Une loterie, les tirs au but ?

Non, la séance de tirs au but n’est pas une loterie. Encore moins une roulette russe. Elle récompense tout simplement les audacieux, ceux qui ont la psyché souveraine.

Souvent, une série de tirs au but clôt les hostilités lointaines, dernier subterfuge d’une partie équivoque où personne n’est capable de se départager, l’égalité parfaite entre deux formations crispées, exténuées, qui s’écharpent depuis 120 minutes d’hystérie.La séance de penalties couronne l’ascendance psychologique. Ceux qui ont terminé sur des hauts – égalisation tardive, renversement improbable, parfois contre le cours du jeu – grignotent un avantage non négligeable à ceux qui se morfondent d’occasions manquées, de maladresses offensives, les regrets en abondances.
Même si le score est toujours au point mort, un avantage psychologique s’est déjà dessiné pour l’un ou l’autre des partis. Et souvent, il est déjà décisif.

Evidemment, les exemples ne manquent pas. Les Japonaises sont devenues championnes du monde, hier, en battant une équipe américaine (2-2, 3-1 tab) qui se demandait comme elle en était arrivée là après avoir tant dominé, tant gâché d’occasions franches ; tout le contraire des Nipponnes, carrément joviales, potaches, l’exploit d’être revenues au score par deux fois, miraculées, réalistes au point d’avoir inscrit deux buts improbables en 120 minutes de subordination totale.
Au moment d’aborder la séance des tirs au but, l’avantage psychologique était évidemment japonais, la logique a fait le reste : 3 tirs au but sur 4 pour le Japon, un catastrophique 1 sur 4 pour les USA. Le palmarès avait, déjà, choisi son camp, les Américaines déjà confites aux regrets éternels, un palimpseste comme miroir d’un dessein qui attend.
Mais les Américaines comprendront. Elles-mêmes avaient bien fait plier les favorites brésiliennes (2-2, 5-3 tab) dans ce même exercice des tirs au but, après avoir égalisé à la 122e minute. Après avoir galéré pendant 60 minutes à 10 contre 11. Après être revenues de nulle part. 5 sur 5 pour les Américaines à la séance des tirs au but, toutes heureuses de l’avoir atteinte ; l’attitude pétocharde pour le Brésil, les regrets pleins la tête avant même le premier tir au but. L’ascendant psychologique avait, encore, choisi son camp.
Hier toujours, chez les hommes cette fois, le Brésil a perdu la bataille mentale avec le Paraguay (0-0, 0-2 tab), après avoir tant dominé une partie confite aux occasions ratées, ou propice aux arrêts d’un Justo Villar en état de grâce. L’état de la pelouse n’a pas aidé, certes, mais les Paraguayens n’ont pas fauté, ni polémiqué sur l’exercice qui était, ma foi, leur objectif avoué.

D’autres exemples affirment la tendance, le mythique Liverpool-Milan (3-3, 3-2 tab) en finale de la Champions League de 2005 le relate, le plus récent Argentine-Uruguay (0-0, 4-5 tab) le confirme : les tirs au but ne sont pas une loterie, encore moins une roulette russe, simplement un moment d’aptitude psychique, un test de sérénité.
La série de tirs au but récompense les mentalistes purs, ceux qui ont la caboche fière, la posture facile, l’aisance du moment, la gloriole comme récompense. Si le mental suit, la technique suit. Si la confiance règne, le calme concrétise.
Une loterie se perd plus souvent qu’elle ne se gagne. La roulette russe ne punit que les poissards. La séance de tirs au but ne sanctionne que ceux qui s’en plaignent. Qu’on n’entende plus jamais parler de loterie.

Écrit par Sacha Clément

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7 Commentaires

  1. Tu as oublié le mythique Suisse-Ukraine ou après avoir outrageusement dominé les débats les Suisses se sont liquéfiés aux penalties 😀

    Intéressant article.

  2. Alors Xamax a fait un exploit en quart de finale de la coupe suisse la saison passée contre Thoune. Après l’égalisation de Thoune à la…120ème, Xamax a résussi tous ses penalties. Sacré mental

  3. Très juste cet article! Un autre exemple: la finale de la Coupe du Monde 2006: Italie-France. Après l’expulsion de Zizou suite à son stupidissime coup-de-boule, les boys de Domenech sont arrivés aux tirs au buts avec le moral dans les chaussettes…

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