La Russie et Slava Bykov sur le toit du monde

Fort logiquement, les Mondiaux suisses et leur finale bernoise ont marqué le triomphe de l’ordre et de l’organisation russe sur l’improvisation nord-américaine.

Note préliminaire : il n’y avait aucun arbitre suisse en finale. Ce n’est pas parce qu’ils sont mauvais, puisqu’ils sont au contraire excellents, dixit un Didier Massy qui ne veut pas compromettre ses chances de promotion. Non, malheureument pour la Suisse, l’arbitrage en finale étaient réservés à ceux qui portaient le bon prénom (Peter Orszagh, Jyri Petteri Ronn, Petr Blumel et Peter Feola). Or l’IIHF n’avait pas retenu Peter Kunz pour les Mondiaux. C’est un complot, si vous voulez mon avis.Mais foin de ces peccadilles, et concentrons-nous sur la rencontre. Qui prit l’allure d’une partie d’échecs entre Bykov et KaspaRuff. La défense et le contrôle du jeu adverse dominèrent l’attaque et la création pendant l’essentiel du match. Autant dire que si cette finale avait opposé, au hasard, la Suisse et l’Allemagne (oui, ça demande un gros effort d’imagination), on se serait passablement ennuyés. On aurait même sans doute lâchement profité d’une des mille douze interruptions publicitaires ou d’un laïus vaseux de Laurent Bastardoz pour prendre la tangente et respirer un instant.
Fort heureusement, le hockey a été bien conçu, et c’était donc le Canada et la Russie qui se retrouvaient à ce stade. Et ces deux équipes, bien que privées de certaines de leurs plus grosses stars, avaient le matériel nécessaire pour produire du jeu haletant malgré ces consignes.
Ainsi, dès la sixième minute, une inspiration géniale de Shane Doan plaçait Jason Spezza de telle sorte qu’il n’ait qu’à pousser le puck dans le but vide. Les Russes réagissaient par quelques actions dont ils ont le secret (c’est-à-dire qu’ils ont tourné pendant trois plombes dans la zone sans prendre le moindre tir), mais trouvaient finalement la mire sur une action très canadienne. Lors d’un jeu de puissance consécutif à un dégagement en touche de Braydon Coburn, Oleg Saprykin ramenait dans la cage d’une habile déviation un tir non cadré de Vitali Atyushov. Dwayne Roloson, pourtant bien loin du niveau miteux de ses premières sorties du tournoi, n’y pouvait mais.
À partir de la mi-match, les Canadiens interrompaient le manège russe et prenaient l’ascendant sur la rencontre. Mais c’est toujours en ces instants trop tranquilles que survient le drame. En l’occurrence, il y eut deux inspirations : une bonne et une mauvaise. Je commence par la mauvaise. Coburn, décidément peu en veine ce soir-là, se livrait pour aller pincher Saprykin à la sortie de la zone d’attaque, ouvrant toute la zone neutre à des Russes qu’on pourrait croire entraînés par Morgan Samuelsson. L’ex-joueur de Calgary (Saprykin, hein, suivez) avait cependant le temps et l’inspiration géniale de lancer d’une passe dans le dos Konstantin Gorovikov et Alexandre Radulov en 2 contre 1. Le second nommé profitait de la diversion causée par son compère pour éliminer Roloson et loger le palet au bon endroit.
Rien de bien grave, il restait vingt-cinq minutes aux gens à la feuille d’érable pour renverser la vapeur. Mais ce sera pourtant bel et bien le goal décisif. Les hommes de Bykov tireront un rideau de fer sur lequel leurs adversaires, volontaires mais trop désorganisés pour se montrer véritablement dangereux, iront s’empaler. Ce furent pourtant les Nord-Américains qui tirèrent à vue. Fidèles à leur style de jeu, ils pilonnèrent sans relâche un Ilya Bryzgalov qui rencontra plus de caoutchouc vulcanisé qu’un hérisson égaré sur l’autoroute. Mais le dernier rempart des Coyotes était dans un grand soir, avec en plus juste ce qu’il faut de moule (cf. les innombrables pucks qui partirent en cloche pour retomber, qui sur le but, qui juste à côté, mais toujours loin des palettes canadiennes).
Après un petit psychodrame autour de l’horloge (il resta six secondes, puis huit, puis zéro, puis sept, puis six, puis de nouveau sept, sans que le puck ne quitte la main du juge de ligne), la Russie pouvait savourer un sacre riche en symboles, et qui sera, n’en doutons pas, largement récupéré par les pontes de la KHL. Mais ce fut un sacre largement mérité, tant la Russie, invaincue lors du tournoi, fut l’équipe de hockey idéale, trouvant un parfait équilibre entre l’organisation et le spectacle, preuve que les deux ne sont pas inconciliables. Les hommes de Bykov sont donc désormais à leur place en haut de la hiérarchie mondiale. Ce sera cependant à Vancouver que l’on pourra vraiment juger d’une éventuelle passation de pouvoir. On s’en réjouit déjà.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Russie – Canada 2-1 (1-1 1-0 0-0)

GéantJaune Arena, 11’454 spectateurs.
Arbitres : P. Orszag, J. P. Ronn ; P. Blumel, P. Feola.
Buts : 5’37 J. Spezza (S. Doan, S. Weber) 0-1, 12’59 O. Saprykin (V. Atyushov, D. Kalinin / 5 contre 4 / B. Cobrun) 1-1, 34’30 A. Radulov (K. Gorovikov, O. Saprykin) 2-1.
Russie : I. Bryzgalov ; I. Nikulin, V. Proshkin ; V. Vishnevsky, O. Tverdovsky ; D. Kalinin, V. Atyushov ; K. Korneyev, D. Grebeshkov ; A. Tereshenko, I. Kovalchuk, A. Morozov ; A. Perezhogin, A. Frolov, S. Zinoviev ; K. Gorovikov, A. Radulov, O. Saprykin ; S. Mozyakin, A. Kuryanov.
Canada : D. Roloson ; D. Hamhuis, S. Weber ; D. Doughty, M.-É. Vlasic ; C. Phillips, B. Coburn ; L. Schenn, J. Kwiatkowski ; S. Horcoff, M. Fisher, T. Zajac ; S. Stamkos, D. Roy, M. Saint-Louis ; D. Heatley, S. Doan, J. Spezza ; S. Upshall, M. Lombardi, C. Armstrong.
Pénalités : 2 x 2′ contre la Russie, 3 x 2′ contre le Canada.
Notes : 58’52 D. Roloson quitte sa cage jusqu’à la fin de la rencontre. 59’33 Temps mort pour le Canada.

Écrit par Yves Grasset

Commentaires Facebook

1 Commentaire

  1. Bravo à la Russie pour ce sacre ô combien mérité et surtout d’avoir évité à l’affreux St-Louis de soulever la Coupe chez nous !

    Un supporter du LHC qui n’a toujours pas digéré…

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.