On a vu de la lumière, on est entrés

Le match au sommet de la première journée du championnat suisse entre Bâle et Zurich n’était pas vraiment prévu à notre agenda du week-end. Mais le chemin du retour depuis les quarts de finale de la Ligapokal allemande et de la Grösste Kirmes à Düsseldorf passe devant le Parc Saint-Jacques, on a vu de la lumière, on est allé voir, y’avait du foot et on est donc entrés. Ce n’est pas très flatteur pour le football suisse de pouvoir ainsi débarquer à l’improviste une heure et demie avant le coup d’envoi du choc entre les deux meilleures équipes du pays de ces dernières saisons et de trouver sans problème des billets aux guichets. En Allemagne, un tel match affiche complet trois semaines à l’avance. Même en ouverture de championnat, même pendant les vacances ou même en match amical.

Autre comparaison qui n’est pas à l’avantage du football suisse, l’hystérie sécuritaire qui entoure le match : policiers omniprésents, boucliers antiémeutes, véhicules blindés, grillages dans et autour du stade, séparation stricte des supporters, files interminables à l’entrée des virages où le nombre de portes et de Securitas est, comme d’habitude à Bâle, largement insuffisant… On est à des années lumières de l’ambiance festive vécue 24 heures plus tôt à Düsseldorf où 50’000 supporters, pour la plupart éméchés, pas forcément amis, se mélangeaient joyeusement, sans l’ombre d’un grillage et avec une présence policière invisible. Et pourtant, c’est bien à Bâle que des torches ont été craquées, qu’un pétard a explosé au dessus du gardien zurichois après une action litigieuse et que quelques heurts (heureusement mineurs) ont éclaté à la fin du match. Manifestement, en vue du prochain Euro, la Suisse a encore beaucoup à apprendre de son voisin germanique. Je crains que, là où l’Allemagne a réussi a donné une image festive, conviviale et détendue, la Suisse ne se montre que sous un angle frileux et craintif, avec des stades transformés en camp retranché et des supporters étrangers tous considérés comme des hooligans en puissance. Ce qui n’empêchera pas les forces de sécurité d’être débordées si un problème majeur devait survenir. Il reste encore dix mois pour corriger le tir mais le temps commence à compter.Ce duel entre le vainqueur de la Coupe et le champion en titre démarre sur les chapeaux de roue. Avide de revanche, le FC Bâle se montre dangereux après 30 secondes de jeu sur un centre du jeune Fabian Frei repris par la tête du revenant Streller que Chipperfield ne peut pousser au fond des filets. Mais ce n’était qu’un feu de paille et les occasions suivantes sont pour Zurich : un dégagement manqué de Marque permet à Hassli de se trouver en bonne position mais l’ex-Valenciennois rate complètement son tir (13e). Ce sera la seule erreur de l’ex-Baulméran qui abattait une carte importante dans l’optique de prouver à ses dirigeants qu’ils n’ont pas besoin de chercher plus loin le successeur de Boris Smiljanic dans l’axe central de la défense rhénane. Zurich s’est encore montré dangereux sur un tir d’Abdi détourné par Crayton et une tête au-dessus de Tihinen (19e). La blessure de Costanzo permet à l’éternel remplaçant Louis Crayton de bénéficier d’un peu de temps de jeu et de montrer qu’il n’a rien perdu de ses talents de comédien, talents que l’on avait découverts avec exaspération lors d’une finale de Coupe de Suisse des espoirs entre Lausanne et GC il y  a quelques années. Il a fallu attendre la 43e pour voir une nouvelle action bâloise, un tir croisé sans grand danger de Chipperfield.

Incontestablement, ce FCB n’est pas l’ogre annoncé en cette journée de reprise. Si les pensionnaires du Jöggeli possèdent comme d’habitude la meilleure équipe du pays sur le papier, il me paraît un peu prématuré d’affirmer que les Bâlois vont survoler ce championnat 2007-2008. Trois titulaires importants sont partis (Smiljanic, Rakitic et surtout Petric, en plus de Buckley et Sterjovski) et pour l’instant les arrivées compensent tout juste les départs (Hodel, Carlitos, Cabral et les retours de Streller, Huggel et Carignano). Les retours de Streller et Huggel sont certes un gros coup sur le plan médiatique mais pas une garantie absolue de succès. S’agissant de l’ex-joueur de l’Eintracht, on dira même qu’il trouvera à Bâle, avec Ba et Ergic, une concurrence plus féroce qu’à Francfort où les départs de Jones et Rehmer ainsi que les blessures de Chris et Vasoski lui auraient laissé le champ libre s’il avait persisté dans son aventure allemande.
Ce Bâle – Zurich n’a jamais atteint des sommets mais s’est animé après la pause. Deux centres de Zanni trouvent la tête de Chipperfield, bien détournée par Leoni (52e), puis la main de Von Bergen, qui a échappé à l’arbitre et surtout à son assistant, pourtant idéalement placé (53e). Cette action a le mérite de réveiller le Jöggeli qui somnolait jusque là. C’est pourtant Zurich qui est passé tout près de l’ouverture du score en deux occasions : un coup franc d’Abdi repris par la tête de Stahel, seul sur la ligne des cinq mètres, juste au-dessus (64e) et un tir de ce même Stahel dévié par Marque qui aurait très bien pu finir sa course au fond des filets (65e). Invisible jusque là, Streller s’est mis en évidence à la 68e avec un centre parfait que Chipperfield n’a pu contrôler. L’Australien a été plus heureux dans la minute suivante, puisque sa percée rageuse, relayée par un contre favorable de Caicedo sur Aegerter, a permis à Marco Streller d’inscrire l’unique but du match sur un tir dévié dans le petit filet. Une réussite qui voudra des commentaires fort élogieux dans la presse alémanique à l’attaquant de la Nati, alors qu’il a été transparent pendant presque tout le reste du match. Tu me diras, c’est ça le talent du buteur mais je demande quand même à revoir l’ex-joueur du VfB Stuttgart avant d’affirmer qu’il peut devenir (ou redevenir) un joueur majeur de notre championnat.
Le FCZ est assommé par ce but et ne se crée qu’une seule occasion d’égaliser, un tir de Rafael détourné par Crayton. Le résultat est un peu sévère pour des Zurichois qui auraient largement mérité le match nul. Le quatuor médian new-look du FCZ (en plus des joueurs partis, l’entrejeu zurichois était encore privé de Cesar, malade) a parfaitement soutenu la comparaison avec les cinq demis du FCB. C’est plutôt en attaque que Zurich a péché, avec un Hassli qui n’a pas paru très concerné. Si l’ex-joueur de Xamax, Servette et Saint-Gall pense que, venant du championnat du France, il peut jouer sur une jambe en Suisse, il se trompe lourdement.

Il est difficile de faire des pronostics alors que les contingents ne sont pas encore bouclés et que débarquent dans notre championnat des joueurs inconnus. Compte tenu des moyens et du contingent à disposition, les deux récents titre du FCZ tenaient du miracle, il sera extrêmement difficile de réitérer l’exploit une troisième fois. Néanmoins, si le club parvient à éviter une nouvelle vague de départs (notamment en cas de non qualification pour la Ligue de Champions), Zurich jouera à nouveau les premiers rôles cette saison et n’aura pas à lutter à la hauteur des Aarau, Thoune, Lucerne ou Neuchâtel Xamax. Son effectif actuel n’a rien à envier à qui que ce soit en Suisse, hormis celui du FC Bâle. Dzemaili est déjà absent depuis quelques mois, il n’y a donc, au jour d’aujourd’hui, «que» Margairaz et Inler à remplacer. Ces deux dernières saisons, Zurich a parfaitement su pallier la défection d’éléments clés comme Gygax, Tararache, Filipescu ou Keita. Si Inler, réserviste du FC Aarau, est parvenu à faire oublier Tararache, pourquoi Aegerter, qui a déjà joué la Ligue des Champions, ne pourrait-il pas occulter le départ d’Inler ? Reste la question essentielle, Bernard Challandes parviendra-t-il à assumer la lourde succession de Lucien Favre ? Réponse ces prochaines semaines.

FC Bâle – FC Zurich 1-0 (0-0)

Parc Saint-Jacques : 27’680 spectateurs.
Arbitre : M. Bertolini.
But : 69e Streller (1-0).
FC Bâle : Crayton ; Zanni, Majstorovic, Marque, Nakata ; Frei, Ergic, Huggel (62e Ba), Chipperfield, Caicedo (79e Burgmeier) ; Streller (75e Eduardo).
FC Zurich : Leoni ; Stahel (90e Staubli), Tihinen, Von Bergen, Rochat ; Abdi, Aegerter (87e Eudis), Chikhaoui, Tico ; Rafael, Hassli (70e Alphonse).
Cartons jaunes : 26e Rochat, 87e Burgmeier, 91e Tico.
Notes : Bâle sans Costanzo ni Carignano (blessés), Zurich sans Stanic, Stucki (blessés), Cesar ni dos Santos (malades).
Toutes les photos copyright Pascal Muller

Écrit par Julien Mouquin

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