Les promesses non tenues du Président

J’ai une faiblesse, j’aime le miel. Profondément. Ainsi, petit garçon, ne pouvais-je m’empêcher d’empiler trois chaises, de les caler avec la queue du chat (qui n’avait qu’à pas être là) et de monter encore sur une boîte de biscuits afin d’aller piocher dans la réserve de ma grand-maman, un peu naïve de penser qu’un mouflet de 9 ans n’arriverait pas à aller chercher les pots cachés tout en haut de la plus grande armoire.

Ce qui devait arriver arriva bien évidemment, c’était un mercredi soir, mon échafaudage s’effondra et je me retrouvais le cul par terre, deux pots cassés sur le carrelage et le chat assommé. Je porte encore la cicatrice (morale, hein, faut pas exagérer) de la colère de ma grand-maman, elle si douce d’habitude (contrairement aux célèbres coups de canne de mon grand-père, mais ceci est une autre histoire). N’empêche qu’il ne m’a fallu qu’un bon sourire et, surtout, une phrase, pour la calmer : «Mais Grand-Maman, il est tellement bon ton miel et je t’aime tellement». Un peu gros, hein ? Ben pas du tout, ma grand-mère s’excusa, sécha mes larmes et m’accompagna à la cuisine. J’avais peut-être un peu honte au fond de moi-même, mais pour tout dire, je m’en foutais : j’avais mon miel.Pourquoi je vous raconte ça ? Allez, flashback et retour sur une journée particulière. Le 20 octobre 2003.
Le FC Sion est sauvé. Après des mois de négociations, procès, recours, séances de tribunal, M. Constantin a finalement eu «sa» licence. C’est la preuve qu’avec de l’envie (et seulement de l’envie ?), on arrive à avoir ce que l’on désire. Revenons donc en arrière lors de ces fameuses séances au Tribunal et surtout des déclarations de M. Constantin, alors interviewé par la TSR. L’architecte valaisan clamait à tous les vents que le FC Sion était un club formateur. Que l’effectif de ce club était jeune, que les joueurs représentaient l’avenir du foot suisse. «Il n’y a pas de célébrités dans ce club, seuls des jeunes joueurs qui en veulent, qui attendent impatiemment de jouer». Il fallait donc lui donner cette licence non seulement pour Monsieur le Président, mais pour le club, pour tout le Valais, pour la Romandie, pour la Suisse, pour la jeunesse, pour la faim dans le monde, pour le développement durable et pour la paix au Proche-Orient. Soit. Suite à la décision du Tribunal Cantonal (www.vs.ch/Press/DS_8/PUTC-2003-10-21-3725/fr/2tribunal_fr.pdf), le FC Sion de Christian Constantin pourra donc débuter sa saison marathon, marathon puisqu’elle compte 12 matches en retard, à rattraper bien sûr. Cette désormais fameuse saison 2003-04 débute donc un mercredi 29 octobre 2003, à Tourbillon face à Bulle. Les Sédunois l’emportent 1-0. La jeunesse suisse exulte.

Puis surprise (ou semi-surprise, c’est selon). En suivant avec grande attention les championnats de Super League et de Challenge League, ainsi que les matches à rattraper du FC Sion, je m’aperçois qu’au fil des mois, le FC Sion s’offre des joueurs comme Yvan Quentin (né en 1970), Didier Tholot (français né en 1964), Frédéric Chassot (1969), Francesco Di Jorio (1973) ou encore Mikhaïl Kavelashvili (géorgien né en 1971). Que de très grands joueurs, destinés à encadrer cette jeunesse triomphante. Bravo, M. Constantin ! Le fameux amalgame entre expérience et fougue, si souvent cité en exemple. Ces joueurs d’expérience vont pouvoir tirer cette troupe de jeunes louveteaux vers le haut et en faire le futur de la nation ! Et pourtant… Et pourtant, si l’on regarde l’effectif du FC Sion sur le site de l’ASF (football.ch), on peut constater que sur les 27 joueurs du contingent, seuls 12 joueurs possèdent le passeport à croix blanche. On peut également remarquer qu’en moyenne, les joueurs sont rentrés dans leur 27ème année.
Lors du match du FC Sion face à Winterthur du 21.02.2003, l’âge moyen sur le terrain est de 28 ans et 6 joueurs sont de nationalité civile suisse. Qui dit jeunesse la derrière ? Qui dit avenir du foot suisse ?  Entre les paroles et la réalité, il peut y avoir un petit écart, un chemin, un fossé, un gouffre, le grand canyon, ou pour rester dans le domaine du vide, les capacités intellectuelles de Frédéric Chassot (pardon). Le week-end suivant, le 28.02.2003 à Tourbillon face à Delémont, un petit coup d’oeil sur la composition d’équipe (en 3-5-2) suffit pour s’en rendre compte : le onze de départ comporte quatre Suisses : Ancay (23 ans), Felley (17 ans), Gelson Fernandes (17 ans) et Chassot (34 ans), accompagnés de 7 étrangers : Kaissi, Meoli, Perdichizzi, Berger, Aulanier, Tholot, Becanovic. Entrés en cours de jeu : Luiz Carlos, A. Leandro, Sirufo. Tous étrangers.
M. Constantin, elle est où la «formation» de nos jeunes suisses là dedans ? Certes vous pouvez me répondre que les lancements des jeunes prodiges suisses Gelson Fernandes (aujourd’hui à Manchester City) ou de Damien Felley, les deux alors âgés de seulement 17 ans, est extraordinaire ainsi que plus-que-réjouissant, mais si on regarde les Aulanier, Tholot, Chassot ou Becanovic qui nous donnent une moyenne d’âge de… passé 33 ans à eux quatre, je me donne le droit de me reposer la question : M. Constantin, auriez-vous menti dans le seul but d’apitoyer un peu le tribunal et de le manipuler ? Ah, j’y suis : il fallait travailler dans l’urgence, l’important c’est les trois points, l’objectif c’est le maintien, laissez-moi travailler à long terme. Bon. Attendons. Pas longtemps, M. Constantin, disons le temps de se stabiliser un peu, retrouver vos vertus de club formateur, soucieux de l’avenir du foot suisse. Ne niez pas, vous l’avez dit ! Les paroles s’envolent, les écrits restent, disaient les Latins et les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent, disait un certain Jacques C., président de la F. Certes. Bon, allez, bénéfice du doute, et aussi parce qu’on n’a pas que ça à foutre. Attendons. Disons… 4 ans ? Ça vous va ? Allez, 4 ans. Ça devrait être suffisant pour se stabiliser et tenir ses promesses, non ?


Obradovic, quel joueur !

Nous sommes le 23.08.2007.
Il y a deux semaines a eu lieu le derby romand en Super League ! Joie dans les chaumières. FC Sion – NE Xamax, à Tourbillon. Vous voulez la composition d’équipe ? Vailati, Kali, Chedli, Nwaneri Alioui, Beto, Bühler, Reset, Obradovic, Dominguez, Saborio
Résumons : au coup d’envoi, deux Suisses sur la pelouse, Vailati & Bühler (bien) accompagnés de 9 joueurs venus «d’autres cieux».
Entrés en cours de jeu : Bastien Geiger, à la 65ème minute. Puis Zakrzewski et Vanczak.
Trois Suisses ont foulé la pelouse, moyenne d’âge de l’équipe : 26 ans. Quatre ans plus tard, l’avenir du foot suisse peut toujours attendre sur M. Constantin. L’équation est simple : paroles + réalité = duperie. Tout est dit, le rideau peut se tirer. Il y a du spectacle à Tourbillon, il y a une magnifique équipe, il y a Goran Obradovic, quel joueur ! Tout cela est vrai. Le FC Sion est une magnifique équipe et Christian Constantin un sacré margoulin qui n’a pas hésité à mentir afin de manipuler un tribunal. Au fond, lui, il s’en fout, il a son miel. Il a bien raison. Ça ne m’empêchera pas de lui tirer les oreilles, mais au fond, comme ma défunte grand-mère, avec une certaine tendresse…

Toutes les photos copyright Pascal Muller


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Écrit par Bart & Tim

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17 Commentaires

  1. Il ny a pas quà Sion ce problème. Regarder à Neuchâtel Xamax. Cest pareil. Dans dautres gros clubs de SuperLeage, la même chose. Facile dattaquer toujours le même club.

  2. @ Thesmall
    Tes propos sont faux. Il y a des Suisses – et des jeunes ! – à Bâle, Zurich et Grasshopper. Peut-être un peu moins à Xamax, cest vrai, mais cest quand même à Sion où le problème semble le plus préoccupant… Dommage car cette équipe avait, à une époque pas si lointine, une tradition de formation et des joueurs valaisans ! Ce quon ne trouve plus forcément aujourdhui…

  3. Lanalyse est juste mais que propose-t-on à la place. La politique dAarau…Lucerne…Auxerre?

    Le foot est devenu un business global ou lorigine des joueurs importe peu. On peut le regretter très fortement mais aller à contre-courant mènera le foot suisse à une marginalisation encore plus importante.

    La solution: que les clubs suisses recoivent des fonds de la ligue Suisse de foot avec lobligation de linvestir dans un centre de formation. Quun pourcentage des transferts de joueurs formés au club soit alloué au centre de formation. Et quavant dinvestir dans la TV du FC Sion, on mette cet argent à la formation des jeunes joueurs suisses. En dernier lieu, il faut des présidents qui croient plus (par la parole et linvestissement) dans les joueurs suisses.

    Avec cela on pourra augmenter le quota de joueurs suisse à long terme….
    A court terme, on est foutu…

    et pourquoi toujours le FC Sion sur le banc des accusés ?

  4. Juste une précision sur larticle. Jaime pas trop Constantin non plus (il est où son stade promis ?), mais dire que Meoli est étranger, cest un peu modifier la vérité. Il doit être plus Suisse que Lucien Favre !! Il doit avoir un accent vaudois plus prononcé que Ph. Guignard.. alors merci de ne pas poussé mémé dans les orties..

  5. Dans des équipes de 1ère et 2ème ligue, cest déjà le même topo ! Il ny que le classement qui compte et tant pis pour la jeunesse ! Pas de patience ! Cest tout, tout de suite !

  6. Malgré mon sang 100% valaisan dans mes veines je suis obligé de constater la réalité de cet article! Toutefois il a été dit quun centre de formation serait remis sur pied et quand on sait le prix dun centre par année il faut avoir du courage et de la patience avant de voir sortir des jeunes du crû… Perso jattends de voir encore dici 2 à 3 ans ce qui pourra bien se passer! Mais il est vrai que jai plus de peine à midentifier au club de mon coeur

  7. Très bon article. Mais comme le dit CC, quoi dautre comme solution ? Quelle politique proposer ?

    Au plus haut niveau Suisse cest un peu désolant den arriver là. Et si les jeunes joueurs suisses qui ne partent pas à létranger nétait tout simplement pas assez bons pour jouer en LNA ? A mon avis, là est la vraie question.

    Ce qui me deçoit beaucoup plus par contre cest de voir les effectifs de club de 1ère ligue genre le FC Bex ou le FC Baulmes qui regorgent de joueurs frontaliers. Ridicule. Pareil pour bien des clubs de 2ème ligue inter ou 2ème ligue. Triste.

    PS : Oui Obradovic sacré joueur… mais Bigon qui ose le faire jouer seul en pointe, sacré dérangé de la tête !

  8. Rafa, merci pour tes remarques, jen ferai juste une : les joueurs du FC Bex ou du FC Baulmes, puisque tu cites deux exemples que je connais bien, ne sont pas frontaliers, pour limmense majorité dentre eux. Il y a effectivement beaucoup de Français dans ces équipes, mais ils vivent en Suisse.

    Après, je ne serai pas aussi définitif que toi, je trouve ces joueurs souvent très bons et avec une mentalité exemplaire, dans la plupart des cas. On peut toujours discuter du pourquoi du comment ils sont là, mais eux nont vraiment rien à se reprocher, au contraire.

  9. Les joueurs non mais les dirigeants oui. Sérieusement, Bex, Baulmes, Le Mont et jen passe, regorgent de joueurs étrangers au détriment de joueurs suisses (on parle de 1ère ligue, 2 inter et 2 régionale et non de ligue nationale…). Tes junior dans ces clubs et bien tu peux te chercher un club rapidement.

    Le fait est que certains de ces dirigeants oublient que leur club est tenu à boût de bras par leurs bourses et que le jour ou ils arrêtent, le club se prépare une jolie descente aux enfers (comme ce fut le cas de Jorat-Mézières à lépoque ou également du Mont qui avait culbuté il y a quelques années de 1ère ligue en 3ème suite à laffaire de son boursier communal…).

    Ce qui ménèrve encore plus cest que certains journaleux passent encore de leur temps (quand ce nest pas de la pommade aux dirigeants des clubs cités avant…) et usent de leurs papiers pour relater ou même vanter les mérites de ces dits clubs.

    Il est beau le foot vaudois !

  10. Cte, il y a le pour et le contre. Je ne suis pas journaliste et je viens dun club aux valeurs familiales et disons, rurales, où lon fait confiance aux jeunes, genre tu sors de juniors et tu intègres la 1, la 2 ou la 3. Cest là-dedans que je « baigne » et cest latmosphère qui me plaît.

    Dun autre côté, je suis reconnaissant aux dirigeants des clubs que tu cites car ils amènent de la diversité et de lanimation dans le foot vaudois. Il y a 4 saisons, Vallorbe-Ballaigues avait construit une magnifique équipe en 3ème ligue avec plein de joueurs français. Cétait un plaisir de les voir jouer, vraiment. Ils sont montés en 2ème ligue, les juniors du club avaient la possibilité de jouer avec la 2 (comme au Mont actuellement) et maintenant, ben, ils se cassent la gueule comme tu dis.

    Je trouve ça sain, cette diversité. Tu as des clubs « formateurs » et tu as des clubs qui paient et qui ne sen cachent pas. Je trouve que cest intéressant et varié. Il ne faudrait pas que des « LUC-Dorigny » ou « FC Le Mont » dans le canton de Vaud, mais Serge Duperret a incontestablement amené quelque chose de positif au foot vaudois. Noublie pas la 2ème équipe du Mont, ni son mouvement juniors.

    Il y a de la place pour tout le monde et jai autant de plaisir à jouer un bon vieux derby contre le village dà côté et mes copains de bar quun gros match contre une équipe assemblée de toutes pièces, cest ma conclusion 😉

  11. Je partage tout à fait lavis éclairé de Rafa et cte.

    Navrant effectivement ces clubs de ligues inférieures qui privilégient le succès à court terme, en engageant moults joueurs non formés en Suisse.

    Ridicules ces clubs qui ne doivent leurs succès quà dambitieux (et relativement riches) dirigeants, prêts à payer ou embaucher des joueurs, pour assouvir leur soif de succès et ce dès la 3ème ligue.

    Hypocrites ces mêmes dirigeants qui se disent préoccupés par la formation des jeunes mais qui préfèrent engager un joueur de ligue supérieure expérimenté, moyennant espèces sonnantes et trébuchantes, que de donner une chance aux dits jeunes.

    Certes, le mauvais exemple montré par les clubs de ligue nationale, dont le FC Sion est le plus flagrant, nest pas de nature à raisonner certains dirigeants de notre foot de talus.

    Ceci dit, il y a encore quelques clubs pour qui le mot formation ne semble pas vain. Je citerai notamment le FC Echallens dont le contingent est encore formé de nombreux joueurs du cru ou de la proche région. Fort heureusement, il y a en encore nombres dautres en ligue inférieure.

    Bravo à eux et bon championnat à tous!

  12. A Tim :
    Chacun son point de vue…

    Toi tu trouves que S. Duperret a amené qqch au foot vaudois, mois je trouve quil le pourrit… et quil tue le foot des talus (jessaie de chercher ce quil a apporté, jai beau cherché, je ne trouve pas… ha peut-être à Jorat-Mézières ?).

    Ayant eu le plaisir de faire mes juniors au Mont, certes cest vieux, jai gardé des contacts avec certaines personnes, qui ont finis par arrêter dentraîner, ou de jouer, soit avec la une soit avec la deux et, de se désintéresser complètement de ce qui se passe au sein de ce club à cause de cette politique…

    Je trouve juste dommage den arriver là, maintenant si un Renatus (ex YS et Baulmes) ou une bonne demie-douzaine de joueurs français peuvent aller remplir leur porte-monnaie aux Châtaigniers et bien tant mieux pour eux.

    Cest juste dommage pour tout ce qui se fait en amont dans le club.

  13. Cte, bien sûr que je te comprends et que je regrette pour les gens comme toi qui aimaient un club et qui naiment pas ce quil est devenu. Je suis le premier défenseur des valeurs conservatrices du foot vaudois.

    Par contre, dire que le foot des talus est mort, je trouve ça exagéré, je le trouve au contraire bien vivant…et je trouve quil a tout à gagner à se frotter de temps en temps au FC Le Mont ou autres équipes de la même trempe. Maintenant, cest clair que je ne sais pas comment je réagirais si ce quil sest passé au Mont se passait dans mon club…

  14. Je nai pas dit que le foot des talus est mort, jai dit que ce genre de politique le tue.

    Comme un autre genre de politique rénumératrice à souhait à fait couler Renens, Epalinges et jen passe.

    Mais heureusement certains clubs gardent les pieds sur terre et font vivre leur club au travers de moyens appropriés et au travers de leurs juniors et de personnes de la région.

  15. Dire que des centaines de personnes travaillent quasi bénévolement pour faire vivre un club ainsi que ses juniors et sont dirigés par ce genre de démagos! Meme en 3ème ligue ca pullule. Y a toujours la 2 en effet… faire jouer un espoir du club en 4ème ligue ca doit être motivant pour lui! Cest un non sens complet pour tous ces gens qui donnent de leur personne pour faire avancer juniors, schublig et buvette. Et quand « Papy plein dtunes » sen va (après avoir siffoné la caisse évidemment) ben cest la région qui paie avec une double relègation. Le pire…cest quils font des émules et que meme après une double relègation, ceux quils ont laissé sur le carreau continuent de croire en « la tune », force vive de tout club régional… Je parle régional, pas du Mont..

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