Constantin : quand l’hôpital se moque de la charité

Le premier tour étant terminé, les footballeurs goûtant des vacances bien méritées, on pensait en avoir fini avec le championnat suisse jusqu’à la reprise des hostilités en février prochain. C’était mal connaître Christian Constantin, qui n’a pas pu supporter que son FC Sion ne fasse pas la une des médias durant une semaine.

J’avais découvert le personnage il y a une petite vingtaine d’années, lors d’un match pluvieux de première ligue à Echallens. L’actuel président sédunois gardait alors les buts du FC Fully. Ce jour-là, sa défense n’avait pas été terrible et il n’avait pas arrêté grand-chose. Au final, Constantin avait encaissé sept ou huit buts et le gamin que j’étais alors avait eu un peu pitié de ce malheureux gardien. Depuis beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, mais j’aurais toujours tendance à avoir pitié de Christian Constantin si ses méthodes de cow-boy n’étaient pas en train de nuire gravement au football suisse.Il est inutile de préciser que ses revendications en dommages et intérêts n’ont aucune chance de trouver grâce devant la justice. Le fait que le boss sédunois invoque le match de Lucerne pour montrer à quel point son équipe a été lésée prouve l’insignifiance de son argumentation. Ce soir-là, le FC Sion a égalisé alors que les arrêts de jeu étaient déjà dépassés sur un but entaché d’une faute flagrante. Il serait trop long de refaire ici la liste de tous les penalties et coup francs inexistants qu’a obtenus le plongeur Regazzoni. On se bornera à constater que si, lors de la saison 2005-2006, il y a une équipe qui doit tous ses succès à des erreurs d’arbitrage, c’est bien le FC Sion. Au premier tour de la Coupe de Suisse, au Mont, les Valaisans sont virtuellement éliminés mais l’arbitre prolonge le match plus que de raison, jusqu’à l’égalisation sédunoise. Si Sion n’avait pas marqué, on serait sans doute toujours en train de jouer au Châtaignier. Seul un but entaché de hors-jeu permettra au FC Sion de se débarrasser du modeste Winterthour en demi-finale. Enfin, lors de la finale, YB est largement supérieur en début de match et il faudra l’expulsion sévère de Gohouri pour rétablir l’égalité des chances.
En championnat, le FC Sion était en passe de perdre toute chance d’atteindre les barrages lorsque, à quelques minutes de la fin de l’antépénultième journée, Bellinzone a inscrit le but du 2-1. Mais, alors que le joueur tessinois était parti cinq mètres derrière la défense valaisanne, les arbitres annuleront le but pour un hors-jeu inexistant avant d’accorder un penalty cadeau aux Valaisans sur une énième simulation de Regazzoni. Au lieu d’un 2-1 éliminatoire, c’était un 1-2 qui permettra au FC Sion, avec la complicité d’un Wil curieusement survolté à la Pontaise contre Lausanne et d’un Lugano étrangement apathique au Cornaredo contre les Valaisans (le seul des 323 matches et demi de Challenge League où aucun carton n’a été distribué !), d’atteindre les barrages et la Super League.

Constantin n’a d’ailleurs jamais caché son admiration pour Bernard Tapie, allant même jusqu’à envisager de rebaptiser son club «Olympique des Alpes». Cela, c’était avant la fin de l’ère Constantin I, avant que celui-ci ne laisse ses successeurs se dépatouiller avec les millions de charges sociales et salaires impayés, avant de revenir en sauveur quelques années plus tard.
Les gesticulations actuelles de Christian Constantin rappellent celles, voici une dizaine d’année, d’un autre dirigeant octodurien, René Grand, lui aussi consommateur effréné d’entraîneurs, quand il n’était pas lui-même à la bande, dont les rêves de grandeur ont mené le HC Martigny à la faillite. On se souviendra que René Grand avait lui menacé de faire sécession du championnat suisse pour protester contre les Grands Méchants suisses allemands, tous ligués contre lui.
Constantin rêve sans doute d’avoir des arbitres italiens façon Moggi qu’il pourrait contrôler et, si nécessaire, licencier, comme ses entraîneurs, en fonction du Totomat. Cela ne lui sera bien sûr pas accordé. Néanmoins, le terme lui a échappé dimanche soir sur la TSR. Christian Constantin vise, par ses revendications, à mettre la pression sur les arbitres, afin que ceux-ci, dans le doute, préfèrent siffler en faveur du FC Sion pour s’éviter des semaines de polémique. Tout est d’ailleurs entrepris pour que les matches à Tourbillon se déroulent dans un climat délétère : le terrain est généralement dans un état déplorable, favorisant le combat plus que le jeu, rien n’est fait pour lutter contre la petite frange de supporters qui n’a rien à faire dans un stade (ceux qui poussent des cris de singe quand des joueurs de couleur touchent le ballon, jettent des objets sur les joueurs et supporters adverses, ont envahi des terrains de LNB…) et nombre de matches du FC Sion se sont finis en pugilat, quelque soit l’adversaire ou la compétition (Leverkusen, YB, Chaux-de-Fonds, GC…). Difficile dans ces conditions pour un arbitre de garder la tête froide.
L’engagement de Pierre-Albert Chapuisat s’inscrit dans cette logique d’intimidation. On ne va pas relater ici tous les démêlés de Gabet avec le corps arbitral (en particulier avec M. Détruche), ni conter les «succès» de sa carrière d’entraîneur (deux limogeages à Bulle et Winterthour) ou ses échecs (Yverdon, Renens, Epalinges, Carouge, Chênois…). Avec aux commandes les deux plus grands pourfendeurs de l’arbitrage en Suisse, le deuxième tour du FC Sion s’annonce carnavalesque. Nul doute que les amateurs de polémiques, de faits divers et de coups fourrés vont se régaler, les amoureux de football un peu moins.

 

Malheureusement, ces méthodes d’intimidation envers les arbitres peuvent porter leurs fruits : José Mourinho, orfèvre en la matière, l’a prouvé contre le Barça voici deux ans. D’ailleurs, Arsène Wenger, constatant l’efficacité de la démarche, s’y met aussi.
Il importe aujourd’hui d’apporter une réponse claire et intransigeante envers ces méthodes qui rendent absolument impossible la tâche déjà ardue des arbitres. La Swiss Football League n’aime pas Christian Constantin certes, mais elle en a peur et préfère céder devant lui plutôt que risquer un nouveau procès. Sinon, comment expliquer que le président sédunois n’ait toujours pas encouru la moindre sanction effective après les faits survenus voici deux saisons à Kriens, faits attestés par une condamnation pénale de la justice lucernoise ? Lorsqu’un junior ou un joueur de ligue inférieure s’en prend à un arbitre, la suspension est immédiate et l’effet suspensif n’est pas accordé, même en cas de recours. Manifestement, M. Constantin est au dessus des lois. Il serait temps que la Ligue prenne ses responsabilités et rappelle à Christian Constantin qu’il y a des règles du jeu à respecter et que si celles-ci ne lui plaisent pas, il n’a qu’à s’en aller. Le football suisse et même le FC Sion ne s’en porteraient que mieux.

Écrit par Julien Mouquin

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