Croche-patte : plus on est de fous, moins il y a de ridicules

Si le ridicule tuait, il y aurait beaucoup moins de monde sur cette planète. Dirigeants, agents, fans, journalistes parfois, parents de joueurs, sportifs d’élite, des talus ou du dimanche, et autres crétins décérébrés, seraient foudroyés sur place séance tenante, au gré d’un geste, d’une parole ou d’une idée lancée sans réfléchir, comme ça, à la face d’un monde dont la réactivité aux ignominies proférées atteint péniblement celle d’un mollusque sous Prozac.

A tout seigneur, tout honneur, et comme j’ai bien envie de me venger, commençons par le gars qui m’a fait perdre une bonne heure et demie de sommeil en plus de quelques minutes de vie en atomisant notre Federer national ! … Federer mondial ! … Federer planétaire !… Que dis-je planétaire ?… Il est galactique ! Tout ça à cause du Marin Cilic dont le prénom, comme son époustouflante prestation, le disposerait bien à un séjour dans une galère ! Ce type, sportif de très haut niveau, admiré et probablement adulé dans son pays depuis peu, contrôlé et contrôlant sa vie à la seconde près, n’a trouvé d’autres excuses, lorsqu’il a été suspendu pour dopage l’année dernière, que de dire à la face du monde entier qu’il avait «ingéré par inadvertance un stimulant». Aussi crédible que les dénégations d’un vulgaire Amstrong, aussi pathétique que les justifications approximatives d’un Virenque.Un qui a fait fort aussi dans le genre «j’ai-eu-une-idée-à-la-con-et-je-vous-en-fais-part-après-l’avoir-mise-en-pratique», c’est le dénommé Hector Varela, qui serait devenu le premier (sic) Argentin à appeler son fils «Messi», ce qui a poussé les autorités de sa ville natale à légiférer et à interdire cette nouvelle pratique ! Nouvelle nouvelle, c’est à voir ! Ces 40 dernières années, combien de parents à l’imagination aussi fertile que celle d’une botte de foin, aux rêves aussi minuscules qu’une midget sur YouPorn, ont appelé leur enfant du nom d’une star de cinéma ou d’un sportif ? Lorsque ni la génétique, ni l’environnement familial n’est d’un grand secours, il reste l’imitation pour s’en sortir dans la vie… Quitte à entrer dans celle-ci sur de bons rails, il paraît que le prénom «Maradona» est toujours disponible… Escobar et Adolf aussi.
Quand la justice s’en mêle, ce n’est pas triste non plus… Outre le fameux O-J. Simpson, en 1994 déjà, reconnu responsable mais non coupable d’un double homicide et qui s’en est sorti blanchi au pénal avec 35 millions de dollars, ou encore le Bernie de mon précédent papier qui doit se sentir léger sodomisé-heureux avec les 100 millions versés pour son immunité judiciaire et sociale, le procès de l’amputé le plus célèbre du 21ème siècle fait aussi tâche sur le manteau immaculé de la crédibilité du monde du sport et de ses aficionados… Ainsi, Oscar n’est reconnu coupable que d’homicide involontaire… si, si, ils ont osé… après une soirée à s’engueuler avec sa copine et quatre tirs tendus dans la porte de la salle de bain, fallait oser, en effet, y voir autre chose, dans la mort de sa nana, que le geste d’un mec amoureux transi, probablement rejeté le soir même, et ne trouvant que dans une virilité détonante la réponse à son impuissance et à son récurrent sentiment d’abandon. Dommage que la juge n’ait pas été blanche et Oscar black… on aurait pu croire en effet, le cas échéant, que l’Apartheid avait définitivement reculé.

Mais que serait le sport sans une bonne moisson de médailles et d’honneurs mondiaux ? Comment faire briller la nation – et accessoirement les fins politiciens qui la dirigent ? La Russie a trouvé : ainsi, ce gros malin de Valentin Balakhnichev, le président de la fédération russe d’athlétisme, jaloux comme pas deux des succès des autres lors des derniers championnats d’Europe à Zürich, a eu l’idée du siècle : corréler le nombre de médailles de l’équipe de Grande-Bretagne au nombre d’athlètes noirs de la même équipe. «Les athlètes noirs, qui constituent l’ossature de l’équipe de Grande-Bretagne, ont apporté à ce pays 14 de leurs 23 médailles» a-t-il très intelligemment observé. Et le voilà parti dans l’optique d’attirer les jeunes talents noirs en Russie… puisque «les résultats (…) dominés par la Grande-Bretagne et la France ne nous laissent plus d’autre choix» a-t-il éructé… 
Ohhhh mais quelle est bonne cette idée : le racisme terrassé sur l’autel de l’or olympique ; les préjugés écrabouillés dans le virage d’une piste en tartan… la discrimination congelée dans un schuss «Wengenerien»… l’intolérance calcinée sur le bûcher d’une raison sportive retrouvée… Oui, je veux vivre dans ce monde-là.
Mais un doute m’habite : en Russie justement, si l’athlète noir convoité est homosexuel et nudiste, il n’est pas un peu dans la merde le président Balakhnichev ?

Écrit par Pascal Trépey

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