Jankastique !

Après avoir eu l’extrême honneur de vivre en direct du Café des Amis de Monthey-d’en-haut le triomphe de Didier Défago, et ayant de longue date prévu le sacre de Janka lors de ce slalom géant, c’est sur la magnifique Zentralplatz de Davos que j’ai choisi d’assister à cette course, en compagnie d’un bon millier de spectateurs ainsi que de la totalité de l’équipe de hockey de Davos, qui se sent aussi concerné par l’équipe suisse de hockey que moi du patinage artistique unijambiste.

Après avoir eu tout loisir de déguster les breuvages valaisans lors de la descente, il faudra ici se contenter de la toujours immonde Calanda locale. Lorsque j’arrive à la buvette, je me fais de suite alpaguer par un gros bonhomme nommé Hans, qui ne me lâchera plus de la soirée. Le temps de prendre place devant l’écran géant que les premiers candidats s’élancent.Au moment où Didier Cuche prend le départ, pas grand-monde à par moi ne semble concerné sur la Zentralplatz. Tout le monde est là pour Carlo, les autres qui qu’ils soient, n’intéressent personne, même s’il s’agit de compatriotes. Je tente tant bien que mal de distinguer la course du Neuchâtelois, mais une fumée épaisse et pas tout à fait inodore vient me masquer la vue. J’ai à peine le temps de regarder d’où ça provient que Hans me fait remarquer que Guggisberg et les frères Von Arx sont devant moi. Pas la peine de chercher plus loin… Je réussis à me décaler quelque peu, et leur truc doit être vachement puissant car je crois deviner que Cuche est à plus d’une seconde.  «Les carottes sont Cuchent, z’est comme za qu’on dit ?» me glisse Hans. J’esquisse un petit sourire.

Arno del Curto prend alors un micro et essaie d’expliquer avec ses grands gestes habituels le pourquoi du comment du raté de Cuche, jusqu’à ce qu’on le fasse taire car c’est à Janka de s’élancer. La foule retient son souffle, jusqu’au premier intermédiaire. L’idole locale semble survoler la course, le public est en transe. Au moment de son passage sur la ligne, la foule explose, les Calanda volent. Les Von Arx s’allument un cône et Hans me prend dans ses bras. Il a peut-être un air lointain du chanteur de Rammstein, mais «Du rieschst so gut» ne doit pas être son tube préféré. La fête est telle que les organisateurs en arrêtent la diffusion afin de nous passer de la musique traditionnelle locale. Idéal pour l’ambiance, quant aux résultats de la manche, on se contentera du Teletext…
La Calanda ayant tendance à être meilleure après en avoir descendu une bonne dizaine, j’accepterai donc sans problème d’attendre la deuxième manche avec Hans et ses potes. Et lorsque celle-ci commence, on apprend avec joie que Janka a bien gagné la première. Ça vaut bien une Calanda.
Les premiers concurrents n’ayant que très peu de chances d’accrocher quoi que ce soit, on ne prêtera attention aux coureurs qu’à partir de ceux classés 15ème et au-dessous. Et lorsque le jeune prodige Jansrud prend la tête, j’interpelle mon nouvel ami en lui glissant  «Hans, ça va être rude d’aller le chercher celui-ci». Il a mis un moment à comprendre, je ne lui en voudrai pas.

Personne n’est capable d’aller prendre la tête de la course. Les échecs s’accumulent, et Janka, en s’élançant, a deux opportunités grandioses : devenir champion olympique de géant, surtout, et chasser tout Autrichien du podium, aussi. Et au gré d’une deuxième manche de très haut vol, celui-ci ne va pas s’en priver. 39 centièmes lui suffisent pour mettre fin à 26 ans de disette helvétique dans la discipline. Il serait difficile de vous décrire l’ambiance sur place, ces gens ayant enfin trouvé une autre raison de vivre que le hockey sur glace. Les larmes coulent chez pas mal de monde, y compris chez mon ami Hans, que mes souvenirs de notre première accolade m’empêchent d’aller le consoler.  J’ai juste le temps de m’éclipser un moment le temps de vous conter ce qui précède, que je vais retourne festoyer avec tout ce beau monde.
Avant ça, permettez-moi de tirer un très grand coup de chapeau à Carlo Janka, qui malgré son jeune âge, a su résister à la pression qu’il s’était mise tout seul, en annonçant qu’il allait rentrer en Suisse avec au moins une médaille. Chapeau bas Carlo !
Notre dernière pensée ira au malheureux Didier Cuche, qui aura complètement raté ce qui auront été ses derniers Jeux Olympiques. Son magnifique palmarès restera donc à jamais vierge de tout titre olympique, ce qui n’enlève rien à sa superbe carrière.

Écrit par Robin Dousse

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2 Commentaires

  1. Nos sportifs sont sympas: par respect pour nos pauvres banquiers, ils évitent l’argent, dont la seule évocation pourrait provoquer un suicide collectif, et mise plutôt sur une valeur sûre, l’or, ou sur un métal quelconque, le bronze…

    Belle solidarité!

  2. pis cuche a bien volé un titre de meilleur sportif suisse de l’année au Maître Federer . Ca ne vaut pas une médaille olympique, ça ?

    Blague à part, bravo à Janka, quelle classe !

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