Boxe thaïe : le fabuleux destin de Nong Thoom

A la demande de la rédaction, j’ai d’abord essayé d’écrire un article sur le football thaïlandais mais je me suis vite rendu compte de la difficulté, voire de l’impossibilité, de cette tâche !

Lorsque je demande à mes amis thaïs quel est leur footballeur préféré, j’ai le droit aux réponses habituelles : Beckham, Zidane, Henry etc…
«Non, je voulais dire votre joueur de foot thaïlandais préféré ?».
«May ru !» (Traduction de «je ne sais pas» en thaï) est la réponse non pas habituelle, mais exclusive ! Le football thaï se limite au match Liverpool – Chelsea du dimanche soir sur ESPN… En même temps c’est mieux qu’un Sion – Zurich que seul un Suisse peut trouver intéressant !Bref, n’écoutant que mon envie de gratifier Carton Rouge d’un article écrit de ma plume internationale, je m’aventure en leur demandant quel sport peut être considéré comme «sport national» en Thaïlande. Et là, magie ! D’une voix commune tous me répondent avec une lueur de fierté dans leurs yeux : le Muay Thaï. Comprends, la boxe thaïe.

Le Muay Thaï ? Kesako ?

Panique ! Un sport de combat ! Et moi qui connais à peine les règles de la boxe, et encore, uniquement grâce aux aventures de Rocky… Je commence donc à fouiller afin de comprendre ce sport qui, je dois bien l’avouer, ne m’attire guère. En gros le Muay Thaï se joue en 5 rounds de 3 minutes, qui suffisent amplement à en prendre plein la figure. Apres un petit Ram Muay, une danse traditionnelle exécutée par des pom pom girls version thaïe sur le ring, le match commence. Et à ce moment le boxeur (le Nak Muay) a droit à divers coups comprenant, accroche toi bien : coups de poing, de coude, de genou, de pied. Il existe également un coup de tibia circulaire dont tu peux facilement voir un exemple réalisé par Thierry Lhermitte dans «Les Bronzés 1». Finalement, le principal intérêt que j’ai trouvé à aller voir un match de Muay Thaï à Bangkok, c’est de voir les spectateurs comme des fous, en train de parier leurs soldes sur des cotons tiges de 45 kilos secs comme du fil de fer !
En poursuivant mes recherches, je découvre avec surprise que la boxe thaïe présente une particularité unique au monde… Je trouve enfin le petit détail qui va rendre ce sport bien plus intéressant. Ce petit détail se nomme Nong Thoom…

Merci Nong Thoom !

Quand on te parle de Thaïlande, que te vient-il à l’esprit en premier ? Les plages ? Les filles ? Cette cuisine délicieuse ? Les Maï Thaï ? Bangkok ? Ou peut-être les transsexuels ? C’est ce dernier point qui va pimenter cet article sur un sport, il faut l’avouer, au premier abord assez ennuyeux.
Nong Thoom est né en 1981 et présente un parcours pour le moins original : après avoir été moine bouddhiste, il devient un grand champion de boxe thaïe en gagnant notamment un tournoi dans la Mecque de ce sport, le Wembley du Muay Thaï : le Lumpini Stadium à Bangkok. Les succès s’enchaînent, les poches deviennent de plus en plus garnies… et le rêve de Nong Thoom devient enfin réalité : grâce à tous ses gains, notre ami peut se payer sa «transformation» ! Nous sommes en 1999 et Nong Thoom, champion de boxe thaïe de 18 ans, va devenir une femme par la force du bistouri ! L’un des plus grands champions de ce sport de combat est devenu une personne de sexe féminin, un transsexuel, ou un «kathoey» comme ils disent ici. Il, pardon, elle est aujourd’hui une actrice et un top model reconnus dans tout le pays. Tu imagines, toi, Stalone défiler pour Versace en robe du soir ?!

Mieux, Nong Thoom a relancé la popularité de ce sport dans le monde ! En effet, si ce sport est un véritable phénomène en Thaïlande (200’000 personnes en vivent), il ne fait que commencer à percer dans le reste du monde. On le connaît mieux en Europe sous le nom d’une de ses variante les plus proches, le kick-boxing. Mais relativisons, tu connais beaucoup d’amis qui pratiquent ce sport ?

Andy Hug, c’est déjà qui celui-là ?

Mais si vraiment tu veux te faire mal aux yeux, je te conseille de regarder un jour un combat de K1. C’est un tournoi se déroulant au Japon et qui reste sans aucun doute le Super Bowl du Muay Thaï… Ce tournoi est d’ailleurs assez connu en Suisse pour la simple raison qu’un Helvète y a inscrit son nom au palmarès en 1996 ! Le nom d’Andy Hug ne te dit rien ? Et si je te donne comme indice que ce champion est décédé en 2000 des suites d’une leucémie ? Ca te revient ? Allez promis, je reviendrai plus en détails sur son histoire une prochaine fois !
Malgré cette internationalisation, la boxe thaïe reste vraiment un sport à part en Thaïlande. Et ne viens pas dire à un Thaï que le K1 fait partie de la même catégorie ! C’est un peu comme si tu comparais les supporters de Liverpool et du PSG ! Bon, je te laisse, je dois aller voir un combat de coqs pour mon prochain article !

Écrit par Eric Laurent