David J. Stern : le boom économique (2/4)

Hier était un jour spécial pour les fans de basketball. Après 30 ans à la tête de la NBA, autant dire une éternité, David J. Stern se retire et cède sa place à son bras droit, Adam Silver. CartonRouge.ch te propose de te souvenir de certaines facettes du pontificat Stern.

1984 : La NBA est-elle «marketable» ?

Lorsque David J. Stern succède à Larry O’Brien, le 1er février 1984, la NBA est loin, très loin de ressembler à l’industrie qu’elle est aujourd’hui. Il y a des doutes quant à la capacité de la ligue à vendre son produit. A cette époque, le fait que la NBA soit «trop noire» représente un problème pour les investisseurs. Cette même perception lie la NBA à des problèmes de consommation de drogue. Des noirs drogués, qui se font trop d’argent (à l’époque, le salaire moyen d’un joueur NBA se situe aux environs de 250’000 dollars par saison).
Si elle connaîtra de nouveau des problèmes d’image suite à la baston générale impliquant joueurs et public lors du match entre les Indiana Pacers et les Detroit Pistons en 2004 (événement sur lequel nous reviendrons, connu sous le nom de Malice at the Palace), la ligue a su, sous l’impulsion de Stern, sortir de son carcan et n’a plus cessé de grandir.

Stern, alors bras droit de l’ancien Commissionner Larry O’Brien, participe aux négociations du CBA de 1983. Cet accord-cadre entre joueurs et dirigeants instaurera, entre autres, un plafond salarial, une grande première à l’époque, et permettra la signature d’un accord sur l’instauration d’une politique anti-drogue au sein de la ligue. Des chiffres fous circulaient alors, faisant étant d’une consommation de cocaïne par 20% des joueurs à cette époque. Chiffres difficile à prouver. Pour Stern, certains joueurs étaient effectivement concernés, mais pas plus que dans d’autres sports ou autres secteurs de la vie courante. Il a toujours indiqué que cet accord sur la drogue n’était pas un «big deal»… Tu m’étonnes.

Les bonnes personnes au bon moment

Balayer en interne les problèmes de drogue est une chose. L’instauration d’un cap salarial est une grande première qui permettra à toutes les franchises de lutter à armes égales. La ligue est sur les bons rails, mais vient de très loin.
En effet, en 1983, seuls 5 matchs de la saison régulière sont diffusés à la télévision, et même la série finale est diffusée en différé. Impensable aujourd’hui.
L’avènement des Los Angeles Lakers, version Showtime, emmenés par la personnalité solaire d’Earvin «Magic» Johnson et l’opposition de style complète avec les Celtics de Larry Bird vont représenter du pain béni pour la ligue.
Stern, qu’on ne connaissait pourtant pas pour ses talents en marketing, va très vite comprendre qu’il est dans l’intérêt de son association d’axer sa communication sur les deux stars de l’époque. D’autant que de jeunes talents aux dents longues entrent à cette période dans la ligue. Michael Jordan, bien sûr, mais aussi, par exemple, Hakeem Olajuwon, Charles Barkley ou John Stockton. Et de vieilles gloires populaires comme Julius «Dr J.» Erving sont encore de la partie. La ligue est à ce moment-là bourrée de talents. Et compter sur des stars aussi vendeuses que Magic et Bird va peu à peu attirer du monde. Un contrat télé est signé à ce moment-là, rendant les matchs enfin plus accessibles au public. Les play-off sont désormais retransmis en direct, de même que de nombreux matchs de saison régulière.

Prendre son envol grâce à Nike

Le génie de Stern est d’avoir su miser sur les bons chevaux. Mais des facteurs sur lesquels il n’a aucun contrôle vont propulser la NBA à des records de popularité, tout au long de son mandat. Lorsque Michael Jordan devient le porte-drapeau de la marque Nike, il apparaît partout et devient une des plus grandes, si pas la plus grande star des années 90, tous sports confondus. His Airness est un compétiteur aguerri, un athlète incroyable au sens de la victoire aiguisé et doté d’une image quasiment parfaite. Jordan est un peu le Federer des années 90.
Nike n’est pas la seule marque à miser sur le basketball, les exemples se multiplient. Par exemple, Reebok signe un contrat avec le jeune géant Shaquille O’Neal, qui deviendra, à son tour, LE visage de la NBA au début des années 2000.
L’apparition de campagnes mondiales de publicité, couplé, entre autres, à la signature d’un accord entre la NBA et le CIO permettant d’envoyer une équipe composée de joueurs professionnels aux JO de Barcelone va donner au basketball une présence mondiale.

Un jeu global

A Barcelone, la Dream Team, composée des plus grandes stars de l’époque (et de Christian Laettner, sérieusement, Christian Laettner !) va broyer toute concurrence et donner une image positive de la NBA, qui n’est plus «trop noire» pour être vendue. L’effet domino sera impressionnant et le basketball est aujourd’hui à des records de popularité, notamment chez les jeunes. Il est sur le podium des sports d’équipes les plus joués au monde. Et plus proche de la 1re que de la 3e place.

Cela se ressent également dans les effectifs des franchises. Dans les années 80, il y avait bien eu quelques joueurs étrangers. Mais depuis les années 90, la tendance est à l’internationalisation et, au début de cette saison, 92 joueurs non US étaient inscrits, soit un peu moins d’un quart des joueurs. Eh, il y a même un Suisse, alors que notre pays montre un désintérêt difficilement compréhensible pour ce sport. Pour te donner une idée, la Suisse en basket, c’est un peu l’Estonie en foot. Ce qui rend d’autant plus incroyable le parcours de Thabo Sefolosha.
Aujourd’hui, la NBA, dont les bureaux n’occupaient en 1984 qu’un étage d’immeuble et 24 personnes, compte 15 bureaux partout dans le monde et 1200 employés. Il est certes réducteur de décrire la transformation de la NBA, sous le règne de Stern, par des chiffres, mais cela donne une idée de l’ampleur de son développement.
En 1984, la NBA est composée de 23 franchises, estimées à un total de 400 millions de dollars. Le salaire moyen d’un joueur NBA est d’environ 250’000 dollars par saison. Aujourd’hui la NBA est composée de 30 franchises, estimées au total à environ 20 milliards de dollars. Le salaire moyen d’un joueur est de 5.7 millions de dollars par saison. La société NBA China, a elle seule, vaut plus de 2 milliards de dollars. Ses matchs sont retransmis dans plus de 200 pays en 47 langues.
Des matchs de pré-saison et de saison régulière sont régulièrement joués à l’étranger. L’équipe nationale des USA est désormais composée à temps complet par des stars de la grande ligue. Mais à peu près tous les pays présents dans les grands tournois alignent également des joueurs NBA. Le basket a cru à vitesse grand V ces 20 dernières années, et la NBA a fait de cette croissance internationale sa grande priorité. Bien aidée par son adaptation ô combien réussie au monde numérique.

Écrit par Arnaud Antonin

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