La bataille du Flon

Cela a déjà été écrit un peu partout, mais quand on s’adresse à un public de football, on ne répète jamais trop les choses : le canton de Vaud a la grande particularité – pour ne pas dire débilité – d’avoir quatre clubs en LNB (sigle à mon avis plus approprié pour désigner la 2ème division helvétique, DCL me faisant un peu trop penser à «Dans l’Cul Lulu…»). Ce week-end, la particularité va pousser le bouchon encore plus loin puisqu’on va retrouver Yves Martin dans le secteur visiteur de la Pontaise. Mais quel est le véritable enjeu de ce derby lausannois ?

Petit rappel des forces en présence : Le Mont est sur un trend ascendant et vient de quitter la dernière place en battant un FC Thoune sans doute encore sur son nuage suite à son exploit en Coupe. Au lieu de s’occuper de mineurs, les joueurs bernois auraient mieux fait d’aller un peu plus au charbon pour battre l’équipe qui apparaît clairement comme la plus faible de LNB. Mais entre la réalité du papier et celle du terrain, il y a parfois un monde. Ce ne sont pas les joueurs du LHC qui me contrediront. Avec l’arrivée de Gabet Chapuisat, cette équipe peut surprendre lors de quelques coups d’éclat, même si sur la durée du championnat, je doute qu’elle tienne la distance.

Quant aux hommes de John Dragani, ils sont également sur la bonne voie après un début de championnat poussif. Eternels candidats à la promotion (un peu comme le LHC, encore eux), les «vrais» pensionnaires de la Pontaise viennent de gifler Winterthour, pour se retrouver à un petit point de la place de barragiste. La recette de ce LS qui gagne est simple : un public patient, un entraîneur charismatique, un directeur technique connaissant le football suisse sur le bout des doigts et une campagne de transferts réussie. Lausanne a notamment engagé «il grande» Tosi, le puissant Madou, le roc Ndzomo et son assurance tout-risque, Guillaume Katz, lui qui s’avère être un tacleur encore plus redoutable que Stéphane Henchoz au sommet de sa gloire. Comme quoi parfois le foot peut être très rationnel, n’en déplaise à Florentino Perez…
Mais trêve d’aspects sportifs, puisque l’enjeu de ce match est tout autre : géographique, et sur deux plans :
Premièrement, le Lausanne-Sport, empereur jusque-là indiscuté de la Pontaise, malgré des investisseurs douteux, une faillite et une désertion du public, a cette fois vu son hégémonie remise en question depuis qu’il est contraint de partager les lieux avec le voisin un peu gênant. Le maître des lieux est-il toujours le même, ou Le Mont est-il devenu calife à la place du calife ?

Deuxièmement, et là c’est du sérieux puisque cela conditionnera le reste de la saison, et peut-être même les suivantes, si Le Mont se maintient (et que Lausanne n’est pas promu…) : la Place du Flon. A l’issue de ce match, les joueurs d’une des deux équipes n’oseront plus mettre les pieds au Punk. Jusqu’au week-end dernier, les théories d’après-match pouvaient se faire là-bas, mais dès lundi, la moitié de ce petit monde devra baisser les yeux devant l’autre. Et sans vouloir mettre la pression au grand frère, en cas de match nul face au dernier du classement (ouais, avant-dernier, c’est pareil…), c’est bien les joueurs du Mont qui pourraient se pavaner au Flon. Quoique… dimanche soir, le MAD ouvrira grand ses portes aux vaincus…
Mais gageons que même en état de grâce, Le Mont ne réalisera pas le même exploit qu’Alcorcon face à Madrid et que l’équité sportive du plus riche sera respectée. Ils ont déjà l’Auberge communale du Mont, nul besoin donc de conquérir le Flon… Quoi qu’il en soit, tous à la Pontaise dimanche à 15h pour assister à ce derby haut en couleurs !
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Écrit par Sébastien Junod