L’essence (ou pas) de la moto

C’est une sorte de Paléo du sport motocycliste. Les gens viennent de partout pour passer 24 heures avec les «stars» de l’endurance au traditionnel Bol d’Or, qui se dispute à Magny-Cours, le Goumoens-le-Jux français. Ça tombe bien, un Suisse y a brillé et CartonRouge.ch y était.

Après vous avoir conté les méandres du camping, place à la compétition. Parce que si la majorité des gens qui se déplacent sur ce circuit n’en ont rien à battre, il y avait bien une manche du Championnat du monde ce week-end à Magny-Cours. Cette année ils n’étaient «que» 48’000 spectateurs, mais le spectacle était quant à lui bien présent dans la Nièvre. Imaginez qu’après sept heures de course, les deux premiers se tenaient encore en… deux dixièmes de seconde !Et des secondes, il en est un qui en regrette amèrement 19. Cet écart, si infime soit-il après près de 4’000 kilomètres d’effort, est pourtant celui qui a privé Grégory Junod et son équipe du RAC 41 du podium. Oui oui, Grégory Junod, celui dont CartonRouge.ch te parle depuis si longtemps, interviewé le 2 décembre 2007 et la semaine dernière. Ton site préféré, toujours en avance sur son temps, qui t’avait notamment fait découvrir un certain Sébastien Buemi au début de l’année 2007.
Bref, trêve de gargarisation. Dès vendredi, Grég et ses compères se qualifient pour la Super-Pole et prennent la huitième place sur la grille de départ. Malgré la septième place arrachée aux dernières 24 Heures du Mans, l’équipe du Loir-et-Cher est toujours aussi ambitieuse et le Vaudois s’élance pour les deux tours de cadrans avec envie.
Si vous ne connaissez pas le Bol d’Or, c’est cette épreuve où les concurrents sont d’un côté de la piste et courent comme des malades pour aller chevaucher leurs bécanes sises sur l’autre bord de la ligne droite. Vous voyez, quoi, une sorte de folklore qui persiste malgré la dangerosité du truc. Comme le Junod est le plus rapide de l’équipe, c’est lui qui a l’honneur de s’élancer et ses collègues et lui ont la chance de rester sur leurs roues tout au long de l’épreuve.
Alors que les Yamaha s’écroulent les unes après les autres, le Suisse et ses compères du RAC 41 grappillent des places. Au point de pointer à un magnifique cinquième rang après les 24 heures requises. Mais c’est ensuite que les regrets sont nés. Alors que l’avant-dernier relayeur de la formation française trouvait malin de ralentir sa cadence pour, paraît-il, économiser du carburant (lu dans la presse tricolore), la Honda Michelin était ensuite déclassée pour réservoir non conforme. On a quand même envie de lui dire que le 40ème a consommé moins d’essence parce qu’il a fait moins de tours, mais qu’on ne comprend pas bien sa stratégie…
Du coup ? Et bien du coup il n’a manqué que dix-neuf petites, minuscules, infimes secondes à l’équipe de Greg Junod pour monter sur le podium. 19 »059 exactement. Soit moins d’une seconde perdue par heure. Environ le dixième du temps que vous mettez pour aller lire Le Matin aux toilettes. De quoi rager après le coéquipier «stratège» qui coûte au final plus cher que trois malheureux litres d’essence. Mais enfin, ce podium manqué ne fera qu’attiser encore plus la soif de conquête du jeune pilote.
Parce qu’au delà du sportif, au delà des voitures qui brûlent dans le camping et des réservoirs trop grands de certains vilains tricheurs, un week-end comme celui-ci est une véritable école de vie. L’essence même de la moto. Un truc que Thomas Lüthi a dû oublier en route ou dans le lit de Miss Berne. Parce que ce bon Greg, il aime son sport. Après avoir roulé un bon tiers des 24 heures et pas fermé l’oeil, il prend son camping-car sous le bras et rentre par ses propres moyens. Pas d’«hospitality» fournie en poules/putes de luxe, pas de poddocks luxueux, juste le sport à l’état brut. Et dans deux semaines, c’est Brno et ses 2’200 km aller-retour pour le Championnat de Suisse. La rage qu’on vous dit.