Les 4 derniers Moto GP sous la loupe de Iam & Suzy Jesse

Comme dirait l’excellent Bernard Jonzier, « feu gaz » pour un récit des quatre derniers Grands Prix !

4 septembre – Silverstone : Les malades font le spectacle

Avec le beau-temps revenu, les duels les plus chauds ont repris leur place dans les trois catégories, avec des dépassements de malades pour tenter la victoire dans chaque catégorie. Manzi en Moto 3, Zarco en Moto 2 et Marquez en moto GP décrochent la palme des plus grands malades adroits.

– Alors Dad, Ces courses sur le sec t’ont rassuré ?
– Oui, Suzy. Mais je t’avoue que j’ai eu très peur de voir encore des courses sous la pluie, au vu des essais.
– Je te comprends. Mais là on a retrouvé le spectacle, n’est-ce pas ? …Mais, Dad ? Qu’est-ce que tu fais sur le toit de la maison ?
– Ben justement. J’étais surexcité. Après chaque course je me retrouvais à courir dans toute la maison. Le rêve. Gaz à fond. Freinages à l’extrême. Angles au plus vifs. Des attaques à chaque virages, émotions sur émotions à chaque dépassement… et je me suis retrouvé là, sur le toit.
– Un signe que c’étaient des courses de grand-cru. Je me permettrais de la raconter, celle-là…
– Si tu veux. Je préfère me retrouver sur le toit par excitation que de me morfondre d’un nouveau Grand-Prix sous la pluie.
– En même temps, Dad, on ne peut rien contre la météo.
– Faut voir. On pourrait faire couvrir les pistes, ou creuser des circuits en sous-sol. Et toc! Plus aucun problèmes de pluie.
– Ca y est. Les grands frais te reprennes. Mais je te laisse à ta joie. Il faut profiter des bons moments dans la vie. Rien à redire sur l’invité spécial ?
– Grmbl#! Manzi ? Cet assassin ?
– Assassin ? Carrément ?
– Ben oui. Mais quel malade ! Alors justement que l’on retrouve enfin tout notre beau monde pour une « bourre d’enfer » autrement dit Binder, Bagnaia et Navarro – qui accessoirement est revenu du milieu de grille jusqu’en tête – pour les voir se battre tous les trois pour la course et le titre, voilà que cet Agnaf’ de Manzi vient jouer au chien dans un jeu de quille.
– Il se battait pour gagner la course, Dad. Il était motivé avec son invitation spéciale à ce Grand-prix. Et puis Il a montré qu’il était aussi rapide que les meilleurs mondiaux.
– Ca c’est vrai. Mais il a aussi montré qu’il était trop naïf pour rester avec eux. Excuse-moi, ma fille, mais la façon dont il a fermé la porte à Navarro deux tours avant la fin était digne du plus maladroit. En course, tu dois laisser la place aux autres aussi. Et là, il a refermé comme si Navarro n’existait pas. Et en plus, celui-ci perd probablement cette fois toutes ses chances au Championnat. Il se retrouve à presque 100 points. Autrement dit quasi 4 victoires, et encore en espérant que Binder ne finisse pas ces 4 courses. Et sachant qu’il n’en reste que 6.
– Ok. Je te comprends. En attendant, je pense que beaucoup d’yeux se sont tournés vers ce môme de 17 piges. Cela ne m’étonnerait pas qu’on le retrouve en Championnat Mondial l’an prochain.
– Peut-être, Suzy. Mais en attendant il mérite une fessée, le môme, point c’est tout.
– Bon. Je n’insiste pas. Et Luthi ? C’est top, non ? Tu dois être content ?
– Oh que oui. Je crois même que j’ai couru trois fois autour du toit pour fêter cela. Comme quoi il fallait bien que tout le monde commence à lui frotter les oreilles de son excès de pacifisme pour qu’il retrouve les voies de la victoire. C’était le moment. Sinon il aurait fini chez Greenpeace.
– En même temps, Dad, heureusement que Zarco s’est loupé sur Lowes.
– Non, pas d’accord. Zarco, lui aussi, mérite une petite …mmh, c’est un adulte…. alors une petite gifle de bienséance. Sa manoeuvre sur Lowes ne lui ressemble pas. On aurait dit qu’il allait perdre le championnat sur ce virage-là et que c’était sa toute dernière chance. Il s’est « envoyé » à l’intérieur de Lowes comme un damné mordu par un zombie. Quel fou. Je suis resté sans voix. Mais justement, je ne suis pas d’accord avec toi. Que Zarco se soit loupé ou non, et que Lowes soit resté en piste ou non, notre petit Thomas assurait comme un chef. Donc il serait resté devant et aurait gagné de toute façon. S’il était sur mon toit je l’embrasserais. Il a été magistral. Et Zarco trop théâtral après course. Franchement. Faire ça à un anglais à Silverstone. Après on s’étonne que les anglais trouvent les frenchies toujours aussi goujats. Mais ce qui est sûr, c’est que là aussi on a retrouvé les meilleurs en tête de course pour une lutte haletante à souhait comme on adore. La Moto 2 cette année, c’est une histoire entre Zarco, Lowes et Folger, avec Luthi comme arbitre.
– Ouais. Ca va lui faire tout drôle à Luthi de voir partir ces trois là en Moto GP l’an prochain. Il va se retrouver tout seul. Ca sent le titre de Moto 2 pour lui.
– Oh, t’inquiètes ! Dès que Alex Marquez arrêtera de tomber tout le temps, comme encore une fois à ce Grand-Prix, tu verras qu’il risquera bien d’être devant Luthi au Championnat. Non, il ne faut pas se réjouir trop vite. D’autant plus que Syahrin monte en puissance, Pawi aussi et sans parler de Baldassari. Mais mon favori pour 2017 sera Nakagami.
– Tu n’as jamais été bon en pronostic, Daddy. Tu es mieux en critique. Mais voyons déjà ce qu’il se passera en 2016. Par contre pour Alex Marquez, je pense qu’il s’est certainement énervé de se voir dépasser par Morbidelli, et il a voulu aller trop vite. En tous cas il a attaqué la courbe trop fort.
– Pas faux. Tu as l’oeil Suzy. Ca me fait plaisir. Ca énerve de se faire doubler par son équipier.
– Et alors, Dad ? Le moto GP ? Tu as vu Maverick ? Je suis toute contente ?
– Et moi aussi pour toi, ma fille. C’est génial pour lui et le team Suzuki. C’est Honda et Yamaha qui tirent la gueule. Après avoir perdu contre Ducati en puissance en Autriche, voilà qu’ils perdent contre l’agilité de la Suzuki et un pilote de maître. Ca me rend juste triste pour toi de le voir partir chez Yamaha l’an prochain. Mais moi je suis content, car quoiqu’il arrive, Ca sent la fête chez Yamaha en 2017.
– Ben ! Tu disais qu’il se ferait « manger » par Rossi ?
– Oui, et puis j’ai pensé que c’était peut-être le pilote qui serait la vrai relève de Valentino. Je m’attends à ce que Rossi le « réduise » à un rôle de coéquipier. Mais si Maverick ne se laisse pas impressionner, Valentino profitera alors enfin d’en faire son « bébé ». Il a déjà commencé d’ailleurs. A croire que Rossi prépare son départ.
– Il est vrai qu’ils roulent toujours les deux maintenant en qualifs.
– Tu l’as dis, ma fille. par contre, j’avoue que sa victoire du jour est impressionante. Tout comme les innombrables dépassements. Plus d’une vingtaine rien qu’entre les leaders, sans parler des re-passements, avec la palme pour marquez et Rossi qui se sont passé-repassé à trois reprises à quelques millimètres, et puis ensuite à Crutchlow avec Marquez – qui, du coup, s’est mis à la faute tout seul. Quel gland, il laisse le podium à Rossi. Bon, là-dessus, je suis ravi. Mais encore une fois, Marquez flirte avec des limites d’accidents à chaque dépassement. Et puis heureusement pour lui qu’on a fait des dégagements, sinon il aurait fini dans la fosse aux herbes deux fois. D’ailleurs, ces dégagements commencent à m’agacer de plus en plus.
– Pourquoi, Dad ? Ils évitent de tomber, et permettent aux pilotes de revenir en course. C’est plus cool.
– Mouais. Pour les chutes, je suis d’accord. Mais le puriste que je suis dis que lorsque tu sors de la piste, tu devrais automatiquement laisser ta position à tes poursuivants. En l’occurrence, Marquez a pris trop de risque, sors de piste, mais en gardant les gaz à fond, il revient sans avoir perdu le moindre temps, et reprend sa position. Ou est la morale sportive ? Finalement, que tout le monde coupe les virages, non ?
– Tu n’as pas tort. En même temps tu dis cela parce que cela a avantagé Marquez.
– Pas vrai. Si cela avait été avantageux pour Rossi, j’aurais grincé des dents, mais j’aurais eu la même pensée: car je pense la même chose. Je n’apprécie pas ces circuits où l’on te dit que tu risques un avertissement ou un drive-trough si tu as pris trop large ici ou là. Mieux vaut faire une piste où tu passes ou Ca casse. Si tu te rates, tu es dans le sable, l’herbe ou la mousse, point c’est tout.
– Bon, en l’occurrence, Marquez a fait le spectacle.
– Oui, mais c’est lui qui devrait porter le nom de Vinales.
– Maverick ?
– Oui. Je te rappelle que cela signifie « Chien fou ».
– Ah. Ok. Evidemment. Mais bon, entre un mec qui pilote aux limites, et un papa qui finit sur le toit, je ne sais pas trop qui peut dire qui est fou, non ?
– Pfff. C’est mesquin. Tu ferais mieux d’aller expliquer à ton autre beau gosse chouchou qu’il faudrait qu’il appuie plus fort sur les gaz.
– Pedrosa ? Pourquoi ? Il s’en est mieux sorti que les derniers Grand Prix.
– Un peu mieux. Mais il me rappelle le rhinocéros du film Jumanji, avec Robin Williams. Une fois que toute la savane est passée, passe le dernier rhinocéros, tout essouflé.
– Tu exagères.
– Ouais, à peine. Mais tu as raison, c’est mieux que Lorenzo qui traîne maintenant toute la misère du monde sur ses épaules. Il me fait pitié tellement il est devenu lent. et aphone. Il a compris que ce ne serait pas lui qui serait Champion cette année, pire, que ce serait même son équipier à 20% de chances. Bref qu’on ne parle plus que de Rossi et Marquez, et qu’en plus, il est devenu le plus lent de tous les pilotes d’usine. Vivement qu’on mette Vinales sur sa moto.
– Là dessus je ne peux pas t’en vouloir. Et alors ? C’est à lui que tu mets un carton rouge ?
– Non. A Iannone.
– Encore ?
– Oui. Je n’aimerais pas être à la place du team Suzuki. Maintenant que leur moto gagne, est annoncé la venue l’an prochain d’un pilote 50%. Il tombe un grand prix sur deux.
– Pas faux. Mais moi je l’aime bien. Je suis sûre qu’on aura de beaux duels à quatre marques l’an prochain. Bon. en attendant tu veux que j’aille chercher une échelle ?…

23 août – Brno : Les hommes de la pluie

Encore de la pluie, et forcément, des high side et des sorties de pistes, mais surtout la présence d’un sort indien, celui des leaders du championnat condamnés à être pitoyables sur cette piste tchèque, alors que la pluie aura mis premier plan les artistes de la glisse.

– Salut Dad. Alors ? Impossible de s’endormir cette fois, non ?
– Impossible. Je confirme. Et là je me pose de sacrées questions ?
– Lesquelles ? Attends, je devine. A propos de Lorenzo ?
– Tout juste. Alors là, vraiment, le bonhomme me déçoit plus que tout. Il s’était refait une santé sur piste sèche, mais dès la première goutte de pluie, il est retombé dans ses peurs absolues. Il faut vraiment qu’il aille faire un stage sur piste mouillée pour retrouver sa confiance, sinon il ne lui restera plus qu’à courir aux USA, là où on ne court pas quand il pleut. Mais ce n’est pas le seul.
– Bagnaia t’as déçu ? Moi aussi.
– Oui, c’est sûr. Le petit est super talentueux, mais s’il nous fait une « Lorenzo » à la moindre goutte, il peut dire adieu à tout titre de championnat.
– Une « Lorenzo » ? Tu y vas un peu fort sur l’expression.
– Crois-moi que pour tout motard, cela veut déjà dire ce que cela veut dire. Le bonhomme n’a plus qu’à prier le ciel pour qu’il ne pleuve plus jusqu’en fin de saison.
– Embêtant, la semaine prochaine c’est l’Angleterre.
– Et voilà. Il balise déjà. Mais en même temps, Brad Binder, en Moto 3, nous a fait le même truc.
– Oh tu exagères. Il était en tête tout le grand-prix avant de chuter.
– Oui. Ok. Tout réfléchi, d’accord, c’est un peu différent. Cela me rappelle une vieille vision.
– Je sais. Tu ma l’as raconté pour m’endormir la nuit quand j’avais 3 ans: Carlos Checa.
– Exact, ma fille. Je suis fier de toi. Comme quoi tu m’écoutais vraiment.
– Oui. Je me souviens que tu me racontais « ô » comment Carlos avait remonté tout le monde sous la pluie depuis presque la dernière place, qu’il tournait une seconde plus vite au tour que tout le monde, et qu’une fois qu’il eut rejoint le leader, Valentino Rossi sur cette course là, et qu’il l’eut dépassé, un tour plus tard, il se vautrait comme une grosse…
– Je n’ai jamais dis « comme une grosse…. ». Au pire j’eu dit: lamentablement. Mais c’est un fait: quand tu es derrière, tu peux voir les limites du pilote devant toi.
– Mais quand on est devant, on n’a pas de référence. Oui, j’ai bien compris, Daddy. Mais quel panache !
– Oui, mais cela ne sert à rien si tu te vautres. Regardes ! En Moto 3, c’est Pawi qui nous a offert une remontée incroyable. Mieux que dans un film. Et au moment où il revient à la 2e place, il en veut encore plus, et finit par terre.
– Ok. Je vois ce que tu veux dire. Sauf qu’à Brno, et en Moto 2, c’est Folger qui a fait ton « Homme de la pluie », sauf qu’il est resté sur ses roues et qu’il a gagné. Idem en Moto GP avec cette remontée incroyable de Cal Crutchlow, qui gagne aussi. Du coup ton pronostic n’a pas tenu sur ce coup-là, Dad.
– Je sais. Voilà pourquoi je n’arrive plus dormir, et que je me pose toutes ces questions. Ces courses, tout comme aussi la course Moto 3, ont été incroyable à ce titre. C’est à se demander si les meilleurs pilotes sont vraiment sur les meilleures machines.
– Je ne te suis pas.
– Ben oui. Cal a été Champion Super Sport. Et il a une moto censée être moins bien. Mais là il fait mieux que tout le monde. Je sais que sous la pluie un homme peut faire la course de sa vie. Mais là il y en a eu 3 ou 4 dans chaque catégorie.
– Rossi a fait presque aussi bien que Cal.
– Mais Marquez a été ridicule, tout comme Lorenzo et Pedrosa qui ont pourtant les meilleurs machines.
– Question de choix de pneus, aussi. Mais ok, je vois. Tu aimerais que Crutchlow, Scott redding et Loris Baz, les meilleurs du week-end en moto GP, soient sur une moto d’écurie officielle, c’est cela ?
– C’est cela. Parce que là, choix de pneus ou non, on retombe dans un doute absolu. Et il est vrai que finalement, seul Rossi à fait aussi bien. Cela me fait vraiment demander ce que vaut Marquez dans l’absolu. En fait, j’aimerais que chacun ait les mêmes moto. Et là on verrait.
– Sauf que c’est la Moto GP, et que c’est d’abord une course d’écurie, Daddy. Ca fait vingt ans que tu me répètes cela.
– Oui, c’est vrai, Suzy. Pardon. Je vais me reprendre. Il n’empêche qu’il y avait aussi comme un signe indien sur ces courses. Sur les leaders du Championnat.
– Là dessus, je suis d’accord, Dad. Il est vrai qu’aucun d’entre eux n’a brillé. Binder tombe en Moto 3. Zarco finit 11e en Moto 2. Et Marquez tire par miracle sa Honda à une 3e place arrachée par maladresse de Barbera, panne de la Ducati de Dovizioso et mauvaise gestion de pneus …de Iannone.
– Exact. Je n’aime pas les Grand-Prix sous la pluie. Les hommes ne peuvent pas s’exprimer à 100%. Mais il faut reconnaître que là, tous les leaders ont été à mal, et plusieurs « Hommes de la pluie » sont apparus. Cela me fait poser plein de questions.
– Du genre Yamaha aurait dû signer Crutchlow plutôt que Vinales l’an prochain ?
– Du genre.
– Il est vrai que Vinales n’a fait que 9e. Pas de très bon augure pour les futurs Grand-Prix sous la pluie de 2017.
– Tu m’as compris. Et je salue McPhee, le vainqueur de la Moto 3. Il est un très beau « Homme de la pluie ».
– Et surtout après son rodéo où il faillit se faire éjecter.
– Justement. Le dernier que j’ai vu rattraper une moto en glisse avant qu’elle ne glisse, enfin, je me comprends, c’était Rossi il y a longtemps.
– Toi tu compares carrément Mc Phee à Rossi ?
– Peut-être, Suzy. Peut-être…
– Ok. Ca vaut peut-être le coup de mettre une pièce dessus, pourquoi pas. Mais je vois qu’effectivement, Daddy, on a des bons pilotes sur sec, et beaucoup d’autres sous la pluie.
– Ben justement. Au milieu de tout cela, il y a trois pilotes dans chaque catégorie qui sont là qu’il pleuve ou qu’il fasse beau : Bastianini en Moto 3; Rins en Moto 2 et Rossi en Moto GP. A mon avis. Mets aussi une pièce sur les deux premiers nommés pour l’avenir. Des valeurs sûres. C’est ce que je vais retenir.
– Ok. Et alors ? Pas de carton Rouge ?
– Si, bien sûr. A Simone Corsi. Mais quel dépassement de m….
– Sur Nakagami qui en est tombé ? Alors oui. Je valide. Il a fait comme si Takaaki n’existait pas. Incroyable.
– Je ne te le fais pas dire. Allez, vivement Silverstone, et qu’il fasse beau, et que l’on voit un Crutchlow dépasser Marquez, Rossi et Iannone sur sec.
– Tu rêves, là.
– Oui. Mais je remets une pièce… et trois s’il pleut…
– Suivi !

15 août – Spielberg : Celui qui a la plus grosse

A Spielberg, les courtes lignes droites et freînages « sur les dents » du circuit du Redbull ring promettait de récompenser la maîtrise de trois caractéristiques différentes pour les trois catégories : l’aspiration en moto 3; le freinage en Moto 2; et la plus grosse… accélération en Moto GP.

– Salut Dad, et ben dis donc, tu as l’air tout ravi. Rossi a gagné ?
– Non.
– Alors Lorenzo sur l’autre Yamaha ?
– Non plus.
– Heu… Ah, je sais. Fabio Quartararo a gagné son premier grand prix en Moto 3.
– Non plus. Mais ce n’était pas loin. Fabio a été bien toute la course, mais il s’est fait avoir dans les deux derniers tours. Bien qu’il y ait eu des choisés-croisés incessants entre lui, Binder, Bastianini et Mir, il faut bien avouer qu’il a très mal géré la fin de course. Il pouvait gagner, mais les autres ont été plus malins. D’ailleurs c’est son coéquipier qui a gagné, tu comprends le soucis ?
– Yoan Mir a gagné son premier grand-prix ? Avant Fabio ? Ben alors ça, c’est innattendu.
– Mouaip. En même temps il est doué le Mir.
– Fabio doit l’avoir de travers.
– Il peut. Je dirais même : il doit. Certains diront que Mir a eu de la chance, mais un peu comme Luthi quand il laisse passer tout le monde, Mir a su pousser du coude Fabio pour lui passer devant à 5 tours de la fin, et là, Fabio aurait dû le coller jusqu’au bout. Après, comme je te dis, ce n’était pas simple. J’accorde, à la défense de Fabio, qu’avec un Binder dans les pattes, sans parler d’un Bastianini, c’est compliqué. On parle quand même de deux des trois meilleurs pilotes Moto 3 de l’année…
– Et le 3e ? Navarro ?
– Tombé.
– M… il va perdre le contact au Championnat du monde sur Binder.
– Fallait pas tomber.
– Mais il était blessé, non ?
– Oui, mais fallait pas tomber, point. C’est là où on reconnaît les grands. Ils ne tombent pas quand c’est important.
– Roh ben dis. Tu peux parler. Je te rappelle que Rossi est tombé à Assen il y a un mois. Bon, mieux vaut que je laisse tomber là-dessus avec toi, Papounet. Je ne voudrais pas t’enlever ton sourire. Alors ? Ca vient de quoi ? Luthi a gagné en Moto 2 ?
– Rah ben non. Il a fait comme d’habitude, il s’est fait blouser par tout le monde. Il est 4e. Hors podium. Médaille en chocolat.
– Loin derrière les autres ?
– Mais non, justement. Dès le début, il était dans le coup. Mais Luthi a pris le virage No 2 d’une manière ultra radicale toute la première moitié du Grand Prix. Et à chaque fois, il y perdait du temps par rapport aux autres: Zarco, Morbidelli, Schrotter et Rins.
– Schrötter avec les premiers ? C’est cool.
– Il a craqué sur la fin. C’est Zarco qui a mis tout le monde d’accord, encore. Mais avec la manière, rien à dire.
– Et alors ton histoire de virage ?
– Et bien justement. Luthi perd du terrain sur tout le monde, quelques mètres à la réaccélération du virage No 2 à chaque fois, et voit un Zarco partir devant lui rejoindre Morbidelli en tête – en se laissant encore une fois dépasser d’un petit coup d’épaule de Zarco auquel « Gentil Luthi » cède toujours aussi pitoyablement. Et puis Rins, qui avait fait un départ moyen, revient aussi petit à petit sur Luthi. Et alors, j’ai enfin cru voir un espoir de changement chez Thomas : Il commence à prendre le virage No 2 comme les autres, sans planter comme un malade, ce qui lui faisait, certes, gagner 3 mètres au freinage, mais perdre 10 mètres ensuite à la réaccélération. Bref, dès le moment où il commence à prendre ce virage comme les autres, large et coulé, voilà qu’il reprend petit à petit son retard sur les deux devants, tout en laissant Rins derrière.
– Et donc ? Qu’a commis le coupable Luthi à tes yeux ?
– Et bien cet Agnaf, au dernier tour – et alors qu’il avait réussi, 8 tours avant la fin, à passer Morbidelli pour la 2e place, voilà qu’il refait son freinage extrême « à la c… » au virage No 2. Et hop, il reperd tout son gain des tours précédents, et se fait rejoindre et passer par Morbidelli « et » par Rins dans les derniers virages…
– Oui, évidemment. Cela doit être très frustrant pour Thomas, si près d’un nouveau podium.
– Désespérant, oui… J’ai l’impression que Luthi nous fait l’ »Ecole de tout ce qu’il ne faut pas faire en Grand-Prix » en cette saison 2016.
– Ton impression vient peut-être aussi parce que tu ne fais que de le regarder, lui, en tant que pilote Suisse.
– Non, ma fille. Les autres font des bourdes – même parfois plus colossales – mais ils en font moins. Luthi ne sait pas jouer des coudes, alors que tous les autres le font.
– Oui, je sais, tu nous rappelle ça à chaque week-end.
– Et je le ferais jusqu’à ce qu’il commence à se battre vraiment. Mais en plus il faut qu’il commence à comprendre et comparer ses freinages et trajectoires avec les autres plus vite en course. Il aurait été en tête toute la course en freînant mieux à ce foutu virage dès le début.
– Bon, moi je vois le positif. Si tu dis qu’il s’est adapté en course, c’est un bon point pour l’avenir.
– Mouais. Si tu veux.
– Et donc, d’où vient cet air bienheureux ? Marquez n’aurait pas marqué de point, ce qui te ravis ?
– Si, si. Il en a marqué. La Honda était pathétique devant les Ducati et les Yamaha, mais il a quand même fini 5e. Non, ce qui me ravit, c’est que j’ai fait une bonne sieste.
– Pardon ! Toi, tu t’es endormi devant la moto GP ?
– Et bien oui, ma petite Suzy. La course a été super excitante durant les 4 premiers tours, chacun des favoris est passé en tête un petit moment, sauf Marquez sur son scooter Honda derrière. Mais on a vu Rossi, Lorenzo, Dovozioso et Iannone prendre la tête tour à tour, en réussissant ou se « loupant » dans les freinages forts, et on a cru alors que la course allait être intense et incroyable. Et puis une fois que les Ducati ont réussi à prendre 10 mètres d’avance, c’était fini. La course est restée figée pendant 20 tours, le temps d’une bonne sieste. Il a juste fallu se réveiller pour voir Iannone passer Dovizioso dans les derniers tours. Rien d’autre à dire, ce fut la course la plus ennuyeuse que j’ai vu depuis des années. Des dizaines d’années même…
– Ben si j’avais cru t’entendre dire ça un jour.
– Mais ce n’est pas la faute aux pilotes ou à leurs moto. C’est le circuit. Je n’ai jamais trouvé ce circuit intéressant.
– Ben, les pilotes disent qu’ils s’y amusent bien. Que ça monte et que ça descend et que c’est fun.
– Peut-être, mais cela reste un circuit d’accélération et de freinage uniquement, sans aucun virage vraiment technique où un pilote peut se démarquer par son pilotage, ses angles et son culot, plutôt que par la puissance de sa machine. C’est l’opposé d’Assen, où chaque virage demande un « touché » différent.
– Je comprends. En même temps tu dis qu’il y a eu du suspense en Moto 3 et Moto 2.
– Oui, parce qu’il y a plus de motos aux performances similaires. Fallait rester dans « l’aspi ». Mais bon, vivement Brno dimanche prochain.
– Oui, le circuit est beaucoup plus tournant. C’est sûr que là c’est le pilote « et » la machine ensemble qui gagnent. Pas juste parce qu’on a une bonne machine.
– Tu l’as dis Suzy. Allez, je retourne dormir en attendant.
– Pfff…

20 juillet – Assen & Sachsenring : Pétoche sous la pluie

Pour la venue au temple de la moto d’Assen, et du tourniquet du Sachsenring, c’est la pluie qui sera fait la vedette. Grand prix interrompu à Assen, route changeante au Sachsenring, les prévisions de victoire des favoris ont été hautement remises en question, et de nouvelles têtes se sont affirmées.

– Ben alors, Papa Iam. Tu es passé où ? En vacances ?
– J’appelerais plutôt cela un pélerinage, Suzy.
– Wow ! Tu es allé à Urbino ? Là où est né Valentino Rossi ?
– Mais non. J’ai été à Assen chercher une nouvelle jeunesse.
– Mpfr…! Pardon, Dad. Mais de quoi tu parles ? L’apéro était généreux ?
– Nan.
– Alors c’est une prescription de ton médecin pour ta circulation sanguine ?
– Mais non, enfin. Allez, je t’explique. Tu as vu les derniers grand-prix ?
– Oui, bien sûr. C’était un peu « Chantons sous la pluie ». Il ne manquait plus que Gene Kelly et le divertissement aurait été parfait. Mais à ce stade, je dois bien avouer que cela ne ressemble pas trop aux courses que l’on aimerait voir.
– Je suis parfaitement d’accord avec toi, Suzy. Néanmoins, tant que les circuits seront à ciel ouvert, il faudra faire avec la pluie, et pour devenir Champion mondial, il faut savoir rouler sur l’eau.
– Ah ! Je te vois venir. Tu remets en cause les capacités de pilotage de Lorenzo, là.
– Euh… oui. Cela, c’est sûr. Il est vrai que de voir un Champion du monde avoir autant la « pétoche » sur route mouillée, ça fait soucis. Et surtout, je ne me souviens pas avoir vu un Champion du monde moto perdre autant ses moyens sur l’eau. Les Champions du monde ont pour trait commun de réussir à être performant en toute situation. D’accord, éventuellement un peu de « moins bien », comme Pedrosa qui ne finit que 6e ou 7e dès que quelque chose le contrarie. Mais de là à finir 15e, et à 1 minute 17 secondes…
– Mouais. Je te comprends. A sa défense, j’avance qu’il rumine encore manifestement encore le départ au ciel de Salom.
– Certes. Peut-être. Mais le plus beau cadeau qu’il puisse faire à son ex-pote régional et sa famille, c’est de gagner et de lui dédier, non ?
– Oui. Bon, alors ? Ce pélerinage ?
– Et bien, ma petite Suzy, à voir la nouvelle jeunesse de Valentino, je me suis dit qu’il y avait vraiment quelque chose là-bas.
– Tu cherchais un prêtre dans la Cathédrale de la moto ? Dad, c’est une expression.
– Mais je sais, c’est moi qui t’ai appris ça à tes 2 ans devant ton gâteau et ton premier casque. Non. C’est par rapport, justement, au comportement de Valentino.
– Il s’est mis par terre tout seul à Assen, Dad.
– Oui, justement. C’est simple. Cette année, Valentino est le plus affûté de tous, non ?
– Ca se discute en comparaison avec Marquez, mais oui, vas-y, continue.
– Et avant Assen, ses belles victoires nettes acquises sur la piste, et non à cause des soucis de ses adversaires, comme parfois l’an dernier.
– D’accord là-dessus.
– Et bien voilà. Le bonhomme arrive à Assen, le circuit mythique surlequel il a toujours excellé…
– C’est normal, c’est un vrai circuit de pilote.
– …Absolument. Et donc Valentino arrive avec un package de confiance énorme. Un package de Champion du monde 9 fois qui vient gagner la course pour viser son 10e titre.
– Je te suis toujours.
– Et voilà que la pluie arrive. Encore mieux. Qui d’autre sur le plateau roule-t-il mieux sous la pluie que Valentino Rossi ?
– Carlos Checa, voir Olivier Jacques.
– Ca, c’est le passé. je te parle d’aujourd’hui.
– Peut-être Crutchlow. Mais continue.
– Et donc, alors que la course commence, et que Valentino s’envole petit à petit, avec d’autres, certes, comme Crutchlow ou Dovizioso qui semble retrouver de bonnes sensations…
– Comme quoi Assen + pluie = révélateur des vrais bons pilotes…
– Si tu veux, Suzy. Mais alors que tout semble fait pour une victoire sans discussion de Rossi, qui au passage laisse un Marquez aussi habile sur sa Honda qu’un panda sur un scooter..
– Tu proposes de drôles d’images, Dad…
– …et on ne parle même pas de Lorenzo, aussi appeuré qu’un chat devant une baignoire, voilà que Rossi force le rythme comme un jeune fougueux inexpérimenté et…
– …se met par terre. Je comprends, Dad. Oui, Valentino a fait de la « surconfiance ». Je suis d’accord.
– Et pareil au Sachsenring. Arrivée de la pluie; Rossi dans le groupe de tête; Marquez qui va jouer dans le sable quelques instants parce qu’il s’est raté dans un freinage; Lorenzo toujours devant sa baignoire, à réfléchir, je l’espère pour lui, à une thérapie de groupe pour gens aquaphobe; et puis alors que Marquez, perdu pour perdu, chausse des slicks alors qu’il cesse de pleuvoir, et que le staff de Rossi lui dit de rentrer pour faire idem, voilà que Valentino refuse de rentrer. Comme un garçon boudeur, ou je dirais, un jeune prétentieux, justement, qui pense qu’il sait mieux depuis la piste s’il va recommencer à pleuvoir ou non, tout comme il saurait mieux les temps de ses concurrents. Bondieu, ces choses-là c’est le stand qui sait.
– Oui, il est vrai que Rossi est rentré 5 à 6 tours trop tard. Mais il faut aussi dire que Marquez a eu le Q bordé de nouilles.
– Ah ben ça, je ne te le fait pas dire. Il est clair que ces deux Grand Prix sous la pluie avantageaient Rossi, mais qu’au final, face à cet excès de jeunesse stupide de celui-ci, et d’un opportunisme à tout épreuve de Marquez, et bien c’est lui qui a montré l’expérience d’un vieux motard.
– Et alors ? As-tu rajeuni ?
– Et bien pas vraiment, car je me suis aussi beaucoup énervé sur Fenati, en moto 3.
– Je vois. Tu vas le comparer à Lorenzo.
– Bien sûr. Ce bonhomme-là, aussi, est promis – tout au moins annoncé comme un des prochains tout grands – mais un peu de pluie et le voilà 18e. Alors excuses-moi, mais à moins d’une saison de beau-temps toute l’année, il ne sera jamais Champion. Idem pour Quartararo, 23e. Mais là je sais que tu souffres autant que moi.
– Oui. C’est mon petit chouchou. Mais là je ne comprends pas. J’ai peur qu’il commence à gamberger après toutes ces chutes, événements et pluie. Même moi j’en viens à penser qu’il faut qu’il se reprenne en main. Mais j’y crois.
– Tant mieux pour toi. Pour le coup, tu vois, la victoire de Khairul Idham Pawi est le genre de maîtrise qui me fait le voir arriver un jour en Moto GP et aller loin. Même son co-équipier Ono sur la même moto n’arrivait pas à le suivre. Et puis Binder, qui est bien parti pour gagner le titre en Moto 3, a justement fait une bonne démonstration de comment gérer sous la pluie. En fait, je pense souvent qu’on ne peut pas vraiment contrôler un motard de Grand Prix. Sauf « Gentil Luthi », ils sont tous un peu égocentriques, et donc imprévisible devant une forte concurrence. Mais là sur ces deux derniers week-ends, j’ai l’impression que presque tous les stupides sont devenus sages, et inversement.
– A la décharge de Luthi, il a dit être fiévreux.
– Ah ben voilà exactement ce qui m’énerve: les excuses… Il faut être français ou suisse-Allemand pour dire être fiévreux avant la course. C’est comme de dire « Hé les potes. Ce sera sans moi ce week-end. J’ai déjà perdu… » A ce stade, fais tes valises et rentre à la maison ! Et reviens quand tu sera guéris ! Dans ces cas-là, tais-toi, ne dis rien, fais ta course, et tu raconteras dans 10 ans à un journaliste qui fera ta bio que ce jour-là tu n’étais pas bien. Non mais c’est quoi cette histoire. Tu vas voir que les autres pilotes vont lui apporter un thermomètre et une bouillote au prochain Grand Prix. Un peu de thé, Thomas ? Aimerais-tu que je déplace la couverture ?
– Bon, je crois qu’on va en rester là aujourd’hui, Dad. Je vois qu’il n’y a rien eu ces deux dernières courses pour te rendre content.
– Si. Je salue le panache de Folger, et surtout au dernier virage de la course Moto 2. Franchement, et je pense comme tout le monde, je me disais qu’il était trop loin pour tenter de dépasser Zarco et gagner la course. Ou, du moins, s’il se lançait, qu’il allait se rater et embarquer Zarco dans sa chute. Mais non. Il a fait un dépassement incroyable.
– Sauf que Zarco a su reprendre une meilleure trajectoire d’accélération.
– Et oui, Suzy. Mais ça, c’était de la moto. De la part des deux, un grand moment.
– Fêtons cela. Une petite verveine, Dad ?

Écrit par Iam & Suzy Jesse

Commentaires Facebook

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.