Juan Carlos rejoint Franco dans l’histoire

L’Espagne a été sacrée pour la deuxième fois de son histoire championne d’Europe. CartonRouge.ch était dans le stade Ernst-Happel de Vienne pour assister au miracle de la Roja, qui attendait cela depuis 44 ans. Vous le savez, on garde toujours le meilleur pour la fin. Mais vous savez aussi que votre site préféré aime nager contre le courant. C’est pourquoi après avoir eu droit aux plus fines plumes de la rédaction sur les 30 premiers matches de l’Euro, vous devrez vous contenter de celle de Psyko Franco pour cet ultime duel.

Enfin ! Comment entamer autrement cet article que par cet adverbe présent sur toutes les lèvres au coup de sifflet final ? L’Espagne, cette éternelle favorite battue, humiliée, cette éternelle promesse bafouée, cette éternelle déception, l’Espagne, donc, est redevenue reine du continent. Une longue, bien trop longue attente pour une équipe si talentueuse, quelles que fussent les générations qui la composèrent. Une attente interminable, depuis ce soir de 1964 où le capitaine Amaro Amancio leva le trophée. Le seul de l’histoire de la Selección.A cette époque, rendez-vous compte, l’Espagne était encore sous la dictature de Franco. Dimanche, à Vienne, c’est dans les bras du roi Juan Carlos qu’Iker Casillas s’effondra de bonheur. Iker Casillas, ce gardien hors du commun. Cet homme qui, alors que sa formation – la plus petite et la plus légère des 16 qualifiées – craignait le jeu aérien des Allemands notamment sur balles arrêtées, imposa sa loi dans sa surface par ses sorties assurées et apaisantes.

Iniesta au centre du monde

Déjà vainqueur presque à lui tout seul du tiers des points en Liga du Real Madrid depuis 5 ans, le gamin de la capitale fit définitivement son entrée dans le panthéon du football planétaire. Une trajectoire qui débuta le 12 septembre 1999 à San Mames, contre l’Athletic Bilbao (2-2). Une carrière qui n’est, loin s’en faut, pas encore arrivée à son terme.
Ni d’ailleurs celle de Fernando Torres, le buteur providentiel, dont la montée en puissance après un premier quart d’heure laborieux fut le véritable détonateur du jeu ibérique, toujours orchestré par les indescriptibles Xavi, Fabregas et Iniesta. Je me réjouis au passage de l’excellent Euro de ce dernier, trop peu connu jusque-là hors de ses frontières malgré son rayonnement hallucinant, son sens de la passe et sa vision de jeu difficilement égalable.


Un sacre totalement mérité

Historique et maladroit

Oui, l’Espagne est championne d’Europe. C’est bon de le répéter. Plus aucune équipe, depuis la France de Platini en 1984, n’avait conquis la couronne en s’étant imposée lors de tous ses matches de groupe. L’Espagne est championne d’Europe, et elle n’a rien volé. Bien au contraire. Sans quelques imprécisions, sans une certaine maladresse devant le but de Lehmann, la Roja aurait triomphé avec un écart bien plus important. Mais peu importe.
L’Espagne, lauréate de la Russie, de la Grèce, de la Suède, de l’Italie aux tirs au buts puis encore une fois de la Russie et enfin de l’Allemagne, est championne d’Europe. L’Espagne du grand-père acariâtre, celle du taureau Puyol, du rugueux Marchena, du polyvalent Sergio Ramos, du sérieux Capdevila, de l’inusable et infatigable Senna, des futurs très grands Villa et Güiza, du discret mais efficace Silva, des remplaçants de luxe Cazorla, Reina et Xabi Alonso.
L’Espagne est championne d’Europe. Juan Carlos ne s’endormit cette fois-ci pas, comme cela lui eut déjà arrivé par le passé. Comment le pouvait-il dans cette belle ambiance du Ernst-Happel ? Comment quitter des yeux la marée rouge, certes moins imposante en nombre que la blanche allemande, mais au moins aussi fervente (pour une fois…) ?

Prendre son temps

Je me souvins, à la fin du match, de ma rencontre avec Michel Platini. Il m’expliqua qu’au jour de sa prise de fonction à la tête de l’UEFA, il avait rallié Nyon de Paris à 70 km/h sur l’autoroute. «Je voulais prendre mon temps. Profiter de l’instant présent.» Un conseil qui n’échappa pas à Casillas. Le portier du Real Madrid ne se précipita pas pour lever la Coupe. Il respira un grand coup. Puis un autre. Et encore un autre. Mon ventre était tout noué. Mes yeux sont prêts à pleurer. Une boule dans la gorge, puis quelques sanglots spasmodiques. Michel Platini s’avance sur la scène. Il traîne avec lui Casillas dans son sillage. Le temps paraît suspendu. Il lui remet le trophée. Casillas se retourne, perché sur son estrade, comme pour se rapprocher des dieux. Il hurle, il tend les bras.
Après tout, il est champion d’Europe. Après tout, l’Espagne est championne d’Europe. Oui, championne d’Europe. Vous verrez, vous vous y ferez. Une question d’habitude. Une question de mémoire aussi. Souvenez-vous des deux claques infligées à la Russie, de la maîtrise contre la Suède, de la facilité contre la Grèce, de l’exploit d’avoir sorti l’Italie championne du monde. Souvenez-vous aussi longtemps de ce milieu de terrain qui a fait étalage, c’est une certitude, de sa classe et de sa maestria. Il suffisait de contrôler et de priver de ballon le milieu des Ibères, diront certains. Une tâche toute aussi compliquée que de contrôler le lift de Nadal à Roland Garros.


Torres a enrhumé Lahm

Beau champion

Merci donc à l’Espagne, pour avoir rappelé au monde entier que l’espoir n’est jamais vain. Merci aussi pour son jeu, pour ses mouvements sans ballon, pour son engagement, ses tripes. Merci d’avoir offert au ballon rond une équipe sacrée en produisant du jeu. Merci aussi d’avoir permis à la logique, pas souvent invitée dans les grands tournois, de triompher.
Car tu étais nettement supérieure à cette Allemagne-là. Cette Allemagne qui n’a finalement réalisé qu’une seule performance digne de son rang au cours de cet Euro, en quart contre le Portugal. Et merci aussi à l’Espagne de s’être imposée, coupant l’herbe sous le pied à tous ceux qui, en manquant d’idées et de culture, n’auraient pas manqué de citer la phrase de Lineker en cas de victoire allemande.

Allemagne – Espagne 0-1 (0-1)

Ernst-Happel Stadion, Vienne. 51’428 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : Rosetti (It).
But : 33e Torres 0-1.
Allemagne : Lehmann; Friedrich, Mertesacker, Metzelder, Lahm (46e Jansen); Frings, Hitzlsperger (58e Kuranyi); Schweinsteiger, Ballack, Podolski; Klose (79e Gomez).
Espagne : Casillas; Sergio Ramos, Puyol, Marchena, Capdevila; Senna; Iniesta, Xavi, Fabregas (63e Xabi Alonso), Silva (66e Cazorla); Torres (78e Güiza).
Notes : 23e tête de Torres sur le poteau. 68e Frings sauve sur sa ligne un tir d’Iniesta.
Cartons jaunes : 43e Ballack. 43e Casillas. 74e Torres. 88e Kuranyi.

Écrit par Psyko Franco

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25 Commentaires

  1. A souligner larbitrage sans faute du gros-méchant-nitalien-qui-a-pas-sifflé-un-péno-pour-la-Suisse.

    Dans le jeu pour lui et une précision hallucinante de ses assistants sur les hors-jeu. Du travail dorfèvre.

  2. Et dire quon a cassé, lapidé les italiens pour leur quart de final supposé indigne contre lEspagne. En attendant ce sont eux et eux seuls qui ont été en mesure de rivaliser contre la roja au cours du tournoi, étant à deux doigts de les éliminer, et en tous les cas nayant pas perdu contre eux, victimes de la loterie des tirs aux buts

  3. Jespérais que larticle soit à la hauteur de lévénement, je nai pas été déçu. Superbe article Psyko, merci!

    Et surtout superbe parcours de lEspagne. On en a rêvé, ils lont fait!

    Quel Euro! Quels beaux champions! Un sans faute et ce en produisant du beau jeu, avec de lengagment, de lintensité lors de tous les matchs: une machine à faire rêver! LEspagne a tutoyé la perfection lors de cet Euro 2008 dont on se souviendra comme une compétition qui se joue à 16 et où lEspagne gagne toujours à la fin…

    On peut être fier de notre séléction. Cétait de la folie sur la Plaza Colon hier soir pendant et après le match. Et la fête dura toute la nuit, dans chaque recoin de la capitale.

    Ce soir, les joueurs arrivent à Madrid avec la Coupe et ils seront reçus comme il se doit! Une autre fête, une autre nuit blanche.

    Vivement 2010 car cette équipe est encore jeune et nul doute quelle a encore de beaux jours devant elle.

    Bravo aussi à toute léquipe de Cartonrouge pour votre excellente couverture de lEuro! On a rit, on a polémiqué, on a pronostiqué (@rédac: jattends de connaître le prix!!)…

    La crevette vous aura certainement agacé mais lEspagne, elle, vous aura épaté.

    VIVE LE FOOT, VIVE CARTON ROUGE ET VIVA ESPAÑA!!!

  4. Ce nétait pas mon équipe préferée, mais je le dit quand même avec grand plaisir: Un grand bravo à lEspagne, titre mérité !

    Et bravo à GR(Gary Romain?) pour avoir souligné la performance remarquable du trio arbitral italien de cette finale, on a assez assassiné injustement les arbitres pendant cet Euro !

    On a vécu un superbe Euro, quelques grands matches : ALL-POR, ALL-TUR, ESP-RUS, HOL-ITA, HOL-RUS… et plusieurs buts danthologie ! On en redemande.

    Et on a même quelque espoir pour le futur de la Nati qui dès demain 1er juillet aura un COACH, bienvenue Ottmar !

  5. 44 ans – le chiffre à retenir.

    LEspagne gagne un deuxième championnat dEurope 44 ans après le premier.

    LItalie gagne sa troisième coupe du Monde 44 ans après la première.

    La France remporte lEuro 1984 44 ans après la débâcle contre les Allemands et la Blitzkrieg.

    Conclusion inévitable: lAngleterre va gagner la prochaine Coupe du Monde, tranquille. 44 ans après la précédente

  6. Alors là Nostradamus jespère vraiment que tu as raison! Come on England! Bon on va pas parler de lAngleterre hein. Donc bravo aux Espagnols qui méritent vraiment de gagner cet Euro! Les boches à la maison!

  7. Un grand BRAVO à Psyko pour cet article qui relate pleinement la réalité. On est tous daccord (sauf cet idiot de Napoleon) pour dire que lEspagne a amplement mérité ce titre. Cest léquipe qui a produit le plus beau jeu offensif et spectaculaire. De plus, lEspagne est toujours invaincue après 22 matchs (série en cours). Cest un très beau vainqueur pour un magnifique Euro. Vivement le Mundial 2010 pour revoir ça !

  8. Beau vainqueur, belle victoire, bel euro, énormément de plaisir à suivre (presque) tout les matchs, et merci à cartonrouge pour ces analyses « pertinantes » daprès match, et merci à Nostradamus parce que sans lui jaurais parié sur le Guatemala pour la Coupe du monde 2010 ! Jai failli faire une connerie… Merci España, au plaisir de vous revoir !

  9. Une performance irréprochable de M.Rosetti? Pas si sûr! En effet, jai le regret de vous rappeler quil a (encore!) oublié une main dans la surface dun espagnol à la 29ème minute. Et cette fois ce nest pas une main sur une frappe adverse, hein. Cest le défenseur espagnol, Ramos je crois (je suis pas sûr), qui manque son contrôle du pied et qui le termine de la main (et il contrôle pas de lépaule, mais vraiment de lavant-bras, cest flagrant).

  10. Bravo à lEspagne dont la victoire ne souffre daucune discussion… A lheure où le jeu passe dans une nouvelle ère, où finalement tout le monde sait défendre et où la différence se fait dans lanimation offensive, lEspagne fait un très, très beau champion !

    Plus que pas convaincus par leurs prestations contre lItalie et la Russie, où ils ont été autant responsables que leurs adversaires de la piètre qualité du match, la fessée donnée hier aux Allemands (qui aurait pu se solder par un 4 à 0) me convainc à 200%, bravo donc !

    Il serait dommage dentâché ce bel article et cette belle page de Carton Rouge par une polémique sur larbitrage, mais Rosetti est une grosse m.., un incompétent notoire, un manifeste à lui tout seul contre les arbitres…

    Il a étalé hier toute sa médirocrité heureusement par petites touches, heureusement sans changer lissue du match (tellement inchangeable en fait…).

    voilà donc…

  11. cest vrai 2 situations chaudes dans les 16 pas forcément bien interprétées, mais bon dans lensemble assez bon match du corp arbitral qui nest heureusement pas tombé dans le misérable petit piège tendu par ce petit malin de Podolski qui a veinement essayé de se faire coudebouler(il aurait du prendre des cours chez Materazzi….), bon cest vrai que certain à sa place se serait ensuite ecroulé par terre afin dobtenir un carton rouge et ainsi faire jouer les espagnols à 10 qui laurait sérieusement senti passé(on lui tiendra donc pas rigueur…)bravo lEspagne et tans pis pour lAllemagne ce sera pour 2010 sans aucun doute

  12. Belle équipe qui a largement mérité son titre: 7victoires/7, 12 buts pour, seul. 3 contre (vs 5/7, 9 pour et 7 contre pour le vice champion)

    Je ne crois pas a tes pronostics Nostradamus, que dire de la suisse qui aurait dû atteindre les quarts à la CM de 98…oses-tu pronostiquer une victoire italienne à lEuro 2012 (bon, là cest jouable) et surtout de la Grèce en 2048 !? moi je continue de croire au Guatemala pour 2010…

    ah joubliais: les espagnols aussi peuvent dire un Grand Merci à Köbi de ne pas avoir fait gagner le titre à la nati (les pauvres espagnoles auraient été terrorisés à lidée de laffronter) 🙂

  13. LEspagne est réellement le plus beau vainqueur depuis la coupe du monde 2002 (Brésil). Après la triste Grèce 2004 et la défensive Italie 2006. Voici enfin une équipe qui joue et qui attaque ! Lors de la finale de hier soir, et aussi lors de la 1/2 finale contre les russes, les espagnols ont pratiqué un football de rêve. le titre est 1000 fois mérité. En 2010, lEspagne sera la favorite N°1 :o)

  14. Larbitre il change le match à la dernière minute en empêchant Schweinsteiger de marquer en sifflant une faute inexistante dun attaquant allemand. Donc le scénario allemand habituelle a été annullé. Ce naurait pas été mérité, ni juste, mais bon comme dhab avec les allemands.

  15. a noter pour ceux qui ont vu la finale de 84 perdue par les espagnols contre la FRANCE 2-0 (a lepoque tres seduisante avec le trio magique Platini Tigana Giresse )que un espagnol se promenait apres le match (je ne sais pas lequel!!!) avec le tricot de Arconada(vert noir) ,le tres celebre gardien espagnol mystifié par un « magnifique » coup franc de Platini lors de ce meme match.Voila cest dit,vous laviez pas vu ca hein????

  16. Salut à tous,

    Fantastique parcours de LEspagne qui a merité son titre. Elle est plus forte en 4-5-1 sans Villa, mais avec un milieu exceptionnel et F.Torrès extraordinaire pendant une heure. S Ramos, Senna et Iniesta les meilleurs et je vote Casillas pour le ballon dor!

    Jadore Ballack,cest le Federer du foot question classe, mais il ma bien déçu pendant cet euro au niveau du comportement. Bravo aux Pays-bas et aux Russes pour le spectacle.

    Et nos « petits suisses », pour eux je pense que cet euro est arrivé 2 ans trop vite. Mais bon avec Hitzfeld et une super génération tout de même, on deviendra de plus en plus fort. Ma compo pour le futur:

    Benaglio
    Behrami-Djourou-Senderos-Magnin
    Barnetta-Inler-Gelson-Margairaz
    Derdiok-Frei

    Et vivement le début des éliminatoires de la coupe du monde!!! Merci Mr Karembeu de nous avoir tirer un groupe « jouable » et Hop Suisse !!!

  17. Bravo lEspagne, titre mérité à 100% lors de lensemble de la compétition. Je nai pas de sympathie en particulier pour lEspagne (au foot on sentend bien), mais force est de constater quils nont rien volé et amplement mérité ce titre!

    Psycko, bon article, mais juste une remarque : »Lexploit » ce nest pas gagner aux tirs aux buts…! :o)

    RDV en 2010, ce ne sera pas facile de défendre notre tire, mais la Squadra le fera avec ferveur et ténacité, telle quon la connait et on laime ou la déteste… :o)

    A+

  18. LEspagne a mérité de gagner je ne dis pas le contraire par contre je ne vous pouvais déjà pas vous encadrer avant, alors maintenant…..

    Il ne me reste plus quà partir en vacances sur les plages allemandes de Majorque mempiffrer de weissbier et de currywurst pour oublier tout ça

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