Donnez-moi tort !

Avec le résultat positif de lundi soir, Sion a repoussé les décisions en mai. Ce sera quitte ou double. Le spectre Gossau nous guette mais la Coupe pourrait rattraper une bien morne saison et tout faire oublier. Tout se décidera donc en très peu de temps. A propos du match, cela faisait longtemps que je n’avais plus vécu cela…

Coach Constantin

Sion se rendait donc chez la lanterne rouge lucernoise avec un seul objectif : sauver sa saison. Bien que favorisé par le tirage, la mission ne s’annonçait pas des plus simples. Face à des Lucernois en nette reprise, l’équipe valaisanne se devait de confirmer le regain de forme observé contre Zurich. C’est dans une ambiance que seule la Coupe peut créer que s’entamait donc une partie à gros enjeux tant pour la bande à Fringer que celle à CC.
Le champêtre stade de l’Allmend allait donc être le théâtre d’une tragédie, quelle que soit l’issue de la pièce. Du monticule où j’étais posté dans le secteur visiteur, je tentais vaguement d’apercevoir le rectangle vert obstrué tantôt par un ivrogne en déplacement vers la cantine, parfois par un drapeau ou encore par une torche craquée. Bien qu’hostile à la rédaction d’un papier, la situation n’en était pas moins enivrante de plaisir à condition, bien évidemment, d’une issue favorable.
La première mi-temps se jouait alors sur un faux-rythme, les actions se faisant de plus en plus rares au fil du temps et le spectacle étant bien plus présent en tribune. Une des attractions majeures était celle d’observer Constantin donner des consignes à ses joueurs depuis le banc et d’imaginer ses paroles. Une autre résidait dans l’observation continue de l’environnement dans lequel j’étais immiscé. Entre souillasses, rougeauds et ivrognes je me devais, moi aussi, de contrôler ma consommation sans quoi l’article écrit n’aurait alors plus grande pertinence. Le bal incessant vers le stand bière rendait la cantinière de plus en plus aigrie au fil du match. Alors que s’achevait la première mi-temps sur un score nul et vierge, je commençais à imaginer la tension insurmontable d’une prolongation et l’épreuve cardiaque que pourrait représenter une séance de tirs au but.

Et si El Haddary ne revenait pas…

Dans tout club, de nombreux supporters qualifient parfois certains transferts de superflus voire inutiles. A Sion, on ne les compte plus (tant les supporters que les transferts) ! Et s’il en est un qu’il faudrait retenir, c’est probablement celui de notre Bouffon égyptien. Arrivé lors d’une crise de confiance de Vailati, celui-ci a démontré qu’il avait un niveau à peine adéquat pour la Super League. Son manque de professionnalisme, ses vacances prolongées, ses excuses bidons et sa fausse blessure ont, elles, démontré un amateurisme à faire pâlir un joueur de 4ème ligue.
Pourquoi m’acharner contre lui alors qu’il n’était même pas sur le terrain ? Simplement parce que son vis-à-vis y était et a démontré des qualités fantastiques. Si la concurrence et non pas l’appât de dollars régissait le vestiaire sédunois, El Haddary n’aurait probablement jamais pénétré sur un terrain de Super League et Sion ne s’en porterait pas plus mal.
Retour à la bute lucernoise pour une seconde mi-temps où la tension allait monter d’un cran. Les rangs se resserraient, les sourcils se fronçaient et la pression augmentait pour les 12’500 spectateurs présents. La fatigue apparaissait elle aussi, laissant plus d’espaces aux techniciens de parts et d’autres. Alors que Sion dominait légèrement les débats, le match s’intensifiait et la prolongation s’approchait.

10 minutes de folie furieuse

85 minutes et des jambes lourdes… Un 0-0 se dessine et d’insoutenables prolongations devaient alors bientôt commencer. Centre de Reset, demi-volée de Monterrubio et ouverture du score. Le gradin visiteur exulte comme jamais, la bière vole, le public s’embrasse, j’annonce à un ami que cette année le déplacement à Berne se fera en train et commence à réorienter mon mois de mai sur ce fatidique mercredi 20. Les 5 minutes d’arrêts de jeu n’y changeront rien. C’est bien à Berne que je mangerai une schnitzel ce mercredi 20.
Tout ne se passera pourtant pas comme prévu… Lustenberger et la passivité de la défense sédunoise prolongeront mon calvaire. Et comme si cela ne suffisait pas, c’est aux pénalties que la partie se décidera. Campé sur mes jambes branlantes, je tente alors désespérément d’apercevoir le but devant mon gradin. L’anxiété est grande et l’odeur de la schnitzel de plus en plus insistante. Bien que j’aie décrié cette équipe plus d’une fois, je vibre, souffre et transpire d’émotions… La séance commence et je repense à 2006 dans les gradins du Stade de Suisse.
Deux arrêts de Beney et quatre pénalties réussis plus tard, je saute de joie. Je cours dans le gradin pour annoncer à mes amis qu’ils l’ont fait, qu’ils sont en finale et qu’on va revivre les émotions de 2006. J’exulte encore et encore et je rêve déjà du mercredi 20 mai.
Inexplicable, c’est peut-être le mot qui caractérise ces émotions. Alors que je croyais cette équipe perdue, elle aura le droit et l’obligation de me démontrer le contraire… L’histoire sera assurément au rendez vous ! Tous les verdicts se rendront donc en mai et, s’il vous plaît, donnez-moi tort !
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Lucerne – Sion 1-1, 3-5 ap. tàb. (0-0)

Allmend, 12’500 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Zimmermann.
Buts : 85e Monterrubio 0-1. 95e Lustenberger 1-1.
Tirs au but : Gajic 1-0. Obradovic 1-1. Paiva 1-1 (Beney pare). Fermino 1- 2. Pacar 1-2 (Beney pare). Afonso 1-3. Renggli 2-3. Paito 2-4.
Lucerne : Zibung; Lukmon, Seoane, Schwegler, Lustenberger; Gajic; Frimpong, Zverotic (87e Pacar), Scarione (63e Renggli), Ferreira; Tchouga (63e Paiva). Entraîneur : Fringer.
Sion : Beney; Vanczak, Sarni, Kali (75e Nwaneri), Paito; Serey Die (94e Bühler), Fermino; Reset, Obradoivic, Monterrubio; Saborio (66e Afonso). Entraîneur : Constantin.
Cartons jaunes : 9e Fermino (faute sur Scarione), 63e Gajic (faute sur Reset), 89e Schwegler (faute sur Reset).
Corners : 6-3 (1-1).

Écrit par Ernest Shackleton