UEFA : fossoyeurs patentés

Après la gestion épique du «cas» du match Turquie – Suisse, l’UEFA a décidé de passer maîtresse dans l’art d’étouffer les affaires. Ainsi, plus de quatre mois et demi après la rencontre entre le Zenit St-Pétersbourg et Marseille, l’instance européenne a rendu son verdict – si on peut l’appeler ainsi – dans les différents problèmes ayant émaillé ce match.

Au cours de ce 8ème de finale de C3, les remplaçants marseillais de couleur (Zubar, Ayew et Kaboré) avaient été victimes de cris de singe et une banane avait été lancée à leur «attention». Loin d’émouvoir l’arbitre, la rencontre avait continué comme si de rien n’était. Après avoir repoussé quatre fois son verdict, l’UEFA, gênée aux entournures par la victoire finale du club russe dans la compétition puis par l’Euro, a finalement sanctionné St-Pétersbourg d’une amende d’un montant de… 36’880 euros pour «le comportement raciste des supporters, l’usage d’engins pyrotechniques et le déploiement d’une banderole à caractère politique».Ce verdict, qui tombe opportunément en plein été, loin des feux de l’actualité, laisse songeur. Le champion de Russie a eu, à l’époque, le culot de s’offusquer de ces accusations. «Le Zenit réunit des joueurs de différentes nationalités et religions et notre club compte des millions de supporters dans différents pays. Avec ses joueurs il a, à plusieurs reprises, pris part à des programmes de lutte contre le racisme et exprimé son opposition à toute manifestation de racisme».

«Eux, ils s’en soucient»

Tiens ! Ces belles déclarations tranchent vivement avec ce que déclarait en mai dernier le coach de l’équipe russe. Dirk Advocaat a alors assuré sans sourciller au Daily Mail qu’il «serait heureux de signer un joueur mais les supporters n’aiment pas les noirs. Tout à fait honnêtement, je ne comprends pas pourquoi ils peuvent faire tant attention à la couleur de la peau. Pour moi il n’y a aucune différence entre noir, jaune ou rouge. Mais eux ils s’en soucient». C’est beau cette façon de se dédouaner.
Lorsque l’entraîneur himself avoue à haute et intelligible voix qu’il lui est impossible de prendre sous contrat un joueur de couleur, comment l’UEFA peut-elle rester insensible à un tel discours ? Oui, l’UEFA, vous savez, cette instance qui, à l’instar de la FIFA, prône la politique du «tout le monde il est beau tout le monde il est gentil, le ballon il est rond»…

Des sanctions ? Quelles sanctions ?

Ces Fédérations se dédouanent à longueur d’année avec des dizaines voire des centaines d’opérations contre le racisme. Des matches amicaux sur ce thème, des jolis t-shirt à l’entrée sur le terrain, des banderoles pleines de bon sens, des belles déclarations des capitaines avant les rencontres et j’en passe… On ne compte plus les réactions offusquées de Blatter ou Platini lorsque des cris de singe descendent des tribunes espagnoles ou italiennes. Et là, alors que l’occasion se présente de faire un exemple ou de tout simplement mettre en pratique les grandes envolées lyriques des dirigeants du football mondial, une amende ridicule est infligée au Zenit.

Les exemples sont pourtant quasiment hebdomadaires dans le football actuel. Rappelez-vous les épisodes Ashley Cole (en match international !), Eto’o, Zoro ou dans une moindre Aragones… Vous souvenez-vous des sanctions prises à l’époque ? On parle du fléau du racisme dans les stades depuis des lustres, on se souvient aisément de nombreux faits, mais qu’en est-il des sanctions ? Est-ce qu’un des lecteurs de CartonRouge.ch se souvient d’un des verdicts de ces différentes affaires ?
Si une fois, une seule, l’UEFA ou la FIFA frappaient là où ça fait mal, en retirant des points plutôt qu’en chatouillant le portemonnaie, nul doute que les clubs commenceraient enfin à faire le ménage. Mais tant que les décideurs, en bons politiques, se contentent de cacher tout cela sous le tapis, rien ne peut changer.