Berbatov classe le derby du nord-ouest

Suite à un match à couper le souffle, avec une deuxième mi-temps d’anthologie, et dans un Old Trafford en ébullition, le Bulgare donne les trois points à Manchester United contre Liverpool grâce à un coup du chapeau.

Supporter de Liverpool, c’est en parfait traître que je passe l’avant-match au Trafford Pub. Pour ceux qui vont aller voir un match à Old Trafford prochainement et qui souhaitent, comme moi, transpirer trente minutes pour atteindre le comptoir dans une salle bondée, commander une Guinness et aller la boire sous la pluie vu le monde à l’intérieur, je vous donne un conseil : ne faites pas la queue devant le Pub mais passez par l’arrière, il y a une porte dérobée qui donne sur la terrasse ! En entrant dans le stade, j’ai l’agréable surprise d’avoir un siège sous le Kop des Reds. C’est donc avec le chant sacré de «You will never walk alone» que les joueurs font leur entrée sur le terrain. Mis à part Rio Ferdinand, qui a rejoué en Ligue des Champions cette semaine et Kuyt, blessé, du côté de Liverpool, ce sont les deux meilleures formations possibles à mon avis avec Berbatov-Rooney d’un côté et le trio Cole-Gerrard-Torres de l’autre.

Deux équipes en quête de points

Manchester et Liverpool n’ont pas vraiment droit à l’erreur aujourd’hui. Les Red Devils restent sur deux matchs nuls décevants. Après s’être fait rejoindre dans les arrêts de jeu à Goodison Park la semaine passée en championnat, ils ont buté contre le cadenas écossais en Champions League. Avec plusieurs titulaires laissés au repos (c’est un euphémisme, puisque Fletcher était le seul survivant du match contre Everton) et face au 7-2-1 concocté par Walter Smith, l’entraineur des Rangers, le 0 à 0 en match d’ouverture de la Ligue des Champions n’a pas été du goût de tout le monde. Ferguson préparant vraisemblablement déjà le match contre Liverpool, il serait fâcheux que son équipe ne poursuive pas sa marche en avant, surtout que Chelsea reçoit Blackpool. Du côté des Scousers, le début de championnat ne baigne pas dans l’euphorie. Avec une seule victoire en quatre matchs, contre West Bromwich à domicile, Liverpool se trouve dans la mauvaise moitié du classement. Les joueurs du bord de la Mersey se sont rassurés jeudi en venant à bout du Steaua Bucarest dans le premier match de poule de l’Europa League avec un excellent Joe Cole. Mais une défaite aujourd’hui les verrait se rapprocher dangereusement de la barre et Roy Hodgson compte sur ce derby pour relancer son championnat.

Berbatov, première

United emballe le match dès le coup d’envoi et se crée deux ou trois actions chaudes dans les dix premières minutes de jeu, sans toutefois que Reina ne doive intervenir. Le match est ensuite relativement calme, la bataille du milieu de terrain ne débouchant sur aucune action concrète. Puis Manchester prend le jeu à son compte et multiplie les débordements et les centres mais n’arrive pas à se montrer suffisamment dangereux avec un Rooney à nouveau bien discret offensivement. Quelques minutes avant la pause, Berbatov place une tête au bon endroit sur corner et réveille le stade, bercé jusqu’ici par les chants du Kop de Liverpool. Sur le but, on apprendra au passage à Torres qu’il faut défendre entre le joueur et le ballon et qu’il ne sert à rien d’encercler l’attaquant par derrière et à Konchesky que le latéral se met contre le poteau et non au milieu du but et que c’est à l’attaquant adverse de gêner le gardien. Il manque quelques actions tranchantes pour déclarer cette première mi-temps comme excellente, mais je ne me suis pas ennuyé et cerise sur le gâteau, mon horrible voisin, et ses cheveux verts et jaunes, n’a pas vu le but, trop occupé à insulter les supporters de Liverpool derrière nous.

Berbatov, deuxième

Au retour des vestiaires, Liverpool fait bien circuler le ballon à mi-terrain et impose un faux rythme qui endort quelque peu Manchester. Mais après dix minutes de jeu, United accentue la pression et les trente minutes qui vont suivre vont valoir à elles-seules un abonnement de saison. C’est d’abord Nani à la 56ème, suite à un bon travail d’O’Shea, qui envoie un missile qui s’écrase sur le poteau droit de Reina, battu en la circonstance. Liverpool réagit par Cole sur l’enchainement, mais son tir légèrement écrasé est trop croisé. Une  poignée de secondes plus tard, Berbatov va illuminer le stade de toute sa classe ; sur un centre du Portugais de poche, il contrôle du genou et trompe Reina d’un retourné qui finit sous la transversale. La foule se lève comme un seul homme et c’est du délire à Old Trafford qui scande le nom de son héros bulgare. C’est aussi deux à zéro et on se dit à ce moment-là que ça va être bien difficile pour les Reds de revenir dans la partie. Mais il suffira que Jonny Evans réécrive «comment relancer un adversaire aux abois pour les Nuls» en allant faucher Torres comme un junior E, sur un crochet prévisible de l’Espagnol dans les seize mètres. Howard Webb, le remplaçant de Busacca en finale de Coupe du Monde, n’a rien vu mais son juge de touche est inspiré et fait virevolter son drapeau. Pénalty indiscutable transformé de pied de maître par Gerrard à la 64ème.

Old Trafford au bord de la rupture

Liverpool se révolte et cinq minutes plus tard, sur un contre, O’Shea fait trébucher Torres qui partait seul au but. Difficile de dire si le latéral irlandais a vraiment fait faute d’où je suis, mais l’Espagnol est tombé en tout les cas comme une feuille morte. Une nouvelle fois, le juge de touche, qui ne s’est pas fait que des amis cet après-midi, signale l’irrégularité et c’est un excellent coup-franc à l’orée des seize. O’Shea peut d’ailleurs s’estimer heureux de ne récolter qu’un jaune vu la faute de dernier recours sifflée. Meireles pousse légèrement sur le mur mancunien qui se désunit et le ballon passe entre O’Shea et Fletcher, qui au passage a du voir un trèfle à quatre à ce moment-là sur le gazon d’Old Trafford et s’est baissé pour le ramasser. Steven Gerrard n’en demandait pas tant et son sec plat du pied trompe van der Sar qui n’a pas bougé. Le sosie du disciple dans la bande-dessinée «Léonard» n’a pas encore eu un arrêt à faire et va pourtant ramasser le ballon dans ses filets pour la deuxième fois. Le Kop s’enflamme à nouveau et les supporters des deux camps se répondent tour à tour dans le Théâtre des Rêves qui porte haut son nom en ce dimanche après-midi.

Berbatov, suite et fin

Suite à l’engagement, Liverpool récupère le ballon et est tout près du hold-up, mais il manque quelques millimètres à Meireles pour que sa tête plongeante soit décisive sur un magnifique service en profondeur de Poulsen. Suite à cette action, Liverpool recule et Manchester pousse pour reprendre l’avantage : toute la différence entre une équipe qui doute et une équipe du haut de tableau qui a confiance en ses moyens. A la 84ème, sur un bon centre d’O’Shea, Berbatov s’élève plus haut que Carragher et délivre Old Trafford en parachevant son œuvre par une tête qui termine dans le petit-filet du but de Reina. Un hat-trick pour le Bulgare (le premier depuis 64 ans d’un joueur de Manchester contre Liverpool, me souffle-t-on dans l’oreillette) qui se fait remplacer sous une standing ovation méritée, qui va durer jusqu’au coup de sifflet final.
Manchester reste donc à quatre points de Chelsea, vainqueur 4 à 0 de Blackpool. Les Mancuniens joueront un autre derby la semaine prochaine dans leur banlieue nord de Bolton. Bien que son organisation de jeu et ses individualités font que United ne sera jamais vraiment complètement «à la rue», je les ai senti plus fragiles que d’habitude. Il paraît clair que Scholes est irremplaçable à l’heure actuelle. Or, le vétéran ne jouera pas tous les matchs cette saison et il faudra que Rooney retrouve toute sa confiance pour que les Red Devils s’accrochent au bon wagon, tiré par les  locomotives londoniennes. Côté supporter, Liverpool n’étant pas menaçant pour le moment, j’ai cru comprendre que la grande peur vient plutôt de l’envahissant colocataire au nord-est de la ville.

Pour Liverpool, ce match peut servir de référence malgré la défaite. Poulsen et Meireles ont montré d’excellentes dispositions à mi-terrain et un fighting spirit digne de William Wallace. Joe Cole apporte sans conteste un grand plus dans le jeu de passes. Même s’il n’a pas du tout le même rôle, il a cette intelligence que Liverpool avait perdu avec le départ de Xabi Alonso au Real. On sent néanmoins que notre Roy national est un peu frustré car il ne possède pas réellement de deuxième attaquant ou d’Adrian Knup pour appliquer son traditionnel 4-4-2. Ayant vainement cherché à enrôler Crouch puis Carlton Cole cet été, il n’a pas trouvé sa tour de contrôle pour épauler Torres en attaque. N’Gog n’a pas (encore ?) le niveau et Liverpool se cherche encore dans son système actuel avec un attaquant et demi et deux couloirs très offensifs. Mais il y a du progrès et s’il présente la même copie dans ses prochains matchs contre Sunderland et Blackpool à domicile, les centres au troisième poteau de Konchesky et Johnson en moins, gageons que le club d’Anfield sera à une place plus acceptable au classement, début octobre.

Manchester United – Liverpool 3-2 (1-0)

Old Trafford, 75’213 spectateurs
Arbitre : Howard Webb.
Buts : 41e Berbatov 1-0, 59e Berbatov 2-0, 64e Gerrard 2-1, 70e Gerrard 2-2, 84e Berbatov 3-2.
Manchester United : Van der Sar; O’Shea, Vidic, Evans, Evra; Nani (87 Gibson), Fletcher, Scholes, Giggs (81 Macheda) ; Berbatov (87 Anderson), Rooney.
Liverpool : Reina; Johnson, Carragher, Skrtel, Konchesky (81 Agger); Meireles (78 Jovanovic), Poulsen, Gerrad, Cole, Maxi Rodriguez (62 N’Gog); Torres.
Man of the match : Berbatov.

Écrit par Ludovic Schmutz

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12 Commentaires

  1. La tireuse à bière du Trafford c’est quelque chose !! 6 pints à la fois, tout ça manoeuvré d’un main de faire par un dragon tatoué 🙂

    Sinon trop content pour Dracula, il explose en fait, espérons que ça continue !!

    Glory glory United !

  2. A noter quand même les 3 (!) pénalties non-sifflés à United (contre 1 p-ê à Liverpool) ! Et c’est pas des trucs limites, limites mais 2 ceinturages dignes du Calcio et une main de Carragher gros comme une maison…

    Enfin c’est 3 pts vitaux qu’ils fallaient pour rester au contact avec les Blues…

  3. Pour qu’il y aille peno sur la main de carragher faudrait deja qu’elle soit dans la surface !!!!

    Enfin au moins MU ne fera pas le titre avec une défense comme celle la….

    Go LIverpool !!!!

  4. J’étais aussi au Trafford Pub, on a dû se croiser, quelle émeute, 2 heures ininterrompues de chants, pour un déjeuner du dimanche matin, c’était quelque chose.
    Par contre, tu devais pas avoir une place stratégique, on était à l’entrée de la salle où ça chantait et on avait nos pintes en moins de cinq minutes.
    Sinon, superbe article, même si je ne suis pas d’accord avec toi sur deux points (mais c’est peut-être que je supporte pas la même équipe):
    – on était en haut de North Stand, à hauteur de la ligne de médiane, et on n’a quasiment pas entendu les Scousers;
    – Howard Webb a à nouveau tout fait pour faire gagner ses copains espagnols; sans son aide, les Scousers, qui ne se sont pas créés la moindre occasion de but avant le penalty, ne seraient jamais revenu dans le match.

  5. Effectivement l’émeute au Trafford Pub! Je pense que j’ai pas été prendre ma pinte au bon moment, mais suis pas resté aussi longtemps que toi à l’intérieur!
    Etant placé juste en dessous des scousers au stade, je pense que ma perception sonore était altérée! Et c’est pas les ballades irlandaises reprises par le KOP qui font le plus de bruit 🙂

    Je suis assez d’accord avec toi que dans l’ensemble Webb a été bien généreux avec les Reds, mais bon, après avoir vu les images aujourd’hui, il semble bien qu’il y a penalty et coup-franc sur les deux buts.

    C’est clair que les ceinturages dans les seize, on ne les compte plus par match (malheureusement). Bon, ca n’a pas empêché Berbatov d’en mettre deux malgré Torres et Carragher! Même si le premier défend par l’arrière et que le deuxième avait apparemment lesté ses godasses!

  6. On va pas relever toute les erreurs de Webb non plus, mais la plus flagrante est quand même la faute sur Torres qui amène le coup-franc de Gerrard…. une faute de dernier recours c’est le rouge!

  7. Article sympa, j’espère vivre un jour cette expérience là en live… A la TV c’est vrai qu’on entendait bien le kop de Liverpool, faut reconnaître qu’ils savent supporter leur équipe et mettre l’ambiance, Old Trafford répondait plutôt en regard des actions du match en faveur de MU (donc quasi toute la partie… ;-)) Enfin superbe ambiance !

    Niveau football : le jeu de MU est passé par tous les stades : bon, de classe mondiale (Berba), marqué d’erreurs individuelles incompréhensibles (surtout Fletcher, ça ne lui ressemble pas du tout), fébrile et enfin expérimenté.

    Celui de Liverpool : euh… pauvre et opportuniste. Il ne méritait en tout cas pas d’emporter des points. Désolé pour les supporters des Reds, mais va falloir laisser un peu de temps à Roy… Mais je crois qu’il va faire quelque chose de bien, justement si on lui laisse du temps.

    Vivement les derbys MU-Liverpool avec comme enjeu : le titre !

    Arbitrage : j’ai trouvé très correct, l’arbitre n’a pas pris des décisions qui pénalisent trop lourdement un geste plus maladroit que malintentionné. D’un côté comme de l’autre.

  8. Merci pour l’article, c’est toujours sympa qu’un derby british soye raconté après l’avoir vu en live.

    Excellent article, espérons qu’il y en aura d’autres !

  9. @ Olegend

    En l’occurence Roy ne pourra pas y changer grand chose, car il n’a que très peu de libertés qui lui sont laissées par le board, notamment pour ce qui a concerné la campagne des transferts cet été. Sans compter qu’un départ de plusieurs joueurs est possible au mercato hivernal….

    Cette saison est le début d’une longue (très longue…) traversée du désert pour Liverpool.

    Alors que le club pourrait se retrouver en faillite dans une vingtaine de jours (échéance du prêt de la Royal Bank of Scotland / aucun acheteur trouvé par Gilett et Hicks), je crois que parler de titre n’est vraiment pas la première préoccupation des Reds.

  10. @Dazzy : je trouve la campagne de transferts pas si mauvaise que ça, Meireles m’a l’air assez convaincant (et un peu plus malin que Mascherano). Joe Cole, inconstant mais il prend ses marques, Poulsen m’a l’air solide et au niveau. Konchelsky, ouais bof… là on verra

    Après, surement qu’Hodgson n’a pas eu les mains totalement libres, mais je le crois capable de bien faire avec ce qu’il a.

    D’ailleurs ce qu’il vise n’est pas le titre mais le retour en C1, j’espère qu’il y parviendra.

    Le gros point faible à Liverpool dans l’effectif, c’est Carragher à mon avis. Ok c’est un pilier du club, mais il commet beaucoup trop d’erreurs je trouve. D’ailleurs le 3 à 2 est pour lui !

  11. Oui je suis d’accord avec toi pour la campagne de transfert, Joe Cole et Meireles sont de très bons joueurs, mais la meilleure nouvelle était quand même d’avoir pu garder les cadres que sont Gerrard et Torres (Bien que Mascherano soit lui une grosse perte…).

    Mais cela ne suffit pas quand on voit les transferts d’équipes comme City, Tottenham pour ne citer qu’eux… et ça, ce n’est pas de la faute de Roy qui comme Benitez l’an passé avait réclamé du board qu’il offre plus de budget pour les transferts. Chose qui n’est jamais arrivée puisque d’après la presse britannique, depuis l’arrivée des deux yank$ à la tête du club, environ 50M £ provenant de la vente de joueurs n’ont pas été employés pour de nouveau joueurs et ont très certainement fini dans leurs poches, puisque il a été déclaré à plusieurs reprises que ces montants n’ont pas été utilisés pour la dette bancaire.

    Tant mieux si l’équipe arrive à faire illusion sur le terrain cette saison (ce qui n’est pas le cas pour le moment), mais personnellement je suis plus pessimiste et espère tout simplement une place parmis les européens et éventuellement un bon parcours dans une des trois coupes….

    Mais comme je l’ai écris dans mon post précédent, le plus préoccupant n’est pas le côté sportif, mais bien ce qui se passe à la tête du club. Puisque début octobre, la faillite pourrait être prononcée pour le plus grand club d’Angleterre…

  12. et pour revenir sur Carragher, cela fait depuis la saison passé que son niveau de jeu a vraiment baissé de manière conséquente.

    Beaucoup de goals sont dûs à une erreur de la défense centrale qu’il forme avec Skrtel. Comme tu l’as écrit, cela s’est encore vérifié dimanche contre ManU (Bien que je suis forcé de reconnaitre que Berbatov a fait un grand match…).

    à voir ce soir en Carling Cup, la titularisation en défense centrale du jeune Wilson qui aura l’occasion de prouver à Hogdson qu’il mérite du temps de jeu pourquoi pas en Premier League.

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