Nati, chienne fidèle…

Après l’étalage de toute sa puissance et de sa détermination face à la France, la Suisse avait de quoi être un peu fatiguée pour affronter les massifs Allemands. Et pourtant, peut-être lassés par une vie nocturne plus adaptée à des parlementaires libidineux qu’à de jeunes éphèbes qui rêvent d’Amérique, les joueurs suisses se sont montrés, du point de vue de l’intensité, à la hauteur des attentes fixées par toute une nation.

Ils ne sont pas un peu beaucoup ?

Contrairement à leur premier match, les Suisses avaient visiblement pris conscience qu’un événement devant leur public risquait de créer une certaine ferveur populaire et donc une forme de pression. On ne reprochera jamais assez aux organisateurs d’avoir déstabilisé la Nati en offrant à chaque spectateur la possibilité d’agiter un fanion aux couleurs helvétiques…Si seulement les cadres de la fédération suisse avaient compris qu’organiser un événement majeur à domicile aurait surtout pu être l’occasion de jouer un match à huis-clos. La patinoire de Caux étant d’ailleurs fermée au public en cette fin de saison, elle aurait été lieu épique pour mettre en scène le naufrage de nos voisins du nord.
Passée la torpeur de rassembler des fans de Zurich, Langnau et Fribourg dans l’antre du SCB, les Suisses se montrèrent globalement plus redoutables que les Allemands. Après sept minutes pourtant, Goran Bezina démontra qu’il disposait de la fiabilité et de la manœuvrabilité d’un modèle de Zamboni soviétique lorsqu’il sembla se demander, quelques secondes, pourquoi il tenait debout sur une surface glacée et qui il pouvait bien être. A 5 contre 4, les Allemands n’en demandaient pas temps et les arbitres pouvaient craindre pour leur intégrité physique lorsque Gerber dut s’avouer vaincu.
Mais la bourde du fils d’un ancien champion de Waterpolo allait avoir deux conséquences positives. Ceux qui affirment depuis longtemps que Bezina est une catastrophe pas si ambulante que ça allaient se retrouver renforcés dans leur expertise et Roman Wick allait égaliser pour ainsi améliorer ses chances d’être repéré pour l’édition tasmanienne de la Nouvelle Star.
La Suisse pouvait embrayer sur une phase de jeu qui montra que les ruées porcines allemandes, qu’elles soient diplomatiques ou une simple volonté de passer une frontière délimitée par une ligne bleue, n’avaient de chance d’atteindre leur but, tant que nous disposerions d’un super Tamiflu en la personne de Paterlini. Ce dernier embrocha quelques réfractaires aux règles de circulation en vigueur dans notre pays, avec le concours des arbitres, impressionnés par l’organisation suisse en général, hors glace du moins…

Une mécanique de précision…

Renforcés par leur prompte réaction, les Suisses allaient montrer une belle volonté offensive. Mais la plupart des actions manquèrent de synchronisation. Si l’un des joueurs n’était pas en retard, les contres avaient lieu durant les changements de ligne. Sur le jeu de puissance, c’est avec le gant qu’il fallait saisir le puck pour le stabiliser tant les passes étaient imprécises. Du même ordre, Bezina tenta un tir avec un effet tellement puissant que le puck prit une trajectoire de boomerang.
Mathias Seger, probablement agacé de tout ce cirque, se décida depuis la zone médiane à envoyer un tir de toute beauté qui allait finir dans les filets du gardien Pätzold. On ne saura jamais si l’intention de ce tir était de blesser un de ses camarades pour fouetter l’équipe ou bien de marquer, mais on aura tous apprécié son geste.
Après cette mise au point, on pouvait se dire que la phase de rodage devant des équipes que l’on n’ose pas trop affronter en amical de peur qu’elles donnent trop confiance en ses moyens à la Suisse allaient maintenant laisser place à une phase d’affirmation de notre équipe de coeur… A ce moment du match, un 6-1 était une attente légitime, surtout si Sprunger pouvait mettre un hat-trick, comme avec Gottéron. Car la chance, ce n’est pas tout, mais ça compte…
Mais il n’en fut rien. Les arbitres, en plus d’oublier d’être franchement mauvais, signalèrent des fautes en faveur de l’équipe de Suisse qui ne trouva rien de mieux à faire que d’aligner quelques spécialistes de l’avantage numérique pour lesquels il est aussi simple de se replier qu’il est aisé de changer de vitesse sur un motoculteur. Et c’était déjà 2 à 2. Je n’ai pas jugé bon de nommer un responsable, vous l’aurez remarqué.
Tout était donc à refaire pour la Suisse. Et elle put démontrer que si elle peut rêver d’un exploit, celui-ci n’aurait pas le retentissement de celui du ZSC cet hiver. Non, cela se ferait sur un malentendu, tout au plus. Devant ce triste constat, il ne manquait plus qu’à un joueur de classe internationale d’élever son jeu pour créer la différence. Plus précisément et dans les faits : Mark Streit délivra ses couleurs en prolongation, à 4 contre 3.
Oui, la Suisse est quasi assurée de finir au deuxième rang de son groupe (elle peut encore finir première si elle bat la Russie). Mais sa capacité à faire le jeu et à mener des offensives la tête haute lui fait totalement défaut. Elle se repose sur quelques hommes clés et des valeurs collectives qui ont fait leurs preuves pour traumatiser des Autrichiens au XIIIe siècle.
On peut toujours espérer un miracle, mais lorsqu’on n’arrive pas à marquer à 5 contre 3, c’est généralement mal parti pour la finale.

T’en reprends une ?

La Suisse affrontera donc mardi une Russie en pleine possession de ses moyens. Après une victoire facile contre l’Allemagne, les protégés de Slava Bykov ont joué durant le premier tiers contre la France et ont ensuite pu montrer qu’ils étaient devenus hockeyeurs par choix. Tous auraient aussi bien pu devenir des ballerines, tant le pas chassé, la pirouette et l’arabesque n’ont aucun secret pour eux. D’ailleurs, si la France en marqua deux, c’est parce que le Russe déteste boire en Suisse. Il fallait donc s’assurer d’une certaine convivialité…
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Suisse – Allemagne 3-2 ap (1-1 1-1 0-0)

Bern Arena, 11’423 spectateurs (guichets fermés).
Arbitres : Partanen/Ronn (Fin) ; Dedioulia (Bié)/Orelima (Fin).
Buts : 7e Ullmann (5c4) 0-1. 9e Wick (Lemm, Jeannin) 1-1. 24e Seger (Paterlini/pénalité différée) 2-1. 34e Schubert (4c5!) 2-2. 62e Streit (Plüss / 4c3) 3-2.
Pénalités : 7 x 2’ contre la Suisse ; 6 x 2’ contre l’Allemagne.
Suisse : Gerber; Blindenbacher, Streit; Du Bois, Bezina; Seger, Furrer; Josi; Paterlini, Ziegler, Ambuehl; Déruns, Jeannin, Lemm; Ruethemann, Gardner, Pluess; Romy, Sprunger, Sannitz; Wick.
Allemagne : Pätzold; Bakos, Schmidt; Schubert, Butenschön; Osterloh, Mueller; Hordler, Renz; Wolf, Hackert, Gogulla; Seidenberg, Ullmann, Hecht; Felski, Kreutzer, Barta; Mulock, Hager, Hospelt.

Écrit par Jean-Boris Cochet-Lamouche

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11 Commentaires

  1. J’aimerais souligner que le moins bon des helvètes reste Rrrrrraaaaaalf qui, j’en fais le pari, ne saura pas adapter son système de jeu ultra défensif à cette équipe dont le potentiel est le meilleur qu’il n’ait jamais eu depuis qu’il coache la Nati

    11’423 spectateurs (guichets fermés) = « bienvenu au PAYS du hockey sur glace » …

  2. 42-14 et 38-22 contre la France, respectivement l’Allemagne au niveau des tirs cadrés.

    Effectivement, une tactique ultradéfensive…

  3. @ Vazyfranky

    Gros béta, ça se jouait à guichets fermés, ils ont du mettre des places assises sur la tribune principale et de la place pour les journalistes… Ce qui a fortement réduit la capacité de la patinoire!

  4. Mouais… Du mieux hier après-midi mais que ce fut laborieux.

    Allez, on y croit : comme toute grosse équipe qui se respecte, la machine suisse a de la peine à se mettre en route… Mais sitôt lancée, elle va tout détruire sur son passage !

  5. Weber rejoint l’équipe pour le second tour!

    A côte de Streit sur la première vague d’avantage numérique, ça ferait des dégâts… Il n’est peut-être pas encore parfait d’un point de vue défensif, mais il tend à s’améliorer, contrairement à Bezina.

    Une deuxième vague Blindou Seger serait pas mal non plus…

  6. Ils sont ou nos attaquants qui devraient nous sortir de la mouise avec leur sens du but? Dont Sprunger? Abominablement perso, sinon transparent… Wick et Pluss sont les 2 seuls qui nous font vibrer! Et Streit, par moment…

  7. « il sembla se demander, quelques secondes, pourquoi il tenait debout sur une surface glacée et qui il pouvait bien être »

    Magnifique l’éveil de Bezina à la conscience, rien vu de plus mythique depuis le début de 2001 l’Odysée de l’espace.

  8. « A ce moment du match, un 6-1 était une attente légitime, surtout si Sprunger pouvait mettre un hat-trick »

    Mouaaaaaaaaarf! Qu’il en mette déjà un, ca sera déja une victoire! La misstinguette n’a plus personne à coté de lui pour faire tout le boulot et lui servir des caviars devant le but, alors on ne le voit plus…dommage…pour la suisse!

  9. Sauf erreur, Sbisa doit recevoir l’aval de son club et Krueger doit lui dire expressément qu’il jouera.

    Aux dernières nouvelles, il avait dit que ce jeune était tellement talentueux qu’il serait de toute manière bienvenu pour s’entraîner avec l’équipe…Ca ne dit pas tout.

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