Où sont donc passés, ces noms de stades qui nous faisaient rêver ?

Les temples du football ont de tout temps exercé une forte fascination sur les supporters du ballon rond. Que deviennent donc ces noms de stades qui nous font et faisaient rêver, tels que les « Anfield Road » ou encore les « Santiago Bernabeu » ? Des noms qui, dès qu’ils étaient énoncés, provoquaient de fortes émotions pouvant prendre la forme de flash-backs instantanés. Vous voulez un exemple : si je vous dis « Wembley » ; là, je parie que nombre d’entre vous voient subitement un ballon frapper une latte, rebondir au sol, puis ressortir des buts (nous n’entrerons pas ici dans le débat de savoir si le cuir avait franchi la ligne ou non…) ! N’avais-je pas raison ? Ce sont ce genre de souvenirs qui font l’histoire d’un stade ou qui donne naissance à une légende.

Alors d’où viennent ces dénominations ? Ils sont en général liés à l’histoire, à la politique où à la géographie de la région. On retrouve un grand nombre d’appellation ayant une origine géographique découlant de l’emplacement du stade dans l’agglomération. En effet, très souvent le nom d’un quartier est donné à l’arène (par ex. la Pontaise ou la Praille). Toutefois, on peut retrouver d’autres caractéristiques géographiques, comme par exemple une petite rivière londonienne creusant son lit à proximité d’un stade, et qui finalement va lui donner son nom : le « Stamford Bridge » de Chelsea. Alors qu’à Turin, ce sont les montagnes voisines qui ont suggéré l’« Estadio delle Alpi ».Pour parler de l’influence de la politique sur certains noms de stades, il faut absolument parler de l’Afrique, car les exemples sont éloquents et nombreux. A Dakar, le stade a été baptisé en 2001 du nom du premier président sénégalais, Léopold Sedar Senghor, et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres patronymes de chefs d’état. Mais on trouve aussi des noms datant de la période coloniale, comme le stade Charles De Gaulle à Porto Novo.

Photo du Stade de Schalke
Mais l’appellation la plus récurrente et ayant une origine politique est sans aucun doute le « Stade de l’Amitié », on en trouve entre autres à Ouagadougou, à Mogadiscio, à Niamey, à Rabat, et même en Europe où il se décline alors en « Stadion der Freundschaft », théâtre des matchs de l’Energie Cottbus en Bundesliga, en ex-Allemagne
de l’Est. De plus, si l’on sait que ces stades africains étaient tous le fruit d’une coopération sino-africaine et furent construits pendant la guerre froide, on comprend bien vite alors, qu’il ne s’agit pas d’une quelconque « amitié », mais d’une « camaraderie » communiste. Depuis, ces stades ont d’ailleurs été débaptisés pour des raisons évidentes, et ont laissé leur place à des noms d’hommes politiques comme à Dakar, cité précédemment, ou à des dates historiques.
Et j’en viens à la troisième partie, à savoir l’origine historique. A Alger, le stade a été baptisé « Stade du 5 juillet », du jour de l’indépendance du pays en 1962. Mais l’origine historique est aussi liée à l’histoire de personnes qui ont marqué le club pensionnaire d’un stade, comme Santiago Bernabeu, ancien joueur, capitaine, entraîneur et président du Real de Madrid, qui donna son nom au stade en 1955. Plus près de chez nous on peut aussi citer le stade Geoffroy-Guichard à St-Etienne, qui doit son nom à un entrepreneur, ayant beaucoup fait pour le club, dont la construction de son premier stade.  Mais il y a aussi des hommes qui pour services rendus à la patrie ont eu l’immense honneur de baptiser un stade à leur nom, comme un certain Arnold Schwarzenegger qui avait jusqu’à il y a peu, son stade à Graz.
Mais de nos jours, la mode anglo-saxone est moins soucieuse d’une quelconque attache géographique, historique ou politique. La mode est maintenant à la marque, au marketing et peut parfois faire sourire. En effet, de nombreux clubs vendent la dénomination de leur stade pour en retirer un pécule non-négligeable. En ces temps dirigés par l’argent. Certains noms ne me font plus rêver comme avant. La connotation économique est trop présente rien qu’à son énoncé.
Emirates StadiumL’exemple, qui m’a donné envie d’écrire cet article, est le nouvel écrin des Gunners d’Arsenal : l’« Emirates Stadium » qui remplace le mythique Highbury. Que doivent penser les plus anciens fans de se rendre aux «Emirates » : « On va voir le match dans un aéroport ? » Et que dire des supporters de Bolton qui se rendent tous les week-ends au « Reebok Stadium » : « est-ce dans une chaussure géante ? »
En Allemagne, on trouve également plusieurs exemples semblables, comme la AOL Arena de Hambourg, qui remplace le vieux Volksparkstadion. Même le magnifique Olympiastadion de Munich n’a pas résisté aux pressions économiques puisque tant le Bayern que le TSV 1864  évoluent maintenant dans la « Allianz Arena ». Le « Waldstadion » de Francfort, qui portait si bien son nom car situé au milieu d’une forêt, a lui été rebaptisé Commerzbank Arena, un peu moins bucolique… Et que dire de Schalke qui dispute ses rencontres sous des flots de bière dans la Veltins Arena. Il manque une touche identitaire à toutes ses appellations. Mais la palme du ridicule revient à Dortmund, où le spectaculaire et légendaire « Westfalenstadion » se trouve maintenant affublé d’un absurde « Signal Iduna Park », qui pourrait faire croire à des distributions gratuites de dentifrice et de déodorant à l’entrée du stade, même si ce sont des assurances que l’on veut nous vendre.

A Lausanne, ces derniers temps, on parle beaucoup de la construction d’un nouveau stade entre Vidy et la Bourdonette, près du lac, pour ceux qui ne connaissent pas. Alors, après ce petit tour d’horizon, on peut d’ores et déjà prendre les paris sur quel pourrait être le nom du nouveau stade et s’attendre au pire.
Donnons quelques idées aux autorités. Si on souhaite le baptiser avec un lien géographique : un « Stade de la Bourdonnette » ou « Stade du Léman » sonnent bien « d’chez nous ! ». Si l’on veut rendre hommage à un personnage politique le nom de « Stade Daniel Brélaz » semble tenir la corde et que dire encore d’un « Stade Stéphane Chapuisat », simplement pour le remercier d’exister. Mais les entrepreneurs du canton ne voudront sûrement pas s’avouer vaincus et proposeront de concert un « Nestlé Park », un peut trop germanique peut-être, mais alors un pompeux « Stade Alinghi Serono Bertarelli », qui c’est vrai serait du plus bel effet.
Au cas où autorités et promoteurs économiques n’arriveraient pas à se mettre d’accord sur un nom, elles pourraient, malgré tout, décider de construire un deuxième stade à côté du premier, mais pour l’athlétisme celui-là, « Stade Anita Protti », qui dit mieux ?

Écrit par Julien Maret

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