Qui pourrait donc succéder à Ralph Krueger ?

On le sait, le fossé entre la NHL et la Ligue Nationale A est si important que l’on pourrait y glisser tout un tas de choses. A commencer par une tonne de préjugés. Finalement, si Zurich est devenu champion suisse, puis s’est hissé en phase finale de la Ligue des Champions pour finalement remporté le titre, ce n’est peut-être pas que par hasard…

Car après avoir visionné un Zurich – Rapperswil «portes ouvertes» de ces dernières semaines, on était tenté de penser que le départ de Séverin Blindenbacher, que la collection de quadragénaires qui commence à se faire imposante, que la récente annonce du transfuge de Ryan Gardner pour la saison prochaine ainsi que l’incompréhensible indisponibilité de la Diners Club Arena allait anéantir la symbiose qui avait permis aux Lions de triompher dans une compétition que l’on a supprimé depuis.

De l’exploit à la norme

Et après une ouverture du score rapide par Barker, on pouvait se dire que Zurich avait eu ses sept minutes de gloire et qu’ils allaient désormais prendre l’eau, ou du moins céder. Les jeunes pousses qui étaient encore alignées à doses homéopathiques contre Magnitogorsk n’allaient pas pouvoir assumer les responsabilités d’un système de jeu éprouvé, certes, mais dont les limites devaient apparaître face à du jeu nord-américain.
Mais c’est bien contre les bandes et dans les phases défensives que le match à tourné. Là où pourtant les équipes de NHL sont censées être dominantes en tout point. Or à voir Schelling arriver à fond de train contre les Chicagoens, on pouvait se mettre à espérer que le second but mettrait du temps. Mais il n’en fut rien. A la onzième minute, Monnet lance Bärtschi qui exécute à merveille sa feinte préférée. «Tiens, pourvu que ça dure» peut-on se dire à ce moment-là et certains signeraient bien pour un bon 1-3. Seulement cette attente va nous apparaître comme une mauvaise analyse des forces vives lorsqu’on verra les Zurichois prendre le contrôle des opérations en harcelant leurs adversaires. Avec un joueur pour attaquer l’homme, un autre pour la récupération du palet et un troisième qui réalise la passe d’ouverture, Chicago était systématiquement pris de vitesse.

La période médiane était aussi l’occasion pour Mathias Seger, le capitaine des Lions, de montrer qu’il n’avait rien à envier en saloperie du moins à un Avery, un Orr ou un Neil en se faisant l’auteur de quelques charges et coups franchement douteux. Fort heureusement, comme en témoigne le silence des médias d’outre-Atlantique, ces quelques touchettes ne devraient pas créer un grand émoi dans les foyers.
Et si Chicago, en plus d’être confronté à de brutaux joueurs, ne trouvait pas tactiquement la faille, on se disait que la vitesse d’exécution ou le génie d’un Toews et la générosité (sur la glace) d’un Kane allait finir par mettre un terme à cette – pour une fois louée – arrogance zurichoise. Hélas pour ces stars que l’on veut nous vendre à tout prix, de peur que l’on se prenne de sympathie pour le Dynamo de Riga, les interventions défensives furent d’une efficacité à toute épreuve et Sulander intraitable. Pour vraiment ternir la soirée des invités de marque, il ne manquait plus qu’à associer le nom de Grauwiler à la feuille de pointage… Une équipe suisse menait au score pour la première fois dans l’histoire face à une formation de NHL.
Le troisième tiers allait voir Zurich tenir le coup tout en se créant encore quelques occasions. Les Blackhawks ne trouvant pas la faille, ils allaient se pousser eux-mêmes à la faute. Le colosse Byfuglien et ses 115 kilos pouvaient certes rester dans le slot et planter son campement sans qu’il soit possible de l’en ressortir sans l’intervention d’un treuil. C’était sans compter sur quelques mots poétiques qui allaient donner à cette force de la nature à l’état de captif, à cause d’un bête coup de gourdin. Bärtschi était encore accroché et avait encore la possibilité de transformer un penalty que Huet rattrapait avec une certaine chance entre les deux jambières. Et après quelques pénalités neutralisées, le ZSC l’avait (encore) fait.

La Suisse peut gagner

Les Chicago Blackhawks ne sont pas les tenants en titre de la Coupe Stanley. Mais en plus d’être les finalistes de l’association Ouest, ils se profilent comme les perdants de la finale de cette saison depuis qu’ils ont fait l’acquisition de Marian Hossa. Reconnaissons que c’est une sacrée machine. Et s’il ne fallait faire qu’une comparaison, on pourrait constater que le salaire du défenseur offensif Campbell est à peu près l’équivalent du budget total du HC Bienne…
Grâce à ce genre de performances, la Suisse n’a plus besoin de se dire qu’elle peut réaliser des exploits. Elle peut désormais savoir qu’elle a la capacité de battre à la régulière n’importe quel adversaire si elle livre une performance de groupe inspirée. C’est ce qu’elle a réussi à faire hier avec toute une équipe uniquement concentrée sur son jeu et un Ryan Gardner avouant n’avoir pas eu le temps de penser au score avant les cinq dernières minutes de jeu. Monsieur Simpson, les portes de la Nati vous tendent les bras. Vous n’avez pas rendu le ZSC invincible, ça non. Mais il est difficile de douter désormais de votre capacité à préparer une équipe pour de grands événements, tant au plan tactique que mental.

Puisqu’il faut de toute manière des perdants

Entre un événement qui pourrait sacrer un club suisse au statut de meilleure formation du monde et une confrontation entre deux équipes sans rapport évident avec les téléspectateurs, vous choisiriez quoi ? C’est bien ce que je me disais, chapeau la TSR pour changer…
René Fasel avait un jour d’avance en avouant à demi mot que les équipes suisses ne faisaient pas le poids pour sa Victoria Cup. On peut comprendre la colère des clubs qui avaient investi et cru en la crédibilité de leur Fédération Internationale pour se retrouver sans compétition. Un projet monté avec un seul gros sponsor, de surcroît engagé dans le contrôle d’une ligue concurrente, c’est en tout cas une belle preuve de lucidité en affaires…
Puisqu’il faut tout de même en parler, des rumeurs disent qu’une bande d’édentés, anglophones pour la plupart, s’en seraient pris violemment à des touristes grisons lundi soir, près d’Oerlikon. Il paraîtrait, toujours selon cette même rumeur que ces envahisseurs auraient traité le guide du groupe de «vieille bonne femme». Celui-ci, piqué à vif aurait essayé de sortir son parapluie et de pratiquer par quelques gesticulations son «jeu de puissance». Mais les agresseurs auraient tôt fait de retourner l’arme contre lui et auraient mis une sévère correction au reste des membres de l’autocar. Les victimes seraient, selon de rares témoins, des participants à une sorte de camp pour instables psychiques et drogués pas vraiment repentis. Parfois, c’est à se demander si la bêtise humaine connaît des limites…
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Zurich Lions – Chicago Blackhawks 2-1 (1-1, 1-0, 0-0)

Hallenstadion, 9744 spectateurs.
Arbitres : MM. Bulanov (Rus), Marovelli (Can); Kalivoda (Tch) et Novak (EU).
Buts : 7e Barker (Sharp) 0-1, 13e Bärtschi (Monnet, Signoretti) 1-1, 35e Grauwiler 2-1.
Zurich Lions : Sulander; Schelling, Suchy; Seger, Schnyder; Stoffel, Geering; Signoretti; Bastl, Pittis, Sejna; Gardner, Alston, Trudel; Bärtschi, Down, Monnet; Grauwiler, Kamber, Bühler. Entraîneur: Simpson.
Chicago Blackhawks : Huet; Seabrook, Keith; Campbell, Hjalmarsson; Sopel, Barker; Kane, Toews, Brouwer; Ladd, Sharp, Bolland; Byfuglien, Kopecky, Eager; Smolenak, Fraser, Skille; Versteeg. Entraîneur: Quenneville.
Notes : les Zurich Lions sans Wichser (blessé), Reist, ni Müller (surnuméraires). Tir sur le poteau: Seger (33e). Bärtschi manque la transformation d’un penalty (57e). Les Chicago Blackhawks sans gardien de 59’23 à 60’00.
Pénalités : 7 x 2′ contre les Zurich Lions, 5 x 2′ contre les Chicago Blackhawks.

Écrit par Jean-Boris Cochet-Lamouche

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8 Commentaires

  1. là je dis « chapeau bas » c’est un peu comme si tout ce que je pensais sur ce sujet s’était retrouver d’un trait de plume sur cet excellent papier!

  2. « un événement qui pourrait sacrer un club suisse au statut de meilleure formation du monde »
    Stop, stop! Bravo à Zürich pour leur superbe performance, mais il faut redescendre sur terre!
    A vous lire, on dirait que Zürich a affronté les mêmes Blackhawks que ceux qui poussaient les Red Wings à leurs limites en mai dernier, avec plus de 80 matchs de NHL dans leurs jambes (et donc le rythme qui va avec…)!
    Vous me direz que « c’est typiquement suisse de rabaisser les exploits de ses compatriotes », mais il ne faut pas se prendre à rêver que la LNA rivalise presque avec la NHL. A la limite, je vous accorde que 2-3 équipes de LNA qui ont le rythme du championnat peuvent parfois faire jeu égal avec une équipe de NHL pas dans le rythme et qui se cherche. Mais en aucun cas le championnat suisse n’est proche de la NHL.
    Regardez plus souvent ESPN America si vous voulez définitivement vous en convaincre!

  3. @ Soci,

    Effectivement, il est inutile, même après cet exploit, de vouloir comparer les 2 ligues. Ce sont 2 mondes totalement différents.

    Mais sur un évènement ponctuel, comme hier soir, le coup reste jouable.

  4. @ Soci

    Au niveau de la valeur intrinsèque, les choses ne se comparent pas vraiment. Mais au niveau de la visibilité qu’un média donne à un événement, la question doit être posée ainsi, notamment pour éviter de passer à côté de l’histoire. Ce qui fut le cas.

    Remarque aussi que les Penguins n’auraient eu que peu de chance face aux Sharks de la saison régulière. Parfois c’est simplement une question de moment et cela ne doit rien enlever à l’exploit.

    Autrement, je suis d’accord que dans une grande majorité de cas de figure réalistes, Zurich aurait pu perdre et Zürich n’est pas champion du Monde des clubs. C’est simplement qu’il n’y a pas d’autre distinction (trophée) qui se rapproche plus de ce statut 

    Bonne suite de Championnat.

  5. et sans vouloir embêter, Chicago tresse des louanges aux Lions, que ca soit les journaux, tv et radio et même le coach des blackhawks a relevé que l’équipe méritait sa victoire. De deux, les joueurs de Chicago étaient passablement abattus, à l’heure de l’interview! Donc, le match de hier, n’était pas de la rigolade!

    ps: Dans les forums américains, ça rigole sévère sur les hawks, raison de plus pour pas perdre!

  6. Bien joué Zurich, ça fait plaisir!
    Mais ça s’arrête là…

    Sur une série, Zurich n’aurait crée l’exploit que sur ce match, car les Hawks ont été pris par surprise, en étant trop arrogants, après la victoire 9-2 facile contre Davos, Zurich a profité intelligement de cet avantage psycholgique…

    Ceci dit, avec des matchs dans les jambes, même sans M. Hossa et dans une taille de patinoire inhabituelle, la NLA ne fait absolument pas le poids contre le NHL, c’est le jour et la nuit à tous les niveaux, technique, physique ou vitesse.

    Mais dans un seul match ponctuel, dans ce sport, tout peut arriver, rien de plus qu’un exploit comme la victoire Suisse contre le Canada aux JO de Turin en 2006, c’est du RARISSIME tant ces équipes sont trop fortes pour nous! Comme indiqué plus haut, voir ESPN America pour voir à quel point le niveau est 10x crans au dessus… :o)

    Ps: Inutile de gagner en saison régulière, pour ne pas avoir le mental en PO ensuite -> Sharks/Berne! :o)

  7. Davos a certes pris une brave rouste mais je doute qu’ils se soient employés à fond… En comparant les 2 matchs, ca donne l’impression que le Zurich de mardi aurait aussi mis une seille au Davos de lundi soir.. Mais bref..
    Magnifique exploit quand même du ZSC!

    Et une fois de plus, carton rouge à la TSR. « La Suisse est définitivement un grand pays de hockey » concluait avec fierté le commentateur sur SF2. Pas partout visiblement…

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