Réintroduisons les finales dans le football vaudois !

Peu après son entrée en fonction en 2000, le président de l’Association Cantonale Vaudoise de Football Jacky Marcuard s’était engagé à supprimer toutes les finales de fin de saison dans les ligues régionales vaudoises et à assurer la promotion de tous les champions de groupe. Aujourd’hui, au terme de son mandat, force est de constater que l’ex-président du FC Chêne Aubonne a tenu parole : la seule rescapée des finales du foot vaudois est celle de 2e ligue, qui est imposée par la ligue amateur, puisque le canton ne dispose que d’une place de promu pour deux groupes de deuxième ligue.

Pour le reste, toutes les finales ont été abolies : les champions de groupe obtiennent automatiquement leur ticket pour le niveau supérieur et, lorsqu’il y a plus de places de promus que de groupes, on va repêcher les meilleurs deuxièmes. On en arrive ainsi à des situations ubuesques où des clubs, surtout en 4e ou 5e ligue, assurent leur ascension grâce à la défaite d’un club situé à l’autre extrémité du canton qu’ils n’ont jamais rencontré et dont ils n’ont jamais entendu parler, ou parfois sont même promus sans s’en rendre compte !Et pourtant, lorsque l’on voit le succès populaire rencontré par l’unique finale subsistante (celle de 2e ligue entre Le Mont et Montreux, avec 800 spectateurs à l’aller et près de 1’500 au retour), on ne peut s’empêcher de penser que le public est friand de ce type d’événement. On regrette avec nostalgie la vénérable institution que constituaient les finales de 3e ligue, avec le souvenir de duels épiques, de spectateurs sur tout le tour des terrains d’Assens, Morges, Poliez-Pittet, Donneloye, Apples ou Bavois, de tonnelles et de cantines montées à la hâte et de troisièmes mi-temps qui se prolongeaient jusque tard dans la nuit. Pour résumer, c’était la grande fête du foot des talus dans une période où le reste de la planète foot s’arrête de tourner pour la pause estivale. Même des finales de 4e ou 5e ligue (que j’ai eu l’occasion de disputer une fois, ascension en 4e ligue à la clé), qui servaient à départager les meilleurs deuxièmes, représentaient un moment privilégié et tranchaient avec la routine du championnat par des matches à haute tension entre deux prétendants à la promotion et les fameuses parties sur terrain neutre (y compris en 5e ligue !). C’était même plus sympa de finir deuxième et de jouer les finales que d’être promu directement avec une première place.


Recréons l’événement autour des terrains vaudois !

Autant je ne suis pas favorable à l’introduction de play-offs en Ligue Nationale, où les enjeux financiers sont tels qu’il est délicat de jouer une promotion sur quelques matches, autant je pense que, dans le football régional, le plaisir de jouer des finales contre des adversaires attractifs et devant un public beaucoup plus nombreux qu’à l’accoutumée, devrait l’emporter sur le risque de manquer une promotion sur des finales après avoir dominé le reste de la saison. Finalement, passer de la 3e à la 2e ligue ou de la 4e à la 3e ligue, cela ne fait que peu de différence au niveau recettes ou nombre de spectateurs, le seul inconvénient d’une ascension ratée peut être le départ de certains éléments mais on constate que de plus en plus de joueurs préfèrent descendre d’une ligue pour jouer une promotion plutôt que d’être dans le ventre mou du classement à l’échelon supérieur.
Nous avons relaté sur CartonRouge.ch les magnifiques promotions en 2e ligue du FC Orbe et du FC Champvent. Ces deux équipes méritent largement leur promotion, ont su faire les points qu’il fallait au bon moment et la fête a été mémorable mais on ne peut s’empêcher de regretter que l’ascension ait été acquise dans un match à sens unique contre un adversaire démobilisé de milieu ou de queue de classement. La fête n’en aurait été que plus belle et le public beaucoup plus nombreux si cette promotion avait été acquise dans un duel contre un autre prétendant à l’ascension. Car un duel au sommet décisif pour la première place au mois d’avril n’attirera jamais les foules ; en revanche, une finale, avec un minimum d’organisation, c’est la timbale assurée entre les entrées spectateurs, la vente de boissons et de repas, un programme de match et une tombola établis à la hâte ou encore l’annonce des ballons de match. Et puis des finales, c’est l’occasion de faire revenir au terrain ceux qui en avaient oublié le chemin ou qui ne se souvenaient même plus de l’existence de l’équipe locale de football.


Avec des finales, y aurait-il eu plus de monde
pour fêter la promotion du FC Champvent ? 

Le principal argument avancé contre les finales est que celle-ci serait contraire à l’équité sportive. Il serait soi-disant injuste qu’un champion de groupe puisse manquer la promotion sur des finales. Personnellement, sans rien enlever aux mérites des autres promus en 2e ligue, je me demande où est l’équité sportive lorsque je vois le FC Gland réaliser 70 points sur 78 possibles et manquer l’ascension parce qu’il a eu le malheur de tomber sur la seule équipe de 3e ligue en Suisse romande qui a été capable de faire encore mieux. Le système actuel, qui n’ouvre pratiquement la promotion qu’au premier de chaque groupe, laisse une place beaucoup trop importante aux décisions, souvent opaques et controversées, concernant la répartition des groupes. Par exemple, pour la saison 2007/2008 de 3e ligue, comment se fait-il que Crissier II, Bussigny et Malley II se retrouvent dans le groupe de la Côte, alors que Renens, Ecublens et Forward Morges sont dans un groupe essentiellement composé d’équipes du Gros-de-Vaud et du Pied du Jura ? Pourquoi Cossonay ne se retrouve-t-il pas avec son voisin Venoge ? Comment se fait-il qu’Ependes, Chavornay et Bavois II, distant de quelques petits kilomètres, soient propulsés dans des groupes différents ? Sur quels critères les équipes de la région lausannoise sont-elles dispatchées dans les quatre groupes vaudois de la catégorie ?
L’importance de la formation des groupes a été démontrée en 2e ligue avec l’insolente supériorité du Mont. Dès la répartition des groupes connue, fin juin, avant même d’avoir disputé leur premier entraînement, les équipes qui héritaient de l’ogre de la catégorie savaient qu’elles ne pourraient espérer mieux qu’une honorifique deuxième place. A l’époque où Noël Allaz présidait l’ACVF, il y a avait un groupe de 3e ligue, dans le Gros-de-Vaud, ironiquement appelé «Groupe de la Vaudoise» parce que supposé plus faible que les autres (cela ne s’est pas toujours vérifié). A l’époque, les finales permettaient justement de corriger une éventuelle injustice puisque le vainqueur d’un groupe au rabais ne passait pas l’écueil des confrontations entre les ténors de la catégorie. J’estime plus équitable qu’une équipe rate la promotion après avoir finie première de son groupe, parce qu’elle a perdu en finale contre le deuxième d’un autre groupe dans une confrontation directe, à la loyale, plutôt qu’elle manque l’ascension parce que, suite à une décision de dirigeants dans un bureau, elle se retrouve dans le même groupe que l’épouvantail de la catégorie.


Pourquoi le FC Ependes n’est-il pas dans le
même groupe que son voisin le FC Bavois II ?
(Photo copyright Sylvain Liechti)

On pourrait par exemple, en 3e ligue, offrir une place en finales aux deux premiers de chacun de quatre groupes, qui seraient répartis en deux groupes de quatre. Cela représenterait trois rencontres à jouer, deux samedis et un mercredi soir, avec, par exemple, pour les équipes ayant finies en tête de leur championnat, l’avantage de jouer deux matches de finales à domicile. Les deux premiers de chaque groupe de finale seraient promus. De tels systèmes pourraient aussi être envisagés en 4e ou 5e ligue. A priori, le nouveau président de l’ACVF, Dominique Blanc, n’est pas fondamentalement opposé au retour des finales dans le football vaudois, pour autant que cela corresponde aux souhaits des clubs. A ceux-ci de se manifester en faveur des grandes fêtes du football régional aux quatre coins du canton ! Bien sûr, même en 5e ligue, il se trouvera des Jean-Michel Aulas en herbe qui viendront vous expliquer que les enjeux sont trop importants pour laisser place à la glorieuse incertitude du sport et qu’il est hors de question que leur club joue sa saison sur deux ou trois matches de finale, avec la part d’irrationnel que comporte toujours ce type de rencontres, ce qui fait d’ailleurs leur charme.  Mais, alors que l’on se plaint de la désaffection du public autour des terrains, de la Ligue Nationale à la 5e ligue, est-il vraiment rationnel de s’être débarrassé de rencontres que les spectateurs, que l’on sait très événementiels dans le canton de Vaud, appellent de leurs voeux et pour lesquels ils sont prompts à s’enthousiasmer ? Le retour des finales ne sera pas possible pour la saison 2007-2008, qui n’est de toute façon guère propice à cela, Euro oblige. Mais au delà, comme les prochains grands événements du football auront lieu avec décalage horaire (Afrique du Sud 2010, Pologne – Ukraine 2012, sans doute Brésil 2014), cela risque de laisser pas mal de belles soirées du mois de juin libres pour réhabiliter les grandes fêtes du football des talus. Pour le plus grand plaisir des joueurs, des spectateurs et des caissiers.

Écrit par Julien Mouquin

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11 Commentaires

  1. Salut Nico et désolé pour cette erreur – qui était glissée sous la troisième photo – que nous venons de corriger.

    Ependes et son voisin Chavornay sont bien dans le même groupe, mais pas Bavois II.

    Merci pour ton commentaire et à bientôt sur CartonRouge.ch !

    La rédac’

  2. Ouais… je comprend ton enthousiasme Julien, pour de magnifiques finales de ligues inférieures.
    Mais …
    Je pense que léquipe qui a passé toute une saison à se battre pour glâner la première place de son groupe, et qui arrive en finale pour ne pas connaitre de promotion, ben cest nul et décourageant. Je peux comprendre tes arguments, mais jai eu la chance de pouvoir pratiquer ton système, ayant joué en 4è ligue fribourgeoise (où de telles finales existent), effectivement les matchs de finales peuvent être sympa. Mais vient encore un problème de calendrier. Il faut bien se dire que les personnes qui jouent, on va dire de la 3è à la 5è ligue, sont des gens du bon peuple. Et que, pour la plus part, ne sont des bêtes athlétiques! Donc, on peut facilement admettre quun match par semaine , ça suffit , (je parle bien sûr dun cas général). Donc rajoute des finales en fin de saison, et le championnat doit finir fin mai, alors que cest là que la saison pour jouer au foot devient intéréssante. Et jouer en juillet, toublie compte tenu des vacances. Alors il faut commencer plus tôt? Ben je pense pas car en général début mars pour jouer au foot, cest pas terrible et je texplique pas l`état des terrain. Et je pense que ça peut permettre un meilleure brassage des équipes de ligue en ligue. (Ainsi même les équipes du gros de vaud ont une chance de promotion 😉 ). Bref, je pense que le système actuel est pas mal, mais que si les gens veulent des matchs de final, eh bien faisont des matchs à élimination direct (ou une poule) entre les premiers de groupes pour désigner un champion de ligue…?
    Jespère que je suis assez compréhensible, car écrire dans une rectangle de 3 cm sur 9 cm , cest pas facile… 🙂

  3. Si jai un avis partagé sur le retour aux finales de promotions (pour les avoir jouées et pu accéder à la 2ème ligue je confirme que cest un sentiment unique et une recette assurée à la buvette mais je rappelle quà lépoque on faisait 22 matches en saison soit 4 de moins quactuellement…fin de la longue parenthèse) je partage totalement ton point de vue concernant la répartition des groupes. Pour le cas de mon club, FC Pied du Jura, nous avons enfin obtenu de jouer dans le groupe de 3ème ligue de la Côte après en avoir fait le demande auprès de lACVF. Il est pour le moins logique que la fusion issue de Colombier-Pampigny et Apples-Ballens joue contre Lonay que se déplace du côté de Donneloye (de préférence en semaine bien sûr). Donc pour le équipes qui nestiment pas, géographiquement, être dans le bon groupe, inondez lACVF de courrier et peut-être quune fois ils ressortiront la carte de notre bon vieux canton et arriverons à un résultat satisfaisant (à une ou deux exceptions près puisque quils sont tout de même limités à 14 équipes par groupes).

  4. Merci pour cet article et je pense que le débat est ouvert. Pour avoir eu la chance de disputer des finales, je pense que cest le bonheur du footeux vaudois. Pouvoir se préparer à un match ou enfin il aura dautres spectateurs que le concierge du stade et le cantinier, cest assez spécial. Paradoxalement, cest les finales que jai perdu qui me laisse un souvenir inoubliable!!! Je suis donc pour le retour aux finales, et en ce qui concerne léquité sportive, elle sera respectée, puisque si ton équipe est la meilleure, elle doit battre tous ses adversaires…

  5. En même temps si ton équipe est la meilleure, elle est première du groupe donc cest pareil! Et si vous voulez faire une bonne recette à la buvette, nous sommes à disposition mais attention nous ne jouons pas plus haut que contre des équipes de 4ème ligue. Par contre à la buvette on doit tenir le rythme de la ligue A. Region géographique Nord Vaudois, un indice? 75 ans dexistence cette année…

  6. Euh Ripo, cest un peu méchant pour le FCE ce que tu viens de dire, parce quon nest peut-être pas BEAUCOUP plus haut que la 4ème ligue, mais quand même !

    Pis je confirme pour la Ligue A à la buvette…Paraît même quavec quelques renforts, un beau parcours en Ligue des Champions serait envisageable pour vous !

  7. Plus que la réinstauration de finales (il devient difficile de mobiliser un contingent complet de ligue amateur pour 15-16 matches au 2e tour, sans parler de la préparation, non?), je suis plutôt en faveur dun championnat où il y aurait 2-3 promus et 2-3 relégués par groupe, de façon à limiter au maximum le ventre mou et de donner un maximum denjeu qui manque souvent au 2e tour.
    Mais, je sais bien que beaucoup de frileux ne voudront pas augmenter le risque dune relégation.

  8. En voilà une bonne idée !!!

    pour avoir participé à plusieurs finales et à tous les niveaux, cest un moment qui reste dans la mémoire dun footballeur et cest ce quon peut raconter aux jeunes daujourdhui ! et perso cest ce que je raconterai à mes gosses… alors à 100% pour les finales !

    Denis Rochat

    ps à Serge : comment tas fait pour perdre des finales… cest tout un mythe qui sécroule pour moi 😉

  9. Personnellement, je serais déjà pour compacter le calendrier, afin déviter la reprise début mars et surtout la préparation en janvier – février.

    Ensuite pour ce qui est des finales, je pense quon devrait à la fois en refaire, mais également ouvrir la promotion à plus déquipes (et donc fatalement la relégation)

    Finalement, entre jouer les premiers rôles en 4ème ligue ou lutter chaque année pour le maintien en 3ème, quel est le plus intéressant? Et ceci est valable pour tous les échelons régionaux.

    Quand je pense que ça fait 3 ans que personne ne peut monter en 2ème inter dans le groupe du Mont à cause de lincapacité de ces derniers datteindre léchelon supérieur (bon cest enfin fait, heureusement)! Alors quavec au moins les 2 premiers de chaque groupe qualifié pour les finales ça mettait un peu de piment à ces groupes.

    Enfin, il y a à méditer, à ces chers Messieurs de la Vaudoise doeuvrer.

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