Rien ne sierre de courir, il faut s’exfiltrer du Graben

Service minimum. C’est comme cela que l’on pourrait résumer la
prestation lausannoise face au HC Sierre-Anniviers. Non que la partie n’eut pas réservé d’agréables surprises, mais le niveau était un ton en dessous des récitals des dernières prestations du LHC. La faute en partie au contexte, au Ryan local, à leur Section Est et à un adversaire présenté comme en plein doute.

En montant en-haut dessus en altitude au sommet de la pente à gravir par ascension qui domine le Graben – cet antre à Grabataires où les tourniquets d’entrée ont fait les frais de la crise des «subprimes» –, nul ne savait ce que cette patinoire (haha) pousSierreuse allait nous réserver. Après avoir vécu l’euphorie puis la désillusion en un seul match mémorable à Malley (5-0, 1-4, 0-3) puis une revanche sous forme de claque (12-4), toujours à Malley, les Lausannois ont un bilan équilibré cette saison ici d’dans au Graben, en restant toutefois sur un succès 2-6. L’élément clé sera, sans surprise, le rendement et la forme de Jinman, dernièrement bien en-deçà en dessous en-ça de son niveau. Un quatrième succès de rang dans ce tour de classement était prévisible pour le LHC, totalement transfiguré depuis le véritable «coup de pecker», de l’éviction manu militari de Gélinas et la reprise en main par Yake.

Passons d’entrée au désert…

Du moins, c’est comme ça que les choses auraient dû se présenter dans ce derby entre une équipe qui commence à prendre l’habitude de se prendre des baffes et une autre qui vient de se rappeler qu’elle avait l’autorisation d’en donner, surtout lorsqu’il y a la manière. Mais en arrivant dans les ruines du Graben (qui, en patois local, doit certainement vouloir dire «gravas»), une crise façon LHC ou, plus récemment, Ryan à Langenthal, agitait tout le monde. Le kop décidant même de boycotter son estrade où seule demeurait une banderole explicative: «Un virage déserté pour une équipe sans fierté». Celui qui a compté 2157 spectateurs ce soir a dû faire honneur à ses tonneaux de Fendant. Cela dit, relevons que le «Aux armes» lausannois raisonnait du coup plutôt bien. Les Sierrois paraissaient donc en bien mauvaise posture après des derniers résultats décevants couplés aux rumeurs de vives tensions, au centre desquelles le choyé et toujours très apprécié Aegerter.
Tremblay ne se laissait pas déconcentrer par cet étrange contexte et fusilla le Rüfenacht qui ne jouera pas en LNA la saison prochaine: 0-1 après 3 minutes de jeu. Puis c’est la 747 qui permit de faire décoller le score grâce à un tir puissant à mi-distance de Staudenmann sur passe de Baumann. Plusieurs occasions de part et d’autre lors des 30 premières minutes, mais le réalisme était du côté lausannois, à l’image du 3e but des visiteurs réalisé par Tremblay. Un 4e but annulé (dans la cage sierroise vide, le gardien s’étant aventuré je ne sais où) et alors que le LHC était à 4 contre 5 ! Dommage que l’arbitre se soit cru obligé d’y voir un hors-jeu car LE but gag de ce début d’année était à portée de ridicule. 0-3 à la mi-match donc, où power-plays poussifs ont succédé à des phases de domination de chaque équipe, mais sans que l’avalanche annoncée de buts vaudois ne se produise.

Vous en reprendrez bien un p’tit deuxième ?

2 comme le nombre de surnombres réussis par un Aegerter en grande forme, qui perdit néanmoins sa légendaire sierrénité (il aurait tenté de faire entrer Jinman alors que son Top Scorer était déjà sur la glace – pénalités qui provoquèrent un assourdissant tollé du kop vide). Et 2 comme le nombre de buts que Lausanne est capable de se ramasser en 7 secondes… Le record viégeois n’est pas tombé (Visp n’avait mis que 6 secondes pour en enfiler 2), mais c’était bien essayé quand même. Gageons que Lausanne essaiera de le faire tomber contre la monoligne ajoulote ou, si le détestable Desmarais est trop fatigué d’être aligné 120 minutes en 24 heures, contre le HCC mardi pour cet ultime match de liquidation.
Mais Charpentier avait réussi une minute plus tôt à déborder le dernier rempart valaisan (sur des assists de Sigrist et… Walter !), ce qui amenait donc la marque à 2-4 à la fin du tiers médian. L’ultime tiers vit les Sierrois prendre d’assaut la cage dudit Walter qui ne céda pas, quelquefois avec pas mal de réussite, comme ce poteau de la 47e. Le HC Jinman-Anniviers jouait finalement à 6 contre 5 près d’une minute et demie, assénant un feu nourri et passant très près d’une remontée au score. Mais une interception du LHC permit à Tremblay de réaliser son coup du chapeau dans la cage vide à 5 secondes du terme de ce match.

Un service en 7 plats

Il nous a été donné d’observer l’exceptionnelle profondeur de banc du HC Sierre avec 4 lignes extrêmement homogènes: le bloc des 2 mercenaires et un ancien Lausannois pour la 1re ligne, Jinman, Cormier et Lötscher pour la seconde, une redoutable 3e ligne avec les numéros 72 (Top Scorer), 19 et 61 et, enfin, la 4e (digne d’une première ligne d’étrangers !) associant audacieusement pour la première fois cette saison les petits jeunes prometteurs répondants aux prénoms de Lee, Derek et Kevin. La rotation savamment orchestrée de ces 4 blocs remarquablement équilibrés fut confrontée, étrangement, à la fatigue survenue au même moment pour les 4 lignes ! Quelle malchanceuse coïncidence. Mais cela a permis de voir un peu plus les 5e, 6e et 7e blocs sierrois où les incisifs Wüst et Keller se sont montrés très bons.
Le problème de la tactique à 7 blocs est que le rendement est très dépendant de celui de Jinman. Le Top Scorer valaisan se place toujours habilement, possède une technique impressionnante et une énergie incroyable. Mais la réussite fut moins au rendez-vous que d’habitude. Cormier était peu inspiré et plutôt maladroit, mais il a toujours représenté un danger devant les buts. Quant à Lötscher, (é)nerveux, il loupa complètement son match (à vouloir trop bien faire, il manquait quasiment tout ce qu’il entreprenait, à l’exception des quelques petites poussettes très amicales sur ses anciens coéquipiers). Malgré un potentiel LNA assez évident, son expérience biennoise risque de s’avérer très courte s’il devait rester aussi dépendant qu’actuellement de la performance de ses compagnons de ligne.
Du côté du LHC, le principal changement imprimé par Yake est l’implication de tous les éléments dans le jeu vaudois. Les défenseurs participent très activement aux offensives (à l’image d’un excellent Villa, de Leeger ou de Chavaillaz qui prennent de belles initiatives) et les attaquants ne rechignent pas à défendre efficacement au besoin (je relèverai à titre d’exemple les quelques beaux gestes défensifs de Gailland). Cependant, en plus de l’éternel problème du power-play lausannois qu’il va absolument falloir résoudre avant les play-offs, notons un autre travers du LHC: la croyance selon laquelle le slot n’a aucune importance, comme la surface de séparation en foot quoi… Que ce soit en défense (où des Cormier notamment restaient des plombes impunément devant Walter) ou en attaque (où seul le vaillant et intrépide Rüfenacht, toujours bien inspiré, allait se prendre des coups dans l’espoir de faire une belle déviation ou de transformer un rebond – malheureusement, sans avoir l’imposant physique d’un Baumann ou d’un Staudenmann, donc vite écarté par l’arrière-garde sierroise).
Avec cette victoire et le très surprenant faux-pas chaux-de-fonnier à Langenthal, Lausanne ravit la tête du classement au HCC, avec 2 points d’avance mais 1 match en plus. Le suspense devrait donc durer jusqu’à mardi, à moins que ce tour de classement ne se transforme en tour du désespoir pour les ex-leaders.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Sierre – Lausanne 2-5 (0-2 2-2 0-1)

Graben : 2157 spectateurs.
Arbitre : M. Popovic.
Buts : 3e Tremblay (Lardi) 0-1. 14e Staudenmann (Baumann) 0-2. 30e Tremblay (T.Rüfenacht, Lardi) 0-3. 39e Charpentier (Sigrist, Walter/5c4) 0-4. 40e R.Keller (Jinman, M.Kamber/5c4) 1-4. 40e Métrailler (Maurer) 2-4. 60e Tremblay (Miéville, Rüfenacht/cage vide) 2-5.
Pénalités : 8 x 2’ contre Sierre; 5 x 2’ contre Lausanne.
Sierre : D.Rüfenacht; Keller, Marugg; Jenni, Dällenbach; M.Kamber, Bernasconi; Jinman, Cormier, Lötscher; Métrailler, Siritsa, Maurer; Lüthi, Tognini, Reber; Wüst, Hürlimann, Kohli.
Lausanne : Walter; Trunz, Lardi; Leeger, Schäublin; Villa, Chavaillaz; Tremblay, Miéville, T.Rüfenacht; Lüssy, Staudenmann, Baumann; Sigrist, Gailland, Charpentier; Frunz, Bonnet.
Notes : Lausanne sans Zeller (blessé), Grieder (malade) ni Yake (officiant en tant qu’entraîneur).

Écrit par Yves de St-Aÿ