50 matchs pour rien

Chacun le sait, chacun le dit, mais d’une saison à l’autre, on oublie qu’un championnat de hockey sur glace ne commence vraiment qu’avec les play-off. Les inculqués d’Amérique du Nord l’ont bien compris puisqu’ils ont raccourci la saison régulière de NHL en causant pognon pour les uns et en gagnant pognon en Europe pour les autres. En 2013, il n’y a que le fric qui compte, il faut s’y faire.

Il n’en va pas autrement à Lausanne. Après les 50 premiers matchs, il faut être en équilibre comptable. Des frais, on en a eu LHC cette saison : un budget «joueurs» le plus maousse costaud de la ligue, un encadrement technico-commercio-administrativo-prepafisico-marketing digne d’une organisation professionnelle de haut rang et cerise devant le filet: un gaulois d’origine, vinifié au Tessin pendant quatre ans, vieilli en fût chez les inculqués d’AdN pendant huit ans, réhabitué à notre climat tempéré dans une cave à fromage pendant deux ans,  avant que finalement il ne s’assemble de lui-même avec une belle bouteille du pays pour faire de lui le meilleur rempart franco-suisse que le hockey mondial n’ait jamais produit!

Vous imaginez à combien ça nous met le «big save»? Tellement cher que les managers technico-commerciaux précités ont préféré ne pas le compter dans le budget.
Parmi les babioles onéreuses en cours d’exercice, il ne faut pas oublier un changement de coach,  histoire de respecter une ancienne tradition, les arrivées de quelques joueurs en morceaux à retaper d’ici la fin de la saison, un ex-crack du bout du lac devenu méconnaissable depuis son passage chez les Ours de la ville fédérale, l’engagement de deux mercenaires pour pallier aux bobos des étrangers titulaires (même si sur ce point, je me demande si un six-pack de Canads aurait été suffisant ?) et enfin les honoraires du bon Dr Valloton qui, à moins d’un forfait par saison, doit à lui seul coûter au LHC autant que ce que le Dr Ferrari a coûté en potions magiques à Lance Armstrong.
Mais ces 50 matchs, c’est aussi l’occasion pour le club de réduire quelques charges et d’augmenter certains produits: en vrac, les abos et les entrées qui augmentent et auxquelles on ajoute un franc pour les juniors, ça donne bonne conscience. Les bières: on diminue la taille des gobelets de 25% et le prix du liquide de 17%, où l’art de gagner plus en vendant moins. Un marchandising digne d’une boutique de fringues, tant en variété qu’en qualité, et que dans les prix des articles vendus. Les maillots de la première équipe, magnifiques, en deux qualités: le «faux» au prix de l’ancien vrai et le vrai-vrai de la saison en cours, brodé et personnalisé. A 259 francs, ça fait cher, mais pas plus qu’en LNA!
Comme cela ne suffit pas, ces 50 premiers matchs, c’est l’occasion aussi de laisser partir quelques bons joueurs et d’en placer d’autres ailleurs en attendant des jours meilleurs. Vous rajoutez un repas de soutien par-ci, une soirée VIP par-là, un match d’All Star et quelques ventes aux enchères et c’est comme ça que l’affaire roule. 
Le LHC nouveau pue le fric, mais ne réussit pas mieux que l’ancien me direz-vous. C’est vrai, nous sommes en 2013, c’est fini le hockey des copains de Montchoisi, c’est fini le délire d’un Chaudron de Malley plein à craquer faute de tourniquets en état de marche, c’est fini le temple chauffé à rouge et blanc par le virage ouest, et décoré des plus beaux tifos du hockey suisse.

Nous avons survécu à la fin du monde. Nous sommes en 2013. Il faut être sérieux, sages, ne pas se faire interdire de patinoire et avant de gagner des matchs, aussi se préoccuper de gagner des sous. Rien de plus normal quand on a une dette de 2.3 millions à rembourser à son «pire» ennemi, ça rend tout de suite moins rêveur et passionné, ce genre de situation.
Et le sport, hein? Quoi le sport, quel sport? Ah oui, mais il n’y en pas eu beaucoup cette saison et lorsqu’en plus il compte pour beurre, autant ne pas en parler.
Puis soudain, le vendredi 15 février 2013, le miracle des play-off. Nous avons eu droit à quatre sports en même temps: du hockey, de la boxe, de la lutte et du catch. Et même un peu de théâtre, du cinéma et de la couardise de la part de certains joueurs. Pour arroser tout ça, un peu de philosophie de bistrot de la part des arbitres qui nous ont rappelé que quand on est con, ça ne sert à rien d’être plus nombreux pour devenir bons!
Bonne «vraie» saison de hockey à tous et déjà bravo à l’équipe qui gagnera le dernier match.

Photo Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Écrit par Yan-Karel Grostonnerre

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5 Commentaires

  1. très bien, du grand CR, ça change du forum du LHC qui se met au niveau de certains journalistes de quotidien de boulevard ces derniers jours….

  2. Très bon papier que je découvre à l’instant. Et même si ce monsieur Grostonnerre (…) prend un pseudo ubuesque, il résume parfaitement le sentiment des supporters du LHC.

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