Coin polémique : toutes proportions gardées

Loin de moi l’envie de gâcher la fête. Non, vraiment. Mais je crois qu’il est bon, de temps en temps, d’essayer de prendre un peu de recul, d’essayer de s’extirper de nos uniformes culturels et de nous défaire de nos lunettes communes. Car nous péchons tous par uniformité désintellectualisée. Le libre arbitre, messieurs, parfois ne fait pas de mal.

Ainsi, on nous a relaté puis vanté les mérites de nos skieurs et skieuses lors des récents championnats du monde de Val d’Isère. Je vous l’accorde, il y avait de quoi s’enthousiasmer. Je n’en ai d’ailleurs presque pas perdu une miette. Mais peut-être pas autant. Ou plutôt, peut-être en relativisant quelque peu la portée des exploits de Cuche et consorts.Même si ça fait mal à notre suissitude montagnarde et traditionnelle, les sports d’hiver ont cela de particulier qu’ils ne constituent pas des disciplines mondialement répandues. A peu de choses près, je dirais même qu’une manifestation comme les Jeux Olympiques d’hiver s’apparente plus à une Coupe des Alpes qu’à un réel bastringue intercontinental.
Rien de mal à cela, me répondrez-vous. Non, rien de mal à cela. Il nous faut simplement savoir raison garder. Ou encore mieux, savoir toutes proportions garder. Briller dans un grand championnat de ski alpin et revenir médaillé est une performance de choix, certes. Le champion olympique de descente ne devient pas moins que le roi des JO d’hiver, à l’instar du vainqueur du 100 mètres lors des joutes estivales.
Faire partie des meilleurs skieurs de la planète demande énormément de sacrifices, de travail et de talent. Jamais je ne me permettrais de remettre en doute cela. J’affirme toutefois que ces succès ont une saveur moindre du fait d’une adversité moins touffue que dans d’autres sports, notamment ceux qui se pratiquent en été. Soit les sports réellement démocratiques.

Hockey sur glace, ski alpin, ski nordique, bobsleigh. Autant de disciplines réservées à une portion congrue de la planète. Le monde entier joue au football. Le monde entier peut courir, nager. Sur terre, il doit y avoir presque autant de licenciés en volleyball que de licenciés tous sports d’hiver confondus. Une finale de Coupe du Monde de football met en émoi plusieurs milliards de personnes. Combien pour le titre de Cuche en super-G ?
Je vous le répète, loin de moi l’envie de décrédibiliser les athlètes plus à l’aise dans un congélateur que dans un four. Je suis tout simplement surpris par le manque de reconnaissance des performances des sportifs «estivaux». Je trouve plus impressionnant un Stéphane Grichting qui s’impose depuis plusieurs années comme titulaire à Auxerre qu’un Simon Ammann qui gagne des concours Coupe du monde. J’estime qu’il est plus dur d’être comme Stephan Lichtsteiner un pilier d’un club de Serie A que de remporter le général de la Coupe du monde de fond comme certainement Dario Cologna.
Il est autrement plus admirable de terminer, tel Viktor Röthlin, meilleur non-Africain dans un marathon olympique ou de premier rang que de terminer quart de finaliste des Mondiaux de hockey sur glace.
Je sais, l’effort que je vous demande est douloureux. Patriotisme oblige. Il n’est jamais évident de reconnaître que les domaines dans lesquels son pays brille sont des domaines de substitution. Mais consolez-vous, en peu de temps, nous avons eu des Rosset, Hingis et surtout Federer, l’équipe de Suisse de football qui s’est qualifiée pour deux tournois majeurs – un 8e de finale de la Coupe du monde quand même ! – de suite avant d’en organiser un troisième. Pour une nation que la nôtre, c’est déjà pas mal. Non ?


LE COIN POLÉMIQUE

Le Coin polémique est une rubrique consacrée au sport dans son ensemble. Son nom définit parfaitement son aspiration première : créer la polémique. Il y sera ainsi traité de toutes les disciplines, pour autant qu’elles soient d’un intérêt assez général pour toucher un maximum de personnes. Le but de la manœuvre est simple : évoquer un sujet «brûlant» avec un parti pris extrêmement provocateur. Ainsi, les lignes que vous avez lues ci-dessus ont tout simplement pour but de faire réagir et d’ouvrir le débat.

Écrit par Julien Pralong

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24 Commentaires

  1. Pas convaincu… Va expliquer à un Cuche qui s’entraine toute l’année et qui a lutté pour revenir après ses nombreuses blessures qu’il a moins de mérite qu’un footballeur ou qu’un coureur de 100m…

  2. bah, c’est juste un article qui sert à rien. C’est pas facile d’être obligé de pondre un texte quand on a rien à dire, essayez, lecteurs de carton rouge, et vous verrez…

  3. Ouais, je vois +/- où tu veux en venir, mais je suis pas convaincu avec tes comparaisons de sportifs à la fin.
    Je pense que Dario Cologna fait quelque chose d’extraordinaire cette année, pas Lichtsteiner (mais c’est quand même bien aussi pour Lichtsteiner).

  4. Cet article est admirablement bien écrit. Et domage que certains ne semblent pas avoir pigé le sens très humble de l’article (see above), car cette remise en question nous concerne tous, nous le public hélvète, sans bien sûr remettre en question l’effort admirable des atlhètes du froid. Julien l’explique pourtant bien à plusieurs reprise.
    Même Cuche et les autres Ivo Rutheman penseront sûrement pareil.

    P*** si ça fait du bien de lire du journalisme sportif de qualité écrit par des gus qui ont de la « matière » entre les deux oreilles et du talent !
    Bravo ! Continuez les gars. Vos articles, c’est le petit Jesus en culottes de velours.

    Olive – Fan de Hockey et ex joueur GSHC

  5. Pas grand intérêt effectivement. Doit-on juste répondre: et alors?

    Il y a un paramètre que tu oublies et qui montre la fausseté de ta théorie.

    S’il est vrai de dire qu’il est bien plus compliqué d’atteindre un niveau international en football qu’en ski ou aviron ou ski de fond, nous parlons là de top niveau!

    Assurément un Grichting a plus de « mérite » (disons un meilleur niveau) qu’un skieur suisse naviguant en Coupe d’Europe. Mais un Grichting n’est pas comparable à un skieur qui atteint le sommet de son sport, tel Cuche, Cologna ou Ammann.

    Idem pour le hockey. Un joueur de LNA, participant aux mondiaux n’aura pas le mérite d’un Ammann. Mais un Streit qui atteint la NHL oui. Ca fait une sacrée différence.

    Dans tous les sports, quand tu atteins le sommet, les sacrifices sont considérables. Et les entraînements sont à des années lumières d’un footballeur moyen du championnat de France, avec ses 1 ou 2 entraînements par jour et son match par semaine.

    Après tu parles de sport plus ou moins démocratique. Encore une fois, c’est discutable. La présence de pays pauvres n’est pas gage de démocratisation.

    As-tu une idée de l’encadrement d’un coureur de sprint en Suisse? Je peux t’assurer qu’à ce niveau-là un Jamaïcain a bien moins de mérite qu’un Suisse de parvenir au titre en 100m!

    Tout dépend de l’intérêt du pays dans certains sports. A part les USA qui sont représentés dans tous les sports ou presque (même si le football n’a pas grand intérêt chez eux), toutes les autres nations ont certaines préférences.

    C’est finalement peut-être le tennis qui bénéficie de la plus grande démocratisation (paradoxalement). Il y a tant d’argent en jeu et tant de recruteur prêt à « aider » le développement d’un jeune talent, qu’il s’agit peut-être du seul sport où autant de pays sont représentés parmi les 20 ou 50 meilleurs mondiaux.

  6. Petit complément:

    Les 16 derniers champions olympiques:

    100m:
    USA (10)
    Royaume-Uni (2)
    Allemagne (1)
    Russie (1)
    Canada (1)
    Jamaique (1)

    Descente ski:
    Autriche (6)
    France (5)
    Suisse (2)
    USA (2)
    Italie (1)

    Je sais pas lequel est clairement le plus démocratique…

  7. intéressante la stat de phil. de plus on remarque que dans la catégorie 100m on retrouve des pays dont la pratique du dopage n’est plus à prouver.

  8. Vous êtes vraiment fabuleux vous les suisses. Vos sportifs pourront réaliser n’importe quel exploit (comme gagner 13 titres du grand chelem, ou gagner des championnats du monde de ski devant des pays bien plus peuplés), faudra toujours que certains viennent vous gâcher votre plaisir, et en plus des suisses de chez vous, pas même des frouzes ou des genevois. Ca tient vraiment du masochisme. En France on est peut être chauvin et cocorico a outrance mais au moins on sait apprécier et se gargariser d’une magnifique et retentissante victoire.

  9. tres pertinent Jb
    non a regarder les audiences télé des championnats du monde de ski je crois que les suisses aussi savent savourer une retentissante victoire!
    et je ne pense pas qu un grichting qui a surement eu 3 entrainements par semaine jusqu a ses 16 ans a fait autant de sacrifice qu un amman ou une lara gut!

  10. Article fort bien torché et argumentation pertinente.
    Avec toutefois cette remarque. S’il y a effectivement plus de concurrence en football (pour reprendre ton exemple), les places restent moins chères. En gros, t’as 20 x 11 chances d’être titulaire en D1.
    Et aux Mondiaux de ski ? Tu n’as que les places sur le podium.
    Voilà ce qu’en dit Julien Lizeroux: « Tu termines troisième et on te trouve génial. Tu termines quatrième et on te traite de merde »

  11. D’accord que des sports comme le 100m sont plus démocratisés, mais on voit toujours les mêmes. Donc au final c’est la même chose que pour le ski. En parlant de la comparaison avec grichting, j’aimerai bien voir le nombre de footballeurs à un niveau pro (disons dans les 1ères ligues des grands pays), et le nombre de skieurs pro….

  12. Article très intéressant et fort bien écrit. C’est vrai que le ski est un sport pratiqué par peu de pays et que, de ce fait, il est peut-être « moins difficile » (en termes de concurrence) d’être champion du monde de descente (où il y a 70 coureurs au départ) que champion olympique de marathon (où il y a XXX milliers d’athlètes).

    N’empêche qu’à mon avis, c’est tout simplement incomparable. C’est deux mondes, deux galaxies différentes. Comparer l’athlétisme et le ski, le foot et le bob, le vollley et le hockey, c’est presque aussi illogique que comparer la remise des Césars (très élitiste) et le prix de la plus jolie saucisse en Bavière agricole…

    Bref, ça s’appelle le sport mais c’est totalement différent !

    Ps : mais merci quand même d’avoir ouvert ce débat pertinent !

  13. un champion qui gagne ou qui realise une bonne perf est un champion pourquoi vouloir tout gacher avec de fausses comparaisons domage……faut etre content de ceux qui reussissent quel que soit leur sport ou leur domaine a bon entendeur

  14. juste pour argumenter, lorsque 30 coureurs arrivent au bas de la piste dans une fourchette de 2 secondes c’est que ceux sont vraiment tous des pros. (nous on serait à 30 secondes !!) après comment expliquer que ça soit quasiement toujours les mêmes 3 devants…. bein c’est là le mérite des gars, car ça se joue souvent à la perfection, au « coronès », au mental, à la prise de risque maitrisée !!!! Beaucoup de mérite pour ces gens, bien plus que pour les footballeurs ou les hockeyeurs par exemple (et je suis fan des 2 sports) car si un gars fait une boulette il y a toujours du temps et « des copains » pour rattraper le coup…. tu râte un virage ou une porte à ski et tu finis 10ème…..

    A méditer….

  15. La question posée par l’article est à mon avis tout à fait pertinente. En revanche, force est d’admettre que les exemples choisis pour illustrer cette théorie sont pour le moins malheureux.
    Qu’il s’agisse d’un Didier Cuche admirable de volonté et d’abnégation (malgré les blessures, il n’a jamais cessé de travailler pendant de longues années pour revenir) ou encore d’un Dario Cologna dont les performances athlétiques pures sont impressionantes, voilà en effet deux athlètes qui ne démériteraient pas dans des sports dits démocratiques…

  16. « Le libre arbitre, messieurs, parfois ne fait pas de mal. »

    Ça ne vous est jamais venu à l’idée que Carton Rouge était aussi lu par des femmes ?

    (Je sais, ça n’a rien à voir avec l’article, par ailleurs bien écrit)

  17. on voit que celui qui a écrit cet article ne connait rien en ski!!!
    le ski demande bcp plus ‘dentrainement que le foot par exemble, le ski demande de la coordination, de la puissance, du physique, de l’équilibre, bref un entrainement complet et astreignant!!!! et les places au solieil sont comptées sur les doigts de la main alors qu’en foot il y a des dixaines, des centaine de club qui emploient des professionnels!! donc bcp plus facile d’0arriver au sommet au foot qu’en ski!!!!

  18. Débat intéressant: y a t’il un sport universel?
    Le foot n’intéresse pas les USA, ni la péninsule indienne.
    Les sports d’hiver j’insiste pas.
    Le volley est le sport ayant le plus de licenciés mais je vous mets au défi de citer 3 joueurs d’un pays autre que le votre…
    Alors sur quoi se baser? C’est sûr que tout le monde peut pratiquer la course a pieds, donc c’est le 100m la référence?
    Peut importe le sport en question, le champion est le meilleur dans son sport, il a vaincu tous les autres adversaires ayant la même passion que lui et mérite considération et reconnaissance à ce titre.

  19. « Et que dire de l’outrageuse domination helvétique en lutte à la culotte… »

    Ah ah ah ! Excellent ! Y’a pas que l’équipe CR qui fasse bien marrer.
    Et ce que dit Greg est finalement très juste. Allez Vlan ! 5**** à tous les deux.
    Ce site est super relaxant, ça bagarre un peu mais ça reste surtout drôle.
    Bon week end à tous
    O.

  20. L’article est intéressant mais inexact à mon goût.

    En effet, si le football est certes plus populaire, c’est parce que de nombreux pays l’ont vu débarquer et s’y sont mis. C’est un fait.

    Maintenant, si on prend le rugby, c’est également les 10 mêmes nations qui dominent outrageusement ce sport, car les autres n’ont pas réussi à se mettre au niveau.

    L’Angleterre, l’Afrique du Sud ou la Nouvelle-Zélande s’excusent-elles d’écraser la concurrence? Non, tout simplement non.

    Les épreuves d’hiver ont pris leurs racines avant tout dans les Alpes, puis se sont développés en Scandinavie, dans les Balkans et outre-Atlantique. Ce n’est pas de notre faute si les Marocains ne skient pas sur l’Atlas ou si les Asiatiques et les Sud-Américains ne profitent pas de leurs massifs. La Suisse et l’Autriche sont les deux nations phares du ski alpin, car sa pratique est une tradition chez nous. Cela ne rend pas la performance de nos athlètes moins impressionnante, loin de là.

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