Les playoffs, enfin

Après une saison régulière conclue en queue de poisson, les Aigles voient se profiler une série contre Berne qui promet beaucoup.

La plaisanterie est terminée. Il était d’ailleurs temps, car elle tournait à la mauvaise farce. Jugez-en, rien que pour le match contre Zurich : des Servettiens qui mènent de deux buts sans trop forcer et résistent vaillamment à 3 contre 5 avant d’encaisser coup sur coup deux buts ridicules, Breitbach qui marque en contre, un sauvetage in extremis du même, Reto Berra élu meilleur joueur zurichois en dépit d’une performance schürchesque (bonne chance Arno) qui l’avait notamment vu encaisser un but en contre de Breitbach (je l’ai déjà dit ?), bref, le grand n’importe quoi. Fort heureusement, après une dernière défaite pour la forme à la Resega, il est enfin temps que les choses sérieuses (re)commencent.Tout cela, nous disait-on, servait un noble but. Il ne s’agissait là que des inconvénients, d’une idée de génie : le choix de l’adversaire en playoffs. On nous avait promis que ça allait assurer l’intérêt de la fin de saison, ce qui est pour le moins raté. Restait l’autre avantage de cette nouvelle formule, soit offrir des confrontations plus alléchantes en playoffs et ajouter un peu de piment. En effet, l’équipe ayant eu l’«honneur» d’être choisie plus tôt que prévu avait le droit d’être un peu vexée qu’on la prenne de haut comme ça devant tout le monde.

Caramba, encore raté !

On allait donc voir ce qu’on allait voir ce 20 février à Berne. Eh bien on a vu. Les dirigeants des clubs de pointe, sans doute refroidis par les événements en LNB, et plus particulièrement le cas Langenthal, évitaient au maximum le risque de passer pour des imbéciles a posteriori et s’en tenaient simplement à l’ordre du classement. Ça valait bien la peine…


Photo Pascal Muller

Toutefois, il y a deux raisons de ne pas trop s’en formaliser. Premièrement, ces tristes péripéties auront du mal à entamer le crédit de la Ligue, puisque cela fait bien longtemps qu’elle n’en a plus en matière de formules de championnat. Deuxièmement, si la forme s’est avérée décevante, l’adversaire destiné aux Genevois est particulièrement alléchant et promet une série explosive.

Kinder froh, und Erwachsene ebenso

Compte tenu de la pénible végétation du LHC à l’étage inférieur et de l’absence de réel antagonisme avec Fribourg-Gottéron, les supporters des Aigles n’ont plus qu’une seule véritable rivalité à se mettre sous la dent. Les rencontres face au CP Berne ne sauraient bien sûr constituer des derbies au sens propre du terme, faute de lien géographique. Mais les deux équipes, bien que ne boxant toujours pas dans la même catégorie, ont déjà eu deux fois l’occasion de croiser le fer en seconde partie de saison, et toujours de façon houleuse. Forcément, cela crée des liens. Et les matches opposant les deux équipes sont toujours particulièrement tendus, même en saison régulière.
Pas étonnant donc, que cette série ait déjà commencé à faire jaser avant même son début. Dans le genre, Berne a tout de suite pris une longueur d’avance, en recrutant le goon Nathan Perrott. Sur un plan purement hockeyistique, cette décision se comprend assez mal. Pratiquement dépourvu de qualités dans le jeu, le Canadien serait un poids mort s’il figurait sur la feuille de match, où les places dévolues aux étrangers sont limitées. Et on voit mal Berne se passer de Toni Söderholm ou d’Éric Landry pour un joueur qui ne servira qu’à venger une éventuelle agression genevoise. Il serait d’ailleurs assez paradoxal que Berne craigne tant les mauvais coups adverses alors que lors des précédentes séries, c’est plutôt lui qui a recouru à ce genre de méthodes expéditives. (Rolf Ziegler sur Dino Kessler en 2003 ou Rolf Schrepfer sur Oleg Petrov en 2004, par exemple.) La raison de cette embauche est plutôt à chercher du côté du marketing, voire pour créer un peu de spectacle au cas, fort peu probable au demeurant, où l’on s’ennuyât dans cette série.
Si le club de la capitale fait monter la sauce, les Aigles se la jouent étonnamment soft. Certes, un élément vient s’ajouter à l’hagiographie de Chris McSorley : la guérison miraculeuse des très très très graves blessures de Serge Aubin et de Thomas Déruns, que même Denis Vipret il est pas cap’. D’autre part, le gourou des Vernets a confirmé que ses matches de playoffs contre John van Boxmeer en AHL ont toujours été des «guerres». Mais tout semble au contraire dégager la sérénité, jusqu’aux vidéos du site officiel, censées créer l’ambiance. Sait-on qu’on n’a aucune chance ? Ou se réjouit-on plutôt du bon tour à jouer aux Ours ?


Photo Pascal Muller

En théorie, c’est la première hypothèse qui semble la plus séduisante. L’effectif genevois, mince comme du papier bible, souffrira sans doute de la moindre blessure ou suspension importante, alors que chez les Bernois, on aligne presque trois premières lignes. Chez les Grenat, on repose presque uniquement sur les joueurs étrangers. En face, les Christian Dubé, Patrick Bärtschi et autres Ivo Rüthemann font partie des tous meilleurs compteurs du pays. Marco Bührer possède une longue expérience en playoffs, quasi inexistante chez Gianluca Mona. Et bien sûr Berne a terminé la saison régulière à un petit point de la première place, avec une vingtaine de longueurs d’avance sur son futur adversaire. C’est à tel point que même quelqu’un d’aussi expérimenté que Klaus Zaugg s’y est laissé prendre.
Oui mais… La théorie oublie qu’avec un effectif au complet ou presque, la valeur de l’équipe du bout du lac est bien supérieure à la somme de celle de ses éléments, grâce à un esprit de corps impressionnant. Ou que McSorley bâtit ses équipes pour les playoffs, quitte à ce qu’elles en ratent la qualification, comme la saison dernière. Ou encore que Mona fut étincelant lors de sa seule apparition à ce stade de la compétition face à ces mêmes Bernois. Ou enfin qu’on ne donnait pas cher de la peau de Kloten la saison dernière.
Il est donc plus sage de s’attendre à une série serrée et acharnée, du moins tant que les Aigles pourront éviter les blessures. Pronostic de votre serviteur : 4-2 pour Berne.

Écrit par Yves Grasset

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