Pas de crise deux fois

N’en déplaise aux catastrophistes de tout poil, le dernier week-end blanc était une exception. Genève-Servette est revenu à ses habitudes de ce début d’année : deux matches aux antipodes en terme de qualité de jeu. Le paradoxe étant que cette fois-ci, c’est le moins bon qui a débouché sur une victoire.

On le lisait un peu partout : attention, les Aigles restent sur trois défaites consécutives, les joueurs ne sont plus en confiance, etc. Peu importe que sur cette période, ils aient affrontés deux des ténors du championnat. Ou encore qu’ils aient été volés contre Davos, le but décisif ayant été entaché d’un hors-jeu que même Gilbert Montagné aurait remarqué. Non, peu importe, les chiffres sont formels, et les chiffres ne mentent jamais. D’autant qu’accessoirement, une bonne petite crise en perspective fait toujours parler, surtout en période de ventre mou.Malheureusement pour ceux qui regrettent le mois de novembre, le week-end dernier offrait Bâle en amuse-gueule. Et si, on l’a vu, on peut encore perdre contre Fribourg en y mettant du sien, il semble bien difficile d’égarer des points contre les Rhénans en cette fin de saison. À tel point que cette équipe pourtant intéressante sur le papier semble ne pouvoir se raccrocher pour son salut qu’au fait que si «Droopy» McParland n’a jamais qualifié son équipe pour les séries, il n’a jamais été relégué non plus. Les deux mille Bâlois pour qui le hockey a une vague importance retiennent leur souffle en espérant que la première fois ne soit pas pour cette année.
Les Genevois n’ont donc pas eu à se décarcasser plus que ça pour, eux, faire un pas supplémentaire vers les playoffs. Depuis le début du championnat, on se disait que le jour où Laurent Meunier cadrerait un tir, ça ferait mal. Après 18 minutes ce 2 février, c’était enfin le cas. Et, effectivement, Daniel Manzato cherche encore ce qui s’est passé. C’était alors 3-0. On n’avait pas encore vu beaucoup de hockey, mais le match était déjà plié.


Photo Pascal Muller

Tout cela n’avait bien sûr pas la vertu de rendre le match plus passionnant. D’autant moins que les buts grenat continuaient de tomber régulièrement au milieu d’une défense bâloise affichant une apathie à faire frémir Moritz Leuenberger. (C’est dire.) Décidément chaud bouillant, Meunier se permettait même de cadrer un deuxième envoi en fin de match, avec le même résultat que le précédent. Trois points dans la besace sans trop se fouler, et l’on pouvait se concentrer sur la rencontre suivante.
Le samedi offrait en effet un challenge d’un tout autre calibre. Battu déjà deux fois (dont une en leur fosse) cette saison par les Genevois, le Club des Patineurs de Berne n’avait pas trop l’intention de faire des cadeaux. Ils ne pouvaient d’ailleurs pas trop se le permettre, risquant toujours de terminer 5e et se voir ainsi choisis par Kloten qui a de bons souvenirs dans la ville fédérale.
Les plantigrades, imitant leurs supporters, entamaient ainsi la rencontre tambour battant. Dans leurs petits souliers, les Genevois résistaient pourtant fort vaillamment, montrant des qualités de cœur qu’on ne leur connaissait plus depuis un moment. Au quart d’heure, en infériorité numérique, Laurent Meunier, toujours lui, interceptait un puck à la bleue et partait en contre. Rejoint, il ridiculisait Bührer, Rötheli et Söderholm d’une passe dans le dos que Jan Cadieux n’avait plus qu’à pousser dans le but vide. Euphorie dans les rangs grenat. De courte durée toutefois.
Après une minute de grand à-peu-près hockeyistique, les Bernois se montraient à nouveau dangereux. Mais Gianluca Mona pouvait bloquer une reprise de Christian Berglund. C’était compter sans l’«opiniâtreté» du Suédois, qui ne se gênait pas pour pousser par deux fois la mitaine du gardien genevois. Jusqu’à ce que le palet finisse dans le but. Assez incompréhensiblement, Monsieur Schmutz accordait le but, après un conciliabule avec ses juges de lignes.


Photo Philippe Rayroud

Le mal était fait. Berne était relancé, et prenait les devants juste avant la pause. Et malgré les efforts des Aigles, admirables jusqu’au bout, ils assuraient le gain de la rencontre sur une xième rondelle mal contrôlée par Goran Bezina à la ligne bleue. Cadieux ne trouvera, lui, que l’extérieur du poteau de Bührer dans les dernières secondes, avant que Simon Gamache ne se lance dans un numéro de roulé-boulé digne de Pippo Inzaghi, suite à une charge relativement anodine, épaule contre épaule, de John Gobbi. Méconduite de match, tonnera l’arbitre, qui avait pourtant fait preuve auparavant d’une relative mansuétude envers une véritable agression par derrière de la part de Robin Breitbach («seulement» 2 + 10 minutes). Vous avez dit cohérence ?
Bien sûr, cette défaite n’a pas vraiment d’incidence au classement, la place dans les huit étant définitivement assurée. Mais elle a un goût amer. Pour la deuxième fois de la semaine, une rencontre bascule en défaveur des Grenat sur une grossière erreur d’arbitrage.
Cela n’a bien entendu pas manqué de faire jaser au bout du lac. Au premier rang des explications avancées vient évidemment l’éternel complot des méchants suisse-allemands qui veulent du mal aux Genevois. Or, on voit mal quel intérêt il pourrait y avoir à vouloir leur perte dans une phase de la saison où ils n’ont plus rien ni à craindre, ni à espérer. Difficile de croire également à un plan pour favoriser les grosses équipes : pourquoi diable offrir trois points à Davos si c’est pour faire de même 6 jours plus tard à Berne ?
Non, la réalité est plus prosaïque : nos zèbres vénérés sont complètement dépassés par la situation. Et la tolérance zéro n’a rien arrangé, contraignant un seul homme à observer mille et une choses, surtout loin du puck. Qu’attend donc la Ligue pour tester le système à deux arbitres principaux en vigueur, à la satisfaction générale, en NHL ? Car ce n’est pas en affirmant que l’arbitre a toujours raison même quand il se trompe qu’on aide ce dernier. Bien au contraire.

Résumés

Genève-Servette – EHC Bâle 6-1 (3-0 2-1 1-0)

Patinoire des Vernets : 5’496 spectateurs.
Arbitres : Danny Kurmann ; Gilles Mauron, Paul Rebillard.
Buts : 1’17 J. Gobbi (Y. Treille, M. Knoepfli) 1-0, 16’06 J. Cadieux (T. Deruns, M. Trachsler) 2-0, 18’06 L. Meunier (O. Keller) 3-0, 34’35 C. Bright (M. Maneluk, R. Fuchs) 3-1, 35’17 M. Knoepfli (P. Rytz, M. Trachsler) 4-1, 39’34 I. Fedulov (S. Aubin, J. Gobbi / 5 contre 4 / M. Maneluk) 5-1, 57’37 L. Meunier (T. Deruns, O. Keller / 5 contre 4 / C. Bright) 6-1.
Pénalités : 4 x 2′ contre Genève-Servette, 5 x 2′ + 5′ + méconduite de match (C. Bright) contre Bâle.
Genève-Servette : G. Mona ; J. Mercier, G. Bezina ; O. Keller, R. Breitbach ; J. Gobbi, S. Schilt ; P. Rytz ; J. Wright, S. Aubin, K. Law ; Y. Treille, L. Meunier, M. Knoepfli ; J. Cadieux, M. Trachsler, T. Deruns ; C. Rivera, P. Savary, I. Fedulov ; G. Augsburger. Absents : J. Horak (dos) et Jér. Bonnet (surnuméraire).
EHC Bâle : D. Manzato ; A. Plavsic, G. Voisard ; M. Astley, R. Stalder ; P. Liimatainen, L. Gerber ; M. Maneluk, C. Bright, R. Fuchs ; J. Walker, N. Anger, S. Voegele ; P. Della Rossa, A. Camenzind, T. Nüssli ; S. Tchannen, S. Tschuor, S. Schnyder ; F. Collenberg, T. Schwarz.
Absents : R. Bundi, A. Châtelain, M. Wuthrich (blessés) et D. Boss (surnuméraire).

CP Berne – Genève-Servette 3-2 (2-1 1-1 0-0)

BernArena : 14’916 spectateurs.
Arbitres : Daniel Schmutz ; Tobias Wehrli, Dany Wirth.
Buts : 16’04 J. Cadieux (L. Meunier / 4 contre 5  / S. Aubin) 0-1, 17’06 C. Berglund (S. Bordeleau, É. Landry) 1-1, 19’34 C. Berglund (S. Gamache, S. Bordeleau / 5 contre 3 / J. Wright, G. Bezina) 2-1, 21’32 J. Mercier (S. Aubin, K. Law / 5 contre 4 / A. Rötheli) 2-2, 34’02 C. Dubé (S. Gamache) 3-2
Pénalités : 6 x 2′ contre Berne, 9 x 2′ + 10′ (R. Breitbach) + 5′ + méconduite de match (J. Gobbi) contre Genève-Servette.
CP Berne : M. Bührer ; Dom. Meier, R. Kobach ; B. Gerber, M. Steinegger ; D. Jobin, T. Söderholm ; R. Ziegler ; S. Bordeleau, É. Landry, C. Berglund ; P. Bärtschi, C. Dubé, S. Gamache ; M. Reichert, T. Ziegler, I. Rüthemann ; P. Berger, Dan. Meier, C. Camichel ; A. Rötheli. Absent : P. Furrer (blessé).
Genève-Servette : G. Mona ; J. Mercier, G. Bezina ; O. Keller, R. Breitbach ; J. Gobbi, S. Schilt ; P. Rytz ; J. Wright, S. Aubin, K. Law ; I. Fedulov, L. Meunier, M. Knoepfli ; J. Cadieux, M. Trachsler, T. Deruns ; C. Rivera, P. Savary, G. Augsburger ; Jér. Bonnet.
Absents : J. Horak et Y. Treille (dos).

Écrit par Yves Grasset

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