Confirmation en vue ?

Projecteurs sur le groupe qui passionne tout le pays, celui des champions du monde en titre, de l’Allemagne, de la France et du futur quart de finaliste, la Suisse bien sûr ! La Russie tentera de faire la passe de deux, mais quoiqu’il arrive leur bilan depuis la chute de l’URSS restera bien maigrichon en regard de leur potentiel. Ah qu’il est loin le temps des Soviets suprêmes qui raflaient tout…

1) Pourquoi ai-je choisi de présenter ce pays ?

Après les États-Unis, j’ai décidé de me spécialiser dans les pays impossibles à pronostiquer.

2) À quoi sert ce pays ?

La Russie est le plus grand pays du monde, mais la quasi-totalité de son territoire sert uniquement de congélateur à mammouths et accueille des voies de chemin de fer jadis destinées à résoudre le préoccupant problème du chômage chez les opposants politiques. On y parle le russe, langue particulièrement étrange, puisque «premier ministre» se dit «président» et «président» «premier ministre». Les principales spécialités culinaires russes sont le bortch à la dioxine et les zakouskis au polonium.

3) Comment joue-t-on au hockey dans ce pays ?

La Russie (l’URSS, même, à l’époque) découvre le hockey sur le tard, mais le génie d’Anatoli Tarasov et le totalitarisme aidant, les Rouges ne tardèrent pas à tout rafler. Ils faillirent même ridiculiser au passage des pros Canadiens pour le moins confiants. (On rappellera qu’avant le premier match de cette Série du Siècle, Jacques Plante, dans le souci louable d’éviter une dégelée mémorable à ses adversaires, était allé jusqu’à donner des conseils au jeune inconscient qui avait le front de garder le but soviétique, un dénommé Tretiak.) Le style de jeu est particulièrement original : s’inspirant du billard trois bandes, les Russes ont développé le hockey trois tours, interdisant à un joueur de tirer au but avant d’avoir fait au moins trois fois le tour de la zone offensive. C’est pour cette raison que la Russie n’a jamais brillé dans les disciplines techniques du ski alpin : ses slalomeurs jouent tous au hockey.

4) Pourquoi vont-ils gagner les Mondiaux ?

Parce que même avec son équipe W, la Russie serait encore candidate au titre.

5) Pourquoi vont-ils se faire éliminer au premier tour ?

Parce qu’ils ont gagné l’édition précédente. Les hommes de Bykov peuvent donc se rendormir peinard pendant une bonne dizaine d’années. On pourrait penser par ailleurs qu’ils auront de la peine à s’éclater toute la nuit à Berne, mais ce serait bien les sous-estimer.

6) Qui sont les joueurs à surveiller ?

Quasiment tous. On citera plus particulièrement la superstar Ilya Kovalchuk. Pour ceux qui auraient passé les quelques dernières années dans le désert ou qui seraient journalistes à la TSR, on précisera que le gaillard est un buteur patenté qui inscrit entre 40 et 50 buts par saison en NHL, et ce en pure perte, puisqu’il joue à Atlanta. Alexander Frolov symbolise assez bien le joueur russe en cela qu’il est particulièrement redoutable quand il a envie de jouer.

7) Qui sont les joueurs à ne pas surveiller, mais dont on peut éventuellement se moquer ?

Alexander Perezhogin est tout sauf un mauvais joueur (c’est la Russie, après tout, ne vous faites pas d’illusions), mais il s’est surtout illustré par ses talents de joueur de base-ball jusqu’ici. À moins d’une blessure d’Ilya Bryzgalov, on ne devrait pas beaucoup voir Alexander (vous avez remarqué qu’ils s’appellent tous Ilya ou Alexander ?) Eremenko. C’est bien dommage, car c’est en général assez rigolo.

8) Une bonne raison de les supporter ?

Malgré une certaine nord-américanisation de leur jeu depuis la chute de l’URSS et la vague d’émigration économique en NHL, la Russie reste une équipe qui produit régulièrement du beau jeu et des schémas qui changent un peu du «on attend à la bleue et on va droit au but» en vogue de nos jours. De plus, l’équipe est coachée par Slava Bykov, homme de classe qui a eu le bon goût de gagner des trucs partout où il est passé, sauf à Fribourg et à Lausanne.

9) Une bonne raison de ne pas les supporter ?

Supporter l’équipe de Russie est un des plus grands sacerdoces du monde du hockey. Déjà parce qu’il faut tenir la dose de vodka syndicale, mais aussi parce que c’est l’équipe qui déçoit le plus souvent par rapport à son niveau potentiel. Il est plus logique de s’enthousiasmer pour des équipes plus constamment fidèles à leur niveau, comme la Suisse, par exemple.

10) Bon d’accord, mais sinon ?

Suite au retour massif de ses joueurs au pays, pour des raisons purement patriotiques, on n’en doute pas un seul instant, l’équipe de Russie devrait trouver un peu plus de cohérence. Mais avec des éléments toujours très portés sur l’exploit individuel, il y a encore du boulot. Une demie et on rentre.

Écrit par Yves Grasset