrouve pas de solutions concrètes à apporter (même si cela ne sera jamais discuté dans aucune commission disciplinaire…) à part le cas de l’amende.

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