Les Pays, peut-être Bas, mais Grands

Il est 5h45 ce matin, mon réveil sonne. Je me suis lancé un défi : avant de partir bosser, je vais me taper l’enregistrement d’un match dont le score est déjà connu de tous et qui, en plus, a unanimement été reconnu comme pas très passionnant. Mais comme j’étais chargé de la rédaction de son compte-rendu, je me voyais mal le faire en me contentant des 5 minutes de résumés offertes par la TSR. Quelle erreur !

Oui, quelle erreur ! Car en fait, les 5 minutes dudit résumé auraient parfaitement suffi à monter un article bout de bois, tant le reste du match aura été soporifique. Avant la partie, les données étaient claires et connues de tous : il «suffisait» aux Roumains de battre les Pays-Bas pour accéder aux quarts de finale et éliminer du même coup la France ET l’Italie. Oui mais voilà, les hommes de Van Basten, bien qu’alignant 9 remplaçants, ont décidé de jouer le jeu et ainsi de respecter les déclarations de leur coach qui répétait inlassablement que son équipe n’avait pas l’intention de laisser filer cette rencontre. Pourtant, ces déclarations n’avaient guère rassuré les deux derniers finalistes de la Coupe du Monde. En effet, même si celui-ci avait eu en tête l’idée d’éliminer ces deux nations, l’aurait-il hurlé sur tous les toits ? Bien sûr que non, il aurait plutôt demandé à ses joueurs de lever discrètement le pied à un moment donné, le temps de laisser les Roumains marquer ce fameux but. Mais c’était sans compter sur la classe de MvB, fidèle à ce qu’il était en tant que joueur. Quitte à devoir affronter l’Italie ou la France en demi, il a demandé à ses remplaçants de faire honneur à leurs couleurs et ainsi de terminer en tête du groupe avec 9 points. Car à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.
De plus, les Roumains avaient de quoi espérer avant le coup d’envoi, puisque lors des qualifications, ils avaient réussi à prendre 4 points sur 6 face aux titulaires néerlandais. Mais jamais au cours de cette rencontre, on les a sentis capables d’aller chercher la victoire. Fidèles à ce qu’ils ont montré lors de leurs deux premiers matches, ceux-ci se sont contentés d’attendre leurs adversaires dans leur camp et de tenter de procéder en contres. Mais les rares possibilités offertes aux hommes de Piturca ont été galvaudées et le grand Stekelenburg a finalement passé une soirée plutôt tranquille.

Un tout grand Monsieur

Les plus grosses occasions de la première période ont donc été oranges, mais ni Robben, pourtant seul devant Lobont, ni Huntelaar n’ont pu loger le ballon au bon endroit. Mais il ne faisait aucun doute que les Roumains n’y arriveraient pas. Et après 9 minutes en deuxième période, le but d’Huntelaar sonnait le glas des espoirs de Mutu et ses potes. Le très beau but de Van Persie mettra un terme définitif au peu de suspense qui aurait pu encore subsister. La voie était donc libre pour l’un des deux «bleus» qui s’affrontaient à Zurich.
Cette équipe (ou plutôt, ces deux équipes…) des Pays-Bas aura vraiment été la formation la plus attractive de ce premier tour, et la soudaine admiration du public suisse pour cette équipe semble confirmer cet état de fait. Le premier souci des Oranje est de marquer des buts, alors que beaucoup d’autres pensent d’abord à ne pas en encaisser. Prenez pour exemple les changements opérés par Van Basten à la mi-temps du match face à la France pour vous en convaincre. Pas de calculs, seulement la recherche du beau jeu et de l’efficacité. Il va maintenant falloir faire attention de ne pas trop s’emballer du côté des Oranje. Le route vers la finale est encore longue, à plus forte raison qu’en cas de victoire en quart, l’avant-dernier obstacle sera l’Espagne ou l’Italie.
Contrairement à la Coupe du Monde 1982, où la RFA et l’Autriche avaient disputé un match honteux dans le seul et unique but d’éliminer l’Algérie, l’Euro 2008 aura échappé à un tel scénario. Il y a eu hier soir trois vainqueurs : les Pays-Bas, l’Italie et le sport. Et dans le climat quelque peu pourri du football actuel, on ne peut que s’en réjouir.
Une question me taraude quand même : si l’Italie ou la France s’étaient retrouvées dans la situation des Pays-Bas, comment auraient-elles joué le coup ?
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Pays-Bas – Roumanie 2-0 (0-0)

Stade de Suisse, 30’777 spectateurs (à guichets fermés).
Arbitre : M. Busacca (S).
Buts : 55e Huntelaar 1-0. 87e van Persie 2-0.
Pays-Bas : Stekelenburg; Boulahrouz (58e Melchiot), Heitinga, Bouma, de Cler; de Zeeuw, Engelaar; Afellay, van Persie, Robben (61e Kuyt); Huntelaar (82e Vennegoor of Hesselink).
Roumanie : Lobont; Contra, Tamas, Ghionea, Rat; Cocis, Codrea (72e Dica), Chivu; Nicolita (82e Petre), M. Niculae (59e D. Niculae), Mutu.
Cartons jaunes : 78e Chivu.

Écrit par Robin Dousse