La Pologne, une autre idée du capitalisme

Si vous n’êtes pas un fervent connaisseur de basket en général et de NBA en particulier, vous ne connaissez sans doute pas Marcin Gortat. Le géant chauve du Magic d’Orlando passe un temps très limité sur le parquet (un petit quart d’heure), disputant actuellement les finales du championnat nord-américain. Malgré son rôle somme toute mineur sur l’issue de cette série face aux Los Angeles Lakers, le Polonais de 25 ans est actuellement au coeur d’une polémique qui dépasse les limites du terrain, voire même de l’entendement…

Au début de sa carrière au LKS Lodz, «The Polish Hammer» s’est fait tatouer une image de Michael Jordan sautant vers le panier sur le mollet droit, image également utilisée comme logo de la marque de «Sa Majesté». «Il m’a aidé à progresser et à arriver en NBA», a-t-il expliqué depuis aux médias américains. A première vue, rien de choquant. Mais la firme Reebok, qui possède un contrat de sponsoring pour les chaussures du Polonais, n’a pas vu d’un bon oeil cette publicité pour un concurrent et lui a demandé de masquer ce logo à l’avenir par une chaussette ou, tenez-vous bien, du maquillage. Comble du manque de savoir-vivre du géant de l’équipement sportif, la demande a été effectuée le jour du troisième match entre Orlando et Los Angeles. Selon Reebok, une photo de Gortat est parue dans un journal polonais et le concurrent y serait trop mis en valeur.
 
La maladroite demande du sponsor a été accueillie froidement. «Certains ne connaissent même pas mon nom, mais savent que je suis le grand blanc avec le tatouage de Jordan sur le mollet et j’aime ça. Reebok devra s’y habituer.» Un «niet» de la part de Marcin Gortat qui défend cette image aussi bien que le panier de son équipe : «Au moment de signer le contrat, ils n’ont rien dit à ce propos alors que le tatouage était déjà bien présent.» Le Polonais est dur en affaire et enchaîne en souriant : «Reebok ne me paye de toute façon pas assez pour que je pense à le cacher.»
 
Drafté dans les derniers en 2005 par Phoenix, Marcin Gortat a disputé 6 matches lors du dernier championnat avec Orlando et, cette saison, a vu son temps de jeu croître tout au long des 63 rencontres jouées. Malgré sa notoriété naissante, il a décidé de ne pas se laisser faire par la firme rachetée il y a quelques années par Adidas. Son salaire en NBA n’est «que» de 711’517 dollars par année (je m’en contenterais…) et une estimation de son contrat de sponsoring avec Reebok est difficile à faire. Toutefois, celui-ci doit à peine atteindre la moitié de sa fiche salariale, une sorte de pourboire pour une marque qui brasse les millions et qui a offert un contrat à vie d’une valeur de près de 90 millions de dollars à Allen Iverson…
 
Si anecdotique soit-elle, cette histoire dénote bien l’omniprésence à l’excès des sponsors dans le milieu du sport de haut niveau. La réticence de ce jeune «nobody» polonais à se plier aux exigences aberrantes d’un manufacturier devrait en faire réfléchir plus d’un. Si l’argent est le nerf de la guerre, est-ce logique qu’il en arrive à influer sur le cours d’une rencontre de championnat du monde de hockey en hachant celle-ci à deux reprises par tiers-temps ? Est-ce logique qu’une patinoire ou qu’un stade de foot change de nom aussi souvent que Martina Hingis de copain ?
 
Par peur de perdre d’importantes rentrées d’argent, les présidents de clubs, les présidents de fédération ou même les sportifs eux-mêmes se prostituent pour figurer dans la publicité pour le Bâton de Berger ou pour les derniers rasoirs Gillette. Si plus de monde osait s’opposer aux grands argentiers à l’instar de Marcin Gortat, peut-être que certaines dérives du sport (dopage, salaires faramineux ou encore corruption) pourraient être quelque peu endiguées. Mais ça, c’est une autre histoire qui va bien au-dela des limites d’un terrain de basket ou d’un court de tennis.

Écrit par George Baudry

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10 Commentaires

  1. Très bon article qui met le doigt là où ça fait de plus en plus mal. La dérive absurde au niveau du pognon. Real Madrid s’offre Kaka et Ronaldo pour env. 150M d’euros alors que le club a une dette de 547M d’euros! Cherchez l’erreur et surtout l’horreur. Et l’UEFA

  2. Suite (putain d’ordi). Et le président de l’UEFA qui avait fait beaucoup de promesses et qui n’ose pas ouvrir sa grande gueule. Un jour ou l’autre, tout finira par exploser. Mais, justement, demain est un autre jour…

  3. Baudry, tu dois être souffrant ….

    un article sérieux qui parle de quelque chose de vrai.

    Mais que fait la rédac ???? CartonRouge n’est plus crédible …

  4. @ Economie Suisse

    En fait c’est très simple…

    tout comme Baudry s’était fait passer pour un hockeyeur néo-zélandais, quelqu’un est en train de se faire passer pour Baudry.

  5. Paul Fournier doit probablement être en train de manger une fondue avec les All Blacks tout en écrivant une lettre d’amour à Chris MacSornettes et en préparant la structure du prochain article « Exclusivité CR : les plans du futur complexe sportif du Stade de glace de Biou ».

    Non ?

  6. Ouais, je pense que notre basketteur Polonais est un bon type mais je pense que si Reebook lui filait plus de pognon il cacherait son tatoo . Donc aller jusqu’à dire qu’il faudrait plus de types comme lui pour s’opposer aux grands argentiers et lutter contre le sport business….. On dirait un article (reportage) de la TSR.

  7. Je rejoins tout à fait le commentaire de goram…
    ce type ne me semble pas se poser en partisan d’un sport éthique et moins « bling bling » mais essaie juste de défendre sa petite (un comble pour un basketteur) personne..En fait il joue avec le système plutôt qu’il ne le combat…

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