Urugueux

L’Uruguay, berceau de la Coupe du Monde, du taillage de viande et des règlements de compte extra sportifs. Le dernier qualifié de cette édition a d’ailleurs fini en beauté en grattant sa qualif dans un barrage rocambolesque et ô combien laborieux face au Costa Rica, pendant que les remplaçants et le staff des visiteurs devaient en découdre avec les équipes de télévision uruguayennes au bord du terrain. Le sélectionneur de la Céleste, Tabarez, est un pragmatique au pays des gangsters. «Heureusement qu’elle n’a pas lieu en Uruguay cette Coupe du Monde». Petit zoom entre une droite et un tacle dans le bas du dos.

1) Pourquoi ai-je choisi de présenter ce pays ? En 2002 l’Uruguay, lors de sa dernière visite à la Coupe du Monde, avait pris soin de se faire détester. Du «teigneux» à revendre, des tacles avec les talons et de la provoc en veux-tu en voilà. Thierry Henry s’y était laissé piéger, attirant avec lui toute l’équipe de France dans un des plus grands camouflets de son histoire. Le moment de solitude qui s’en est suivi sur les ondes de TF1 restera dans la légende et on ne les remerciera jamais assez. Mais l’Uruguay c’est aussi un client de rêve. Surnoms cocasses à profusion et coiffures qui feraient passer Bernard Rappaz pour un leader de style.
2) A quoi sert ce pays ?
La postérité ? Organisateurs et vainqueurs de la première Coupe du Monde en 1930, c’est probablement tout ce que l’on peut demander à honorer via l’Uruguay. D’ailleurs leur blason orné de 4 étoiles interpelle. C’est que les Charruas comptent également leurs titres olympiques, glanés dans les années 20. Bref, l’Uruguay c’est rien d’autre qu’une équipe bleu-ciel, qu’on voit en noir et blanc, où l’on imagine encore des gardiens en béret, et des images qui défilent en accéléré.

3) Comment se sont-ils qualifiés et surtout pourquoi ?
Poussivement, c’est le terme qui s’impose. Le panache ? Ils connaissent pas trop. Eux qui possédaient une chance de se qualifier directement à l’ultime journée face à l’archi-rival argentin, ils ont préféré se faire aux culottes et laisser Maradona faire part de ses envies de gâteries. Finalement 5èmes, c’est en bons vieux habitués qu’ils s’en allaient aborder ce dernier match de barrage. Finis les duels face au représentant océanique et les interminables vols entre deux matchs capitaux. C’est cette fois avec les 4ème de la zone Concacaf, les copains de Saborio, qu’il faudra en découdre. Victoire 0-1 au Costa-Rica dans un stade survolté, puis match nul 1-1 à domicile au stade du Centenario dans une ambiance délétère au possible. Mais qu’importe le flacon…
4) Pourquoi vont-ils gagner la Coupe du Monde ?
Un tempérament de feu, une des attaques les plus productives individuellement en Europe et une pression relâchée, voilà qui devraient être les moteurs de la Céleste dans cette phase de poules. Un football total, sans compromis, qui devrait certainement pouvoir troubler les Sud-Africains ainsi que les neurasthéniques français. Et comme le hasard fait bien les choses, le 3ème match qui pourrait être décisif les opposera aux Mexicains. Après y avoir fait du petit bois comme seuls eux (et les Argentins) savent le faire, nul doute que leurs futurs adversaires, marqués par les pubs SUVA, leur laisseront la voie royale. Et si l’Uruguay gagne la Coupe du Monde, Maradona fermera certainement sa gueule à jamais et replongera dans ce qu’il sait faire de mieux.

5) Pourquoi vont-ils se faire éliminer au premier tour ?
Une légère image de formidables perdants. Combien de matchs décisifs et plein de pression ont-ils laissé s’échapper depuis 20 ans ? Une foule. Quant aux prétendus buteurs, Boucle d’Or en tête (voir photo ci-dessous) ils sont soit trop vieux, soit trop jeunes.
6) Qui sont les joueurs à surveiller ?
Sans aucun doute Luis Suarez. Le jeune attaquant (23) de l’Ajax sera l’un des joueurs les plus attendus de cette Coupe du Monde. De ces joueurs prometteurs, qui évoluent et tabassent tout dans un championnat de 2ème zone et dont on attend de voir ce qu’ils valent à l’échelon le plus élevé. Parce que 35 buts en 33 matchs (saison écoulée), c’est quand même assez impressionnant, d’ailleurs sans une pondération plus favorable des buts de la Liga, il aurait été nommé «Soulier d’Or» devant Messi. Le soulier d’or, une spécialité uruguayenne…
On gardera aussi un œil sur Diego Lugano. Le défenseur central du Fenerbahçe traîne avec lui une réputation bien rugueuse, mais ça serait un peu sévère de le cantonner dans ce rôle-là. Le capitaine de la Céleste a en plus un nom qui sent bon le Tessin, et qui trahit sans nul doute des racines helvétiques, à l’époque où les Tessinois émigraient en masse dans une Uruguay fraîchement indépendante.

7) Qui sont les joueurs à ne pas surveiller, mais dont on peut éventuellement se moquer ?
Recoba ? Ça vous dit quelque chose ? On ne va pas le surveiller, et pour cause cela fait belle lurette qu’il fait partie de l’histoire. Le «Chinois», en fin de parcours, est rentré au pays après un petit crochet par le Grèce, comme pour se faire mieux oublier. L’ancien «meilleur jour du monde» et longtemps, footballeur le mieux payé de la planète, symbolise mieux que quiconque le foirage de carrière complet.
8) Une bonne raison de les supporter ?
Rappelez-vous, avril 2001. Notre morose championnat suisse s’émerveille des performances de Gimenez et de Rossi, les Argentins qui vont bientôt voir leurs chemins s’unir. Pourtant durant les saisons à venir, celui qui va truster les premières places du classement des buteurs et du classement des assists n’est pas argentin. C’est un petit Uruguayen, du nom de Richard Nuñez. L’attaquant de poche régale le championnat suisse, y imprègne le soleil national à longueur de journées. Doté d’une technique éblouissante, Nuñez se faufile, Nuñez croche et Nuñez frappe. Souvent. Après une idylle helvète où il épousera sa femme pour le plus grand bonheur du Blick, Richard s’envole pour l’Espagne et l’Atletico. Le début des emmerdes pour le souriant Uruguayen, qui laissera néanmoins un superbe souvenir derrière lui.
9) Une bonne raison de ne pas les supporter
Faute de goût. Comme déjà exposé plus haut, le panache et la classe ne sont pas l’obsession uruguayenne. On est plutôt dans les victoires étriquées, les buts de raccroc et les qualifs sur le fil. Et puis la tignasse de l’ex-pichichi madrilène, on commence à en avoir assez. D’ailleurs depuis qu’il nous a gratifiés de dreadlocks, on ne lui a jamais vraiment pardonné. Et ce n’est pas l’affreux maillot uruguayen, couverts de gros soleils en contraste ton sur ton, qui nous fera changer d’avis.

10) Bon d’accord, mais sinon ?
En bons Helvètes on aura un œil intéressé sur le parcours des Bleus. Leur premier match les opposera justement à la Celeste, avec certainement un petit goût de revanche à prendre. Voilà qui laisse augurer d’un match bien rock’n’roll. A part ça, leur objectif pourrait bien être atteint : aller en huitièmes, et puis disparaître à nouveau dans l’anonymat jusqu’à la prochaine qualification en 2030 pourquoi pas, pour le… centenario.

Écrit par Roby Steedman

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4 Commentaires

  1. « coiffures qui feraient passer Bernard Rappaz pour un leader de style. »

    Oh la la !

    Juste magique, je ne m’en remet pas!

  2. Richard Nunez, il avait la classe ! Un pied gauche magique qui faisait souvent mouche sur coup-franc !!! 9 sélections en équipe nationale …

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