Les yeux plus gros que le ballon

On le sait, le football est gouverné par les dollars et les euros de tout horizon. C’est pourquoi, les différences se font de plus en plus béantes entre les clubs, que ce soit sur le plan sportif ou financier. Ces cinq dernières années, c’est deux clubs anglais qui ont fait parler d’eux grâce à leurs millions : Manchester City et Chelsea.

Manchester City, les millions ne suffisent pas

Coup de tonnerre sur la planète football cet été : un milliardaire inconnu, roi de l’or noir dans son pays, achète le club de Manchester City afin d’en faire le plus grand club du monde, promet-il. Une histoire digne d’un conte des mille et une nuits !
Lors du mercato d’avant saison, on ne verra cependant pas les ambitions attendues puisque la seule «star» engagée se nomme Robinho. Le Brésilien, en disgrâce avec le Real Madrid, est transféré pour un montant aussi astronomique que disproportionné de 42 millions d’euros ! Une telle somme permet aux Citizens de faire parler d’eux dans les médias du monde entier et, corolaire, d’éventuellement intéresser d’autres gros «poissons».
Après ce transfert très controversé, notre riche ami veut mettre la main sur des «dinosaures» : Buffon, Henry, Ronaldo, Torres, Messi et j’en passe… Mais tous, sans exception, refusent la généreuse invitation. Il s’agit ici d’une véritable utopie marcrogeriste (voir le Servette avant sa chute) et les folles ambitions de Souleiman Al-Fahim sont revues à la baisse.
Mais le milliardaire émirati ne laisse pas tomber pour autant. Avant le mercato hivernal, il met 243 millions d’euros à la disposition du manager du club Mark Hughes pour réaliser ses transferts les plus fous. Bellamy, Bridge, Given et De Jong coûteront la modique somme de 61 millions, de quoi acheter environ 40 David James que City avait vendu en 2006 à Portsmouth ! Une somme gargantuesque qui prouve que ManCity a décidé d’assommer le foot avec ces pétro-euros. Si je calcule bien sur les 243 millions à disposition, il en reste à peu près 180, de quoi atteindre le sommet de la folie – pour ne pas dire bêtise –   mancunienne : une proposition de 150 millions d’euros pour Kaka, qui heureusement refusera. On l’a compris, pour attirer les grands de la planète football, il faut des millions et surtout le palmarès. Et à ce niveau là, ManCity est carrément rachitique.
Manchester City possède aujourd’hui 30 joueurs dans sa première équipe (les membres du Big Four en possèdent environ 23), de quoi créer une nouvelle équipe de rugby tout prochainement ! On peut féliciter ce club pour l’hilarité qu’il propage dans le monde entier, tout en espérant que la plaisanterie ne durera que le temps de renflouer les caisses des autres clubs, tout heureux de vendre leurs joueurs à des prix qui dépassent l’entendement.

Chelsea, la Champions League à tout prix 

En 2003, alors que le club est en perte de vitesse, Roman Abramovitch rachète le Chelsea Football Club, et avec ses millions provenant du pétrole soviétique, lui promet un avenir brillant.
En 2005 (déjà !), le club remporte le championnat anglais et occupe une place importante sur la scène européenne. Sur le plan des transferts, l’oligarque russe fait fort en engageant Drogba, Shevchenko et Malouda qui totaliseront 114.5 millions d’euros de transferts. Le coup de poker Ballack, qui était libre de toute indemnité de transfert (!), démontrera la puissance du nouveau club. Récemment, Deco fut engagé pour 10 millions.
Au contraire de Drogba et Malouda, qui montreront leur talent sous le maillot des Blues, Ballack et Shevchenko n’arriveront pas à se rallier à leur chef et entraîneur, le «special one» José Mourinho. Ce décalage ne va cependant pas perturber ce club puisqu’il dispose d’un effectif important et de qualité. Pourtant, en 2007, on assiste à la première erreur d’Abramovitch : le licenciement de Mourinho, en raison du mauvais début de saison du club. Ce qui est exceptionnellement débile dans cette histoire, c’est que l’ancien entraîneur recevra un peu plus de 30 millions d’euros d’indemnité ! À un prix pareil en Suisse, il y en a beaucoup qui auraient sauté tête la première dans le tourbillon des entraîneurs à Sion !
Tout récemment, on peut encore admirer l’argent dépensé pour les entraîneurs de Chelsea : Scolari a reçu 7.5 millions pour 7 mois de travail, et Guus Hyddink coûtera 3 millions pour les 5 mois à venir ! Pourquoi cette envie constante de résultats sans attendre que le club se stabilise ? Tout simplement parce que cet homme, si riche et impatient soit-il, veut par-dessus tout gagner la plus grande compétition européenne, la Ligue des Champions. Il se fixe un objectif si élevé qu’il ne pense même pas à se laisser du temps pour atteindre son but et entame alors une valse mémorable d’entraîneurs et de joueurs qui lui fait perdre des dizaines de millions d’euros. Au sujet des joueurs, on ne peut que regretter que Sheva, l’ex-chouchou de San Siro, se soit vu arrêté net dans sa fulgurante progression et soit revenu finalement aux bases chez son club chéri.
Bien que les idées de base de la première fortune de Russie aient été intelligentes et bien conçues, une déception fait place quand on remarque la volonté farouche de glaner des titres à tout va et le plus vite possible. Cette volonté s’est transformée en pression sur les joueurs et les entraîneurs et c’est cela qui a contribué à cette baisse notable de résultats.
Chelsea et Manchester City contribuent aujourd’hui à démontrer que les riches doivent laisser le football aux connaisseurs. Avec leurs millions, ils ne font qu’augmenter la valeur de tous les joueurs, ce qui à long terme contribuera à réévaluer le prix du foot et de son environnement. Les sommes d’argent engagées et les ambitions surréalistes de ces mégalos qui ont «les yeux plus gros que le ballon» amènent le foot à devenir un jeu pour milliardaires et non plus simplement un sport. Gageons qu’ils finiront par se lasser de leur joujou et qu’ils iront blanchir leur argent dans d’autres activités… Le foot en sortirait grand gagnant !

Écrit par Jul Compa

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7 Commentaires

  1. Bien vu. Pour info, ManCity a déboursé 20 millions d’euros en janvier pour débaucher Nigel de Jong, qui jouait à Hambourg. Or à la fin de la saison, de Jong était à vendre pour… 2 millions d’euros. A Manchester, ils ont peut-être les milliards de leur sheik, mais ils ont aussi perdu leur âme.

  2. Chelsea et Manchester City contribuent aujourd’hui à démontrer que les riches doivent laisser le football aux connaisseurs. mais c’est completement juste! tu as tout a fait raison. quand tu vois des Aston villa Everton Wigan ou meme Hull city les performances qu’ils sont capables de faire avec un contingent nettement moin « bling bling-mega-ultra-stars » que ces gros clubs c’est juste la classe! du beau foot!

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