Le Léman fait encore des siennes

Samedi 7 juin à 14h, alors que l’Euro de football débute en Suisse, le troisième coup de canon annonce le départ de la 44ème Genève-Rolle-Genève. La pluie a cessé depuis le petit matin, mais le lac reste toujours aussi plat. La distance entre la Tour Carrée de Genève et le port de Rolle va être longue. Reportage d’un amateur de voile passionné alors que toute la Suisse et l’Europe a les yeux rivés sur le ballon rond.

La ligne est juste à quelques mètres de nous, mais le vent manque. Les bateaux ayant choisis le bord de la rive gauche commence déjà à partir tout doucement. Les multicoques à la moitié du lac créent entre eux leur propre vent pour s’extraire de la masse des autres bateaux.Inexorablement nous voyons les premières embarcations s’éloigner alors que nous restons collés à 10 mètres de la ligne de départ. L’ambiance reste bon-enfant dans le peloton, les grands monocoques et les plus petits se laissent passer mutuellement quand cela les arrangent. La ligne est enfin franchie à 14h30, alors que les premiers sont déjà à la Belotte.
Les airs se lèvent un moment, rien de très significatif, mais cela nous permet de nous donner de l’élan pour recoller au peloton. Le petit groupe de D35 et la grande quantité de M2 sont déjà loin devant nous. Sur notre Surprise, c’est l’heure de la décontraction et aux longues manœuvres pour trouver un peu de vent. Au large de Collonge-Bellerive, un canot à moteur vient prendre de nos nouvelles et prendre quelques photos.
La masse des bateaux commence à s’étendre à travers tout le petit lac, on reconnait les favoris et les bateaux puissants qui croisent plus au large. Le soleil est caché derrière les nuages et il fait juste assez chaud pour enlever la veste. Le long du lac les gens se retournent pour voir la régate passer.

A 16h30, on est presque à Hermance, nous savons désormais que nous allons devoir composer avec un vent qui ne voudra pas nous aider. On recherche la moindre risée, on cherche le moindre souffle d’air et surtout on observe les autres bateaux pour voir s’ils trouvent plus d’air que nous.
17h00. Coup d’envoi officiel de l’Euro 2008, nous allumons la radio et nous buvons une bière tous ensemble. On écoute le match tant bien que mal sur le petit poste de radio embarqué avec nous. On entend la blessure de Frei et le but de la Tchéquie contre une Suisse démunie. Le bateau avance toujours, mais le cœur est endeuillé par le match désastreux de la Nati. On se replonge dans la régate, on mange un morceau de pain et de fromage en attendant le deuxième match de la soirée.
21h45, on se trouve au large de Nyon, on voit presque Rolle ! Hourra se dit on, nous sommes bientôt arrivés ! Que nenni, la distance qui nous sépare de la première marque du parcours ne veut pas se rapprocher. Nous voyons les multicoques et les monocoques enfermés dans cette baie de Rolle incapable d’en ressortir. Le vent manque !
Portugal-Turquie, on écoute le début du match, mais on éteint vite la radio en espérant mieux nous concentrer sur la régate et ainsi avancer le plus vite possible vers la ligne d’arrivée. Rien à faire, on part vers le large pour espérer trouver des airs, mais toujours rien.

Les D35 et les M2 nous passe enfin à coté ; prochaine destination pour eux : Genève.
Pour nous la nuit va être très longue. Les bruits de moteurs sur les bateaux à voile vrombissent : c’est l’heure de l’abandon pour les découragés.
On ne craquera pas ! Nous allons continuer ! Le point dans la poche, la bière à la main on continue notre route. Vers 22h30, un peu d’air nous amène vers la bouée d’entrée de Rolle. La nuit est déjà tombée depuis un moment, le silence est presque total sur le lac. On entend des moteurs de bateau, des discussions sur les différents bateaux, mais surtout le Caribana Festivale au loin.
23h30, Tribord ! On a priorité ! Un bateau vient de nous voler la priorité, nous coupant dans notre élan. Un spot se braque sur nous. C’est enfin la bouée de sortie de Rolle. Pour nous c’est la délivrance et surtout l’espoir de rentrer à Genève avant le coup de canon de clôture à 8h00 dimanche matin.
Les klaxons des voitures fêtant la victoire du Portugal sur la Turquie nous accompagne pour la sortie de Rolle. C’est le temps pour nous de commencer nos Quarts, chacun ira dormir entre 30 à 45 minutes avant de revenir sur le pont du bateau.

00h15, alors que les premiers bateaux sont arrivés à Genève, nous nous trouvons toujours dans la baie de Rolle. Rien à faire, on n’arrive pas à sortir de cette désormais haïssable baie. On prend l’option milieu du lac pour la rentrée. C’est payant, vers 01h30 le vent se lève un petit peu pour nous permettre de descendre doucement sur Genève sous spi. Les bateaux autours de nous on prit soit côte droite soit milieu. On ne voit plus grand-chose dans les ténèbres de la nuit lémanique.
Au petit matin, vers 4h30, on commence à voir les différents bateaux sortir de l’obscurité. On se dit que la nuit a été longue et fraîche, mais on est content de deviner le quai d’Hermance. Genève n’est enfin plus très loin.
6h34, on coupe enfin la ligne d’arrivée ! Ouf ! On est dans les temps, place au p’tit déj’ les amis. Au menu : pain avec charcuterie et un verre de vin blanc pour ceux qui ont encore froid. Rentré au port, le bateau est amarré et lavé. Le sourire est sur nos lèvres et la satisfaction bien présente. Vivement la prochaine édition !

Écrit par Guillaume Privat