Moins loin, plus haut, plus froid

Cette édition 2011 d’Athletissima aura été fidèle à elle-même. Un peu de MPM, beaucoup de vent, un froid à la folie et pas de records du monde du tout. Parmi les points forts, on notera les trois excellents sauts (à la suite) de Teddy Tamgho et le record suisse du 4×100 mètres féminin. Pour le reste, un léger goût d’inachevé subsiste quant aux performances globales qui ont sanctionné la réunion.

Athletissima, c’est aussi l’occasion de croiser tout une belle brochette d’indésirables venant se pavaner dans les travées de la Pontaise : de notre Pierre-Alain Dupuis national à Jean-Jacques Besseaud, en passant par certaines figures politiques bien connues de la région. Il ne manquait plus que Fathi Derder et Bertrand Piccard pour que le tableau soit vraiment complet. Nous avons même surpris Maryam Jamal sans voile se promener aux abords du stade ! Mais que fait la Police ?Cela dit, l’édition de cette année a été marquée par deux excellentes nouvelles. D’une part la défection d’Usain Bolt (le chèque n’était sans doute pas assez étoffé) ; voir un gars venir en touriste et couper son élan à 40 mètres de la ligne dans le seul but de faire son show pathétique et réjouir ainsi tous les footix de l’athlétisme, on s’en passe volontiers. D’autre part, la participation de l’honnie Hind-Dehiba a certes fait débat, mais ce fut une excellente chose. En fond et demi-fond, comment voulez-vous battre certains records du monde est-allemands, soviétiques et tchécoslovaques qui datent de près de trente ans – à l’époque où ces machines étaient élevées en laboratoire – tout en étant irréprochable ? Tout simplement impossible. Cette piqûre de rappel est donc nécessaire afin de lancer un signal fort pour remédier à ce problème.

La cochoooooone !

Lemaître l’a trouvé

Lors de la conférence de presse matinale qui précédait la compétition, nous avions récolté en vitesse les réactions suivantes. Christophe Lemaître : «J’espère déjà pouvoir terminer cette course sans me perdre en chemin. Trouver le bon couloir sera la clé». Renaud Lavillenie (saut à la perche) : «2 mètres n’est pas mauvais ! Car il n’est pas facile de revenir à la compétition après avoir eu un enfant». Asafa Powell : «En dessous de 50 secondes ? Je ne promets rien mais je vais faire de mon mieux. Mon but est de gagner». Nadine Müller (lancer du poids) : «L’absence de Bolt ne change pas ma façon d’aborder la compétition». Blanka Vlašić (qui ne mange que des sushis) : «Sauter 18 mètres n’est pas impossible. Toutefois, il faudrait avoir toutes les conditions réunies». Bon il est probable que l’on se soit un peu mélangé les pinceaux, mais revenons sur certains faits marquants de la réunion de Lausanne.
19h40. Le concours du javelot prend fin. Le Finlandais Tero Pitkämäki, champion du monde en 2007, a fait n’importe quoi et termine avant-dernier du concours avec seulement 78 mètres 35, à 10 mètres du vainqueur Andreas Thorskilden. Beau joueur, le Norvégien dira qu’il a eu un bon échauffement mais qu’il aurait pu faire mieux.
19h44. Le mal nommé Alain Fuss prend la dernière place du 1500 mètres en fauteuil roulant. Nous en profitons pour s’offusquer du traitement inégal que subit le sport handicap au niveau des épreuves : pourquoi n’existe-t-il toujours pas de saut à la perche en fauteuil roulant par exemple ? Ou encore de 110 mètres haies ? Les femmes participent bien au lancer du poids…
20h10. Nous avons toujours énormément de peine en voyant un athlète de 3000 mètres steeple se fracasser le tibia gauche de la barrière précédant l’obstacle d’eau avant de se manger le fond de ce dernier tout en se faisant piétiner le corps par les pointes des poursuivants. Ce cas de figure ne s’est toutefois pas produit dans la version féminine de cette course remportée par la Kenyane Milcah Chemos.

La Bise, un mal invisible…

20h28. De retour de blessure, le Cubain Dayron Robles s’impose d’un cheveu en 13"12 au terme d’un 110 mètres haies plutôt poussif compte tenu d’un vent favorable de force 9 sur l’échelle de Nelson Beaufort (on the sca-sca-scale of Myself Beautifulstrong dans le texte).
20h40. Fait incroyable, une blanche a gagné une course ! Normal car c’est Pearson, kangourou de son état, qui a remporté le 100 mètres haies féminin en 12"47 – meilleure performance mondiale de l’année tout de même… Mais bon, c’est tout de suite plus facile avec une bonne Bise dans le dos.

Génération neuf-sept

21h05. place au clou de la réunion : le 100 mètres masculin. Un Asafa Powell bien décevant s’impose en 9"78. Une nouvelle meilleure performance mondiale est certes établie, mais il était parfaitement légitime d’être plus exigeant sur l’une des pistes les plus rapides du monde. À noter que la présence du Français Lemaître a permis de satisfaire les quotas de représentation des diversités valables dans l’athlétisme tricolore.
21h08. Le Français Teddy Tamgho (triple sot) se caractérise par un bandeau blanc absolument grotesque, mais aussi par un bond de 17 mètres 91 réalisé à son troisième essai, meilleure performance mondiale et record du stade à la clé.
21h12. Frayeur pour Blanka Vlašić : la Croate montée sur échasses passe à la raclette son troisième essai à 1 mètre 90. La belle ne pointe qu’au sixième rang provisoire.
21h19. Deuxième scandale de cette soirée glaciale. Une autre athlète blanche, l’Américaine Uceny, s’impose dans le 1500 mètres féminin. La décriée Hind-Dehiba prend la troisième place grâce à la chute d’Ibtissam Lakhouad qui a confondu la ligne d’arrivée avec un rail de coke. Maryam Jusuf Jamal – toujours sans voile – termine à une indigente dixième place alors que la seule participante masculine de l’épreuve, Caster Semenya, parvient à arracher la dernière place par les poils. La Sud-Africaine ne mérite pas la polémique sur son genre. En effet, des tests poussés ont permis d’identifier au moins un chromosome X parmi tous ses chromosomes Y. Et ce n’est pas parce qu’elle a une toison très fournie sur le torse et deux bites qui pointent sur le bas ventre que ces analyses peuvent être remises en cause.

Sans contrefaçon, c’est un garçon

21h31. Cérémonie de remise des prix du 100 mètres hommes, avec toujours ce débile concours de l’applaudimètre. Le speaker se porte candidat au prochain Pigeon d’Or en hurlant le nouveau record de la réunion établi par Powell en 9"78. Le souci est que le Jamaïquain a couru en 2008 la distance ici-même en 9"72… La bourde a été continuellement reprise jusqu’à la version papier du 24 Heures du 1^er juillet (en plus de la mention de la victoire d’Usain Bolt sur cette distance…)
21h34. Après le jaune, le rouge. Blanca Vlašić se broute trois fois à 1 mètre 95 et terminera sixième du concours. Seule athlète encore en lice à la hauteur féminine, la Russe Chicherova tentera le double mètre, sans plus de succès.
21h53. Dernière course de la soirée. Vincent Kiprop Chepkok (!) s’impose dans le derby kenyo-éthiopien en 12’59"13. Un temps qui laisse sur sa faim le longiligne coureur kenyan. Franchement, il faudrait changer de tactique pour avoir des chronos de la mort. Au lieu de mettre des lièvres devant, les organisateurs feraient mieux de mettre des flics derrière !
22h15. La clôture de la réunion se fait par les traditionnels feux d’artifices en même temps qu’une prestation de la chanteuse Joni Fuller qui entame un poignant «Allez Louyaz». Nous nous demandons d’ailleurs toujours qui est ce Louyaz… Par contre, la reprise infâme d’un morceau du tout aussi infâme Coldplay aurait pu (dû) nous être épargné. Une fausse note donc pour terminer cette édition 2011.

Une sorte d’Eyjafjöll en miniature

22h22. La température chute à –34 degrés Kelvin. Il est temps d’allumer le chalumeau pour libérer nos pieds de la banquise avant de prendre le traineau pour rentrer. Pour terminer avec un dernier podium, voici celui des trois plus belles déclarations récoltées par les athlètes qui ont couru à Lausanne.
Bronze : Teddy Tamgo avec «J’espère sauter 17 mètres 13». On en déduit donc qu’avec 17 mètres 91, le Français a manqué son objectif.
Argent : Danielle Carruthers avec «Je n’ai pas senti le vent, mais le résultat (12"37) prouve qu’il y en avait». Il faut dire que la température affichait 57% et que la pression atmosphérique était de 5 degrés.
Or : Blanka Vlašić avec «New-York n’a rien à voir avec la réalité. J’avais envie de jeter mon passeport et de ne pas rentrer chez moi». Dommage que les procédures de naturalisations soient si fastidieuses en Suisse.

Écrit par Mathieu Nicolet et Yves de St-Aÿ